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NOTICE

vraisemblablement une fiction de Praxiphane, qui en avait fait le sujet d’un dialogue de sa composition. En fait, il paraît difficile que Platon ait pu avoir beaucoup de sympathie pour l’homme et l’écrivain qu’était Isocrate : ce sont deux esprits dont la structure et l’orientation sont diamétralement opposées. On s’est donné une peine infinie pour essayer de prouver qu’Isocrate ne doit pas être reconnu dans le personnage hybride dont Platon avait fait le cruel portrait dans son Euthydème (305 c-306 c ; cf. la Notice de L. Méridier p. 133 sqq.) ; peut-être se refusera-t-on aussi à voir dans le discours du Pausanias du Banquet une parodie de la manière d’Isocrate (cf. ibid. Notice, p. xl sqq.) ; peut-être n’est-ce pas non plus à lui que devrait se rapporter, contrairement à ce que je crois (cf. ibid.), le passage de la République (VI 498 c sqq.) où c’est le nom de Thrasymaque qui est prononcé. Ce qui du moins est certain, c’est que, dans l’Antidosis (qui est de 354/3) Isocrate parle d’ennemis cachés derrière ceux qui l’attaquent ouvertement, à peu près comme, dans l’Apologie, Socrate parle d’Aristophane dont les calomnies ont de longue date fait mûrir l’accusation dont il est l’objet. Or il y semble bien avoir en vue une hostilité ancienne et tenace, non pas celle de quelques rhéteurs dont il n’a plus à craindre la concurrence, mais celle de rivaux qui ont su acquérir sur l’esprit de la jeunesse et dans le public une autorité dont il y a lieu pour lui de s’alarmer ; ils sont passés maîtres dans « les discours éristiques » et en même temps ils s’occupent de géométrie et d’astronomie : ce sont eux qui ont été les agresseurs et sur son compte ils ont toujours quelque méchanceté à dire ; sans que leur orgueil soit tout à fait injustifié, il l’est cependant (Antid. 257-261 ; cf. 243-247). Bref, il s’agit d’ennemis qu’il est impossible de traiter par le dédain.


L’éloge d’Isocrate à la fin du Phèdre.

Le Phèdre, dans ses deux dernières parties et, par conséquent, dans son ensemble puisque c’est un tout solidaire, m’apparaît donc comme un réquisitoire contre la rhétorique d’Isocrate[1]. Tous les autres Maîtres dont il est question çà et là

  1. Ainsi que le suggérait Thompson (173, 178), qui pourtant n’est pas allé tout à fait jusqu’au bout de ce que semble appeler cette suggestion. — Que la comparaison d’Isocrate avec Lysias fût, à