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LETTRE VII

séjour en Sicile s’acheva 338 ainsi que je l’ai raconté avant mes avis aux parents et amis de Dion. Après quoi, je m’efforçai de persuader Denys de me laisser partir. Mais pour le moment où la paix serait rétablie (car il y avait alors la guerre en Sicile)[1], nous fîmes tous deux nos conventions : Denys promit de nous rappeler, Dion et moi, quand il aurait raffermi son pouvoir, et il demanda à Dion de ne pas considérer son départ comme un exil, b mais comme un simple changement de séjour. Sur ces paroles, je me déclarai prêt à revenir. À la conclusion de la paix, il me rappela, mais il pria Dion d’attendre encore un an. Pour moi, il me mandait d’arriver à tout prix. Dion me poussait à me mettre en route et faisait des instances : de Sicile, en effet, le bruit se répandait que Denys était pris de nouveau d’un zèle merveilleux pour la philosophie. Aussi Dion me priait ardemment de répondre à cet appel. Moi, je savais bien c que les jeunes gens éprouvent souvent vis-à-vis de la philosophie de pareils sentiments. Il me parut pourtant plus sûr de laisser de côté, du moins pour le moment, Dion et Denys, et je les mécontentai fort tous deux en répondant que j’étais bien vieux et que l’on n’agissait nullement suivant nos conventions. Là-dessus, je crois, Archytas[2] se rendit chez Denys (j’avais, en effet, avant mon départ, noué des relations d’amitié entre Archytas, le gouvernement de Tarente et Denys) ; d il y avait aussi à Syracuse des gens qui avaient entendu des entretiens de Dion, d’autres qui les tenaient de ces derniers, et ils avaient la tête farcie de formules philosophiques. Ils essayèrent, je suppose, d’en[3] discuter avec Denys, persuadés

  1. Cf. Lettre III, 317 a. L’expression ἐν Σικελίᾳ ne signifie pas nécessairement que la Sicile était le théâtre de la guerre et ne contredit pas l’opinion qui voit ici une allusion aux entreprises de Denys contre les Lucaniens.
  2. Archytas, le tyran de Tarente, célèbre pythagoricien, était l’ami de Platon. Ce dernier avait fait sa connaissance lors de son premier voyage en Italie en 388. Les Lettres IX et XII lui sont adressées, et il est encore plusieurs fois question de lui ailleurs. — Voir Lettre VII, 350 a ; XIII, 360 c.
  3. Apelt fait dépendre τῶν περὶ τὰ τοιαῦτα de οἳ et rapproche la formule des expressions similaires : οἱ περὶ μουσικήν ou οἱ περὶ τὴν τοῦ σώματος τροφήν (Protagoras, 313 c). Mais la séparation de οἳ et de τῶν περὶ… rend ici la construction peu naturelle. Il est bien plus simple de faire dépendre τῶν περὶ… de διαλέγεσθαι et de considérer τῶν comme un génitif partitif, ce qui est parfaitement correct.