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astron. de M. le Monnier. Il n’est pas inutile d’observer ici que la scintillation des étoiles est d’autant moindre, que l’air est moins chargé de vapeurs ; aussi dans les pays où l’air est extrèmement pur, comme dans l’Arabie, les étoiles n’ont point de scintillation. Voyez Etincellement, Scintillation, & l’hist. de l’acad. de 1743, pag. 28.

Catalogue des étoiles. On divise aussi les étoiles par rapport à leur situation, en astérismes ou constellations, qui ne sont autre chose qu’un assemblage de plusieurs étoiles voisines, qu’on considere comme formant quelque figure déterminée, par exemple d’un animal, &c. & qui en prend le nom : cette division est aussi ancienne au moins que le livre de Job, dans lequel il est parlé d’Orion & des Pleyades, &c. Voyez Constellation & Arcturus.

Outre les étoiles qui sont ainsi distinguées en différentes grandeurs ou constellations, il y en a qui ne font partie d’aucune. Celles qui ne sont point rangées en constellations sont nommées informes, ou étoiles sans forme. Les astronomes modernes ont formé de nouvelles constellations de plusieurs étoiles, que les anciens regardoient comme étoiles informes ; comme le cœur de Charles, cor Caroli, qui a été formé en constellation par Halley, & l’écu de Sobieski, scutum Sobiesci, par Hevelius, &c. V. Cœur, Ecu, &c.

Celles qui ne sont point réduites en classes ou grandeurs, sont appellées étoiles nébuleuses ; parce qu’elles ne paroissent que foiblement & en forme de petits nuages brillans. Voyez Nébuleux.

Le nombre des étoiles paroît très-grand & presque infini ; cependant il y a long-tems que les Astronomes ont déterminé le nombre de celles que les yeux peuvent appercevoir, qu’ils ont trouvé beaucoup moindre qu’on ne se l’imagineroit. 125 ans avant J. C. Hipparque fit un catalogue, c’est-à-dire une énumération des étoiles avec la description exacte de leurs grandeurs, situations, longitude, latitude, &c. Ce catalogue est le premier dont nous ayons connoissance ; & Pline ne craint point d’appeller cette entreprise, rem etiam Deo improbam. Hipparque fit monter le nombre des étoiles visibles à 1022 ; elles étoient distribuées en 48 constellations. Ptolomée ajoûta quatre étoiles au catalogue d’Hipparque, & fit monter le nombre jusqu’à 1026. Dans l’année 1437, Ulug Beigh petit-fils de Tamerlan, n’en compte que 1017 dans un catalogue nouveau qu’il fit, ou qu’il fit faire.

Mais dans le seizieme & le dix-septieme siecles, lorsque l’Astronomie commença à refleurir, on trouva que le nombre des étoiles étoit beaucoup plus grand. On ajoûta aux 48 constellations des anciens douze autres nouvelles, qu’on observa vers le pole méridional, & deux autres vers le pole septentrional, &c. Voyez Constellation.

Ticho Brahé publia un catalogue de 777 étoiles, qu’il observa lui-même. Kepler, sur les observations de Ptolomée & autres, en augmenta le nombre jusqu’à 1163 : Riccioli jusqu’à 1468, & Bayer jusqu’à 1725. Halley en ajoûta 373, qu’il observa lui-même vers le pole antarctique : Hevelius, sur les observations de Halley & sur les siennes propres, fit un catalogue de 1888 étoiles ; & depuis, Flamsteed en a fait un contenant 3000 étoiles, qu’il a toutes observées lui-même avec exactitude.

Il est vrai que de ces 3000 étoiles il y en a beaucoup qu’on ne peut appercevoir qu’à-travers un télescope. S’il arrive souvent dans les belles nuits d’hyver qu’on en voye une quantité innombrable, cela vient de ce que notre vûe est trompée par la vivacité de leur éclat ; parce que nous ne les voyons que confusément, & que nous ne les examinons pas par ordre : au lieu que quand on vient à les considérer plus attentivement, & même à les distinguer l’u-

ne après l’autre, il seroit bien difficile d’en trouver qui

n’ayent été marquées dans les cartes ou les catalogues d’Hevelius ou de Flamsteed. Bien plus, si on a devant les yeux un de ces grands globes, semblables à ceux de Blaen, & qu’on le compare avec le ciel ; quelque excellente vûe que l’on ait, on n’en pourra guere découvrir, même parmi les plus petites étoiles, qui n’ait été placée sur la surface de ce globe. Cependant le nombre des étoiles est presque infini. Riccioli (ce qui est peut-être exagéré) avance dans son almageste, que quand quelqu’un diroit qu’il y en a plus de 20000 fois 20000, il ne diroit rien que de probable.

En effet un bon télescope dirigé vers un point quelconque du ciel, en découvre une multitude immense, que l’œil seul ne peut pas appercevoir ; particulierement dans la voie lactée, qui pourroit bien n’être autre chose qu’un assemblage d’étoiles trop éloignées pour être vûes séparément ; mais arrangées si prés les unes des autres, qu’elles donnent une apparence lumineuse à cette partie des cieux qu’elles occupent. Voyez Galaxie & Voix lactée.

Dans la seule constellation des Pleyades, au lieu de six ou sept étoiles qu’apperçoit l’œil le plus perçant, le docteur Hooke avec un télescope de douze piés de long, en a apperçû 78 ; & avec des verres plus grands, une quantité encore plus grande de différentes grandeurs. Le P. Rheita capucin, assûre qu’il a observé plus de deux mille étoiles dans la seule constellation d’Orion ; il est vrai que ce dernier fait n’a point été confirmé. Le même auteur en a trouvé 188 dans les Pleyades ; & Huyghens considérant l’étoile qui est au milieu de l’épée d’Orion, a trouvé qu’au lieu d’une il y en avoit douze. Galilée en a trouvé 80 dans l’épée d’Orion, 21 dans l’étoile nébuleuse de sa tête, & 36 dans l’étoile nébuleuse nommée Præsepe.

En 1603, Jean Bayer astrologue allemand, publia des cartes célestes gravées ou toutes les constellations sont dessinées avec les étoiles visibles, dont chacune est composée. Il désigna ces étoiles par des lettres greques, appellant l’une α, l’autre β, &c. ce qui abrege les dénominations : ainsi on dit l’étoile η de la grande ourse, au lieu de l’étoile de la seconde grandeur, qui est à l’extrémité de la queue de la grande ourse, &c.

Les changemens qu’ont éprouvé les étoiles sont très-considérables ; ce qui renverse l’opinion des anciens, qui soûtenoient que les cieux & les corps célestes étoient incapables d’aucun changement ; que leur matiere étoit permanente & éternelle, infiniment plus dure que le diamant, & n’étoit point susceptible d’une autre forme. En effet jusqu’au tems d’Aristote & même 200 ans après, on n’avoit encore observé aucun changement.

Le premier fut remarqué l’an 125 avant J. C. Hipparque s’apperçut qu’il paroissoit une nouvelle étoile ; ce qui l’engagea à faire son catalogue des étoiles, dont nous avons parlé, afin que la postérité pût appercevoir les changemens de cette espece qui pourroient arriver à l’avenir.

En 1572, Ticho Brahé observa encore une nouvelle étoile dans Cassiopée, qui lui donna pareillement occasion de faire son nouveau catalogue. Sa grandeur d’abord surpassoit celle de Sirius & de la luisante de la Lyre, qui sont les plus grandes de nos étoiles ; elle égaloit même celle de Vénus quand elle est le plus près de la Terre, & on l’apperçut en plein jour : elle parut pendant seize mois ; dans les derniers tems elle commença à décroître, & enfin disparut tout-à-fait sans avoir changé de place pendant tout le tems qu’elle dura.

Leovicius parle d’une autre étoile qui parut dans la même constellation vers l’an 945, & ressembloit à