Philosophie anatomique. Des monstruosités humaines/Des faits anatomiques et physiologiques de l’anencéphalie, observés sur un anencéphale humain né à Paris en mars 1821

Chez l’auteur, rue de Seine-Saint-Victor, no 33 (p. 125-153).

DES FAITS
ANATOMIQUES ET PHYSIOLOGIQUES
DE L’ANENCÉPHALIE,
observés sur un anencéphale humain né à paris en mars 1821[1].



La fréquence de ces monstruosités est remarquable et tient peut-être à quelque chose de plus simple qu’on ne l’a cru généralement. Les ouvrages des médecins nous en font connaître plusieurs, et j’en sais de très-bien conservées dans toutes nos collections de Paris. À ne citer que les faits les plus récens et répandus dans un très-court rayon, voilà trois anencéphales. Le premier est un individu né à Dreux le 21 juillet 1808, et qui a été publié avec figures par M. André, chirurgien, dans l’Annuaire de la société de médecine du département de l’Eure, année 1810 ; un second est le sujet né à l’Hôtel-Dieu de Paris en février 1816, dont M. le professeur F. Lallemand, de Metz, a donné une description si satisfaisante ; et le troisième est un sujet né aussi à Paris (le 2 mars 1821), dont il n’a pas encore été fait mention, et que je vais, dans cet article, essayer de faire connaître[2].

Mais c’est moins peut-être la fréquente apparition de ces anencéphales que leur caractère physiologique qui mérite de fixer notre attention. Ce genre de monstruosités affecte celui de nos organes qu’un certain entraînement vers des vues nouvelles nous porte à placer au premier rang. Comme nous est donnée l’observation, il nous faut admettre l’absence absolue de toute substance cérébelleuse et médullaire en dedans du crâne et du canal vertébral ; et il faut bien qu’il en soit ainsi, dira-t-on, puisque ces récipiens n’existent ni l’un ni l’autre, en tant que les parties du squelette dont ils sont ordinairement composés ne comportent ni boîte, ni étui, ni cavités quelconques.

Voilà ce que les faits d’observations nous donnent : mais est-ce bien là un résultat possible ? Et quoi ! aucune trace de cerveau, aucun indice de moëlle épinière constitueraient le caractère d’anomalie de sujets à tous autres égards doués d’une organisation parfaitement régulière ? Ce serait l’organe que nous nous accoutumons à considérer comme le régulateur de la machine qui manquerait, alors que celle-ci n’en éprouverait, sous tous les autres rapports, aucune altération fâcheuse ?

Est-ce bien cela qu’on a voulu dire, cela qu’on a entendu par l’expression très-significative d’anencéphale ? J’interroge la littérature médicale, et rien que de vague m’est répondu. Ou ces difficultés ne se sont pas présentées, ou l’on a imaginé de les surmonter, en admettant une maladie survenue après les premières élaborations organiques. Ainsi on a supposé ce qu’il eût fallu d’abord établir en fait, et l’on a de cette manière appliqué au commencement de la vie, aux opérations d’un monde inconnu et à la formation des organes, des phénomènes et des actes observés dans le décours de la vie, produits dans un autre milieu, et qui ne se développent que pour et par la destruction des organes.

Ces réflexions me suggérèrent l’idée que les observations d’où on était parti étaient, sinon toutes fausses, du moins fort incomplètes. J’explique ainsi ce qui m’a engagé dans une sorte de révision des faits.

J’ai dit plus haut, page 11, d’où me venait ma confiance dans le système osseux ; et je m’employai à examiner en détail ce que, des parties de ce système ordinairement en contact avec la substance médullaire, il restait encore chez les anencéphales.

Mon premier résultat fut de constater qu’il n’y avait rien de changé quant au nombre et aux connexions de ces parties. Mais ce qui dut augmenter ma surprise, ce fut d’apercevoir un tout autre système aussi invariablement reproduit, et justement le système nerveux ; persistance sans doute bien remarquable dans un sujet réputé pour être entièrement dépourvu de substance cérébrale et médullaire.

Il était en effet certain que la répétition des matériaux osseux s’étendait à celle des élémens nerveux : je le savais, et par la description de M. Lallemand, qui avait donné une énumération complète des nerfs qui se répandent tant dans le canal médullaire, que dans la boîte osseuse, et par mes propres observations qui me faisaient lire ces faits sur le tissu osseux ; et dans le vrai, il ne manquait aucun des trous qui servent de passage à tous les nerfs spinaux et cérébraux.

Je vis davantage ; car, ces trous paraissant avec un plus grand diamètre, j’en dus conclure que les nerfs des fœtus anencéphales avaient plus de grosseur que ceux des fœtus de l’état normal. Mais plus de volume à leur sortie des organes des sens, comment concevoir cette circonstance ? à quelle fin ? Sortis si gros, ce serait pour se perdre subitement ? ils n’arriveraient dans le crâne que pour s’y aller propager dans le vide ?

Je faisais ces réflexions, l’esprit prévenu par les théories admises jusqu’à ce jour. Tout nerf, provient, dit-on, de matière médullaire, naissant ou du cerveau, ou de la protubérance annulaire, ou de la moëlle vertébrale. Or dans le cas de notre anencéphale, il fallait admettre des nerfs qui non-seulement étaient privés de leur gangue originelle, mais qui de plus acquéraient par cette privation même une plus forte constitution. C’était suivant tout à la fois les indications de la théorie et les données de l’observation, c’était admettre des parties qui n’avaient pas d’origine, qui n’avaient pas de point de départ : et dans ce cas, le simple bon sens disait que c’était faire quelque chose avec rien, une existence avec des non-existences. En pressant ces conséquences, j’arrivais à l’absurde. Mais où étaient mes causes d’erreur ?

C’était dans les vacances de 1820, et dans une campagne isolée, que j’étais livré à ces perplexités. Je n’avais emporté avec moi que les trois crânes d’acéphales décrits et figurés dans ma première dissertation. Me contentant d’abord d’examiner ces trois préparations, je pensais que ce serait déjà faire quelque chose d’utile dans l’état présent de la science, que de commencer par donner la détermination et la philosophie de cet ensemble de pièces.

Ces nerfs sans origine procuraient donc à mon esprit une importune préoccupation. Car il ne me restait, après l’observation du tissu osseux, que de revenir à la thèse de M. Lallemand, et celle-ci me ramenait à cet énoncé dont je ne pouvais demeurer satisfait : « Tous les nerfs qui naissent du cerveau sont libres et flottans à la base du crâne. » (Thèse, etc. 1818, no 165, p. 28.)

De retour à Paris, je voulus voir par moi-même ces nerfs flottans dans la cavité du crâne ; et un heureux hasard, après bien des soins d’abord inutiles, me procura enfin le sujet de cet article, l’anencéphale que j’ai fait figurer pl. IV.

Tous les anencéphales reproduisent invariablement une circonstance, à laquelle je donnai d’abord toute mon attention ; c’est l’absence du derme en de certaines places. Ce fait tire un nouvel intérêt de sa position ; tout ce nu est visible à la région occupée par l’épine du dos et sur toute l’étendue de la boîte cérébrale. Je me rappelai les observations de Santorini et de Bomberg citées par Morgagni, et celles, de Fontanus conservées par Wepfer. Comme ces physiologistes ne voulaient qu’expliquer la prétendue disparition du cerveau, il leur est échappé de s’accorder sur un fait d’observation, sur l’existence d’une vessie pleine d’un liquide à dos de leurs fœtus. Je ne doutai pas que l’anencéphale de la Seine[3] n’ait eu à porter une pareille bourse, en lui voyant le dos pelé en grande partie, et je ne tardai pas en être informé par la sage-femme[4] qui reçut l’enfant.

On jugera de la grandeur de cette poche sur le volume du liquide qui y était contenu, volume que la sage-femme m’a dit avoir estimé à la quantité de deux à trois litres d’eau. Cette poche était indépendante du placenta (celui-ci a été trouvé dans l’état normal), et son liquide parut différent de celui des eaux de l’amnios.

Je note cette circonstance négligée dans le récit de M. Lallemand, ou ne s’y trouvant qu’implicitement ; comme, par exemple, dans la remarque que la mère de son anencéphale avait étonné par une grossesse surnaturelle et par l’abondance des liquides épanchés avant l’enfantement.

On sait que Marcot, Haller, Morgagni et beaucoup d’autres physiologistes, se sont fixés sur ce fait, pour l’attribuer à un cas d’hydropisie, pour n’y voir qu’un événement à rapporter à ces développemens déréglés d’un genre déterminé, par lesquels se terminent tant de maladies organiques. J’ai donc cherché à me bien pénétrer du caractère de l’observation suivante. Je ne sache pas qu’on ait aussi nettement distingué que dans cette occasion les deux poches des deux liquides, ces eaux différentes et les deux temps marqués par leur écoulement[5].

Dans le travail utérin du 2 mars, il y avait déjà deux heures que les eaux de l’amnios, claires et limpides à l’ordinaire, s’étaient répandues (circonstance à prendre en considération), quand eut lieu la rupture de la poche dorsale. Le toucher de la sage-femme et une incision de l’ongle en décidèrent et produisirent un second écoulement : mais cette fois, le liquide était opaque, roussâtre, sanguinolent et cependant inodore. L’expulsion du fœtus s’ensuivit : ce fut trois quarts d’heure après.

Il fut très-facile de détacher les vestiges de la poche sur la ligne de ses bords[6] contigus au derme ; et c’est à quoi s’appliqua tout d’abord la sage-femme, dans la vue de nettoyer l’être qu’elle venait de recevoir, et bien persuadée qu’en débarrassant ce sujet de lambeaux vraiment hideux, elle le rendrait plus accessible à l’observation. Ce fut comme une peau morte qui se sépara sans difficulté de la peau vive. On conçoit que l’interposition du fluide avait rendu impossible de l’une à l’autre de ces peaux l’existence d’aucune bride, et que les feuillets supérieurs de la poche n’adhéraient en rien aux lames aponévrotiques subjacentes. Je fus fixé sur cette considération comme sur une dissection toute faite d’avance.

J’étais aidé dans ces recherches par M. le docteur Flourens, habile physiologiste sorti de mon école ; circonstance dont l’idée que j’ai de sa valeur et des services qu’il rendra aux sciences me porte à m’honorer. Nous soulevâmes, mon jeune ami et moi, cette dernière membrane et nous ne tardâmes pas à nous apercevoir que la nature nous avait là comme ménagé une autre dissection, sinon faite avec plus d’industrie que la première, du moins remarquable par un caractère de plus grande utilité. En effet ces nouvelles combinaisons organiques se rapportaient à ce qui m’avait précédemment occupé, d’une manière trop directe, pour que je ne m’y intéressasse pas vivement. Et dans le vrai, ce que, pour étudier la terminaison des nerfs spinaux et cérébraux, il nous eût fallu faire, c’est-à-dire ouvrir le crâne, fendre le canal vertébral et détruire peu à peu la pulpe médullaire, nous le trouvions tout pratiqué chez notre anencéphale, et cela l’était par la nature elle-même ; en sorte que nous ne nous voyions exposés ni aux inconvéniens d’un emploi peu judicieux du scalpel, ni à aucun autre sujet de fâcheuse méprise.

Tout bon esprit préférera sans doute ces bonnes fortunes de l’anatomie pathologique, dont avec un peu de sagacité il devient facile de démêler les circonstances, à ces vivisections si vantées de nos jours qu’on décore du nom imposant de physiologie expérimentale, où il se mêle tant d’incertitudes, où le fer produisant la douleur ne laisse prise à aucune autre sorte d’excitation, et où tant de causes réunies ne sauraient être distinguées dans leurs influences respectives.

Nous vîmes sur notre anencéphale, comme l’avait remarqué M. Lallemand sur le sien, et tous les nerfs des sens et tous ceux de la moelle épinière rangés dans l’ordre de leurs relations habituelles ; considération que notre principe des connexions nous eût donné à priori : mais, ce qui forme le haut intérêt de l’observation, nous aperçûmes ces nerfs écartés, isolés, entièrement libres, les uns à l’égard des autres.

C’est, comme on l’a vu plus haut, la condition de ce genre d’acéphalie, que le manque des masses encéphaliques et médullaires. Aucun empâtement n’embarrasse donc les extrémités nerveuses ; d’où, faute d’être empaquetés dans une bouillie cérébrale, tous les nerfs du cerveau et de l’épine restent facilement observables, et l’étaient en effet dans notre sujet pour la vue, pour le toucher, de toutes les manières possibles.

Attentif à ce qu’était la préparation sous ce rapport, je n’aperçus ni franges ni extrémités flottantes ; mais je vis des nerfs qui se plongeaient et qui allaient se perdre dans les tégumens employés ordinairement à les recouvrir. C’est, à bien le dire, c’est là tout mon mémoire. Je ne me contentai pas d’examiner ce fait pour mon propre compte : je désirai en propager l’observation et la rendre en quelque sorte praticable pour tous mes lecteurs. Ayant tenu à ce que cette préparation fût dessinée avec le plus grand soin, je la donne en la première figure de ma quatrième planche.

La dissection a placé la préparation sous deux aspects différens. Une coupe longitudinale, sur la ligne médiane en a b, a partagé le dos en deux moitiés égales. On a continué d’agir à gauche, de soulever une membrane très-fine et de la rejeter en dehors. Cette opération a mis à nu tous les nerfs spinaux vvuu. Rien au contraire n’a été dérangé à droite ; ce qui n’empêche pas qu’on n’y aperçoive aussi de ce côté les indices des mêmes nerfs, indices qui se manifestent en ll par un relief assez sensible à travers la membrane qui les recouvre. Les nerfs uu proviennent deux à deux des trous de conjugaison : les antérieurs vv, bien qu’ayant une même origine, paraissent directement sortir d’une cavité profonde existant là à raison de la courbure d’une portion de la colonne épinière, et tous, les antérieurs comme les postérieurs, viennent se perdre dans la membrane qui leur sert d’enveloppe. Devenus à leur terminaison une partie même du tissu de cette membrane, ils sont comme elle et avec elle rejetés à gauche ; en sorte que ceux-là seuls, dont les traces restent visibles en ll, doivent être consultés, si l’on veut prendre une idée de la réelle situation de toutes ces parties.

Au dessous de cet appareil nerveux se voyait une autre membrane semblable à quelques égards à l’externe, cependant plus épaisse, plus dense et plus résistante : posant à cru sur les os vertébraux, c’en est, à tout prendre, le périoste. Ainsi les nerfs spinaux, à leur sortie des trous intervertébraux, s’ouvrent un passage à travers ce périoste pour aller se répandre et finir sur la dernière membrane : ces nerfs sont donc, un moment, contenus entre ces deux lames ou membranes.

Nous avons reçu notre anencéphale, quant à sa cavité crânienne, dans l’état où le montre la figure. Les nerfs qui se voient là sont, en s les trijumeaux, en o les nerfs acoustiques ou les portions dure et molle de la 7e paire, et en pp les faisceaux des nerfs grand-hypoglosse et glosso-pharyngien. Heureusement que notre sujet n’était nullement endommagé sur les côtés, et que nous avons pu voir distinctement toutes ces branches nerveuses se porter chez lui et s’y épanouir dans des membranes d’une détermination facile à donner. Ces membranes étaient manifestement les enveloppes ordinaires du cerveau, pie-mère, arachnoïde et dure-mère : or c’était sur la première des trois que ces nerfs venaient aboutir et se confondre.

M. Lallemand a donné les mêmes démonstrations. Après avoir décrit la dure-mère, il ajoute : « Les débris de l’arachnoïde et de la pie-mère formaient derrière la base du crâne une espèce de capuchon qui descendait jusqu’au bas du dos. Au dessous de ces membranes, les artères carotides et vertébrales, entourées d’une foule de veines, formaient une sorte de chevelure, un réseau inextricable, au milieu duquel nous avons cependant reconnu la faux du cerveau, à cause de sa forme en croissant et des veines qui s’y rendaient. » (Thèse, etc. p. 28.)

Notre figure montre aussi très-distinctement des extrémités osseuses qui font saillie, et repoussent les tégumens en dehors ; savoir, iiii à gauche, et jjjj à droite. Ce sont les extrémités des lames des vertèbres que l’ouverture et le renversement du canal vertébral ont écartées l’une de l’autre, et rejetées ainsi latéralement. On concevra cet arrangement, un prenant la peine de consulter la portion de colonne épinière que j’ai fait représenter pl. III, fig. 1.

Tout le lambeau mn, terminé par des déchirures faites irrégulièrement, se compose des membranes du cerveau (mm) et du cuir chevelu (nn). Notre anencéphale était aussi pourvu de cheveux assez longs. Voyez les figures 1 et 2 de la pl. IV, aux lettres rrr.

Si l’on comparé la précédente description à celle que M. Lallemand a donné dans sa thèse, on les trouvera semblables au fond, mais différentes toutefois dans leur exposition. M. Lallemand, dans sa préoccupation qu’une maladie était venue déranger le cours d’une formation primitive et régulière, n’a pas fait de difficulté d’admettre des nerfs flottans à la base du crâne, des racines à l’origine de ces nerfs ; ou peut-être ce ne fut point chez lui un effet de prévention, mais le résultat d’un empêchement d’observation causé par le mauvais état de sa préparation.

J’ai donné plus haut la détermination des membranes de la région épicrânienne : cela n’offrait aucune difficulté. Mais il n’en est pas ainsi de celles qui recouvrent la région dorsale. Y ayant donné attention, j’ai diverses fois hésité. L’anomalie est là en effet si grande qu’il faut d’abord s’accoutumer à elle avant de s’engager dans son explication ; cependant voici ce que j’y ai définitivement aperçu.

Reprenons de plus haut : tout le canal vertébral du dos et des lombes est ouvert à sa partie médiane et postérieure : au lieu de faire étui, les lames des vertèbres sont rejetées partie à droite et partie à gauche : l’étui fendu et renversé est devenu une table. Ainsi une surface plane tient lieu des parois intérieures du tube.

Mais, dans l’état ordinaire, les couches membraneuses appliquées à tapisser l’intérieur du canal vertébral se composent : la première, de la dure-mère ; la seconde, de l’arachnoïde ; et la troisième, inscrite en dedans des deux autres, de la pie-mère. Conservons en souvenir que ce sont là les trois feuillets de l’étui membraneux, garnissant les parois du canal vertébral osseux, et que dans ce contenant est la moëlle épinière, l’objet contenu.

Or j’ai toujours vu que les os n’éprouvent point de modification, qu’ils ne la fassent ressentir aux parties molles qu’ils étayent. À la liaison intime de toutes ces parties du canal vertébral, on ne doit donc pas douter que cette vue ne leur soit à toutes applicable.

Par conséquent la seule manière que nous ayons de concevoir l’anomalie du cas actuel, c’est d’admettre que tous les élémens du canal vertébral se sont, avec ce système osseux, renversés en ailes à droite et à gauche, c’est-à-dire que tous se sont étendus en table pour former la large surface dorsale limitée à gauche par l’arête ccc, et à droite par la ligne des lettres ddd.

Cela posé, tout se réduit à une question bien simple, et dont la solution nous est donnée sans difficulté par les connexions. Car si le feuillet posé profondément et à cru sur les os vertébraux, est composé chez les anencéphales par la dure-mère, le dernier feuillet ou l’externe l’est par la pie-mère : quant à l’arachnoïde, ou elle est employée à la manière du tissu cellulaire pour unir ces deux membranes, ou, confondue avec l’une d’elles, elle en rend le tissu plus solide.

Nous voilà donc informés de ce qu’est l’espèce d’aponévrose, apparente comme une large plaie à la région dorsale ; et nous savons même à son sujet un peu davantage. C’est que nous voyons, en dehors, celle des deux surfaces de la pie-mère, qui, chez les fœtus de l’état normal, devient paroi intérieure, celle enfin qui est dans un contact immédiat avec la substance médullaire.

Mais si le tuyau contenant en est réduit à devenir table rase, et si ce sont ses parois intérieures qui interviennent en dehors, nous sommes conduits à chercher l’objet contenu à la surface de cette table rase. C’est du moins à cette même place que la théorie des connexions en indiquerait la position.

Dans le vrai, serait-il quelque chose au-delà ? Oui, puis-je répondre, oui, sans doute ; car d’abord on n’a point probablement oublié ce que j’ai rapporté plus haut de la vessie observée par Santorini et de ses eaux, et ce que j’ai dit moi-même de la poche dorsale de notre sujet.

Au delà est donc une bourse contenant un liquide opaque, roussâtre et inodore (page 133). Comme cette bourse se présente à l’observateur, en la voyant couchée tout le long du dos, j’y distingue deux plans : l’inférieur, répondant à notre table rase, comprend toute la partie représentée dans notre dessin et circonscrite par les lettres ccdd, et le supérieur se compose des membranes malheureusement supprimées par la sage-femme. Si pour le moment nous sommes privés de nous faire une opinion sur ces membranes, nous avons du moins une idée arrêtée sur celles du plan inférieur : nous venons en effet de prouver qu’elles sont formées par les méninges.

Ce quelque chose qui est en dedans de la pie-mère, cet objet contenu à chercher, serait donc connu, Nous l’apercevons manifestement au delà de ces méninges, dans le liquide que renferme la poche à dos des anencéphales.

Mais, dira-t-on, ce n’est pas là du moins cet objet contenu précédemment annoncé ; car ce n’est ni de la substance cérébrale, ni de la substance médullaire. Qu’importe ? je ne crains point de répondre ; qu’importe ? si c’est ce que le flux sanguin vient déposer à son lieu et place, ce que les filières ordinaires apportent et répandent sur la pie-mère, ce que la loi des connexions nous donne comme l’objet cherché.

C’est là déjà un premier et très-important résultat. Voyez ; ce liquide existe où la moelle épinière eut dû exister : il en tient donc lieu ; il en est donc l’équivalent, et en effet, vous ne pouvez reculer devant cette conséquence, quand vous en avez apprécié l’intérêt, comme vous offrant un objet de sécrétion, un produit nécessaire des vaisseaux sanguins, une dette qui est acquittée. Apprécions bien plutôt notre position ; et cessant de nous inquiéter de l’opinion qui place les anencéphales sous la supposition que, chez eux, il n’est nul indice de substance médullaire, restons fermement attachés à nos premiers pressentimens, et continuons à nous refuser de croire qu’une organisation régulière à tant d’autres égards, se puisse concilier avec l’absence absolue de tout appareil cérébral et spinal.

Cette eau à la place du prolongement rachidien ; il est presque inutile d’ajouter qu’elle était retenue extérieurement par le restant de la poche, par cette prétendue peau morte dont le fœtus a été débarrassé par la sage-femme.

D’où cette partie de la poche tirait-elle son origine ? Nous sommes privés de le savoir par une observation directe. Cependant deux seules hypothèses sont admissibles. Car, ou cette tunique avait été formée par le derme, qui aurait été soulevé et successivement distendu, au fur et à mesure de la livraison du fluide par le système artériel ; ou elle était une continuation des méninges, lesquelles fussent restées sous la condition d’un étui membraneux, et n’auraient participé à l’écartement des os vertébraux qu’à leurs points de contact avec la charpente osseuse.

Nous bornant à exposer des faits dans ce Mémoire, cette discussion nous est pour le moment interdite. Nous aurons plus tard occasion d’y revenir ; ce sera quand nous aurons donné dans le Mémoire suivant quelques faits analogues.

Reste une haute question à traiter. Cette eau de la poche dorsale qui tient lieu de cerveau, qui remplace ainsi le cordon rachidien, serait-elle primitive ? ou n’est-elle qu’un effet de maladie qui s’en vient tardivement porter le trouble dans un travail d’organisation d’abord régulier ? Beaucoup de physiologistes n’y ont vu qu’un effet d’hydropisie, qu’un cas d’hydrencéphalie ; je vais discuter l’opinion contraire.

Je me serais gardé d’une pareille discussion, si je devais n’y apporter qu’une toute autre manière de sentir ou de juger les faits : j’aurais trop à souffrir en effet de renoncer aux habitudes de modération qui font le charme de ma vie, et, pour si peu de motifs, d’essayer de poursuivre un succès ; mais fixé sur de nouvelles considérations, j’ai dû en accepter les conséquences. On pourra juger, si je ne m’en suis pas trop exagéré la valeur ; je vais exposer ces nouveaux aperçus dans l’ordre suivant.

1o Du système osseux. Avant que j’en eusse fait le sujet particulier de ma précédente dissertation, on n’avait que des idées vagues sur ce qui en restait conservé chez les anencéphales. On supposait que, passibles tout autant que le cerveau de l’action pathologique, les os crâniens tombaient dans la même dégradation. Mais on a vu que nous avons au contraire observé qu’aucun de leurs élémens ne disparaît, que seulement les conditions de monstruosités en affectent les formes, et que chaque pièce, comme si toutes les molécules à lui fournir devaient être livrées à des époques et dans une quantité réglées pour tous les cas, acquérait en épaisseur ce qu’elle perdait en superficie. Les formes elles-mêmes ne m’ont paru soumises qu’à une domination indirecte et accidentelle ; car ou ces os se relèvent en bosse sur un cerveau d’un relief considérable, ou, si l’encéphale diminue et même disparaît, ils s’affaissent et retombent sur eux-mêmes, étant dispos pour ces variations, comme s’ils faisaient effectivement partie d’une bourse à compartimens mobiles ; Mais d’ailleurs hors ces causes, qui influent sur leurs formes, et qui en font la variation de l’état normal à l’état monstrueux, ces os ne sont point autrement affectés. Leur tissu, dans l’un et l’autre cas, paraît dépendre tout-à-fait des mêmes causes de formation ; c’est la même structure, la même physionomie, j’allais dire la même apparence de bonne et parfaite santé. L’observation ne saurait donc s’accommoder de l’idée d’un désordre récent : tout porte au contraire l’empreinte d’un travail ancien et persévérant. Il me paraît donc parfaitement établi que les os crâniens et vertébraux des anencéphales restent dans leur développement constamment soumis à des conditions primitives, c’est-à-dire qu’ils sont moulés sur une forme donnée dès l’origine.

2o Du système nerveux. On ne fut de même que faiblement fixé sur les rameaux nerveux qui se répandent ordinairement sur l’encéphale et la moelle épinière. Mon observation, établissant que ces nerfs restent étrangers à la substance médullaire, et qu’ils ont un mode de terminaison qui leur est propre, est d’un grand poids dans cette question. Ce ne sont donc plus, comme on l’a cru, des bouts de nerfs vagues et flottans dans un reste de cavité. N’étant ni déchirés, ni rompus, il n’est donc plus besoin d’imaginer de maladie qui puisse rendre compte de ces ruptures.

3o De la nature du fluide de la poche dorsale. La monstruosité dont nous sommes occupés résulte de la modification de deux grands systèmes ; du système osseux servant à renfermer la substance médullaire, et du système encéphalique se prolongeant en moelle épinière et composant cette même substance médullaire. Au lieu de ne voir là qu’un seul et même phénomène, que l’action du contenant sur le contenu, ou, vice versâ, celle du contenu sur le contenant, que l’affection respective de deux choses dans une dépendance nécessaire ; on a imaginé de les isoler, et de faire jouer à chaque système le rôle différent et de cause et d’effet. Dans cette combinaison, le tissu osseux a paru l’objet affecté, et les eaux de la poche en furent jugées l’occasion et comme la cause perturbatrice.

Ces explications ont pris leur source dans l’opinion que, puisque de l’eau formait le liquide de la poche, c’était par un effet d’hydropisie, d’hydrencéphalie. Ainsi ce qui termine les maladies chroniques dans la vie aérienne, chez de jeunes enfans ou des vieillards, après un long exercice des organes, après tant de métamorphoses provenues d’épuisement, serait assimilé à des actes qui se passent dans des vaisseaux fermés, à de premières élaborations organiques, à des jeux d’affinités pour le groupement des matériaux, à tant de nouvelles productions enfin qu’amène l’ordre successif des développemens.

Mais, dira-t-on, il le faudra bien, si dans l’état présent de la physiologie, il n’y a d’explication applicable à ces cas de monstruosités que la seule théorie des infiltrations. Car enfin, pourra-t-on ajouter encore, ce fait principal est manifeste ; de l’eau est à la place du cerveau chez les anencéphales. J’extrais ces déductions d’ouvrages justement célèbres ; de ceux de Haller, de Morgagny, de Sandifort, d’Ackermann, etc. etc.

Mais d’abord je voudrais savoir ce que, dans ces illustres écrits sur les monstruosités, on a entendu par les mots cas pathologiques et maladie ; car je ne saurais me faire une idée nette de ces termes, dont l’acception précise porte en soi un caractère d’explication et de conclusion, à moins que je ne les applique à un organe achevé, ayant déjà existé sous une première forme, qui subit des altérations, et qui passe de l’état sain, sa condition ordinaire, à une organisation insolite.

S’il n’y a jamais eu cerveau proprement dit chez les anencéphales, si dès l’origine l’eau de la poche tient lieu de cet organe, ce serait un fait de monstruosité, mais non une de ces lésions exprimable par l’épithète de pathologique ; et en effet, ceci est uniquement monstrueux, qui s’arrête en deçà des transformations réglées par le cours des communs développemens ; et au contraire cela tombe dans des conditions pathologiques, qui dépasse le terme de ses dimensions habituelles pour arriver à moins ou à plus que son volume ordinaire.

Or voyez : les déductions précitées des maîtres de la science s’étaient principalement fondées sur la considération qu’il n’y avait de possible que l’unique solution donnée dans ces corollaires. Mais présentement vous n’en pouvez douter : nous en apercevons deux très-différentes, et nous saisissons d’autant plus volontiers cette ouverture, que notre nouvelle manière d’envisager le phénomène nous paraît la seule explication qui lui convienne.

Ou bien on ne l’a pas su à temps, ou cette réflexion aura échappé, c’est que tout cerveau, que toute moelle épinière ont un commencement qui est l’état ordinaire et permanent des anencéphales. De l’eau est le premier produit des vaisseaux sanguins : les bourses ou les membranes encéphaliques et vertébrales s’en remplissent d’abord : ainsi ce fluide préexiste à toute substance médullaire. Premier produit, il est donc une sorte de gangue qui attend de subséquentes élaborations pour acquérir de nouvelles qualités, et dont les plus manifestes pour nos sens consistent à cesser d’être diffluente, à se coaguler. Qu’on examine un poulet à la sixième journée de l’incubation, on le trouvera, sous le rapport du cerveau, présentant les traits d’un anencéphale, avec une poche très-distendue et toute pleine d’un fluide aqueux à la région occipitale.

Qu’est-ce donc qu’un anencéphale ? Un être dans lequel ne s’opère pas à la région rachidienne la transformation du premier versement aqueux du liquide organogène ; un être qui conservé à toujours ses premières conditions fœtales en ce qui concerne un des produits organiques ; un être enfin chez qui ce produit entre en bourse pour y rester étranger à la vie commune.

Sur ce pied l’anencéphale est monstrueux : car si nous le comparons aux fœtus de même espèce étant dans l’état normal, nous voyons qu’en un point il ne parcourt pas toute l’échelle des développemens possibles, comme le font ces derniers : mais il n’est pas malade, sous ce rapport que cette défectuosité ne tient point à un organe déjà formé, qui s’est vicié plus tard.

Il n’est pas malade, puisqu’il ne le saurait être par le défaut de coagulation des eaux de la poche dorsale. Effectivement, c’est là une circonstance à laquelle doivent rester indifférens tous les organes des sens et toutes les parties du tronc et des extrémités ; ce qui se passerait tout différemment au contraire, si les artères carotides et vertébrales étaient privées de fluer dans la bourse commune à l’encéphale et à l’épine. Car n’ayant plus de ce côté leur débouché ordinaire, les matériaux charriés par ces artères, faisant retour dans les voies de la circulation et refoulées sur d’autres points, ne manqueraient pas d’y être une source de désordres pour tous les organes dans la substance desquels ils parviendraient à pénétrer.

Il est, ce me semble, tout-à-fait évident que rien de ceci n’est applicable aux anencéphales. À cela près que de l’eau tient lieu chez eux de cerveau et de moelle épinière, ils naissent, non moins bien nourris, non moins vivaces que tous les autres fœtus. L’individu que j’ai eu sous les yeux peu après sa naissance, était gras et bien potelé. À l’exception de ce qui forme le caractère de sa monstruosité, il aurait pu le disputer d’embonpoint et de santé avec l’enfant né le plus heureusement.

J’insiste sur cette conséquence : les anencéphales ne sont point malades dans l’acception précise de ce terme ; mais ils restent monstrueux dans ce sens qu’ils ne jouissent pas d’une organisation assez perfectionnée, assez riche pour suffire à la vie dite de relation. Tels que je les aperçois dans cette insuffisante organisation, ils sont viables, mais seulement à la manière d’une portion d’arbre, satisfaisant à des développemens compliqués et réguliers dans de certaines limites, et y satisfaisant sans fâcheuse réaction sur d’autres points, tant qu’ils tiennent à un principal rameau, tant qu’un placenta les greffe à l’utérus de leur mère, tant qu’ils y puisent les moyens de leur existence. Mais venez à les comparer aux êtres doués d’une organisation complète, vous ne les voyez plus viables ; ils cessent de l’être, quand finit le temps de la gestation de leur mère. Ou mieux, ils ne le furent jamais de la manière qu’on a toujours entendu cette expression : car il leur manque de pouvoir exister par de propres ressorts. Leur poche dorsale ne s’est point élevée jusqu’au caractère d’une bourse médullaire, c’est-à-dire qu’il n’est entré dans celle-ci qu’un fluide aqueux, et rien qui puisse devenir un agent de réaction et de domination, rien qui présente et fournisse les ressources du tout-puissant régulateur x, de cet inconnu qui, je le crois, ne peut tarder à se manifester aux physiologistes, de cet être d’où cependant dépendent les phénomènes vitaux dans la vie de relation.

M. le docteur Gall, en y apportant ses vues élevées et les inspirations de son génie, a touché plusieurs points de cette discussion. On sait avec combien de raisons il s’est depuis long-temps récrié contre le système que des eaux répandues dans le crâne pouvaient détruire le cerveau, le dissoudre, et en résorber tout ou partie. Une hydrencéphalie ne saurait produire, suivant lui, qu’une hernie du cerveau[7].

M. Fr. Meckel aurait de même, dès 1812, pensé à établir ce fait, que l’hydrocéphalie de naissance est toujours, ou du moins le plus souvent, un retardement du développement du cerveau, qui ne s’élève pas à la forme qu’il devrait prendre conformément au type de l’espèce. Voyez l’Anatomie pathologique de l’auteur, tome 1, page 260.

Cette doctrine est aussi celle que professe M. Tiedemann.

CONCLUSION.

Nous connaissons présentement la poche dorsale, la nature et l’objet du fluide qui y est renfermé : nous savons que c’est un fait préexistant à la formation de toute substance médullaire. Nous aurions donc ramené les anencéphales à quelque chose de plus simple que ce qu’on en pensait ; à un âge de la série des développemens ; à n’être enfin qu’un fœtus sous les communes conditions, chez lequel un seul organe n’aurait point participé à ces transformations successives qui font le caractère de l’organisation.

  1. J’ai lu ce Mémoire à l’Académie des Sciences le 19 mars 1821, sous le titre d’Observations d’Anatomie pathologique sur un anencéphale humain, éclaircissant quelques points de l’histoire des nerfs. J’en ai retouché depuis quelques parties.
  2. Je lis dans les Variétés historiques un fait d’anencéphalie qui n’a point été recueilli dans les annales de la littérature médicale. « On a vu naître en 1722, à la ville de la Flèche, un enfant sans aucune trace de cerveau, de cervelet, ni de moelle épinière. La boite cérébrale et les vertèbres étaient ouvertes et revêtues d’une simple membrane. C’était un garçon. La mère l’a porté jusqu’à terme, et le sentit remuer douze heures avant l’accouchement, qui fut heureux, quoique l’enfant arrivât mort. Cette femme, âgée de vingt-sept à vingt-huit ans, était hydropique pendant cette dernière grossesse, et l’est demeurée encore après. » Extrait des Variétés historiques, physiques et littéraires, in-12, t. 2, part. 1, p. 463. Paris, chez Nyon, 1762.
  3. Quelques renseignemens qui m’ont été communiqués touchant la naissance de ce fœtus m’autorisent à l’appeler de ce nom. Je traiterai de l’anencéphale de M. Lallemand sous celui de l’anencéphale de l’Hôtel-Dieu, et du sujet décrit par M. André sous la dénomination de l’anencéphale de Dreux. Dans les vues zoologiques que j’applique à l’étude des monstres, ce sont là trois différentes espèces d’un même genre.
  4. Madame Riguet, à Paris, quai du port aux Tuiles.
  5. Santorini et l’un de ses confrères, Alexandre Boni, auraient aperçu, au rapport de Morgagni, dans leur fœtus anencéphale, non pas la voûte du crâne ni un cerveau qui n’existaient nulle part, mais une espèce de vessie qui ne contenait que de l’eau jaune. Morg. De morborum sedibus et causis, epist. 12.
  6. Voyez pl. IV, les deux lignes marquées cccc.
  7. Le cerveau, disent nos adversaires, serait postérieurement détruit par une hydropisie cérébrale. Mais nous avons prouvé que ni les acéphales, où l’on trouve encore les parties inférieures du cerveau, ni ceux qui sont absolument dépourvus de tête, de cou, de poitrine, etc., ne peuvent être les produits d’une hydropisie antérieure du cerveau. Jamais on ne voit naître un fœtus avec des traces d’un pareil déchirement des membranes du cerveau ; ce qui devrait arriver fréquemment, puisque c’est leur maladie ou leur mort qui occasionne presque toujours les avortemens. Souvent on trouve en bon état les parties inférieures de la tête, ainsi que les nerfs auditifs, optiques et olfactifs, qui sont si délicats. Comment eussent-ils pu résister à l’action d’un fluide qui aurait dissous des os si durs, des membranes si tenaces ? On ne découvre pas non plus dans ces acéphales la moindre trace de blessure cicatrisée, ou d’os corrodés ; les bords des os sont, au contraire, lisses et arrondis. Gall et Spurzheim, Anatomie et Physiologie du Système nerveux, etc., tome 1, page 52. Voyez aussi l’article acéphale du Dictionnaire des Sciences médicales, par les mêmes anatomistes.