duite : mais il étend ce principe plus loin. Il ne se contente point de placer le feu dans les corps comme un élément ; il se propose même de prouver qu’il est répandu également par-tout, qu’il est présent en tous lieux, & dans les espaces vuides aussi bien que dans les intervalles insensibles qui se trouvent entre les parties des corps. Mem. de l’Acad. an 1713. Ce sentiment sera exposé ci-dessous plus au long.
Il semble qu’il y a de l’absurdité à dire que l’on peut échauffer des liqueurs froides avec de la glace ; cependant M. Boyle nous assure que la chose est très-aisée, en ôtant d’un bassin d’eau froide où nagent plusieurs morceaux de glace, un ou deux de ces morceaux bien imbibés de la liqueur, & en les plongeant tout-à-coup dans un verre dont l’ouverture soit fort large & où il y ait de l’huile de vitriol ; car le menstrue venant à se mêler d’abord avec l’eau qui adhere à la glace, produit dans cette eau une chaleur très-vive accompagnée quelquefois d’une fumée visible ; cette fumée venant à dissoudre promptement les parties contigues de la glace, & celles-ci les parties voisines, toute la glace se trouve bientôt réduite en liqueur ; & le menstrue corrosif ayant été mêlé avec le tout par le moyen de deux ou trois secousses, tout le mêlange s’échauffe quelquefois au point que l’on ne sauroit tenir dans la main le vase qui le contient.
Il y a une grande variété dans la chaleur des différens lieux & des différentes saisons. Les Naturalistes soûtiennent communément que la chaleur augmente à mesure qu’on approche du centre de la terre ; mais cela n’est point exactement vrai. En creusant dans les mines, puits, &c. on trouve qu’à peu de distance de la surface de la terre, on commence à sentir de la fraicheur : un peu plus bas on en sent davantage ; & lorsqu’on est parvenu au point où les rayons du soleil ne peuvent répandre leur chaleur, l’eau s’y glace ou s’y maintient glacée ; c’est cette expérience qui a fait inventer les glacieres, &c. Mais quand on va encore plus bas, savoir à 40 ou 50 piés de profondeur, on commence à sentir de la chaleur, de sorte que la glace s’y fond ; & plus on creuse au-de-là, plus la chaleur augmente jusqu’à ce qu’enfin la respiration y devient difficile & que la lumiere s’y éteint.
C’est pourquoi quelques-uns ont recours à la supposition d’une masse de feu placée au centre de la terre, qu’ils regardent comme un soleil central & comme le grand principe de la génération, végétation, nutrition, &c. des fossiles & des végétaux. Voyez Feu central, Terre, Tremblement de terre, &c.
Mais M. Boyle qui a été lui-même au fond de quelques mines, croit que ce degré de chaleur que l’on sent dans ces mines, ou du moins dans quelques-unes, doit être attribué à la nature particuliere des minéraux qui s’y trouvent ; ce qu’il confirme par l’exemple d’un minéral d’espece vitriolique qu’on tire de la terre en grande quantité en plusieurs contrées d’Angleterre, & qui étant arrosé simplement d’eau commune s’échauffe presque au point de prendre feu.
D’un autre côté, à mesure que l’on monte de hautes montagnes l’air devient froid & perçant ; ainsi les sommets des montagnes de Bohême nommées Pico de Theide, le Pic de Ténériffe, & de plusieurs autres montagnes, même de celles des climats les plus chauds, se trouvent toûjours couverts & environnés de neige & de glace que la chaleur du soleil n’est jamais capable de fondre. Sur quelques montagnes du Pérou, au centre de la zone torride, on ne trouve que de la glace. Les plantes croissent au pié de ces montagnes, mais vers le sommet il n’y a point de végétaux qui puissent croître à cause
du froid excessif. On attribue cet effet à la subtilité de l’air dont les parties sont trop écartées les unes des autres à une si grande hauteur pour refléchir une assez grande quantité de rayons du soleil ; car la chaleur du soleil refléchie par les particules de l’air, échauffe beaucoup plus que la chaleur directe.
Chaleur des différens climats de la terre. La diversité de la chaleur des différens climats & des différentes saisons naît en grande partie des différens angles sous lesquels les rayons du soleil viennent frapper la surface de la terre. Voyez Climat, &c.
On démontre en méchanique qu’un corps qui en frappe perpendiculairement un autre, agit avec toute sa force ; & qu’un corps qui frappe obliquement agit avec d’autant moins de force que sa direction s’éloigne davantage de la perpendiculaire : le feu étant lancé en ligne directe doit suivre la même loi méchanique que les autres corps, & par conséquent son action doit être mesurée par le sinus de l’angle d’incidence : c’est pourquoi le feu venant à frapper un objet dans une direction parallele à cet objet, ne produit point d’effet sensible ; parce que l’angle d’incidence étant nul, le rapport du sinus de cet angle au sinus total est comme zéro à un, c’est-à-dire nul ; par conséquent le soleil n’a encore aucune chaleur lorsqu’il commence à répandre ses rayons sur la terre. Voyez Percussion & Composition de mouvement.
Un auteur célebre a fait en conséquence de ce principe, un calcul mathématique de l’effet du soleil en différentes saisons & sous différens climats. Voici une idée de ce calcul, sur lequel nous ferons ensuite quelques réflexions. M. Halley part de ce principe, que l’action simple du soleil, comme toute autre impulsion ou percussion, a plus ou moins de force en raison des sinus des angles d’incidence ; d’où il s’ensuit que la force du soleil frappant la surface de la terre à une hauteur quelconque, sera à la force perpendiculaire des mêmes rayons, comme ce sinus de la hauteur du soleil est au sinus total.
De-là il conclut, que le tems pendant lequel le soleil continue d’éclairer la terre, étant pris pour base, & les sinus de la hauteur du soleil étant élevés sur cette base comme des perpendiculaires ; si on décrit une ligne courbe par les extrémités de ces perpendiculaires, l’aire de cette courbe sera proportionelle à la somme ou totalité de la chaleur de tous les rayons du soleil dans cet espace de tems.
Il conclut de-là aussi que sous le pole arctique, la somme de toute la chaleur d’un jour de solstice d’été est proportionnelle à un rectangle du sinus de 23 degrés par la circonférence d’un cercle : or le sinus de 23 degrés fait à peu-près les du rayon ; & les du rayon qui en sont le double, sont à-peu-près le sinus de 53 degrés, dont le produit par la demi-circonférence ou par 12 heures, sera égal au produit ci-dessus. D’où il infere que la chaleur polaire, le jour du solstice, est égale à celle du soleil, échauffant l’horison pendant 12 heures, à 53 degrés constans d’élévation. Comme il est de la nature de la chaleur de rester dans le sujet après la retraite du corps qui l’a occasionnée, & sur-tout de continuer dans l’air, l’absence de 12 heures que fait le soleil sous l’équateur, ne diminue que fort peu la chaleur ou le mouvement imprimé par l’action précédente de ses rayons : mais sous le pole, l’absence de six mois que fait le soleil, y laisse régner un froid extrème ; de sorte que l’air y étant comme gelé & couvert de nuages épais & de brouillards continuels, les rayons du soleil ne peuvent produire sur cet air aucun effet sensible avant que cet astre se soit rapproché considérablement du pole.
A quoi il faut ajoûter, que les différens degrés de chaud & de froid qu’il fait en différens endroits de