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Transformation, & la II. partie de mes recherches sur le système du monde, page 284. Or, soit que n soit =0, ou non, la seconde partie de cette intégrale, savoir devient , quand . A l’égard de la premiere partie, elle est évidemment toûjours nulle, quand n=0, puisque n en multiplie tous les termes ; mais quand n n’est pas =0, elle devient, lorsque , , comme la précédente à laquelle elle s’ajoûte pour lors. Ainsi quand n=0, l’attraction n’est que  ; & quand n n’est pas zéro, elle est . Voilà la raison analytique du paradoxe.

IV. Usage du système de la gravitation pour trouver les masses des planetes. Soient deux planetes, dont les masses soient M, m, qui ayent des satellites qui tournent autour d’elles à la distance A, a, & qui fassent leurs révolutions dans les tems T, t, les forces centripetes de ces satellites seront , puisque la gravitation est en raison directe de la masse du corps attirant, & inverse du quarré de la distance : de plus ces forces centripetes seront égales aux forces centrifuges ; & en considérant les orbites des satellites comme des cercles, les forces centrifuges seront entr’elles comme . Voyez Force centrale au mot Central. Donc on aura . Donc si on connoît le rapport de A avec a & celui de T avec t, on connoîtra le rapport de M à m. Par-là on peut connoître le rapport de la masse du Soleil, de Jupiter & de Saturne, à celle de la Terre ; car toutes ces planetes (en y comprenant le Soleil) ont des satellites, dont on connoît le rapport des distances à leurs planetes principales, & les tems des révolutions. V. Planete. (O)

GRAVITÉ, s. f. (Phys. & Méchaniq.) on appelle ainsi parmi les Physiciens la force que le vulgaire appelle pesanteur, & en vertu de laquelle les corps tendent vers la terre.

Il y a cette différence entre pesanteur & gravité, 1°. que gravité ne se dit jamais que de la force ou cause générale qui fait descendre les corps, & que pesanteur se dit quelquefois de l’effet de cette force dans un corps particulier ; ainsi on dit la force de la gravité pousse les corps vers la terre, & la pesanteur du plomb est plus grande que celle du cuivre. 2°. Que pesanteur ne se dit jamais que de la force particuliere qui fait tomber les corps terrestres vers la terre, & que gravité se dit aussi quelquefois dans le système Newtonien, de la force par laquelle un corps quelconque tend vers un autre. Car le principe général de ce système, est que la gravité est une propriété universelle de la matiere. Voyez Gravitation. Mais avant que d’en détailler les preuves, disons un mot des systèmes imaginés par les autres philosophes, pour rendre raison de la gravité.

Le vulgaire est d’abord étonné qu’on cherche une cause à ce phénomene ; il lui paroît tout naturel qu’un corps tombe, dès qu’il n’est pas soûtenu ; sur quoi nous renvoyons le lecteur à l’article Force d’inertie, p. 112. col. j. Nous renvoyons aussi aux mots Accélération & Descente sur les explications que les Péripatéticiens, les Epicuriens, & les Gassendistes donnent de la gravité, & qui ne méritent pas un plus long détail. Mais l’explication de Descartes est trop ingénieuse & trop séduisante au premier coup-d’œil, pour ne pas nous y arrêter.

La matiere subtile, dit ce philosophe, se meut en tourbillon autour de la terre ; en vertu de ce mouvement elle a une force centrifuge, voyez Force & Centrifuge ; en vertu de cette force, toutes les parties de cette matiere tendent à s’éloigner de la terre ; elles doivent donc pousser les corps vers la terre, c’est-à-dire dans un sens contraire à la direction de leur force centrifuge : car par la même raison qu’un fluide qui pese de haut en bas, tend à pousser de bas en-haut les corps qu’on y plonge, & les y pousse en effet, s’ils tendent de haut en-bas avec moins de force que lui ; par cette même raison la matiere du tourbillon ayant une force centrifuge, doit pousser vers la terre les corps qu’on place dans ce tourbillon, & qui n’ont point une pareille force. Voyez Fluide & Hydrodynamique. Ainsi la pesanteur du corps L placé dans la pyramide AEB (fig. 8. Méch.), est égale à la force centrifuge de la matiere du tourbillon dont il occupe la place, multipliée par la masse de cette matiere, moins la force centrifuge du corps L, s’il en a, multipliée par la masse L.

En supposant l’existence des tourbillons que nous croyons insoûtenable, & que presque personne n’admet plus aujourd’hui, voyez Tourbillon, il suit de cette explication qu’il faut, ou que la force centrifuge de la matiere du tourbillon soit beaucoup plus grande que celle du corps L, ou que la matiere subtile soit beaucoup plus dense que ce corps. Or la force centrifuge du corps L vient de sa vîtesse de rotation autour de la terre ; vîtesse qui est à-peu-près égale à celle des points de la surface terrestre. Donc il faudroit dans le premier cas que la matiere du tourbillon eût beaucoup plus de vîtesse de rotation que la terre ; or cela posé, on sentiroit une espece de vent continuel dans le sens de la rotation de la terre, c’est-à-dire d’occident en orient. Dans le second cas, si la matiere du tourbillon a beaucoup plus de densité que les corps terrestres, on devroit sentir dans les mouvemens de bas en-haut & de haut enbas la résistance de cette matiere ; or on sait que cette résistance est insensible, que l’air seul est la source de celle qu’on éprouve, & qu’il n’y en a point dans la machine du vuide, où tous les corps tombent également vîte. Ce n’est pas tout ; supposant, comme on le dit, la force centrifuge de la matiere du tourbillon beaucoup plus grande que celle du corps L, le corps L devroit toûjours avoir une pesanteur sensiblement égale, pourvû qu’il conservât le même volume ; car la force centrifuge qui agiroit sur ce corps, seroit alors la même. Or cela est contraire à l’expérience : car un pié cube d’or pese plus qu’un pié cube de liége. De plus & par la même raison, les corps devroient descendre d’autant plus vîte, abstraction faite de la résistance de l’air, qu’ils auroient moins de masse sous un même volume ; car la force qui les presse étant la même, elle devroit y produire des vîtesses en raison inverse des masses. Or c’est ce que l’expérience dément encore ; car l’expérience prouve que tous les corps descendent également vîte dans le vuide ; d’où il résulte que la gravité agit en raison de la masse, & non du volume du corps.

Une autre objection contre les Cartésiens, c’est que les corps devroient descendre vers l’axe de la terre, & non vers le centre ; de sorte que sous les paralleles à l’équateur ils devroient tomber par des lignes obliques, & non par des lignes à-plomb. Les Cartésiens, il est vrai, ont imaginé différens moyens de répondre à ces difficultés ; mais tous ces moyens sont autant de paralogismes. Je me flate de l’avoir démontré dans mon traité des fluides, art. 409. M. Huyghens a cherché à corriger sur ce point le système de Descartes ; mais la correction est pire que le