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le tout sauf la légitime des autres enfans.

Ainsi, les enfans qui ne viennent à la succession qu’en vertu d’un testament, ne sont point obligés de rapporter entr’eux, à-moins que ce ne fussent des enfans rappellés à la succession dans les cas où le rappel donne la qualité d’héritier. Voyez Rappel.

L’obligation de rapporter n’a lieu qu’en directe, & non en collatérale, si ce n’est dans quelques coutumes singulieres, comme Chauny, Maine & Anjou ; le rapport n’est même dû que dans la ligne directe descendante ; les ascendans n’y sont point obligés.

Dans les cas où on succede par souches, & non par têtes, comme cela a toujours lieu en directe, le rapport se fait aussi par branches ; de maniere que si dans une branche composée de plusieurs petits-fils, quelques-uns qui sont donataires entre-vifs renoncent à la succession, les autres se portent héritiers, ces derniers sont obligés de rapporter pour les renonçans ; ce qui paroît un peu dur, puisqu’on leur fait rapporter ce qu’ils n’ont pas reçu ; mais aussi la part des renonçans accroit à leur profit, & ils doivent prendre le bénéfice avec les charges.

Les créanciers, le sise, ni le seigneur haut-justicier qui succede par déshérence ou autrement, ne peuvent pas obliger au rapport, attendu qu’ils ne peuvent pas opposer l’incompatibilité des qualités d’héritier & de légataire ou donataire.

Tout ce qui s’impute sur la légitime est sujet à rapport : ainsi toute donation gratuite est sujette à rapport, sous quelque forme qu’elle soit faite. Ainsi, quand le pere a fait à son fils une vente à vil prix, ou qu’il a payé pour lui le prix de quelque acquisition, qu’il a exercé pour lui un retrait, qu’il a fait des impenses & améliorations sur les biens de son fils, tout cela est sujet à rapport.

A l’égard des choses mobiliaires, le rapport peut en être fait en essence lorsqu’elles ne sont point diminuées par l’usage, comme des diamans & des perles ; que si elles sont anéanties ou détériorées, il faut en rapporter la valeur, eu égard au tems du partage.

Les pensions, alimens & entretien fournis aux enfans, ni les livres, & ce qui a été dépensé pour leur instruction & éducation, tout cela n’est point sujet à rapport, mais une bibliotheque le seroit.

On ne rapporte pas non plus les habits nuptiaux, frais de noces, mais seulement le trousseau de la fille.

Les étrennes & petits présens, les deniers donnés au mineur qui les a dissipés, ceux même que le pere a donnés au majeur pour le jeu, ne sont pas rapportables.

Les offices venaux, soit de judicature ou de finance, sont sujets à rapport, & à plus forte raison les offices domaniaux ; mais ceux de la maison du roi ne se rapportent pas, parce qu’ils sont considérés comme des graces personnelles, & non comme des biens héréditaires.

On ne peut pas obliger l’enfant de rapporter l’office même, il suffit qu’il en rapporte le prix.

L’enfant est aussi obligé de rapporter ce qui a été dépensé pour lui donner un état, comme pour le faire promouvoir aux ordres, le faire recevoir docteur dans quelque faculté, ou avocat, ou pour le faire recevoir maître dans quelque métier.

Les rapports se font ou en précomptant & moins prenant, ou en rapportant en essence.

Les meubles & sommes de deniers se rapportent ordinairement en précomptant & moins prenant : à l’égard des terres, maisons & rentes, on les rapporte aussi quelquefois de même ; mais on peut obliger l’enfant de les rapporter en essence, afin que chacun y ait part, à moins que ces biens n’aient été aliénés par lui de bonne foi, auquel cas il n’est tenu de rapporter que l’estimation.

Les fruits ne se rapportent que du jour de l’ouverture de la succession.

Les effets du rapport sont, 1°. que l’effet qui est rapporté est censé faire partie de la succession du moment qu’elle est ouverte ; 2°. que si l’enfant qui rapporte ne conserve pas dans son lot l’effet qu’il a rapporté, les hypotheques de ses créanciers passent sur les autres biens qui lui sont assignés pour sa part. La raison est que le partage n’est que déclaratif, & que les héritiers sont censés n’avoir jamais eu aucun droit aux biens qu’ils rapportent ; leurs créanciers ne peuvent même se plaindre de cette translation d’hypotheque, ayant dû connoître l’état de leur débiteur ; leur hypoteque sur ces biens n’étoit proprement que conditionnelle, au cas qu’ils demeurassent définitivement à leur débiteur.

La matiere des rapports est traitée au digeste dans les titres de collatione bonorum, & de collatione dotis, & au code, titre de collationibus. On peut aussi voir Domat, part. III. liv. II. tit. jv. Lebrun, des successions, l. III. ch. vj. Duplessis, sur la coutume de Paris, traité des success. Bouvot, tom. II. p. 120. Henrys, tome II. liv. VI. quest. 1. les arrêtés de M. le premier président de Lamoignon ; Dupineau, nouv. édit. l. VI. des airéts, ch. xv. sect. 3. Voyez aussi les mots Héritier, Incompatibilité, Légataire, Partage, Qualités, Renonciation, Succession. (A)

Rapport, (Médec. & Chirurg.) le terme de rapport tire son origine du verbe latin refero, qui signifie je rapporte ; mais on peut dire qu’il est encore de plus près dérivé du mot substantif relatio, qui signifie rapport ou récit d’une chose.

Selon cette premiere idée, il faut entendre par les rapports en Médecine & en Chirurgie, des actes authentiques & publics, que les Médecins & les Chirurgiens titrés sont obligés de faire en justice quand ils en sont requis par le magistrat, pour certifier sur leur conscience de l’état de ceux qu’ils visitent, soit sains, malades, blessés, ou décedés, afin que les juges, ou ceux qui ont droit d’y prendre part, en étant bien informés, fassent, ou ordonnent en conséquence ce qui est raisonnable pour le bien du public & des particuliers.

Des differences de rapports en Chirurgie. Tous les rapports en Chirurgie, quels qu’ils soient, peuvent se réduire sous trois especes générales, qui sont les rapports proprement pris, les certificats d’excuse, & les estimations.

Le rapport proprement pris, est une certification à justice faite par un ou plusieurs chirurgiens titrés, de l’état où ils ont trouvé le corps humain vivant ou mort, dans son tout, ou dans quelques-unes de ses parties. Ces rapports proprement pris, sont de trois especes ; savoir, dénonciatifs, provisoires, & mixtes.

On nomme rapports dénonciatifs, ceux que toutes sortes de chirurgiens font de quelque blessure que ce soit, à l’heure même, ou bien-tôt après, en vertu de leur droit de maîtrise, à la requisition des blessés, ou de ceux qui s’intéressent pour eux, auxquels rapports les juges n’ont d’égard qu’autant qu’ils les croyent justes & raisonnables. Je dis que les juges n’ont à ces rapports dénonciatifs que l’égard qu’il leur plaît ; parce que n’étant que des témoignages volontaires, ils sont sujets à suspicion.

Les rapports proprement pris de la seconde espece, que l’on nomme provisoires, sont ceux qui se font par les chirurgiens jurés en titre d’office préposés pour les rapports, & qui sont ordonnés par le juge. L’on obtient toujours pour les blessés, au moyen de ces rapports, quand les faits qui sont rapportés le méritent, des provisions, tant pour leurs alimens & médicamens, que pour leurs frais de poursuite.

Sous la troisieme espece de rapports proprement dits, que l’on peut appeller rapports mixtes, on com-