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Live, majestati populi romani submisit. Ce fut cette sage conduite, que ses successeurs ne suivirent pas toûjours, qui fit donner à ce grand homme le nom de Publicola ; mais ce fut moins pour mériter ce titre glorieux que pour attacher plus étroitement le peuple à la défense de la liberté, qu’il relâcha de son autorité. Nous lisons dans Pline, l. VII. que lorsque Pompée entra dans la maison de Posidonius, fasces litterarum januæ submisit, pour faire honneur au philosophe, aux talens & aux sciences.

Ces généralités qu’on trouve par-tout, peuvent ici suffire ; voyez-en les preuves ou de plus grands détails dans Tite-Live, Denys d’Halicarnasse, lib. III. cap. lxxxjv. Florus, liv. I. c. 5. Silius Italicus, liv. VIII. v. 486. Plutarque, Censorin, de die nat. Rosin, antiq. rom. lib. VII. cap. iij. & xjx. Rhodiginus, lib. XII. cap. vij. Godwin, anthol. rom. lib. III. c. ij. sect. 2. César Paschal, de coronis ; Middleton, of roman senate, &c. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Faisceaux d’Armes ; c’est, dans l’Art militaire, un nombre de fusils dressés la crosse en-bas & le bout en-haut, rangés en rond autour d’un piquet principal, sur lequel sont des traverses pour arrêter le bout du fusil. On les garantit de la pluie en les couvrant d’un manteau d’armes. Voyez Manteau d’Armes.

Lorsque l’infanterie est campée, chaque compagnie a son faisceau d’armes. Ces faisceaux doivent être dans le même alignement, & à dix pas de trois piés, c’est-à-dire à cinq toises en-avant du front de bandiere. Voyez Front de bandiere. (P)

Faisceau optique, (Optique.) assemblage d’une infinité de rayons de lumiere qui partent de chaque point d’un objet éclairé, & s’étendent en tout sens. Alors ceux d’entre ces rayons qui tombent sur la portion de la cornée qui répond à la prunelle, feront un cone dont la pointe est dans l’objet, & la base sur la cornée ; ainsi autant de points dans l’objet éclairé, autant de cones de rayons réfléchis : or c’est l’assemblage des différens faisceaux optiques de rayons de lumiere, qui peint l’image des objets renversés dans le fond de l’œil. Voyez Rayon, Vision, &c. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Faisceau, (Pharmacie.) est un terme dont on se sert pour exprimer une certaine quantité d’herbes.

Par faisceau on entend autant d’herbes qu’un homme peut en porter sur son dos, depuis les épaules jusqu’au sommet des hanches ; d’autres le prennent pour ce qu’il en peut serrer sous un seul bras. Au lieu de faisceau les Medecins écrivent par abbréviation, fasc.

On ne détermine que très-rarement la quantité des plantes par cette mesure, qui est fort peu exacte, comme on voit. (b)

Faisceaux, (Jardinage.) sont composés de plusieurs canaux en forme de réseaux, servant à porter le suc nourricier dans toutes les parties de l’arbre. (K)

* FAISEUR, ou celui qui fait (voyez Fait), s. m. Gramm. Dans notre langue on ajoûte après ce substantif la sorte d’ouvrage, lorsqu’on ne peut désigner par un seul mot l’ouvrage & l’ouvrier, ou lorsqu’on affecte de les séparer par mépris : dans le premier cas on dit un faiseur d’instrumens de musique, un faiseur d’instrumens de mathématiques, un faiseur de métier à bas, un faiseur de bas au métier, &c. & dans le second, un faiseur de vers, un faiseur de phrases, &c. C’est ainsi que l’incapacité ou l’envie réussit à donner un air méchanique à la Poësie & à l’Art oratoire, & à avilir aux yeux des imbécilles, l’homme de génie qui s’en occupe.

FAISSES, s. m. pl. en terme de Vannier ; c’est un cordon de plusieurs brins d’osier que l’on fait de dis-

tance en distance dans les ouvrages pleins ou à jour, pour leur donner plus de force.

FAISSER, v. act. en terme de Vannerie ; c’est faire un petit cordon d’un ou plusieurs brins d’osier dans un ouvrage à jour.

FAISSERIE, s. f. en terme de Vannier ; c’est le nom de la Vannerie proprement dite : elle s’étend à tous les ouvrages à jour qui se font de toutes sortes d’osier.

* FAIT, s. m. Voilà un de ces termes qu’il est difficile de définir : dire qu’il s’employe dans toutes les circonstances connues où une chose en général a passé de l’état de possibilité à l’état d’existence, ce n’est pas se rendre plus clair.

On peut distribuer les faits en trois classes ; les actes de la divinité, les phénomenes de la nature, & les actions des hommes. Les premiers appartiennent à la Théologie, les seconds à la Philosophie, & les autres à l’Histoire proprement dite. Tous sont également sujets à la critique. Voyez sur les actes de la divinité, les articles Certitude & Miracle ; sur les phénomenes de la nature, les articles Phénomene, Observation, Expérimental & Physique ; & sur les actions des hommes, les articles Histoire, Critique, Erudition, &c.

On considéreroit encore les faits sous deux points de vûe très-généraux : ou les faits sont naturels, ou ils sont surnaturels ; ou nous en avons été les témoins oculaires, ou ils nous ont été transmis par la tradition, par l’histoire & tous ses monumens.

Lorsqu’un fait s’est passé sous nos yeux, & que nous avons pris toutes les précautions possibles pour ne pas nous tromper nous-mêmes, & pour n’être point trompés par les autres, nous avons toute la certitude que la nature du fait peut comporter. Mais cette persuasion a sa latitude ; ses degrés & sa force correspondent à toute la variété des circonstances du fait, & des qualités personnelles du témoin oculaire. La certitude alors fort grande en elle-même, l’est cependant d’autant plus que l’homme est plus crédule, & le fait plus simple & plus ordinaire ; ou d’autant moins que l’homme est plus circonspect, & le fait plus extraordinaire & plus compliqué. En un mot qu’est-ce qui dispose les hommes à croire, sinon leur organisation & leurs lumieres ? D’où tireront-ils la certitude d’avoir pris toutes les précautions nécessaires contr’eux-mêmes & contre les autres, si ce n’est de la nature du fait ?

Les précautions à prendre contre les autres, sont infinies en nombre, comme les faits dont nous avons à juger : celles qui nous concernent personnellement, se réduisent à se méfier de ses lumieres naturelles & acquises, de ses passions, de ses préjugés & de ses sens.

Si le fait nous est transmis par l’histoire ou par la tradition, nous n’avons qu’une regle pour en juger ; l’application peut en être difficile, mais la regle est sûre ; l’expérience des siecles passés, & la nôtre. S’en tenir à son coup-d’œil, ce seroit s’exposer souvent à l’erreur ; car combien de faits qui sont vrais, quoique nous soyons naturellement disposés à les regarder comme faux ? & combien d’autres qui sont faux, quoiqu’à ne consulter que le cours ordinaire des évenemens, nous ayons le penchant le plus fort à les prendre pour vrais ?

Pour éviter l’erreur, nous nous représenterons l’histoire de tous les tems & la tradition chez tous les peuples, sous l’emblème de vieillards qui ont été exceptés de la loi générale qui a borné notre vie à un petit nombre d’années, & que nous allons interroger sur des transactions dont nous ne pouvons connoître la vérité que par eux. Quelque respect que nous ayons pour leurs récits, nous nous garderons bien