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tués par la chûte de quelque corps ; cependant nous n’avons pas le moindre soupçon que cet accident nous arrivera : le rapport des évenemens connus pour, aux évenemens connus contre, n’est pas assez grand pour former le doute & la conjecture. Remarquez cependant qu’il s’agit ici de l’objet le plus important à l’homme, la conservation de sa vie. Il y a dans toutes les choses une unité qui devroit être la même pour tous les hommes, puisqu’elle est fondée sur les expériences, & qui n’est peut-être la même ni pour deux hommes, ni pour deux actions de la vie, ni pour deux instans : cette unité réelle seroit celle qui résulteroit d’un calcul fait par le philosophe Stoïcien parfait, qui se comptant lui-même & tout ce qui l’environne pour rien, n’auroit d’égard qu’au cours naturel des choses ; une connoissance au moins approchée de cette unité vraie, & la conformité des sentimens & des actions dans la vie ordinaire à la connoissance qu’on en a, sont deux choses presqu’indispensables pour constituer le caractere philosophique ; la connoissance de l’unité constituera la Philosophie morale spéculative ; la conformité de sentimens & d’actions à cette connoissance, constituera la Philosophie morale pratique.

CONIFERE, (Arbre), adj. Hist. nat. bot. Les Botanistes appellent arbres coniferes, ceux qui portent des fruits de figure conique, comme le cedre du Liban, le pin, le sapin, le picéa, la méleze, &c. On prétend que ces arbres sont à l’épreuve de la corruption & des impressions du tems : mais c’est beaucoup trop prétendre ; & ce seroit assez de dire, que ces sortes d’arbres sont, choses égales, généralement moins sujets à la pourriture & à la corruption que les autres, à cause que leur bois est plus compact, plus solide, & qu’ils sont remplis de seve, ou d’un suc abondant, gras, & amer. Il paroît qu’ils viennent presque tous d’une semence ; & Bodœus de Stapel, dans son commentaire sur Théophraste, dit avoir souvent essayé, si les arbres coniferes ne pourroient point se reproduire en en plantant un jet ou une branche en terre, mais qu’ils n’ont jamais bourgeonné, & que toutes ses peines ont été infructueuses. Il est sûr qu’on n’a pas assez multiplié les expériences en ce genre, & je croi que Stapel est dans l’erreur.

Le fruit des arbres coniferes porte en Botanique le nom de cone, qui désigne des fruits écailleux, secs, & durs, faits en forme de pyramide, contenant pour l’ordinaire deux semences sous chaque rejetton. Ray comprend aussi sous ce nom, sans égard à la figure pyramidale, les fruits qui sont composés de plusieurs parties crustacées, ligneuses, étroitement unies, & s’ouvrant quand le fruit est mûr, comme est celui du cyprès. Ludwig adopte le sentiment de son compatriote, & définit un cone, un fruit composé d’un amas fort serré de couches ligneuses, attachées à un axe commun, dont les interstices sont remplis de semences. Ainsi quoique suivant Saumaise, un fruit ne mérite le nom de cone que lorsqu’il a une base ronde, & qu’il est terminé en pointe, l’usage a prévalu sur la dénomination tirée de la figure, & ce seroit un grand bonheur s’il n’étendoit pas plus loin son empire à d’autres égards. Article de M. le Chevalier de Jaucourt

CONIL, (Géog. mod.) petite ville d’Espagne en Andalousie, sur le golfe de Cadix.

CONIN, (Géog. mod.) ville de la grande Pologne au palatinat de Posnanie.

CONJOINT, adj. (Musique.) tétracorde conjoint, est dans l’ancienne Musique, celui dont la corde la plus grave est à l’unisson de la corde la plus aiguë du tétracorde, qui est immédiatement au-dessous de lui. C’est ainsi que dans le système des Grecs, le

tétracorde Synnemenon étoit conjoint au tétracorde Meson. Voyez Tétracorde. (S)

Le système de la Musique ancienne étoit composé de quatre tétracordes, si ut re mi, mi fa sol la, si ut re mi, mi fa sol la, dont le premier & le second, ainsi que le troisieme & le quatrieme, étoient conjoints, c’est-à-dire avoient la corde mi commune ; au lieu que le second & le troisieme étoient disjoints, c’est-à-dire n’avoient point de cordes communes, puisque le second finissoit par le son la, & le troisieme commençoit par le son si. Voyez Gamme. (O)

Dans la Musique moderne, on appelle par degré conjoint, la marche d’une note à celle qui la suit immédiatement, sur le plus voisin degré au-dessus ou au-dessous d’elle. Voyez Degré. (S)

Ainsi le chant, ut re mi re mi fa mi re mi fa sol fa mi re ut, est par degré conjoint. Voyez Disjoint. (O)

Conjoints, adj, pris subst. (Jurispr.) on appelle de ce nom ceux qui sont unis par le lien du mariage.

On considere leur état avant & après le mariage.

Avant le mariage, les futurs conjoints peuvent se faire tels avantages qu’ils jugent à-propos.

Depuis le mariage, ils n’ont plus la même liberté ; dans les pays de droit écrit, ils ne peuvent s’avantager que par testament ; dans la plûpart des pays coûtumiers, ils ne peuvent s’avantager ni entrevifs, ni à cause de mort.

On considere aussi l’état des conjoints par rapport à la communauté de biens, quand elle a lieu entre eux ; par rapport à l’autorisation de la femme, & à la faculté d’ester en jugement ; & enfin pour les reprises des conjoints en cas de décès de l’un d’eux. Voyez Communauté, Douaire, Préciput, Reprises, Donation entre Conjoints.

Conjoints : on donne aussi cette qualité à ceux qui ont quelque droit ou quelque titre commun, tels que sont des colégataires ; ils peuvent être conjoints en trois manieres différentes, savoir re, verbis, ou bien re & verbis.

Ils sont conjoints re seulement, lorsque la même chose est leguée à chacun d’eux nommément, comme si le testateur dit : Je legue ma maison de Paris à Titius, je legue ma maison de Paris à Mævius.

Ils sont conjoints verbis tantum, lorsque la même chose leur est leguée par une même phrase, mais divisément : par exemple, je legue à Titius & à Mævius ma maison de Paris, à chacun par moitié.

Enfin ils sont conjoints re & verbis, lorsque le testateur dit : Je legue à Titius & à Mævius ma maison de Paris.

Le droit d’accroissement a lieu entre ceux qui sont conjoints re, ou re & verbis ; mais non pas entre ceux qui ne sont joints que verbis tantum. Voyez institut. lib. II. tit. ij. & ci-devant au mot Accroissement (Jurispr.). (A)

CONJONCTIF, IVE, adj. terme de Grammaire, qui se dit premierement de certaines particules qui lient ensemble un mot à un mot, ou un sens à un autre sens ; la conjonction & est une conjonctive, on l’appelle aussi copulative.

La disjonctive est opposée à la copulative. Voyez Conjonction.

En second lieu, le mot conjonctif a été substitué par quelques Grammairiens à celui de subjonctif, qui est le nom d’un mode des verbes, parce que souvent les tems du subjonctif sont précédés d’une conjonction ; mais ce n’est nullement en vertu de la conjonction que le verbe est mis au subjonctif, c’est uniquement parce qu’il est subordonné à une affirmation directe, exprimée ou sous-entendue. L’indicatif est souvent précédé de conjonctions, sans cesser pour cela d’être appellé indicatif.

On doit donc conserver la dénomination de subjonctif ; l’indicatif affirme directement & ne suppose