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102 ac
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Adverbe

tion adverbiale, p. ex. הַרְבֵּה beaucoup (inf. abs. hifil de רָבָה : action de faire beaucoup, en faisant beaucoup § 79 q). Souvent l’idée adverbiale est exprimée par un groupe de deux ou plusieurs mots, surtout préposition et substantif, p. ex. בֶּֽאֱמֶת vraiment, véritablement, לָ֫מָּה pourquoi (ל et pronom מָה), מַדּוּעַ pour quelle raison ? (מָה + יָדוּעַ, scibile quid ? avec יָדוּעַ affaibli au sens de chose[1] : « quelle chose ? » = pourquoi ?).

b Les adverbes dérivés sont peu nombreux. Avec la finale ◌ָם : אָמְנָם vraiment, en vérité, mais après le ה interrogatif הַֽאֻמְנָם (de אֹ֫מֶן, 1 f.) ; חִנָּם en grâce, gratuitement, en vain, inutilement, sans cause (de חֵן grâce ; comp. gratia et gratis) ; רֵיקָם à vide, les mains vides, sans cause (de רֵיק vide) ; יוֹמָם de jour (l. diu, interdiu). Avec la finale ◌ֹם on a seulement פִּתְאֹם soudain et שִׁלְשׁוֹם (11 f. ; שִׁלְשֹׁם 12 f.) avant-hier. Ces finales sont diversement expliquées. Certains auteurs voient dans ◌ָם l’ancienne finale de l’accusatif indéterminé (§ 93 b)[2], d’autres une finale spéciale[3]. Pour les deux noms en ◌ֹם il faudrait savoir d’abord si l’ est moyen ou long. פִּתְאֹם est p.-ê. pour pitʿam (de פֶּ֫תַע instant), devenu pitʾām par affaiblissement du ע et allongement compensatoire de l’a. Quant à שִׁלְשׁוֹם, il semble bien emprunté à l’akkadien ina šalši ūme « en trois jours », et alors l’ serait long[4].

Avec la finale annīt, composée de ann et de la finale féminine īt (§ c), on a les deux adverbes de manière אֲחֹֽרַנִּית en sens inverse, à reculons et קְדֹֽרַנִּית lugubrement.

c Adverbes de suppléance. Nous appelons ainsi les diverses parties du discours qui, employées en fonction adverbiale, suppléent au manque d’adverbes.

  1. Comp. aram. juif מִדָּעַם, de middāʿ + ma « scibile quid », quelque chose (syr. ܡܶܕܶܡ). Dans le dialecte arabe décrit par Socin, Diwan aus Centralarabien, § 63 d, ʿilm « connaissance » aboutit à chose, p. ex. wes ʿilm « pourquoi ? ».
  2. Par exemple, à חִנָּם gratis on peut comparer l’arabe maggānan مَجَّانًا gratis, à l’accusatif indéterminé ; le grec μάτην vainement, acc. de μάτη).
  3. Dans יוֹמָם il pourrait y avoir redoublement du מ radical ; cf. syr. ʾīmåmå ܐܺܝܡܳܡܳܐ ; ou bien åm pourrait être une finale indiquant le temps : « le temps du jour », donc la journée, ital. la giornata. Comp. p.-ê. צָֽהֳרַ֫יִם midi § 91 g.
  4. D’après P. Dhorme, les formes primitives seraient *pitʾuma, *šilšuma (finale u bref du nominatif et pronom ma) , cf. Revue Biblique 1914, p. 436.