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fois version d’un livre, ou d’un écrit, d’une langue, dans une autre. Aujourd’hui on dit traduction. Voyez Livre, Version, &c.

Souvent les traducteurs tâchent de s’excuser aux dépens de la langue dans laquelle ils traduisent, & demandent grace pour cette langue, comme si elle n’étoit pas assez riche & copieuse pour exprimer toute la force & toutes les beautés de l’original.

Ainsi un traducteur accuse la langue angloise de la pauvreté & de la sécheresse, qui ne se trouve que dans son propre génie, & il met sur le compte de la langue, toutes les fautes qu’il ne devroit imputer qu’à lui même. Voyez Anglois.

Les Italiens disent proverbialement traduttore, traditore, pour faire entendre que les traducteurs trahissent ou défigurent ordinairement leur original.

Translation, (Jurisp.) est l’action de transférer une personne ou une chose, d’un lieu dans un autre. Ce terme s’applique à différens objets, ainsi qu’on le va voir ci-après.

Translation d’un chanoine régulier d’une congrégation dans un ordre, on y observe les mêmes regles que pour celle des religieux, cap. licet extra de regul. Voyez translation d’un religieux.

Translation de domicile, en fait de taille, est lorsqu’un taillable va demeurer d’un lieu dans un autre ; ce changement doit être notifié aux habitans & syndics des paroisses avant le premier Octobre : & si la translation de domicile est faite dans une paroisse abonnée, le taillable doit suivant les réglemens, être imposé pendant dix ans à son ancien domicile, & cela pour empêcher les fraudes.

Un fermier qui transfere son domicile en changeant de ferme, est encore imposé pendant un an dans son ancienne demeure, & ne l’est pour sa nouvelle ferme, qu’un an après. Voyez Domicile & Taille.

Translation ad effectum beneficii, est la translation d’un religieux dans un autre ordre, à l’effet de posséder un bénéfice qui en dépend. Les provisions du bénéfice sont capables d’opérer seules cette translation ; mais on ne reconnoit plus aujourd’hui de translation ad effectum seulement, celui qui est transferé pour posséder un bénéfice est censé transferé à tous égards. V. Fevret, Louet, Vaillant, Lacombe.

Translation d’un évêque d’un siege à un autre, est reprouvée par les anciens canons & par tous les peres, lorsqu’elle est faite sans nécessité ou utilité pour l’Eglise, parce qu’il se contracte un mariage spirituel entre l’évêque & son église, tellement que celui qui la quitte facilement pour en prendre une autre, commet un adultere spirituel, suivant le langage des peres.

Le concile de Nicée défend aux évêques, prêtres, & diacres, de passer d’une église à une autre ; c’est pourquoi Constantin le grand loue Eusebe évêque de Cesarée, d’avoir refusé l’évêché d’Antioche.

Le concile de Sardique alla même plus loin, car voyant que les Ariens méprisoient la défense du concile de Nicée, & qu’ils passoient d’une moindre église à une plus riche, Ozius le grand qui y présidoit, y proposa que dans ce cas les évêques seroient privés de la communion laïque, même à la mort.

Il y a un grand nombre d’autres canons conformes à ces deux conciles.

L’église romaine étoit tellement attachée à cette discipline, que Formose fut le premier qui y contrevint, ayant passé de l’église de Porto à celle de Rome, vers la fin du ix. siecle, dont Etienne VII. lui fit un crime après sa mort.

Jean IX. fit néanmoins un canon pour autoriser les translations en cas de nécessité, ce qui étoit conforme aux anciens canons qui les permettoient en cas de nécessité, ou utilité pour l’Eglise.

C’étoit au concile provincial à déterminer la nécessité ou utilité de la translation.

Tel fut l’usage en France jusque vers le x. siecle, que ces translations furent mises au nombre des causes majeures reservées au S. siege.

Suivant le droit des décrétales, & la discipline présente de l’Eglise, les translations des évêques sont toujours reservées au pape, & ne peuvent même appartenir aux légats à latere, sans un indult spécial du pape.

On observe aussi toujours que la translation ne peut être faite sans nécessité, ou utilité pour l’Eglise.

Il faut de plus en France, que ces translations se soient faites du consentement du roi, & sur sa nomination, & qu’il en soit fait mention dans les bulles de provision, autrement il y auroit abus. Voyez cap. iv. extra de translat. episcop. le P. Thomassin, Tournet, Fleury, Lacombe, & le mot Evêque.

Translation de legs, est une déclaration par laquelle un testateur transfere un legs, soit d’une personne à une autre, soit de l’héritier qui en étoit chargé à un autre qu’il en charge, soit en changeant la chose léguée en une autre. Voyez au digeste, au code & aux institut. les tit. de legatis.

Translation d’ordre, ou d’un ordre dans un autre. Voyez ci-après Translation de religieux.

Translation d’un prisonnier, est lorsqu’on le fait passer d’une prison à une autre, soit pour l’approcher du juge de l’appel, soit pour le renvoyer à son premier jugement. Voyez Accusé, Prison, Prisonnier.

Translation d’une religieuse d’un monastere dans un autre, on y observe les mêmes regles que pour la translation des religieux, c’est-à-dire qu’elles ne peuvent passer d’un monastere à un autre plus austere, sans avoir demande la permission de leur supérieure ; & si celle-ci la refuse, la religieuse ne peut sortir du premier monastere, sans une permission par écrit de l’évêque. Cap. licet extra de regularib.

Translation d’un religieux, est lorsqu’il passe d’un ordre dans un autre.

Dans l’origine de l’état monastique les religieux pouvoient passer d’un monastere dans un autre, même d’un ordre différent, & se mettre successivement sous la direction de différens supérieurs.

S. Benoit joignit au vœu d’obéissance perpétuelle, celui de stabilité, c’est-à-dire de résidence perpétuelle dans le monastere où les religieux avoient fait profession.

La regle de S. Benoit étant devenue la seule qui fût observée dans l’occident, le précepte de stabilité devint un droit commun pour tous les réguliers.

Cependant comme le vœu de stabilité n’avoit pour objet que de prévenir la légérété & l’inconstance, & non pas d’empêcher les religieux de tendre à une plus grande perfection, on leur permit de passer de leur monastere, dans un autre plus austere ; & pour cela, ils n’avoient besoin que du consentement de l’abbé qu’ils quittoient.

Depuis l’établissement des ordres mendians, plusieurs religieux de ces ordres se retirant chez les Bénédictions, ou dans d’autres congrégations, pour y obtenir des bénéfices, on régla d’abord que les mendians ainsi transférés, ne pourroient tenir aucun bénéfice sans une permission particuliere du pape.

Ces sortes de permissions s’accordant trop facilement, on régla dans la suite que les translations des mendians dans un autre ordre (excepté celui des Chartreux, où l’on ne possede point de bénéfice), ne seroient valables que quand elles seroient autorisées par un bref exprès du pape.

Un religieux peut aussi être transféré dans un ordre plus mitigé, lorsque sa santé ne lui permet pas de suivre la regle qu’il a embrassée ; mais l’usage de ces