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procurer l’extraction des corps étrangers, arrêtés ou enclavés dans une partie. Pour prouver ce que j’avance, je vais transcrire à ce sujet une observation fort curieuse, rapportée dans Dionis, & qui servira d’exemple.

« Un homme âgé de 27 ans, ayant reçu un violent coup de couteau sur la partie antérieure de la quatrieme des vraies côtes, fut pansé très-simplement pendant les trois premiers jours ; mais une toux extraordinaire & un crachement abondant de sang étant survenus, on eut recours à M. Gerard. Il reconnut que les accidens dépendoient de la présence d’une portion de la lame du couteau qui traversoit la côte, & dont la pointe excédoit d’environ six lignes dans la cavité de la poitrine. Ce corps étranger débordoit si peu l’extérieur de la côte, & y étoit tellement fixé, qu’il ne fut pas possible de le tirer avec différentes pincettes ou tenailles, ni même de l’ébranler au moyen des ciseaux & du marteau de plomb ; & quoique dans un cas aussi pressant il semble qu’on n’eût d’autre parti à prendre, que de scier ou de couper la côte, M. Gerard crut avant d’en venir à cette extrémité, devoir tenter de dégager ce corps étranger, en le poussant de dedans en-dehors.

» Dans ce dessein il alla choisir un dé dont les tailleurs se servent pour coudre ; il en prit par préférence un de fer, un peu épais, & fermé par le bout ; il y fit creuser une petite gouttiere pour y mieux fixer la pointe du couteau ; & ayant suffisamment assujetti ce dé sur son doigt index, il porta ce doigt ainsi armé dans la cavité de la poitrine, & réussit par ce moyen à chasser le morceau de couteau, en le poussant avec force de dedans en-dehors.

» Ayant tiré le corps étranger, il quitta le dé & remit le doigt index à nud dans la poitrine, pour examiner si le couteau en traversant la côte, ne l’auroit point fait éclater en-dedans ; il trouva un éclat capable de piquer, & qui tenoit trop fortement au corps de la côte pour qu’on pût l’en séparer entierement : il prit donc le parti de l’en rapprocher, & pour le tenir au niveau de la côte, il se servit du doigt qui étoit dans la poitrine pour conduire une aiguille courbe enfilée d’un fil ciré. Il fit sortir cette aiguille au-dessus de la côte, qui par ce moyen se trouva embrassée par le fil en-dehors de la poitrine sur une compresse épaisse d’un pouce, & serra assez le nœud pour appliquer exactement & remettre au niveau l’esquille saillante.

» On sent aisément que l’effet d’une manœuvre aussi ingénieuse a dû être non-seulement la cessation des accidens, mais encore une prompte guérison. »

Je n’ai pas parlé des médicamens attractifs pour tirer des plaies les corps étrangers, parce qu’il n’y a point de tels remedes. Je sai bien qu’il se trouve des auteurs qui en distinguent de deux sortes, dont les uns, disent-ils, agissent par une qualité manifeste, comme la poix, la résine, le galbanum, & plusieurs autres gommes ; mais ce ne sont-là que des maturatifs ! & les autres, ajoûtent-ils, attirent par des qualités occultes, comme l’ambre jaune, l’aimant, &c. mais un très-bon chirurgien n’y donne aucune confiance ; il ne connoît de moyens de tirer les corps étrangers, que ses doigts, ses instrumens, & son génie pour en forger au besoin. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Corps, se dit aussi en matiere de Littérat. de plusieurs ouvrages de la même nature rassemblés & reliés ensemble.

Gratien a fait une collection des canons de l’Eglise, que l’on appelle corpus canonum. V. Canon. Le corps du droit civil est composé du digeste, du

code, & des institutes. Voyez Droit civil. Voyez aussi Code & Digeste. Voyez aussi plus bas Corps (Jurisprudence.) Nous avons aussi un corps des poëtes grecs & un autre des poëtes latins. (G)

* Corps de J. C. (religieux du) Hist. ecclésiast. ordre institué vers le commencement du xjv. siecle. Le fondateur n’en étant pas connu, on a supposé qu’après l’institution de la fête du saint Sacrement par Urbain IV. quelques personnes dévotes s’étoient associées pour adorer particulierement la présence de J. C au sacrement de l’autel, & réciter l’office composé par saint Thomas d’Aquin ; & que c’est de là que sont venus les religieux du corps de J. C. ou les religieux blancs du saint Sacrement, ou les freres de l’office du saint Sacrement ; & qu’on les assujettit à la regle de saint Benoît. Après avoir erré en plusieurs endroits, Boniface IX. les unit en 1393 à l’ordre de Cîteaux. Ils en furent ensuite séparés par différens évenemens ; & ils subsisterent indépendans jusques sous Grégoire XIII. qui unit leur congrégation à celle du mont Olivet.

Corps, (Jurisp.) est l’assemblage de plusieurs membres ou parties qui forment ensemble un tout complet. Ce terme s’applique à différens objets qui vont être expliqués dans les subdivisions suivantes. (A)

Corps & Communautés. Ce terme comprend tous les corps politiques en général, c’est-à-dire toutes les personnes auxquelles il est permis de s’assembler & de former un corps ; car on ne peut faire aucunes assemblées sans permission du prince ; & ceux même auxquels il permet de s’assembler ne forment pas tous un corps ou communauté. Par exemple, les ordres de chevalerie ne sont pas des corps politiques, mais seulement un ordre, c’est-à-dire un rang & titre commun à plusieurs particuliers ; les avocats forment de même un ordre, sans être un corps politique.

Pour former un corps ou communauté, il faut que ceux qui doivent le composer ayent obtenu pour cet effet des lettres patentes dûment enregistrées, qui les établissent nommément en corps & communautés, sans quoi ils ne seroient toûjours considérés que comme particuliers. Il ne leur seroit pas permis de prendre un nom collectif, ni d’agir sous ce nom ; & l’on pourroit leur ordonner de se séparer : ce qui est fondé sur deux motifs légitimes ; l’un d’empêcher qu’il ne se forme des associations qui puissent être préjudiciables au bien de l’état ; l’autre, d’empêcher que les biens qui sont dans le commerce des particuliers ne cessent d’y être, comme il arrive lorsqu’ils appartiennent à des corps & communautés. V. au mot Communauté. (A)

Corps de Droit, est la collection des différentes parties du Droit ; il y a deux sortes de corps de Droit, savoir le canonique & le civil. (A)

Corps de Droit canonique, est la collection des différentes parties qui composent le droit canonique Romain : savoir le decret de Gratien, les decrétales de Grégoire IX. le sexte, les clémentines, les extravagantes communes, les extravagantes de Jean XXII. (A)

Corps des Canons, est la collection ou code des canons des apôtres & des conciles. Voyez Canon & Concile. (A)

Corps de Droit civil Romain ou de Droit civil simplement, est la collection des différens livres de Droit composés par ordre de l’empereur Justinien, qui sont le code, le digeste, les institutes, les novelles, treize édits du même empereur ; on y comprend aussi les novelles de Justin, quelques constitutions de Tibere, quelques-unes de Justinien & de Justin, les novelles de Léon, & celles de plusieurs autres empereurs ; les livres des fiefs, les constitutions de l’empereur Frédéric II. les extravagantes d’Henri VII. le livre de la paix de Constance. Dans