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<references />
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=== CLAVEAU ===
s. m. Nom que l’on donne aux pierres taillées en forme de
coin qui composent un arc ou une plate-bande appareillée et qui se
trouvent comprises entre le sommier et la clef. Les constructeurs du
moyen âge n’ayant employé la plate-bande appareillée qu’exceptionnellement,
nous nous occuperons d’abord des claveaux d’arcs. En règle
générale, la coupe d’un claveau est toujours normale à la courbe de l’arc;
en d’autres termes, la coupe du claveau doit être faite suivant la direction
du rayon de l’arc (voy. [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 4, Construction|Construction]]). Les claveaux, dans l’architecture
du moyen âge, étant toujours intradossés et extradossés, sauf de
très-rares
exceptions, il en résulte que les claveaux d’un même arc sont tous
de même forme et de même dimension, ainsi que le démontre la fig. 1.
A sont les sommiers, B la clef et C les claveaux.<span id=Beauvais>
</div>
[[Image:Claveaux.png|center]]
 
[[Image:Claveaux.Basse.oeuvre.Beauvais.png|center]]
<div class="text">
Pendant les premiers siècles du moyen âge, en France, on rencontre
souvent des claveaux de pierre alternés dans les arcs avec des briques.
C’était là un reste des traditions de la construction romaine des
bas-temps.
Les fenêtres de la Basse-œuvre de [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes B#Beauvais|Beauvais]], dont la construction
remonte probablement au VIII<sup>e</sup> siècle, ont leurs arcs ainsi composés de
claveaux de pierre séparés par une ou deux briques (2). On obtenait
ainsi une décoration à peu de frais. Un rang de briques extradossait
l’arc. Les claveaux des arcs reçoivent souvent des moulures à dater du
XII<sup>e</sup> siècle; jusqu’à cette époque, ils sont généralement taillés à vives
arêtes, ou parfois en demi-cylindres (voy. [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 1, Arc|Arc]]). Les membres de l’architecture
romane à son déclin sont très-chargés d’ornements; non-seulement
les chapiteaux, les frises en sont couverts, mais encore les colonnes et les
archivoltes qu’elles supportent. Les ornements les plus ordinairement
sculptés sur les archivoltes, pendant le XII<sup>e</sup> siècle, sont des billettes, des
dents de scie, des damiers, des besans, des zigzags, des méandres, des
entrelacs, etc. Ces ornements sont toujours compris dans la hauteur de
chaque claveau, afin de pouvoir les
sculpter avant la pose, et de les raccorder
bout à bout, en formant ainsi
une décoration continue. Cette règle
est suivie d’une manière si absolue,
que, lorsque dans un même archivolte
les claveaux sont inégaux d’épaisseur,
l’ornement se conforme
à la dimension de chaque pierre,
quitte à déranger ainsi la symétrie
de la décoration.
 
La fig. 3 explique ce que nous
disons ici.
</div>
[[Image:Claveaux.XIIe.siecle.png|center]]
 
[[Image:Claveaux.cathedrale.Puy.en.Velay.png|center]]
<div class="text">
Quelquefois, vers la fin du XII<sup>e</sup> siècle, les claveaux des arcs moulurés
sont, de deux en deux, chargés d’un ornement. Cette disposition est
fréquente dans les monuments de l’Auvergne. Ainsi, les arcs ogives du
porche sud de la cathédrale du Puy-en-Velay (4), qui datent du milieu du
XII<sup>e</sup> siècle, se composent de claveaux alternativement moulurés et sculptés.
La porte sud de l’église d’Ennezat, près de Riom, d’une époque plus
récente (commencement du XIII<sup>e</sup> siècle), présente, dans son archivolte,
une disposition analogue (5). Dans cette province, le midi de la France,
et en Bourgogne même, lorsque la nature des matériaux le permet, les
claveaux des arcs sont taillés dans des pierres de deux couleurs. La
construction, rendue apparente, contribuait ainsi à la décoration, sans
avoir recours à la sculpture ou à la peinture appliquée.
</div>
[[Image:Claveaux.eglise.Ennezat.png|center]]
<div class="text">
Pendant le cours du XII<sup>e</sup> siècle, dans le Beauvoisis et en Normandie
particulièrement, les claveaux des archivoltes sont refouillés, évidés, de
façon à présenter des entrelacs de zigzags, de bâtons rompus et même
d’ornements sculptés. C’est dans l’architecture anglo-normande de cette
époque que l’on trouve les combinaisons les plus compliquées, les évidements
les plus précieux. Les deux portes latérales de la façade occidentale
de la cathédrale de Rouen, dont les pieds-droits et les archivoltes datent
de 1160 environ, nous fournissent un des exemples les plus riches de ces
claveaux appareillés, évidés, découpés et sculptés avec une finesse et une
précision rares.
</div>
[[Image:Claveau.cathedrale.Rouen.png|center]]
<div class="text">
Voici (6) deux rangs de ces claveaux; les uns, ceux figurés en A,
présentent un rang de feuillages entrelacés complètement à jour, derrière
lequel les sculpteurs ont eu la patience de ciseler des palmettes qui
garnissent le fond de la gorge, ainsi que l’indique la section B. En C est
tracé le fond de la gorge; en D les palmettes, et en E les feuillages ajourés
compris exactement dans l’épannelage du claveau. L’autre rang de
claveaux, figuré en F, présente des dessins découpés à vif sur l’épannelage;
cette sorte de broderie, creusée profondément, donne la section G.
Plus tard, les rinceaux de feuillages, et plus fréquemment des figures,
décorent les claveaux d’archivoltes, mais en observant toujours la règle
primitive, savoir: que chaque ornement ou figure doit être comprise dans
un claveau. Il y a très-peu d’exceptions à cette règle. Cependant, au
portail occidental de l’église abbatiale de Saint-Denis, on voit les figures
des vingt-quatre vieillards de l’Apocalypse sculptées dans deux ou trois
claveaux, et, par conséquent, taillés sur le tas après la pose.
 
Les claveaux de plates-bandes sont rares pendant les périodes romane
et gothique; cependant force fut, dans quelques contrées où la pierre à
bâtir n’était extraite qu’en petites dimensions, de faire des linteaux de
porte composés de claveaux. Dans le Beauvoisis on rencontre assez
fréquemment des linteaux de porte appareillés appartenant au XII<sup>e</sup> siècle;
mais les claveaux de plate-bande ne présentent jamais, à cette époque,
des coupes tendant à un centre, comme dans l’architecture romaine; ils
sont maintenus dans leur plan au moyen de coupes enchevêtrées, qui
rendent tout glissement impossible. <span id=Beauvais2>On voit un de ces linteaux de porte
le long du flanc nord de l’église Saint-Étienne de [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes B#Beauvais|Beauvais]] (7). La difficulté
résultant de la taille et de la pose de plates-bandes ainsi appareillées fit
qu’au XIII<sup>e</sup> siècle, alors que l’on extrayait des carrières des pierres d’un
fort volume, on abandonna ces moyens de construction compliqués, à
moins d’une nécessité absolue, comme, par exemple, pour les manteaux
de cheminée; et, dans ce cas particulier, les claveaux des manteaux sont
appareillés à crossettes, ou suivant des coupes tendant à un centre (voy.
[[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 1, Appareil|Appareil]], [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 3, Cheminée|Cheminée]]).
</div>
[[Image:Claveaux.XIIIe.et.XIVe.siecles.png|center]]
<div class="text">
Lorsqu’au XIII<sup>e</sup> et au XIV<sup>e</sup> siècle on adopta les voûtes en arcs d’ogive,
divisés en un certain nombre de moulures, boudins, filets, cavets, gorges,
il arrivait quelquefois que, les sommiers étant posés tout taillés, suivant
l’usage, les claveaux ne venaient pas raccorder exactement leurs membres
de moulures avec ceux des sommiers, il restait des <i>balèvres</i>. Le boudin A
des claveaux (8), par exemple, ne retombait pas exactement sur le profil
du boudin B du sommier; les appareilleurs, s’apercevant de ce défaut
de taille, posaient un claveau de transition C, sur les moulures duquel on
réservait un petit ornement, une feuille, qui dissimulait les balèvres. <span id=Carcassonne>Il
existe un certain nombre de claveaux de contre-clefs et de sommiers
possédant cet appendice dans les arcs ogives des voûtes de l’église de
Saint-Nazaire de [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes C#Carcassonne|Carcassonne]] (commencement du XIV<sup>e</sup> siècle). Ceci est
encore une preuve certaine de la taille de tous les membres de moulures
avant leur pose. Parfois aussi les claveaux possèdent des membres de
moulures que les appareilleurs n’avaient pas eu la précaution de réserver
dans les sommiers. Alors une tête, une fleur forme comme un petit
cul-de-lampe
servant de naissance à ce membre supplémentaire. Ces détails
sont intéressants à observer, car ils démontrent comment les constructeurs
savaient dissimuler les erreurs ou irrégularités qui ne pouvaient manquer
de se présenter dans les détails compliqués de l’architecture gothique,
comme ils trouvaient toujours des ressources lorsqu’il s’agissait de s’affranchir
des difficultés qui se présentaient dans l’ensemble aussi bien que,
dans les plus minces détails de leurs constructions.