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en matiere de Théologie, ne leur fournissoit qu’un seul mot pour deux grecs οὐσία & ὑπόστασις, & les mettoit hors d’état de distinguer l’essence de l’hypostase. Ils aimerent donc mieux se servir du terme de trois personnes que de celui de trois hypostases. On termina enfin cette dispute dans un synode qui se tint à Alexandrie vers l’an 362, auquel S. Athanase assista ; & depuîs ce tems-là, les Latins ne se sont plus fait un scrupule de dire trois hypostases, ni les Grecs trois personnes. Les Grecs prirent la coûtume de dire μία οὐσία, τρεῖς ὑποστάσεις, une essence, trois subsistances, & les Latins non dans le même sens, una essentia, tres substantiæ, mais, una essentia ou substantia, tres personæ. Ceux qui prenoient le mot d’hypostase dans son ancienne signification, ne pouvoient supporter qu’on admît trois hypostases, c’étoient trois essences divines selon eux, mais ce mot fut expliqué. Ceux qui s’en servoient contre les Sabelliens, déclarerent qu’ils entendoient par-là trois individus, ou trois sujets qui subsistent également, & non pas trois substances ou essences différentes. Dans ce sens, ils reconnoissoient trois hypostases dans une seule essence. D’autres entendoient par essence une nature commune & indéfinie, comme l’humanité à l’égard de tous les hommes en général, & par hypostase une nature singuliere & propre à chaque individu, comme chaque homme en particulier est une modification de la nature ou essence universelle. Mais cette derniere interprétation, que quelques-uns attribuent à S. Basile appliquée à la Divinité, emporteroit le trithéisme ; parce que si les trois Personnes de la Trinité sont trois Hypostases, précisément comme Pierre, Jacques & Jean, il y a manifestement trois Dieux. Diction. de Trévoux.

Hypostase, sedimentum, s. m. (Med.) ce terme grec signifie la partie la plus grossiere de l’urine, qui se dépose ou tend à se déposer au fond du vase, où elle est contenue ; c’est le sédiment de l’urine qui est aussi appellé quelquefois hyposteme, mot qui est par conséquent synonyme d’hypostase. Voyez Urine, Sédiment.

HYPOSTATIQUE, adj. (Théolog.) se dit en Théologie en parlant du mystere de l’incarnation.

L’union hypostatique est celle de la nature divine avec la nature humaine dans la personne du Verbe. Voyez Incarnation.

Les Chimistes & particulierement Paracelse entendent par principe hypostatique les trois élémens chimiques, le sel, le soufre & le mercure, qu’ils appellent tria prima. Voyez Principe & Élément.

HYPOSTROPHE ou HYPOTROPE, (Med.) ce terme grec a deux significations ; ou il est employé pour désigner l’action d’un malade, qui se tourne & se retourne dans son lit d’un côté à l’autre, & c’est le sens dans lequel Hippocrate s’en sert, Epid. lib. VII. &c. ou il est synonyme de récidive, rechûte dans les maladies selon le même auteur, Epid. l. II. Voyez Récidive, Rechûte.

HYPOSYNAPHE, en Musique, est, au rapport du vieux Bacchius, la séparation de deux tétracordes par la consonance de quarte, de sorte que les sons homologues de ces deux tétracordes ont entre eux cinq tons d’intervalle : tels sont les deux tétracordes hypaton & synnemenon. Voyez Système, Tétracorde. (S)

HYPOTENUSE, s. m. terme de Géométrie, c’est le plus grand côté d’un triangle rectangle, ou la soûtendante de l’angle droit. Voyez Triangle.

Ce mot est grec, soûtendante, formé d’ὑπὸ, sous, & τείνω, j’étends. La plûpart des Géometres écrivent hypotenuse par une h : si cette ortographe n’est pas vicieuse, ce mot ne doit pas venir de τείνω, j’étends, mais de τίθημι, je pose. On s’en rapporte là-dessus aux savans.

Dans le triangle KML (Pl. géom. fig. 71.) le côté ML, opposé à l’angle droit K, est appellé hypotenuse.

C’est un théorème fameux en Géométrie que, dans tout triangle rectiligne rectangle KML, le quarré de l’hypotenuse ML est égal aux quarrés des deux autres côtés KL & KM ; on l’appelle le théorème de Pythagore, à cause qu’il en est l’inventeur. Il fut si charmé de cette découverte, qu’il fit, dit-on, une hécatombe aux muses pour les remercier de ce bienfait. Voyez Géométrie.

L’auteur des Institutions de Géométrie, imprimées en 1746 chez Debure l’aîné, observe qu’il est assez difficile de concevoir la raison pour laquelle Pythagore s’est livré à des transports si marqués à l’occasion de cette découverte : car, quand on découvre une nouvelle propriété dans l’étendue, on ne voit pas sur le champ la liaison qu’elle a avec toutes celles que la suite des tems a manifestées : l’usage de cette proposition est effectivement très-étendu, mais Pythagore n’en pouvoit presque rien savoir ; les Mathématiques alors n’étoient pas parvenues à cette fécondité qui leur donne aujourd’hui tant d’éclat & d’excellence : cette découverte même ne nous apprend-elle pas que les élémens de Géométrie ne faisoient que de naître ? Il faut donc, quoique l’histoire n’en dise rien, supposer que Pythagore avoit trouvé auparavant un grand nombre de propositions fondées sur celle-ci, & qui n’attendoient que cette découverte pour être mises elles-mêmes au nombre des grandes découvertes : & avec tout cela, la reconnoissance de Pythagore ne laissera pas de nous paroître extreme ; car il y a bien d’autres vérités dans la Géométrie élémentaire, plus sublimes & plus utiles dont les auteurs n’ont pas fait tant de bruit ; telles sont celles qui enseignent que les trois angles d’un triangle pris ensemble sont égaux à deux angles droits ; que les triangles semblables ont leurs côtés proportionnels ; & celles par où l’on résout tous les problemes de la Trigonométrie, moyennant les sinus.

Au reste, la proposition de Pythagore se déduit très-simplement d’une proposition fort connue dans les élémens ; ce qui va nous fournir une nouvelle démonstration, qui nous paroît beaucoup plus facile que toutes celles dont nous ayons connoissance.

On sait que si d’un point pris hors d’un cercle on tire une tangente & une sécante qui aillent se terminer à la circonférence du cercle, la tangente est moyenne proportionnelle entre la sécante entiere & la partie de cette sécante qui est hors du cercle. Soit donc le triangle rectangle ABC (Pl. de Géom. fig. 23. n°. 1.). Avec l’un des deux côtés CA qui comprennent l’angle droit, décrivons un cercle du centre C, & prolongeons l’hypotenuse BC jusqu’à ce qu’elle rencontre un autre point de la circonférence en D ; supposons maintenant que l’hypotenuse BC = h, le côté AC = CL = D = r ; ainsi BD = h + r & BL = hr soit aussi le côté AB = t. Il s’agit de démontrer que hh = rr + tt.

Démonstration par la proposition précédente BD. ABAB. BL ou h + r.tt. hr ; donc, en faisant le produit des extrèmes & celui des moyens, l’on a hhrr = tt, & par conséquent hh = rr + tt. C. Q. F. D. (E)

De ce que hh = rr + tt, il n’en faut pas conclure que h = r + t ; car la racine quarrée de rr + tt n’est pas r + t, puisque le quarré de r + t est rr + 2rt + tt. Nous faisons cette remarque, parce que nous avons vû plusieurs commençans qui croyoient que la proposition du quarré de l’hypotenuse étoit contradictoire à celle qui prouve que l’hypotenuse est plus petite que la somme des deux côtés : ces deux propositions sont au contraire parfaite-