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haut-justicier, mais hors de l’église, le haut-justicier est préféré au patron : c’est pourquoi il a seul droit de litre au-dehors de l’église ; & quand la procession sort de l’église, il a droit d’y prendre le pas sur le patron.

Les seigneurs qui n’ont la haute-justice que par engagement, ne joüissent pas des droits honorifiques proprement dits, mais seulement des moindres honneurs & simples, à moins que le roi n’ait engagé nommément les droits honorifiques : car l’engagiste n’est regardé que comme un seigneur temporaire, qui peut être dépossédé d’un moment à l’autre par la voie du rachat.

Il ne suffit pas non plus pour joüir des droits honorifiques d’avoir une haute-justice dans la paroisse, il faut être seigneur haut-justicier du terrein sur lequel l’église est bâtie.

La femme du patron & celle du haut-justicier, participent aux droits honorifiques dont joüissent leurs maris.

Les patrons & les seigneurs hauts-justiciers joüissent encore de quelques distinctions dans les églises ; comme d’y avoir les premiers & avec distinction l’eau-benite, d’aller les premiers à l’offrande recevoir le baiser de paix & le pain beni, de marcher les premiers à la procession : mais tous ces honneurs ne font pas partie des grands droits honorifiques, qui sont les seuls honneurs majeurs, droits honorifiques proprement dits ; ces distinctions ne sont que de simples préséances ou préférences, que les auteurs appellent les moindres honneurs de l’église, honneurs que les patrons & les hauts-justiciers reçoivent à la vérité les premiers, mais dont ils ne joüissent pas seuls ; attendu que les personnes constituées en dignité, ou qui peuvent mériter quelque considération, telles que les seigneurs moyens & bas-justiciers, les seigneurs de fiefs, & gentilshommes, les officiers royaux, les commensaux de la maison du roi, & autres personnes qualifiées, participent aussi à ces mêmes honneurs après les patrons & les hauts-justiciers, chacun selon leur dignité ou rang, titres & possession : au lieu que les vrais droits honorifiques, tels que le droit de litre, les prieres nominales, l’encens, le droit de banc & de sépulture dans le chœur, n’appartiennent qu’au patron & au seigneur haut-justicier, & ne s’étendent à aucune autre personne, quelque qualifiée qu’elle puisse être.

On peut voir ce qui concerne chacun des droits honorifiques en particulier, aux mots Eau-benite, Banc, Encens, Litre, Ceinture funebre, Pain-beni, Patron, Patronage, Prieres nominales, Procession, Sépulture.

Voyez aussi sur cette matiere, le tr. des droits honorifiques, par Maréchal ; les observations sur le droit des patrons & des seigneurs, par M. Guyot ; Loyseau, tr. des seigneuries, ch. xj. Bacquet, des dr. de justice, ch. xx. Charondas, liv. IV. rep. 99. Tournet, lettre P. arr. 5 ; la bibliotheq. de Jovet ; Coquille, tome I. pag. 251. Leprestre, cent. 2. ch. xxxvj. Chenu, en son tr. des off. tit. 40. Basnage, sur la coût. de Norm. art. 69. & 140. le recueil d’arrêts de M. Froland, les définit. canon. & la biblioth. canon. les lois ecclésiast. d’Héricourt ; les mat. bénéf. de Fuet ; les mémoires du clergé, I. édit. tom. II. part. II. chap. v. le recueil de Borjon des bénéfices ; les arrêtés de M. le premier président de Lamoignon, tit. des dr. honorifiq. les résolutions de plusieurs cas de consciences, & des plus importantes questions du barreau, &c. par la Paluelle, part. II. On peut voir aussi les traités du droit de patronage, ou qui ont rapport à cette matiere, comme celui de Chassaneus, catalogus gloriæ mundi ; le tr. des dr. honorif. & utiles des patrons & curés primitifs, par M. Duperray ; & les tr. du droit. de patronage de de Roye, & autres auteurs, & ceux de Simon & de Ferriere. (A)

Droits immobiliers, sont ceux qui sont réputés immeubles par fiction en vertu de la loi ; comme les offices, les rentes, dans les coûtumes où elles sont réputées immeubles.

Droits incorporels, sont ceux quæ in jure tantùm consistunt ; ils sont opposés aux choses corporelles, que l’on peut toucher manuellement. Les droits incorporels sont de deux sortes : les uns mobiliers, comme les obligations & les actions, les deniers stipulés propres ; les autres qui sont réputés immobiliers, tels que les offices, les servitudes, les cens, rentes, champarts, & autres droits seigneuriaux, soit casuels, ou dont la prestation est annuelle, &c. (A)

Droits litigieux, sont ceux sur lesquels il y a actuellement quelque contestation pendante & indécise, ou qui sont par eux-mêmes douteux & embarrassés, de maniere qu’il y a lieu de s’attendre à essuyer quelque contestation avant d’en pouvoir joüir : tels sont par exemple, des créances mal établies, ou dont la liquidation dépend de comptes de société ou communauté fort compliqués ; tels sont aussi les droits successifs, lorsque la liquidation de ces droits dépend de plusieurs questions douteuses.

Les cessionnaires de droits litigieux sont regardés d’un œil défavorable, parce qu’ils acquierent ordinairement à vil prix des droits embarrassés ; & que pour en tirer du profit, ils vexent les débiteurs à force de poursuite. Ces sortes de cessions sont sur-tout odieuses, lorsque l’acquéreur est un officier de justice que l’on présume se prévaloir de la connoissance que sa qualité lui donne, pour traiter plus avantageusement de tels droits, & pour mieux parvenir au recouvrement : on ne permet pas non plus qu’un étranger vienne au moyen d’une cession de droits successifs, prendre connoissance du secret des familles.

C’est sur ces différentes considérations que sont fondées les lois per diversas & ab anastasio, au code mandati ; lois qui sont fameuses dans cette matiere : c’est pourquoi nous en ferons ici l’analyse.

La premiere de ces lois dit : que des plaideurs de profession prennent des cessions d’actions ; que si c’étoient des droits incontestables, ceux auxquels ils appartiennent les poursuivroient eux-mêmes. L’empereur Anastase, de qui est cette loi, défend qu’à l’avenir on fasse de tels transports, & ordonne que ceux qui en auront pris, ne seront remboursés que du véritable prix qu’ils auront remboursé, quand même le transport feroit mention d’une plus grande somme.

Cette loi excepte néanmoins quatre cas différens.

1°. Elle permet à un co-héritier de céder à l’autre sa part des dettes actives de la succession.

2°. Elle permet aussi à tout créancier ou autre, qui possede la chose d’autrui, de prendre un transport de plus grands droits en payement de son dû, ou pour la sûreté de la dette.

3°. Elle autorise aussi les co-légataires & fidéicommissaires à se faire entre eux des cessions de leur part des dettes actives qui leur ont été laissées en commun.

4°. Cette loi exceptoit aussi purement & simplement, le cas de la donation d’une dette litigieuse.

La loi ab anastasio qui suit immédiatement, & qui est de l’empereur Justinien ; après avoir d’abord rappellé la teneur de la loi précédente, dit que les plaideurs trouvoient moyen d’éluder cette loi, en prenant une partie de la dette à titre de vente, & l’autre partie par forme de donation simulée. Justinien suppléant ce qui manquoit à la constitution d’Anastase, défend que l’on use à l’avenir de pareils détours ; il permet les donations pures & simples de