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ce qu’elle se quitte, se reprend, se retouche, & se finit tant qu’on veut.

Le fond ordinaire sur lequel on peint au pastel est du papier dont la couleur la plus avantageuse est d’être d’un gris un peu roux ; & pour s’en servir plus commodément, il faut le coller sur un ais fait exprès d’un bois léger. Le plus grand usage que l’on tire du pastel, est de faire des portraits ; on est obligé de couvrir toujours cette peinture d’une glace fort transparente qui lui sert de vernis.

Les crayons mis en poudre imitent les couleurs
Que dans un teint parfait offre l’éclat des fleurs,
Sans peinceau le doigt seul place & fond chaque teinte ;
Le duvet du papier en conserve l’empreinte,
Un crystal la défend ; ainsi de la beauté
Le pastel a l’éclat & la fragilité.

Watelet.

Aussi a-t-on vû long-tems avec peine, que cette agréable peinture, qui ne tient aux tableaux que par la ténuité de ses parties, fût sujette à s’affoiblir & à se dégrader par divers accidens inévitables. Des peintres célebres étoient parvenus à la fixer ; mais ils étoient dans la nécessité de redonner, après l’opération, quelques touches dans les clairs, pour leur rendre tout leur éclat. Enfin le sieur Loriot a trouvé en 1753 le moyen de fixer, d’une maniere plus solide, toutes les parties d’un tableau en pastel, & même de n’en point changer les nuances. Il peut par son secret faire revivre quelques couleurs qui ont perdu leur vivacité ; l’académie de Peinture & de Sculpture, paroît avoir approuvé par ses certificats, la nouvelle invention de cet artiste. (D. J.)

PASTENAGUE, Tareronde, Tourtourelle, s. f. (Hist. nat. Icthiolog.) pastinaca, poisson de mer du genre des raies. Voyez Raie. Il est plat, cartilagineux, lisse & sans écailles ; il a sur la queue, environ au milieu de sa longueur, un aiguillon long, pointu, & garni de chaque côté de dents comme une scie ; on prétend que les piquûres de cet aiguillon sont dangereuses ; la queue est fort longue, lisse, flexible, & assez semblable à celle d’un rat. Le museau de ce poisson se termine en pointe, les yeux sont situés sur la face supérieure de la tête, & la bouche est en-dessous ; elle est petite & dégarnie de dents, les mâchoires sont rudes & dures ; ce poisson n’a qu’une très-petite nageoire à la queue ; ses excrémens sont verds comme du jus de poireau : il vit dans les lieux fangeux près du rivage ; il se nourrit de poisson ; sa chair est molle & d’assez mauvais goût. Rondelet, Hist. nat. des poissons, premiere part. liv. XII. chap. j. Voyez Poisson. (I)

PASTEQUE, s. m. anguria, (Hist. nat. Bot.) genre de plante qui ne differe des autres plantes cucurbitacées qu’en ce que ses feuilles sont profondément découpées, & que son fruit est bon à manger. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

Pasteque, (Botan.) voyez Citrouille.

PASTEUR, s. m. (Gramm. & Théol.) dans un sens littéral signifie un berger, un homme occupé du soin de faire paître les troupeaux. Dans l’antiquité on a par analogie appliqué ce nom aux princes ; Homere dit que les rois sont les pasteurs des peuples, parce qu’ils doivent veiller à la félicité de leurs sujets.

Dans l’ordre de la religion pasteur signifie un homme consacré à Dieu d’une maniere spéciale, ayant autorité & jurisdiction sur toute l’Eglise, comme le pape, ou sur une portion considérable des fideles, comme les évêques, ou sur une moindre portion, comme les curés. On distingue les premiers pasteurs, c’est-à-dire le pape & les évêques, des pasteurs du second ordre. Les premiers ont seul droit de décider

dans les matieres de dogme & de discipline, les autres ont celui d’enseigner, mais avec subordination, aux premiers pasteurs. Voyez Curé.

Pasteur, livre du, (Théol.) le livre du pasteur tel que nous l’avons aujourd’hui est divisé en trois livres, dont le premier est intitulé visiones, le second mandata, & le troisieme similitudines. Le premier, dans l’édition qu’en a donné M. Cotelier, est sous-divisé en quatre visions, qui contiennent chacune plusieurs apparitions. L’auteur, qui est Hermas, raconte dans la premiere que son pere ayant vendu une jeune fille à Rome, le hazard fit qu’il la vit ensuite & l’aima comme sa sœur : que quelque tems après l’ayant vû se baigner dans le Tibre, il souhaita en lui-même d’avoir une femme aussi belle & aussi sage, & rien de plus, ajoute-t-il, nihil ultra : mais qu’un jour il vit le ciel ouvert, & cette femme dans le ciel qui lui reprochoit d’avoir péché à son occasion, du-moins par concupiscence. Il falloit qu’Hermas fût bien dévot pour trouver un péché dans un pareil souhait : son livre est je crois le premier livre de dévotion qui ait été fait, & par conséquent le premier qui a commencé d’altérer la religion, & de mêler aux vérités chrétiennes les visions d’un cerveau creux. Il voit ensuite une autre femme plus vieille qui lui dit les mêmes choses que la premiere, & qui ajoute qu’elle lui a été envoyée pour l’avertir du mauvais gouvernement de sa famille & de ce qu’il ne corrigeoit pas assez ses enfans. Ce dernier avertissement étoit plus raisonnable, & pouvoit être donné avec plus de fondement : car les gens qui s’amusent à des visions sont plus sujets que les autres à négliger l’essentiel de leur devoir.

Dans la seconde vision, la même vieille lui apparoît pour lui reprocher le trop grand babil de sa femme : mais il étoit lui-même bien babillard de parler & d’écrire de telles bagatelles : elle disparoit ensuite après lui avoir promis bien des révélations, parce que c’étoit peut-être son goût & celui de son siecle, goût qui se renouvella du tems de saint Brigite. La vieille femme n’a pas sitôt disparu qu’un jeune homme se présente sur les rangs, pour instruire Hermas que cette femme qu’il vient de voir est l’Eglise qui a pris la figure d’une vieille, parce qu’elle a été créée la premiere, & que le monde a été fait pour elle. Cette Eglise avoit donné à Hermas un livre avec ordre de le copier, & d’en donner un exemplaire à Clément pour l’envoyer aux églises, & un à la veuve Grapte pour l’enseigner aux veuves & aux orphelins.

Dans la troisieme vision, c’est la même Eglise qui lui paroît accompagnée de six jeunes hommes dans une espece de pavillon couvert d’un voile de fin lin, où il y avoit des bancs pour s’asseoir. Aussi-tôt qu’elle fut entrée, elle dit aux jeunes gens d’aller bâtir, & resta seule avec Hermas, à qui elle ne permit jamais de s’asseoir à sa droite, malgré les instances qu’il en fit ; parce que cette place appartenoit aux martyrs qui avoient beaucoup souffert pour J. C. Hermas lui fait à cette occasion une question niaise, qui surprend quand on fait attention que cet auteur vivoit du tems des martyrs & des persécutions, & qui feroit douter que tout ce qu’on nous conte dans les martyrologes ne tînt beaucoup plus d’une pieuse fiction, que de la vérité de l’histoire ; car il en parle comme s’il les ignoroit entierement : Dico ei domina, vellem scin quæ sustinuerunt : audi, inquit, feras, bestias, flagella, carceres, cruces. Pendant qu’il s’entretient avec l’Eglise, il s’apperçoit que les six jeunes hommes bâtissent sur l’eau une tour quarrée avec des pierres quarrées, dont les jointures ne paroissent pas. Qu’une infinité d’autres hommes apportent à ces nouveaux mâçons des pierres qu’ils tirent de la terre, dont celles qui se trouvent de figure quarrée & dont les jointures conviennent, sont employées dans l’édifice de