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moindre quantité de ce même côté : le tout pour gêner & pour contraindre la partie tuméfiée, & pour ne pas l’offenser par la brochure ; ce qui réussit quelquefois, pourvû que les oignons ne proviennent pas d’une tumeur formée dans les parties molles.

Ferrure du pié comble. Voyez Sole. Laissez, en parant le pié, autant de talon que vous le pourrez, & tachez de conserver à cette partie toute sa force : blanchissez la sole : ne coupez point avec le boutoir, la pince ni les quartiers ; mais servez-vous à cet effet du rogne-pié : forgez un fer extrèmement fort, à commencer depuis la voûte jusqu’à la partie interne des deux éponges, le dehors en étant extrèmement mince ; qu’il soit très-couvert, sans néanmoins que les éponges puissent gêner la fourchette : étampez-le assez maigre, & sur-tout en pince : voûtez-le à proportion du pié, de maniere qu’il ne porte pas absolument sur la sole, mais qu’il la contraigne un peu : placez-le en talon le plus qu’il vous sera possible, sans qu’il y garnisse trop, & qu’il s’avance : brochez au surplus assez avant.

Taillez autant de talon que vous le pourrez, parce que ces piés manquent ordinairement par cette partie. On ne doit que blanchir la sole, parce que dès que toute sa force sera conservée, elle résistera davantage, non-seulement à celle de l’impulsion des liqueurs, mais encore à l’impression du fer, qui doit la gêner & la contraindre : vous le forgerez très-fort sur la voûte, dès-lors il ne pliera point. Cette précaution est d’autant meilleure, que ces sortes de piés travaillent beaucoup sur cette partie ; & que si le fer plioit, il les élargiroit, & en emporteroit tout l’ongle. Il ne sera pas aussi épais en-dehors, parce qu’il seroit trop pesant. Les étampures seront maigres & bien en pince, attendu qu’il faut nécessairement rogner pour donner la forme au pié. Vous placerez le fer beaucoup en talon, autrement le pié seroit trop long : vous brocherez avant, pour que l’ongle, que vous devez d’ailleurs rogner, puisse soûtenir le fer : vous ferrerez plus court que long, dans la crainte que le talon ne s’use davantage, & le cheval en marchera plus à son aise : enfin voûtez proportionnément le fer, parce que la sole étant contrainte. elle cessera d’avoir une nourriture aussi abondante ; & que celle qui s’y portoit y affluant en moindre quantité, & se distribuant sur les autres parties, la difformité sera réparée insensiblement & avec le tems.

Tel est le juste milieu que l’on doit prendre. Je ne proscris point entierement la méthode des fers voûtés, pourvû que la contournure ne soit point celle que les Marechaux leur donnent ordinairement ; contournure si défectueuse, qu’elle met enfin le cheval hors de service : car ces sortes de fers gênant l’ongle par leur bord extérieur, renvoyent toute la nourriture à la sole, dont le volume augmente sans cesse, & qui croît & saillit en-dehors de plus en plus, parce que d’ailleurs elle n’est en aucune façon contrainte & resserrée.

Ferrure d’un pié gras ou foible, d’un pié trop long en pince & en talon ; & d’un pié trop petit. Parez le pié gras à l’ordinaire ; que le fer que vous y ajusterez n’ait rien de particulier, & qu’il soit étampé plus maigre, dans la crainte de serrer ou de pénétrer le vif en brochant.

Quant au pié trop long en pince, rognez-le : à l’égard du pié trop long en talon, abattez cette partie, & que les fers n’y avancent point trop : pour les piés trop petits, votre fer débordera tout-autour, à l’effet de faciliter l’extension de l’ongle.

Ferrure d’un cheval arqué, brassicourt, droit sur ses membres, bouté, rampin. Voyez Jambe. Pour obvier à ces défauts essentiels, on doit considérablement abattre les talons ; & outre ce grand retranchement, vous y ajusterez un fer dont les éponges seront beau-

coup plus minces que la pince : étampez-le encore

plus en cette partie qu’en talon, & ferrez extrèmement court.

Par le fort abattement des talons, vous parerez au vice principal qui résulte du défaut d’extension, & de la retraction même du tendon. Le fer sera beaucoup moins épais en talon qu’en pince, toûjours dans la même intention ; & pour ne pas détruire par le fer les effets qui doivent suivre la parure, vous étamperez plus en pince qu’en talon, parce que le talon étant fort abattu, les lames pourroient intéresser les parties molles ; & vous ferrerez extrèmement court, afin que le talon porte toûjours plus bas. Si l’animal est bouté, vous lui mettrez ensuite de la même parure, un fer de mulet (voyez Ferrure des Mulets), relevant plus ou moins en pince pour l’asseoir toûjours davantage sur les talons, pour contraindre la partie à rentrer sur la ligne qu’elle a quittée dans ce cas, & pour remettre le cheval dans sa position naturelle.

Il est cependant important d’observer qu’une extension trop subite des tendons retirés, causeroit des douleurs inévitables à l’animal, & occasionneroit infailliblement une claudication : aussi ne doit-on l’asseoir ainsi qu’insensiblement, par degrés, & en facilitant le jeu de cette partie par des applications d’herbes émollientes, telles que les feuilles de mauve, guimauve, & de bouillon-blanc, que l’on fait bouillir jusqu’à ce qu’elles acquierent une consistance palpeuse. On les place sur la partie postérieure du canon, depuis le genou jusqu’au boulet ; on les y arrête par le moyen d’une ligature ou d’un bandage (voyez Ligature, Pansement, Extension), & on les humecte plusieurs fois par jour avec ce qui reste de la décoction de ces mêmes plantes.

Ferrure des chevaux qui se coupent, & qui forgent. Voyez Forger. Nous disons qu’un cheval s’entretaille ou se coupe, lorsqu’en cheminant il touche sans cesse & à chaque pas avec le pié qu’il meut, le boulet de la jambe qui est à terre ; de maniere qu’à l’endroit frappé le poil paroît totalement enlevé, & qu’il résulte souvent de ce heurt ou de ce frotement continuel, une plaie plus ou moins profonde, que l’on apperçoit aisément à la partie latérale interne du boulet, & d’autres fois derriere le boulet même, surtout lorsque l’animal a été vivement troté sur des cercles ou à la longe. Voyez Trot & Longe.

Il s’entre-taille plus communément des piés de derriere que de ceux de devant ; souvent il ne se coupe que d’un pié, quelquefois de deux, d’autres fois encore de tous les quatre ensemble.

Quelle que soit la cause du défaut dont il est question, on peut se flater de le détruire par la voie de la ferrure, à moins que la foiblesse de l’animal ne soit telle, qu’il soit absolument à rejetter. Ce n’est pas que je prétende que la ferrure donne de la force, change la conformation du cheval, s’oppose à sa lassitude, diminue sa paresse, & lui forme l’habitude de cheminer ; mais elle l’oblige & le contraint à une situation & à une action qui éloignent le port de son pié du boulet qui seroit atteint & heurté.

Les chevaux peuvent se couper aux talons ou en pince : dans le premier cas, si après avoir abattu le quartier de dehors jusqu’au vif, & laissé subsister le quartier de dedans dans son entier, vous n’avez pû remplir votre objet, ajustez un fer à la turque, c’est-à-dire un fer dont la branche de dedans ait le triple ou le quadruple d’épaisseur de plus que celle de dehors (voyez Fer), & n’étampez point à cette branche : alors le quartier de dedans étant beaucoup relevé, & l’animal reposant beaucoup plus sur celui de dehors, ce qui change la situation de sa jambe & le port de son pié, il ne se coupe plus. J’ai au contraire éprouvé plusieurs fois aussi, qu’en mettant la