Philosophie anatomique. Des monstruosités humaines/Description d’un monstre humain, né à l’Hôtel-Dieu de Paris en août 1821, où l’on donne les faits anatomiques et physiologiques d’un genre de monstruosités du nom de podencéphale/§ II

Chez l’auteur, rue de Seine-Saint-Victor, no 33 (p. 227-229).
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Description d’un monstre humain né en août 1821, du genre podencéphale.

§ II. De l’extérieur du sujet.

Il devient nécessaire de donner le sexe de notre sujet, depuis que l’entraînement de certaines idées théoriques a fait dire que les monstres sont presque tous du sexe féminin. On ne doit pas plus faire cette dernière application à ce nouveau-né qu’aux monstres de nos deux précédens Mémoires : les cinq individus dont il y est fait mention, et celui de cet article, sont tous, à l’exception de l’anencéphale de la Seine, du sexe mâle.

La tête du podencéphale n’était point devenue monstrueuse sans que le corps ne s’en ressentît. L’abdomen paraissait plus long, plus renflé et généralement plus nourri ; cependant le canal intestinal était sans issue à l’extérieur. Je ne puis affirmer qu’il n’y existât aucune trace d’anus, dès qu’à la place et sur une longueur d’environ six centimètres, on apercevait une ligne, laquelle naissait des flancs droits du scrotum et se prolongeait sur la partie médiane de la région du sacrum : l’enfoncement de cette ligne formait une dépression bien légère ; car celle-ci n’excédait pas l’épaisseur de l’épiderme. Son extrémité supérieure, qui se trouvait un peu déjetée vers la gauche, était plus prononcée en profondeur, et présentait là tout-à-fait le caractère d’une cicatrice.

Je n’ai pu, comme on le pense bien, me défendre de songer aux brides de l’hypérencéphale à la vue de ces traces légères, et d’y voir un fait de même ordre. Il est tout simple que le fœtus, acquérant du volume et du poids, ait fini par se débarrasser de ses liens, et que la peau, n’éprouvant plus d’obstacles dans ses accroissemens en largeur, ait prolongé, l’un vers l’autre, ses deux bords jusque-là écartés ; lesquels se seront réunis et confondus, non cependant sans qu’on ne puisse apercevoir les vestiges de cette suture.

La tête du podencéphale (Voy. pl. VI, fig. 1.) forme la partie la plus considérable de cette singulière monstruosité. La face ne s’étend pas au delà des yeux : le nez est large et épaté. Les yeux paraissent énormes, non qu’ils soient réellement plus gros, mais parce qu’ils sont presque entièrement sortis des orbites. La boîte cérébrale est à peu près nulle comme capacité ; en sorte que le haut de la tête forme un plan surbaissé à l’égard de la face, dont on peut porter l’angle à cent degrés : le vertex n’est légèrement renflé qu’au centre, où le cerveau fait saillie en dehors, et où il présente cet autre et plus important caractère de monstruosité, l’extrême réduction de son volume. Sa grosseur, et, jusqu’à un certain point, sa forme et sa couleur, le rendent comparable à un marron de la plus forte dimension. La tête n’a rien perdu sur ses ailes en arrière, les oreilles et toutes les dépendances de l’organe de l’ouïe s’étant maintenues dans l’état normal.

À tous autres égards, cet enfant n’offrait rien de remarquable.