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| width=33%<pages styleindex="background: #ffe4b5"Viollet-le-Duc |- <center>< [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, Tometome 9,.djvu" from=192 fromsection=s2 to=198 Tour|Tour]]</center>
<references />
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| width=33% style="background: #ffe4b5" | <center>[[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index Tome 9|Index par tome]]</center>
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=== TOURELLE (''Tournelle'') ===
s. f. Diminutif de tour, petite tour, ou plutôt
tour d'un petit diamètre. Les manoirs ne pouvaient être munis de tours,
mais de tourelles seulement<span id="note1"></span>[[#footnote1|<sup>1</sup>]]. On donnait aussi le nom de <i>tournelles</i> à
de véritables tours flanquant des courtines, mais dont l'étroite circonférence ne pouvait contenir qu'un très-petit nombre de défenseurs;
sortes de guérites ou d'échauguettes. Les portes, les châtelets, n'étaient
souvent munis que de tournelles. Aujourd'hui, on désigne habituellement
par le mot <i>tourelles</i> les ouvrages cylindriques, ou à pans, portés en
encorbellement. Ces tourelles s'élevaient, soit sur un cul-de-lampe, soit
sur un contre-fort; elles donnaient un flanquement peu étendu et des
vues sur les dehors d'une habitation, d'une porte ou d'une courtine.
On ne commence guère à les employer que pendant le XII<sup>e</sup> siècle; les
XIII<sup>e</sup>, XIV<sup>e</sup>, XV<sup>e</sup> et XVI<sup>e</sup> siècles même en font un grand usage, et certaines
habitations du XVII<sup>e</sup> siècle en possèdent encore<span id="note2"></span>[[#footnote2|<sup>2</sup>]].
 
La tourelle est fermée et ne communique avec les logis ou chemins
de ronde que par une porte. Elle forme ainsi intérieurement une petite
pièce circulaire, un cabinet, une guérite, et est couverte le plus souvent
par un cône de pierre ou de charpente, plomb et ardoise. Souvent les
tourelles contiennent un escalier à vis pour communiquer d'un premier
étage aux parties supérieures de l'édifice. La figure 1 donne le plan et
la vue d'une tourelle d'angle du XII<sup>e</sup> siècle, appartenant à la partie la
plus ancienne du château de Vées (Oise). Cette tourelle, cylindrique, est
posée sur deux contre-forts et trois culs-de-lampe, remplissant les trois
angles rentrants; elle n'était, par conséquent, évidée que dans la hauteur du second étage. Sa couverture est un cône de pierre creux. Des
cordons de pointes de diamant ornent sa naissance et sa corniche.
</div>
[[Image:Tournelle.chateau.Vees.png|center]]
<div class="text">
Les clôtures d'abbayes, de courtils, étaient souvent renforcées de
tourelles aux angles, ou de distance en distance, pour poster des guetteurs. Quelquefois même ces tourelles avaient deux étages, l'un au niveau du chemin de ronde, l'autre au-dessus, auquel on montait par une
échelle<span id="note3"></span>[[#footnote3|<sup>3</sup>]]. Ces sortes de tourelles étaient de véritables échauguettes, et les
appelait-on ainsi pendant le moyen âge<span id="note4"></span>[[#footnote4|<sup>4</sup>]]. <span id=Mont.Saint.Michel.en.Mer>Les deux fuseaux cylindriques
qui flanquent la porte de l'abbaye du [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes M#Mont.Saint.Michel.en.Mer|Mont-Saint-Michel en mer]] sont
bien des <i>tournelles</i>, dans l'ancienne acception du mot. Voici (fig. 2) une
perspective de ce bel ouvrage bâti en assises de granit rose et gris alternées dans la hauteur du premier étage, et qui date de 1260 environ<span id="note5"></span>[[#footnote5|<sup>5</sup>]]. Ces
deux tourelles servaient à la fois d'escaliers et de défenses dans leur
partie supérieure. La porte qu'elles flanquent est précédée d'un châtelet, et l'ensemble de la construction est intact<span id="note6"></span>[[#footnote6|<sup>6</sup>]]. Ce ne sont point des
combles coniques qui couronnent les deux cylindres, mais des plates-formes,
afin de laisser plus de liberté aux défenseurs.
</div>
[[Image:Tournelles.Mont.Saint.Michel.png|center]]
<div class="text">
<span id="Avignon9">La porte principale du palais des papes, à [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes A#Avignon|Avignon]], est également
flanquée de deux véritables tourelles, dont la disposition mérite
l'attention.
 
Cette façade se compose d'une suite d'arcs percés de mâchicoulis à
la hauteur de 15 mètres au-dessus du sol, et portant un chemin de ronde
crénelé, en arrière duquel le mur de face s'élève jusqu'aux combles et
porte un second crénelage<span id="note7"></span>[[#footnote7|<sup>7</sup>]]. Les deux tourelles de la porte reposent,
en tas de charge, sur deux piles des arcs formant mâchicoulis, et profitent de la saillie du chemin de ronde pour s'élever jusqu'au crénelage
supérieur (fig. 3); elles flanquent ainsi les deux chemins de ronde inférieurs A et B, et ajoutent aux défenses de la porte<span id="note8"></span>[[#footnote8|<sup>8</sup>]].
</div>
[[Image:Tournelles.palais.Papes.Avignon.png|center]]
<div class="text">
Les pyramides de couronnement de ces deux tourelles étaient de
pierre et décorées de crochets. On observera que les culs-de-lampe qui
les supportent sont sur plan circulaire, tandis que les tourelles sont
elles-mêmes tracées sur plan octogone, avec nerfs saillants aux angles
et au milieu des faces du prisme. Cette disposition n'est pas rare pendant le XV<sup>e</sup> siècle.
 
Beaucoup d'hôtels, et de simples maisons même, possédaient des
tourelles d'angle permettant de prendre des jours d'enfilade sur les
rues, ou des tourelles engagées contenant des escaliers (voyez [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 6, Maison|Maison]],
fig. 13, 14, 15, 33, 34, 35 et 39). Parfois aussi ces tourelles étaient disposées pour donner de petits cabinets dans le voisinage des pièces
d'habitation. Il existait une charmante tourelle de ce genre dans l'angle
de la cour de l'hôtel de la Trémoille, à Paris; elle formait un porche
à rez-de-chaussée, devant le couloir qui conduisait au jardin<span id="note9"></span>[[#footnote9|<sup>9</sup>]].
</div>
[[Image:Plan.tournelle.en.encorbellement.png|center]]
<div class="text">
Lorsque les tourelles sont posées en encorbellement, les constructeurs
du moyen âge ont apporté un grand soin dans la disposition de
l'appareil et dans la répartition des charges, pour éviter la bascule. Ces
encorbellements naissent beaucoup au-dessous du sol inférieur de la
tourelle, et le cylindre est complet, afin de pouvoir être maintenu dans
son centre de gravité. Il est assez rare
qu'une tourelle d'angle soit tracée ainsi
que l'indique le plan (fig. 4, A), c'est-à-dire
ayant les trois quarts de sa surface
en dehors de la construction inférieure.
Le plus habituellement, ou un
contre-fort soulage une partie du porte-à-faux
(voyez en B), ou plus d'un quart
de la tourelle est engagé dans l'angle
(voy. en C). Mais le XV<sup>e</sup> siècle se permettait
des hardiesses de construction et
aimait à les montrer. On éleva donc
parfois, à cette époque, des tourelles
d'angle suivant le tracé A. Or, pour
maintenir la bascule de toute la portion
<i>abc</i> du cylindre, il fallait que le
cul-de-lampe prît naissance assez bas
pour être chargé par l'angle <i>h</i>, avant de
commencer le dégagement complet de
l'intérieur de la tourelle. Les constructeurs
procédaient ainsi. Soit (fig. 5)
une coupe faite sur <i>bh</i>; soit <i>g</i> le niveau
du sol de l'étage en communication
avec le sol inférieur de la tourelle.
La naissance du cul-de-lampe était
placée en <i>n</i>, et assez bas pour que la
charge du quart du plan <i>nopq</i>, posant sur l'angle de pierre, fût équivalente
au moins à la charge <i>nst</i> des trois quarts du cul-de-lampe en
porte-à-faux. À cet effet, il était laissé en <i>v</i> un vide que l'on recouvrait
avec un bout de plancher. C'est ce vide que l'on prend, dans les tourelles
anciennes où il existe, pour des cachettes préméditées<span id="note10"></span>[[#footnote10|<sup>10</sup>]]. Les trois
quarts du cylindre en porte-à-faux étaient facilement reliés au quart
engagé dans l'angle, mais encore fallait-il que ce quart engagé fût, à lui
seul, aussi lourd que les trois quarts en porte-à-faux; et c'est pourquoi
les murs des tourelles en encorbellement sont très-minces, souvent évidés,
et présentent une section horizontale analogue à celle tracée en D
dans notre figure 5.
</div>
[[Image:Plan.tournelle.en.encorbellement.2.png|center]]
<div class="text">
<br><br>
----
 
<span id="footnote1">[[#note1|1]] : Voyez [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 6, Manoir|Manoir]].
 
<span id="footnote2">[[#note2|2]] : On voit encore plusieurs tourelles tenant à des hôtels du XVII<sup>e</sup> siècle, dans la rue Hautefeuille, à Paris.
 
<span id="footnote3">[[#note3|3]] : Voyez [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 3, Clôture|Clôture]], fig. 5.
 
<span id="footnote4">[[#note4|4]] : Voyez [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 5, Échauguette|Échauguette]].
 
<span id="footnote5">[[#note5|5]] : Voyez, à l'article [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 1, Architecture monastique|Architecture Monastique]], les figures 18 et 19, qui donnent les plans
de cette porte, en B et C fig. 18, et en A fig. 19.
 
<span id="footnote6">[[#note6|6]] : Voyez, dans les <i>Archives des monuments historiques</i>, le travail de M. Devrez, architecte, sur le [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes M#Mont.Saint.Michel.en.Mer|Mont-Saint-Michel en mer]].
 
<span id="footnote7">[[#note7|7]] : Voyez [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 7, Palais|Palais ]], fig. 15 et 16 (XIV<sup>e</sup> siècle).
 
<span id="footnote8">[[#note8|8]] : La partie supérieure de ces tourelles était encore intacte au commencement du
siècle; l'ouvrage a été rasé au niveau du chemin de ronde depuis lors, mais il existe des
dessins et tableaux, dans la bibliothèque d'[[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes A#Avignon|Avignon]], qui permettent de le rétablir dans
son intégrité.
 
<span id="footnote9">[[#note9|9]] : Voyez [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 6, Maison|Maison]], fig. 36 et 37. Des fragments de cette tourelle ont été déposés dans
la cour de l'École des Beaux-Arts à Paris.--Voyez encore l'<i>Architecture civile et domestique</i>
de MM. Verdier et Cattois.
 
<span id="footnote10">[[#note10|10]] : J'ai vu ruiner une tourelle dans laquelle le propriétaire d'un manoir avait eu l'idée
de faire enlever le massif d'angle formant contre-poids, croyant que ce massif devait renfermer quelque trésor. Il serait tout aussi dangereux de faire remplir de maçonnerie
les prétendues cachettes.