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ment. Puis, levant les yeux au ciel, et n’y voyant plus d’étoiles, il regarda une seconde fois dans le miroir, et aperçut un peuple qui venait de l’Orient, armé, combattant et tuant. Ses devins étant venus pour lui expliquer ce présage, l’oiseau disparut, les laissant en grand trouble. « C’était, à mon avis, dit Delancre, son mauvais démon qui venait lui annoncer sa fin, laquelle lui arriva bientôt. » Dans le royaume de Loango, en Afrique, on regarde comme le présage le plus funeste pour le roi que quelqu’un le voie boire et manger : ainsi il est absolument seul et sans domestiques quand il prend ses repas. Les voyageurs, en parlant de cette superstition, rapportent un trait barbare d’un roi de Loango : Un de ses fils, âgé de huit ou neuf ans, étant entré imprudemment dans la salle où il mangeait, et dans le moment qu’il buvait, il se leva de table, appela le grand prêtre, qui saisit cet enfant, le fit égorger, et frotta de son sang les bras du père, pour détourner les malheurs dont ce présage semblait le menacer. Un autre roi de Loango fit assommer un chien qu’il aimait beaucoup, et qui, l’ayant un jour suivi, avait assisté à son dîner<ref>Saint-Foix, Essais historiques.<ref>.

Les hurlements des bêtes sauvages, les cris des cerfs et des singes sont des présages sinistres pour les Siamois. S’ils rencontrent un serpent qui leur barre le chemin, c’est pour eux une raison suffisante de s’en retourner sur leurs pas, persuadés que l’affaire pour laquelle ils sont sortis ne peut pas réussir. La chute de quelque meuble que le hasard renverse est aussi d’un très-mauvais augure. Que le tonnerre vienne à tomber, par un effet naturel et commun, voilà de quoi gâter la meilleure affaire. Plusieurs poussent encore plus loin la superstition et l’extravagance : dans une circonstance critique et embarrassante, ils prendront pour règle de leur conduite les premières paroles qui échapperont au hasard à un passant, et qu’ils interpréteront à leur manière. Dans le royaume de Bénin, en Afrique, on regarde comme un augure très-favorable qu’une femme accouche de deux enfants jumeaux : le roi ne manque pas d’être aussitôt informé de cette importante nouvelle, et l’on célèbre par des concerts et des festins un événement si heureux. Le même présage est regardé comme très-sinistre dans le village d’Arebo, quoiqu’il soit situé dans le même royaume de Bénin.

Un serpent s’était entortillé autour d’une clef à la porte d’une maison, et les devins annonçaient que c’était un présage. « Je ne le crois pas, dit un philosophe, mais c’en pourrait bien être un si la clef s’était entortillée autour du serpent. »

Prescience, connaissance certaine et infaillible de l’avenir. Elle n’appartient qu’à Dieu. Rappelons-nous ici la maxime d’Hervey : « Mortel, qui que tu sois, examine et pèse tant que tu voudras ; nul sur la terre ne sait quelle fin l’attend. »

Préservatifs. Voy. Amulettes, Cornes, Phylactères, Troupeaux, etc.

Pressentiment. Suétone assure que Calpurnie fut tourmentée de noirs pressentiments peu d’heures avant la mort de César. Mais que sont les pressentiments ? Est-ce une voix secrète et intérieure ? Est-ce une inspiration céleste ? Est-ce la présence d’un génie invisible qui veille sur nos destinées ? Les anciens avaient fait du pressentiment une sorte de religion, et de nos jours on y ajoute foi. M. C. de R…, après s’être beaucoup amusé au bal de l’Opéra, mourut d’un coup de sang en rentrant chez lui. Madame de V…, sa sœur, qui l’avait quitté assez tard, fut tourmentée toute la nuit de songes affreux qui lui représentaient son frère dans un grand danger, l’appelant à son secours. Souvent réveillée en sursaut, et dans des agitations continuelles, quoiqu’elle sût que son frère était au bal de l’Opéra, elle n’eut rien de plus pressé, dès que le jour parut, que de demander sa voiture et de courir chez lui. Elle arriva au moment où le suisse avait reçu ordre de ne laisser entrer personne et de dire que M. C. de R… avait besoin de repos. Elle s’en retourna consolée et riant de sa frayeur. Ce ne fut que dans l’après-midi qu’elle apprit que ses noirs pressentiments ne l’avaient point trompée. Voy. Songes.

On lisait dans le journal la Patrie, en septembre 1857 :

« M. de S…, neveu de la comtesse K…, habite l’Angleterre. Un soir, il rentre chez lui, l’esprit fort tranquille. A peine a-t-il allumé sa bougie qu’il entend un bruit étrange. Il se détourne, et voit sur sa table une main qui trace rapidement quelques lettres sur le papier et disparaît. Il s’approche et lit : Godefroy. C’est le nom d’un de ses amis qui voyageait alors dans l’Amérique du Nord.

» M. de S… a pris note précise du jour et de l’heure de cette apparition ; quelque temps après, il a su officiellement que ce même jour, à la même heure, son ami était mort au Canada. L’impression que cet événement a produite sur lui a été si vive, qu’il vient de renoncer au monde et d’entrer aux oratoriens de Londres. »

Pressine. Voy. Mélusine.

Prestantius. Voy. Extases.

Prestiges. « Il y a eu de nos jours, dit Gaspard Peucer, en ses commentaires De divinatione, une vierge bateleuse à Bologne, laquelle, pour l’excellence de son art, était fort renommée par toute l’Italie ; néanmoins elle ne sut, avec toute sa science, si bien prolonger sa vie, qu’enfin, surprise de maladie, elle ne mourût. Quelque autre magicien, qui l’avait toujours accompagnée, sachant le profit qu’elle retirait de son art pen-