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de Louis XIV. l’origine du mot dragonade, & des détails sur cette exécution, que la nation condamne unanimement aujourd’hui. En effet, toute persécution est contre le but de la bonne politique, & ce qui n’est pas moins important, contre la doctrine, contre la morale de la religion, qui ne respire que douceur, que charité, que miséricorde. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

DRAGONÉ, adj. terme de Blason : un lion dragoné, est celui dont la moitié supérieure ressemble à un lion, & l’autre se termine en queue de dragon. Dragoné se dit de tout autre animal.

Bretigny, d’or au lion dragoné de gueules, armé, lampassé, & couronné d’or.

DRAGUE, s. f. (Marine.) on dit drague de canon, c’est un gros cordage dont se servent les canonniers sur les vaisseaux, pour arrêter le recul des pieces quand elles tirent.

Drague d’avirons, c’est un paquet de trois avirons.

La drague est encore un gros cordage, dont on se sert pour chercher une ancre perdue au fond de la mer. Voyez Draguer. (Z)

* Drague, (Pêche.) espece de filet qu’on employe à la pêche du poisson plat, & sur-tout des huîtres : alors la partie inférieure de la chausse est armée d’un couteau de fer, qui détache l’huître du fond ; & tout le filet est traîné par un bateau, sur lequel le cablot ou le funin de la drague est amarré. Voyez les articles Chausse & Chalut, qui sont des sortes de dragues.

Les dragues de fer qui sont à l’usage des pêcheurs de l’amirauté de Vannes, avec lesquelles ils pêchent les huîtres, tant à la mer qu’à l’ouverture de la baie, & qui servent aux grands bateaux pêcheurs chasse-marée, après que la pêche de la sardine a cessé, n’ont qu’un seul couteau, avec un sac quarré qu’un bâton rond tient ouvert ; ce bâton est d’un pié plus long que l’ouverture ou que la monture de fer de la drague. Il arrive par ce moyen que le sac reçoit jusqu’au fond, tout ce qui est détaché par le couteau. Voyez la drague dans nos planches de Pêche, Planche III. figure 2.

Drague, (Brasserie.) c’est l’orge ou autre grain cuit, qui demeure dans le brassin après qu’on en a tiré la biere. Elle peut servir de nourriture aux cochons, aux vaches, & même aux chevaux.

Drague, (Hydraul.) est une grande pelle de fer, emmanchée d’une longue perche, dont les bords sont relevés par trois côtés, pour arrêter le sable ou les ordures qui se trouvent en curant un puits ou une cîterne. Cette pelle est percée au fond de plusieurs trous, par lesquels elle donne passage à l’eau, & on l’a faite un peu tranchante par-devant, afin de fouiller & enlever le limon. (K)

Drague pour signer, en terme de Vitrier, c’est-à-dire pour marquer le verre sur le carreau ou sur la table, est un poil de chevre long d’un doigt, attaché dans une plume avec un manche comme un pinceau : on le trempe dans le blanc broyé pour marquer les pieces.

DRAGUER l’ancre, (Marine.) c’est chercher une ancre perdue dans la mer, avec un gros cordage qu’on appelle drague. On attache cette drague par ses deux bouts aux côtés de deux chaloupes qui se présentent le flanc, & qui sont à quelques distances l’une de l’autre. Au milieu de la drague sont suspendus des boulets de canon, ou quelqu’autre chose qui pese beaucoup, ce qui la fait enfoncer jusqu’au fond de la mer ; ensorte que les deux chaloupes voguant en-avant, entraînent la drague qui rase le fond, ce qui fait que si elle rencontre l’ancre que l’on cherche, elle l’accroche, & fait ainsi connoître l’endroit où elle est. (Z)

Draguer, v. act. terme de Riviere, c’est nettoyer le fond d’un canal, ou d’une riviere, ou d’un égoût

avec la pelle ou bêche de fer, qui s’appelle drague Voyez Drague.

DRAGUIGNAN, (Géog. mod.) ville de France, en Provence, sur la riviere de Pis. Longit. 24. 14. lat. 43. 34.

DRAMATIQUE, adj. m. f. en Poésie, épithete que l’on donne aux piéces écrites pour le théatre, & aux poëmes dont le sujet est mis en action, pour les distinguer du poëme épique, qui consiste partie en actions & partie en récit. Voyez Théatre, Drame, Poeme.

Pour les lois & le style du poëme dramatique, voyez Unité, Action, Caractere, Fable, Style, Comédie, Tragédie, &c. (G)

DRAME, s. m. (Belles-Lettres.) piece ou poëme composé pour le théatre. Ce mot est tiré du grec drama, que les Latins ont rendu par actus, qui chez eux ne convient qu’à une partie de la piece ; au lieu que le drama des Grecs convient à toute une piece de théatre, parce que litteralement il signifie action, & que les pieces de théatre sont des actions ou des imitations d’action.

Un drame, ou comme on dit communément une piece de théatre, est un ouvrage en prose ou en vers, qui ne consiste pas dans un simple récit comme le poëme épique, mais dans la représentation d’une action. Nous disons ouvrage, & non pas poëme ; car il y a d’excellentes comédies en prose, qui, si on les considere relativement à l’ordonnance de la fable, aux caracteres, à l’unité des tems, de lieu, & d’action, sont exactement conformes aux regles, auxquelles cependant on n’a pas donné le nom de poëme, parce qu’elles ne sont pas écrites en vers.

Les anciens comprenoient sous le nom de drame, la tragédie, la comédie, & la satyre, espece de spectacle moitié sérieux moitié boufon. Voyez Comédie, Satyre, & Tragédie.

Parmi nous les différentes especes de drame sont la tragédie, la comédie, la pastorale, les opéra, soit tragédie soit ballet, & la farce. On nommeroit peut-être plus exactement ces deux dernieres especes spectacles, car les véritables regles du drame y sont pour l’ordinaire ou violées ou négligées. Voy. Tragédie, Comédie, Farce, Opéra, &c.

Quelques critiques ont voulu restraindre le nom de drame à la tragédie seule ; mais on a démontré contr’eux, que ce titre ne convenoit pas moins à la comédie, qui est aussi bien que la premiere la représentation d’une action ; toute la différence naît du choix des sujets, du but que se proposent l’une & l’autre, & de la diction, qui doit être plus noble dans la tragédie ; du reste, ordonnance, unité, intrigue, épisode, dénouement, tout leur est commun.

Le cantique des cantiques & le livre de Job ont été regardés par quelques auteurs comme des drames ; mais outre qu’il n’est rien moins que certain que les Hébreux ayent connu cette espece de poëme, ces ouvrages tiennent moins de la nature du drame que de celle du simple dialogue.

Les principales parties du drame selon la division des anciens, sont la protase, l’épitase, la catastase, & la catastrophe ; & ils comptoient pour parties accessoires l’argument ou le sommaire, le chœur, le mime, la satyre ou l’atellane, qui étoient comme la petite piece, & enfin l’épilogue où un acteur marquoit aux spectateurs le fruit qu’ils devoient retirer de la piece, ou leur donnoit quelqu’autre avertissement de la part de l’auteur. Les modernes divisent les pieces de théâtre, quant aux parties essentielles, en exposition du sujet, qui répond à la protase des anciens ; intrigue, c’est l’épitase ; nœud, qui équivaut à la catastase, & qui n’est point distinct de l’intrigue, puisque c’est lui qui la constitue ; & dénouement ou catastrophe. Quant aux parties acci-