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morceaux longs & étroits avec des cisailles. Voyez Fondeur en sable.

MORTIFICATION, s. f. (Gram.) il a plusieurs acceptions assez diverses. Il se dit de la corruption de quelques parties de l’animal vivant, voyez l’article suivant. Il se dit des austérités que les personnes d’une piété timorée exercent sur elles mêmes, soit en expiation des fautes qu’elles ont faites, soit en préservatif de celles qu’elles pourroient commettre. Il se dit d’une impression désagréable excitée dans notre ame par le reproche, la honte, le blâme, le défaut de succès, les contre-tems, les contradictions, &c.

Mortification, en Médecine, est une extinction totale de la chaleur naturelle du corps ou d’une partie du corps. Voyez Chaleur.

Quelques uns définissent la mortification, une maladie où les sucs naturels d’une partie perdent tout-à-fait leur mouvement propre, & acquierent par ce moyen un mouvement de fermentation & de corruption qui detruit le tissu de la partie.

Il y a deux sortes ou plutôt deux degrés de mortification : le premier appellé gangrene, qui est une mortification imparfaite ou commençante ; le second appellé sphacele, qui est une mortification entiere ou complette. Voyez Gangrene & Sphacele.

MORTIFIER. (Chimie.) Ce terme est usité dans la chimie moderne. Il signifie détruire dans un mixte la qualité qu’on y regarde comme essentielle, propre, caractéristique. Par exemple, la fluidité ou la volatilité dans le vif-argent, la corrosivité dans les acides. Ainsi on mortifie le vif-argent en l’unissant au soufre, à une graisse, à un acide, &c. les acides, en les unissant aux alkalis, à une substance métallique, &c. (b)

MORTOISE, s. f. (Art méchan.) est une entaille qui se fait dans un morceau de bois ou de fer, lorsqu’on veut faire quelque assemblage.

Mortoise, simple piquée juste en about, (Charpent.) est celle qui a des embrevemens & des faussemens piqués autant juste en gorge qu’en about. Voyez les Pl. de Charp. & de Menuis.

Mortoise du gouvernail, (Marine) c’est le trou qu’on fait à la tête du gouvernail, afin d’y passer la barre.

MORTODES, s. f. pl. (Comm.) fausses perles dont on fait quelque commerce avec les Negres du Sénégal & autres endroits de la Guinée. On les appelle en général perles gauderonnées ; il y en a de rondes, d’ovales & d’autres formes.

MORTUAIRE, adj. (Jurisprud.) se dit de ce qui regarde la mort. Registre mortuaire est celui où l’on écrit l’inhumation des défunts. Les curés & supérieurs des monasteres & hôpitaux sont obligés de tenir des registres mortuaires. Voyez Registre.

On appelle extrait-mortuaire le certificat d’un enterrement tiré sur le registe : droits mortuaires sont ceux que les curés sont autorisés de prendre pour les enterremens. Anciennement quelques curés prenoient dans la succession de chaque défunt un droit nommé mortuaire, consistant en une certaine quantité de bétail ou autres effets, & ce pour s’indemniser des dixmes ou autres droits que le défunt avoit négligé de payer. Les constitutions synodales de Pierre Quivil, évêque d’Excestre, suffragant de Cantorbéry, publiées le 16 Avril 1287, recommandent le payement de ce droit ; mais il n’étoit pas établi partout. Voyez Fleury, hist. ecclésiast. (A)

MORVAN, le, (Géog.) en latin Morvinus pagus ; contrée de France contiguë au Nivernois, & sur les confins du duché de Bourgogne. C’est un pays de montagnes & de bois, abondant en gras paturages ; il s’étend le long de la riviere d’Yonne, & est presque tout du diocèse d’Autun, sans être, du-moins

pour la plus grande partie, des dépendances du duché de Bourgogne. Les seuls lieux un peu remarquables du Morvan sont Vezelay, Chateau-Chinon, & Auroux. (D. J.)

MORUE, MORHUE, MOLUE, molua, s. f. (Hist. nat. Icthiol.) Rond. poisson de mer dont la longueur s’étend jusqu’à quatre piés, & dont la largeur est d’environ un pié. Il a le corps gros & arrondi, le ventre fort avancé, le dos & les côtés d’une couleur olivâtre, salé ou brune mêlée de taches jaunâtres ; les écailles petites & très-adhérentes au corps ; les yeux grands & couverts d’une membrane lache & diaphane, & l’iris des yeux blanche ; il y a sur les côtés une large ligne blanche qui s’étend depuis l’angle supérieur des ouies jusqu’à la queue, en suivant la courbure du ventre. Ce poisson n’a qu’un seul barbillon long à peine d’un doigt, qui tient au coin de la mâchoire inférieure. La langue est large, molle, ronde ; les mâchoires ont des dents disposées en plusieurs rangs, dont l’un est composé de dents beaucoup plus longues que les autres. Il se trouve, comme dans le brochet plusieurs dents mobiles entre les dents solides : on découvre encore de petites dents placées fort près les unes des autres entre les dernieres ouies, sur le haut du palais, & même plus bas, prés l’orifice de l’estomac. La morue a trois nageoires sur le dos, une à chaque ouie, une de chaque côté de la poitrine, & deux derriere l’anus l’une au-devant de l’autre. La queue est presque plate & non fourchue.

Les morues sont si abondantes au grand banc de Terre-neuve, qu’un seul homme en prend en un jour trois à quatre cens. On les pêche à la ligne, & les entrailles de celles qu’on vuide servent d’appât pour en prendre d’autres.

Selon M. Anderson dans son histoire naturelle de l’Islande, on a donné à la morue le nom de cabeliau dans tout le Nord & chez les Hollandois. Elle se nourrit de toutes sortes de poissons, principalement de harengs & de crabes ; elle digere en six heures de tems des corps très-durs, comme les taies des crabes qu’elles avalent : ces taies deviennent bientôt aussi rouges qu’une écrevisse qu’on auroit fait cuire ; elles se dissolvent ensuite en une sorte de bouillie épaisse qui se digere tout-à-fait en très-peu de tems. La morue est un poisson très-goulu & insatiable ; il lui arrive souvent d’avaler des corps absolument indigestes, comme des morceaux de bois. La morue blanche, la morue verte & la merluche, ne different que par les différentes façons de préparer les cabeliaux : la merluche est une morue desséchée. Les morues que l’on pêche dans la haute mer à 40 ou 50 brasses de profondeur, sont meilleures, plus tendres & plus délicates que celles que l’on prend sur les côtes & dans les golfes peu profonds. Suite de la mat. med. par MM. de Nobleville & Salerne, regne animal, tome II. part. I. Voyez Poisson.

Morue, (Pêche.) Il y a deux sortes de morues, l’une qui s’appelle morue verte ou blanche, l’autre morue seche ou parée, ou merlu, ou merluche. La pêche s’en fait dans la baie de Canada, au grand banc de Terre-neuve, le banc Vert, l’île Saint-Pierre & l’île de Sable. On se sert de vaisseaux à deux ponts ordinairement, du port de 100 à 150 tonneaux, pour charger 30 à 35 milliers de morue verte. On a des lignes, des calus de plomb, des hameçons & des rets ; il faut avoir un bon trancheur, un bon décoleur & un bon saleur. On attribue la découverte du grand & petit banc des morues à des pêcheurs basques qui y arriverent en poursuivant des baleines, cent ans avant le voyage de Colomb. On pêche depuis le commencement de Février jusqu’à la fin d’Avril ; tout est fait en un mois ou six semaines, quelquefois on emploie quatre à cinq mois. Chaque pê-