Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/569

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ensuite c’est la matiere subtile qui coule entre elles, & qui est plus agitée qu’elles ; & enfin vient la matiere subtile extérieure, dont l’agitation passe celle de tout le reste, & de la vîtesse de laquelle on peut se faire une idée par les effets qu’elle produit dans la poudre à canon & dans le tonnerre.

Ceci est tiré de la Dissertation sur la glace par M. de Mairan, imprimée dans le Traité des vertus médicinales de l’eau commune, Paris, 1730. tome II. pag. 523 & suiv. Article de M. Formey.

Nous n’avons pas besoin de dire que tout ceci est purement hypothétique & conjectural, & que nous le rapportons seulement, suivant le plan de notre ouvrage, comme une des principales opinions des Physiciens sur la cause & les propriétés de la liquidité. Car nous n’ignorons pas que ce mouvement prétendu intestin des particules des fluides, est attaqué fortement par d’autres physiciens. Voyez Fluide & Fluidité.

Liquide, (Jurisprud.) se dit d’une chose qui est claire, & dont la quantité ou la valeur est déterminée ; une créance peut être certaine sans être liquide. Par exemple, un ouvrier qui a fait des ouvrages, est sans contredit créancier du prix ; mais s’il n’y a pas eu de marché fait à une certaine somme, ou que la quantité des ouvrages ne soit pas constatée, sa créance n’est pas liquide, jusqu’à ce qu’il y ait eu un toisé, ou état des ouvrages & une estimation.

On entend aussi quelquefois par liquide ce qui est actuellement exigible ; c’est pourquoi, quand on dit que la compensation n’a lieu que de liquide à liquide, on entend non-seulement qu’elle ne peut se faire qu’avec des sommes ou quantités fixes & déterminées, mais aussi qu’il faut que les choses soient exigibles, au tems où l’on veut en faire la compensation. Voyez Compensation. (A)

LIQUIDER, v. act. (Comm.) fixer à une somme liquide & certaine des prétentions contentieuses.

Liquider des intérêts, c’est calculer à quoi montent les intérêts d’une somme, à proportion du denier & du tems pour lequel ils sont dûs.

Liquider ses affaires, c’est y mettre de l’ordre en payant ses dettes passives, en sollicitant le payement des actives, ou en retirant les fonds qu’on a, & qui sont dispersés dans différentes affaires & entreprises de commerce. Diction. de Com.

LIQUIDITÉ, (Chimie.) mode & degré de raréfaction. Voyez l’article Raréfaction & Rarescibilité, Chimie.

La liquidité est un phénomene proprement physique, puisqu’il est du nombre de ceux qui appartiennent à l’aggrégation, qui sont des affections de l’aggrégé comme tel (voyez à l’article Chimie, p. 411. col. 2. & suiv.) ; mais il est aussi de l’ordre de ceux sur lesquels les notions chimiques répandent le plus grand jour, comme nous l’avons déja observé en général, & du phénomene dont il est ici question, en particulier à l’article Chimie. p. 415. col. 10. Pour nous en tenir à notre objet présent, à la lumiere répandue sur la théorie de la liquidité par la contemplation des phénomenes chimiques ; c’est des événemens ordinaires de la dissolution chimique opérée dans le sein des liquides, que j’ai déduit l’identité de la simple liquidité & de l’ébullition, & par conséquent l’établissement de l’agitation tumultueuse des parties du liquide, des tourbillons, des courans, &c. qui représente l’essence de la liquidité d’une maniere rigoureusement démontrable. Voyez Menstrue, Chimie, & l’article Chimie, aux endroits déja cités.

Mais la considération vraiment chimique de la liquidité, est celle d’après laquelle Becher l’a distinguée en liquidité mercurielle, liquidité aqueuse & liquidité ignée. Ce célebre chimiste appelle liquidité mercurielle, celle qui fait couler le mercure vulgaire,

& qu’il croit pouvoir être procurée à toutes les substances métalliques, d’après sa prétention favorite sur la mercurification. Voyez Mercurification.

La liquidité aqueuse est selon lui, celle qui est propre à l’eau commune, à certains sels, & même à l’huile. Il la spécifie principalement par la propriété qu’ont les liquides de cette classe, de mouiller les mains ou d’être humides, en prenant ce dernier mot dans son sens vulgaire.

Enfin, il appelle liquidité ignée, celles que peuvent acquérir les corps fixes, & chimiquement homogènes par l’action d’un feu violent, ou comme les Chimistes s’expriment encore, celle qui met les corps dans l’état de fusion proprement dite. Voyez Fusion, Chimie.

Quelque prix qu’attachent les vrais chimistes aux notions transcendantes, aux vûes profondes, aux germes féconds de connoissances fondamentales que fournissent les ouvrages de Bécher, & notamment la partie de sa physique souterraine, où il traite de ces trois liquidités, voyez Physic. subter. lib. I. sect. 5. c. iij. il faut convenir cependant qu’il étale dans ce morceau plus de prétentions que de faits, plus de subtilités que de vérités, & qu’il y montre plus de sagacité, de génie, de verve, que d’exactitude.

Je crois qu’on doit substituer à cette distinction, trop peu déterminée & trop peu utile dans la pratique, la distinction suivante qui me paroît précise, réelle & utile.

Je crois donc que la liquidité doit être distinguée en liquidité primitive, immédiate ou propre, & liquidité sécondaire, médiate ou empruntée.

La liquidité primitive est celle qui est immédiatement produite par la chaleur, dont tous les corps homogènes & fixes sont susceptibles, & qui n’est autre chose qu’un degré de raréfaction, ou que ce phénomène physique, dont nous avons parlé au commencement de cet article (voyez l’article Raréfaction & Rarescibilité, Chimie), n’importe quel degré de chaleur soit nécessaire pour la produire dans les différentes especes de corps ; qu’elle ait lieu sous le moindre degré de chaleur connue, comme dans le mercure qui reste coulant sous la température exprimée par le soixante & dixieme degré au-dessous du terme de la congélation du thermometre de Reaumur, qui est ce moindre degré de chaleur, ou l’extrème degré du froid que les hommes ont observé jusqu’à présent (voyez à l’article Froid, Physique, p. 317. col. 1. la table des plus grands degrés de froids observés, &c.), ou bien que comme certaines huiles, celle d’amande douce, par exemple, le froid extrème, c’est-à-dire la moindre chaleur de nos climats suffise pour la rendre liquide ; ou que comme l’eau commune, l’alternative de l’état concret & de l’état de liquidité, arrive communément sous nos yeux ; soit enfin qu’une forte chaleur artificielle soit nécessaire pour la produire, comme dans les substances métalliques, les sels fixes, &c. ou même que l’aptitude à la liquidité soit si foible dans certains corps, qu’ils en ayent passé pour infusibles, & qu’on n’ait découvert la nullité de cette prétendue propriété, qu’en leur faisant essuyer un degré de feu jusqu’alors inconnu, & dont l’effet fluidifiant auquel rien ne résiste, est rapporté à l’article Miroir ardent, voyez cet article. Car de même qu’un grand nombre de corps, tels que toutes les pierres & terres pures, avoient été regardées comme infusibles, avant qu’on eût découvert cet extrème degré de feu ; il y a très grande apparence que le mercure n’a été trouvé jusqu’à présent inconcrescible, que parce qu’on n’a pu l’observer sous un assez foible degré de chaleur ; & que si l’on pouvoit aborder un jour des plages plus froides que celles où on est parvenu, ou l’exposer à un degré de froid artificiel plus fort que celui qu’on