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fer battu est de tous les métaux observés par M. Musschenbroek, celui qui s’est dilaté le moins, & le plomb, celui qui s’est dilaté le plus. Voyez aussi Feu, Raréfaction, Pyrometre. (O)

Dilatation, s. f. (Médecine.) ce terme signifie la même chose que diastole dans l’œconomie animale ; il sert également à exprimer l’état du cœur, des arteres, & de tous les vaisseaux & sacs membraneux dont les parois sont susceptibles d’être écartées de leur axe ou d’un centre commun. Voy. Diastole.

Ce terme est aussi employé pour exprimer l’état d’un vaisseau qui reste dilaté contre nature, comme dans l’anevrysme, la varice. Voyez Anevrysme, Varice. (d)

Dilatation, en Chirurgie, est l’action d’écarter un orifice ou les levres d’une plaie pour la rendre plus large. On confond assez souvent dans l’usage le terme de dilatation avec celui d’incision. On dit communément qu’on a dilaté une plaie ou un ulcere, lorsqu’on a aggrandi la plaie par une incision, ou qu’on a ouvert un sinus. On doit entendre précisément par dilatation l’écartement des levres d’une plaie, ou d’un orifice qui se fait sans instrument tranchant : c’est ainsi qu’on dilate la plaie qu’on fait pour l’opération de la taille par l’écartement des branches de la tenette. Lorsqu’on veut faire une contre-ouverture à une plaie, on la garnit exactement, & on la dilate avec de la charpie pour que le pus, ne trouvant point d’issue, soit obligé de prononcer ou de faire éminence à la partie où l’on se propose de faire la contre-ouverture. Un pansement uni & mollet, exempt de dilatation, ne retiendroit pas le pus dans la plaie, & ne favoriseroit point la contre-ouverture. Voyez Contre-ouverture.

On dilate souvent les playes avec des morceaux d’éponge préparée, ou de racines de gentiane qui se gonflent par l’humidité de la partie, & en écartent les parois. On dilate l’anus & le vagin avec des instrumens nommés dilatatoires. Voyez Dilatatoire. (Y)

DILATATOIRE, s. m. instrument de Chirurgie, dont les Lithotomistes de la fin du dernier siecle se servoient dans l’opération de la taille au grand appareil, après avoir fait une section au périnée, qui étoit parallele à la peau & à l’urethre. Au moyen de cet instrument introduit dans la vessie, ils dilatoient le passage de la pierre. On ne se sert plus de cet instrument, parce qu’on peut, en cas de besoin, écarter les branches de la tenette, ce qui remplit la fonction du dilatatoire sans multiplier le nombre des instrumens, & sans allonger l’opération. Voyez les fig. 1, 2 & 3. Planche XI.

On appelle aussi dilatatoire ou dilatateur de la matrice & du vagin, un instrument très-composé, dont la description seroit fort longue & inutile, puisqu’il n’est plus d’usage. Voyez la fig. 7. Pl. XXVI. On introduisoit dans le vagin les trois branches qui forment le bec de cet instrument. En tournant le treffle ou manche de la vis, les trois branches s’écartoient de maniere à laisser entr’elles des espaces égaux. On a donné le nom de speculum matricis à cet instrument, & on dit que son usage est de dilater le vagin pour y appercevoir quelques maladies, & pour y opérer. Il est facile de voir que rien n’est plus capable d’empêcher qu’on puisse opérer dans le vagin, que l’usage d’un pareil instrument. Il est d’ailleurs bien plus propre à cacher les maladies de ce conduit, qu’à aider à les découvrir. L’introduction du doigt d’un chirurgien intelligent est le vrai speculum ou miroir du vagin ; c’est par ce moyen qu’on reconnoît journellelement des excroissances fongueuses, des relâchemens du vagin, des descentes ou chûtes de matrice, des hernies intestinales dans le vagin, des ulceres,

& autres maladies dont on ne peut juger que par le tact.

Le dilatatoire du fondement est une espece de pincette à laquelle on a donné aussi mal-à-propos le nom de speculum ani qu’au dilatatoire du vagin : on nous dispensera d’en faire une description détaillée ; la fig. 8. Pl. XXVI. donnera sur cet instrument des connoissances suffisantes. S’il se trouvoit par hasard quelques cas où l’on crût qu’il fût à-propos de se servir de cet instrument, il est bon d’avertir qu’il faut l’introduire peu-à-peu & fort doucement dans le rectum, après l’avoir graissé avec du beurre, du suif, ou de l’huile, pour en faciliter l’insinuation. (Y)

DILATOIRE, (Jurisprud.) Voyez Exception dilatoire.

DILE, (la) (Géogr. mod.) riviere du Brabant qui se jette dans l’Escaut.

DILEMME, s. m. (Logique.) Le dilemme est un argument composé de deux ou de plusieurs propositions, arrangées de façon, qu’en accordant telle de ces propositions que vous voudrez, la conclusion sera toûjours contre vous.

Un dilemme est un argument composé de deux parties, ou faces contraires, l’une & l’autre desquelles portent contre l’adversaire. C’est pour cette raison qu’on l’appelle argument cornu ; ces deux parties étant disposées de façon, que si on élude l’une, on ne peut éviter l’autre.

On l’appelle aussi crocodilus, parce que de même que le crocodile conduit dans le Nil tous ceux qu’il suit, & court après ceux qui s’enfuyent pour les dévorer ; de même, quelque parti que prenne un adversaire, soit qu’il accorde ou qu’il nie, cette espece de sylogisme tourne toûjours à son desavantage.

Cicéron, pour prouver qu’il faut supporter toutes les peines avec patience se sert de ce dilemme : Omnis dolor aut est vehemens aut levis ; si levis, facilè feretur ; si vehemens, certè brevis futurus est. Le même auteur prouve par un autre dilemme qu’il ne faut point envoyer des députés à Antoine : legatos decernitis ; si ut deprecentur, contemnet ; si ut imperetis, non audiet.

Il ne faut point passer sous silence ce beau dilemme dont se sert Tertullien pour détromper les payens, & pour faire des reproches à Trajan, qui avoit défendu de faire la recherche des chrétiens, & avoit cependant ordonné qu’on les punît lorsqu’on les auroit arrêtés. O sententiam necessitate confusam ! negat inquirendos, ut innocentes ; & mandat puniendos, ut nocentes : parcit & sævit, dissimulat & animadvertit. Quid temetipsum censurâ circumvenis ! si damnas, cur non & inquiris ? si non inquiris, cur non & absolvis ?

Pour qu’un dilemme soit exact, deux choses sont nécessaires : 1°. une parfaite énumération des parties. Ainsi ce fameux dilemme par lequel Aristippe vouloit dissuader du mariage, n’est pas exact, parce qu’il y a un défaut dans l’énumération, y ayant un milieu entre la beauté & la laideur. Si vous vous mariez, votre femme sera belle ou laide ; si vous la prenez belle, elle vous causera de la jalousie : si vous la prenez laide, elle vous donnera du dégoût. 2°. Que le dilemme ne soit que contre l’adversaire seul, & que celui qui le fait ne soit point exposé à le voir retorquer contre lui. Tel est ce fameux dilemme, par lequel un ancien philosophe prouvoit qu’on ne devoit point se mêler des affaires de la république. Si en vous chargeant du gouvernement de l’état, vous vous en acquitez bien, vous offenserez les hommes : si vous vous en acquittez mal, vous offenserez Dieu : donc vous ne devez pas vous charger du gouvernement de l’état. L’argument rétorqué est : Si vous vous en acquittez bien, vous plairez à Dieu : si vous vous en acquittez mal, vous plairez aux hommes : donc, &c.