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<references />
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=== TRINITÉ ===
s. f. Le moyen âge a essayé de représenter matériellement
le mystère de la sainte Trinité. C'est à l'école d'Alexandrie qu'il faut
avoir recours si l'on veut connaître les diverses phases par lesquelles a
dû passer la pensée de la Trinité avant d'arriver à l'état de dogme. Nous
n'avons pas, bien entendu, à nous occuper de l'exposition du dogme,
mais à rendre compte de la forme sensible donnée à la conception de
la Trinité dans nos monuments du moyen âge. «Dès le IV<sup>e</sup> siècle, écrit
M. Didron<span id="note1"></span>[[#footnote1|<sup>1</sup>]], avec saint Paulin, évêque de Nole, qui est né en 353 et
est mort en 431, apparaissent les groupes de la Trinité. À l'abside de
la basilique de Saint-Félix, bâtie à Nole par Paulin lui-même, on voyait
la Trinité exécutée en mosaïque.»
 
Saint Paulin expliquait, dans les vers qu'il fit à cette occasion, que le
Christ était représenté sous la forme d'un agneau, l'Esprit-Saint sous
celle d'une colombe, et que «la voix du Père retentit dans le ciel».
Le même évêque, dans la basilique élevée à Fondi sous le vocable de
Saint-Félix, avait fait représenter le Fils sous la forme d'un agneau avec
la croix, le Saint-Esprit en colombe, et le Père sous l'apparence d'une
main (probablement) qui couronnait le Fils.
</div>
<center>
«....., et rutila genitor de nube coronat.»<br>
</center>
<div class="text">
Comme l'observe très-bien M. Didron<span id="note2"></span>[[#footnote2|<sup>2</sup>]]: «L'anthropomorphisme, qui
avait effarouché les premiers chrétiens et qui semblait rappeler le paganisme,
ne trouva pas la même résistance pendant le moyen âge proprement
dit. Une fois arrivé au IX<sup>e</sup> siècle, on n'eut plus rien à craindre
des idées païennes... Le Père éternel, dont on n'avait osé montrer
que la main encore, ou le buste tout au plus, se fit voir en pied. Cependant
il ne prit pas une figure spéciale; mais il emprunta celle de son
Fils, et, dès lors, il devint fort difficile de les distinguer l'un de
l'autre. Le Fils continua d'apparaître tel qu'on l'avait vu sur la terre...
La colombe quitta quelquefois aussi son enveloppe d'oiseau, pour
prendre la forme humaine. Comme le dogme déclarait nettement que
les trois personnes étaient non-seulement semblables, mais égales
entre elles, les artistes étendirent aux représentations la similitude et
quelquefois même l'égalité des hypostases divines.» En effet, bon
nombre de peintures de manuscrits des XI<sup>e</sup> et XII<sup>e</sup> siècles<span id="note3"></span>[[#footnote3|<sup>3</sup>]] représentent
les trois personnes divines sous la forme de trois hommes de même âge
et de même apparence. Au portail de l'église collégiale de Mantes, on
voit, dans la voussure de la porte occidentale, la Trinité figurée par une
</div>
[[Image:Trinite.eglise.Saint.Urbain.Troyes.png|center]]
<div class="text">
<br>
croix que portent deux anges (le Fils), par le Père sous forme d'un
homme jeune, et l'Esprit en colombe. Mais les artistes prétendirent identifier
les trois personnes divines, afin de faire comprendre aux fidèles à
la fois leur individualité et leur réunion en une seule puissance. Il existe,
sous le porche occidental, non terminé, de Saint-Urbain de Troyes, un
bas-relief de bois datant des dernières années du XIII<sup>e</sup> siècle, qui représente
la Trinité (fig. 1) Le Père est au milieu, coiffé de la tiare à triple
couronne, comme un pape; de la main droite, il bénit; de la gauche, il
tient la terre. À sa droite est le Fils couronné d'épines et portant la croix.
À sa gauche, l'Esprit, sous la figure d'un jeune homme imberbe, tenant
une colombe. Ces trois personnages n'ont ensemble que quatre jambes,
adroitement drapées de façon à faire croire qu'ils en ont deux chacun.
De petites figures d'un homme et d'une femme agenouillés (les donateurs)
sont sculptées aux deux extrémités du groupe. L'impossibilité de
séparer les trois personnes divines est ainsi matériellement indiquée
par la disposition des jambes. Quelquefois la Trinité est représentée
sous la forme d'un homme ayant une tête à trois visages, une de face et
deux de profil, et deux yeux seulement; ou bien encore, c'est une figure
géométrique ainsi disposée (fig. 2). <span id=Bordeaux>Ce triangle mystique était visible
encore sur la façade d'une maison de [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes B#Bordeaux|Bordeaux]], il y a peu d'années. Des
vitraux, des vignettes de manuscrits, le représentent assez fréquemment
pendant les XV<sup>e</sup> et XVI<sup>e</sup> siècles. À la même époque, dans beaucoup de
portails d'églises, la Trinité se montre ainsi: Le Père assis, coiffé de la
tiare, tient le Christ en croix devant lui. De la bouche du Père descend
</div>
[[Image:Trinite.maison.Bordeaux.png|center]]
<div class="text">
<br>
la colombe sur le crucifix. Ces diverses représentations ont un intérêt;
elles indiquent la marche de l'art comme expression sensible des idées
théologiques selon le temps. Pendant les premiers siècles, on redoute
évidemment l'expression trop matérielle d'un mystère qui doit rester
impénétrable. Le Fils est un agneau, l'Esprit une colombe, le Père
une voix ou une main sortant d'une nuée. Plus tard, l'artiste se rassure,
il donne aux trois personnes divines l'individualité. Elles sont
séparées, distinctes, mais semblables et assises sur un trône commun.
Puis on cherche à faire comprendre, par un artifice matériel, l'unité
des trois personnes. Au XV<sup>e</sup> siècle, c'est une sorte de problème géométrique
posé devant la foule et dont la solution est posée comme une
énigme; ou encore c'est un jeu d'artiste, comme cette tête à trois
visages. Au XVI<sup>e</sup> siècle, on adopte une forme antérieure, mais peu répandue,
celle de la distinction absolue
des trois personnes, en raison
du rôle que leur attribue l'idée
chrétienne. Le Père est le personnage
immuable; le Fils, le rédempteur;
et l'Esprit, l'émissaire
émané du Père; amour, selon saint
Augustin et saint Thomas d'Aquin.
«Jésus, ayant été baptisé, sortit de
l'eau sur-le-champ, et voilà que
les cieux lui furent ouverts et
qu'il vit l'Esprit de Dieu descendant
sous la forme d'une colombe
et venant sur lui. Alors une voix
du ciel dit: Celui-ci est mon fils
bien-aimé en qui je me suis complu<span id="note4"></span>[[#footnote4|<sup>4</sup>]].»
Il est donc assez important
de faire ces distinctions des
caractères donnés à la Trinité figurée
dans les monuments anciens.
 
Le moyen âge admet aussi une Trinité du mal. De même que les théologiens
avaient prétendu trouver le reflet de la Trinité sainte dans l'âme
humaine: volonté, amour, intelligence, confondues en une substance,
ils supposèrent le mal avec des facultés correspondantes. Des sculptures,
des peintures de vitraux et de manuscrits représentent en effet la Trinité
satanique (fig. 3)<span id="note5"></span>[[#footnote5|<sup>5</sup>]]. Cette miniature du XIII<sup>e</sup> siècle montre le pécheur
soumis aux lois de la Trinité du mal, armée d'un glaive et couronnée.
Satan est souvent représenté ainsi dans les bas-reliefs du jugement dernier.
Outre ses trois visages qui correspondent, dans le mal, aux trois
hypostases de Dieu, son corps est couvert parfois d'autres faces humaines,
comme pour marquer que la puissance du mal est plus étendue,
par ses facultés, que celle du bien.
</div>
[[Image:Trinite.XIIIe.siecle.png|center]]
<div class="text">
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<span id="footnote1">[[#note1|1]] : <i>Iconogr. chrétienne</i>, par M. Didron. Paris, 1843.
 
<span id="footnote2">[[#note2|2]] : <i>Ibid</i>., p. 539.
 
<span id="footnote3">[[#note3|3]] : Entre autres, le beau manuscrit d'Herrade de Landsberg, <i>Hortus deliciarum</i>, bibl. de Strasbourg.
 
<span id="footnote4">[[#note4|4]] : Matthieu, iii, 16, 17.
 
<span id="footnote5">[[#note5|5]] : Mss. ancien fonds Saint-Germain, n°37, <i>Psalm</i>., Bibl. impér.