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et, après la descente du Saint-Esprit, les apôtres y paraissent des hommes tout nouveaux. Jésus-Christ leur avait dit : « Celui qui croira en moi fera les œuvres que je fais et en fera de plus grandes ». Il leur avait également prédit qu’ils seraient conduits devant les magistrats et les rois, flagellés dans les synagogues et exposés à mille cruels traitements. Mais il leur avait promis qu’ils sortiraient victorieux de toutes ces épreuves, et il avait annoncé que son Évangile serait prêché dans le monde entier. Eh bien ! le livre des Actes nous raconte le parfait accomplissement de ces diverses prédictions et de plu sieurs autres que les apôtres avaient recueillies de la bouche de Jésus-Christ. (Jn. 14,12 ; Mt. 10,18)
Vous y verrez les apôtres parcourir d’un vol rapide les continents et les mers, et de timides et grossiers qu’ils étaient naguère, devenir soudain des hommes nouveaux. Ils méprisent les richesses et la gloire, et ils se montrent supérieurs à la colère, à la volupté et à toutes les autres passions. Vous les verrez encore s’aimer comme des frères, étouffer tout souvenir de leurs anciennes rivalités et bannir tout désir comme toute dispute de prééminence. Mais surtout vous admirerez en eux le radieux épanouissement de la charité ; car ils cultivent avec un soin tout particulier cette vertu que Jésus-Christ leur avait tant recommandée, et dont il avait dit : « Tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous vous aimez les uns les autres ». (Jn. 13,35) Quant aux vérités dogmatiques, ce livre en renferme un certain nombre que sans lui nous ne connaîtrions que très-imparfaitement ; et l’on peut dire en général qu’il éclaire d’un jour tout nouveau la vie, les exemples et la doctrine de Jésus-Christ, qui est le chef de tous les chrétiens.
Toutefois, la plus grande partie des Actes contient le récit des travaux de saint Paul, qui a plus travaillé que tous les autres apôtres ; et la raison en est que l’auteur de ce livre est saint Luc, son disciple. Au reste, la fidélité de ce disciple à ne pas abandonner son maître est, entre mille preuves de sa haute vertu, une des plus éclatantes. C’est le témoignage que lui rend saint Paul,'lorsqu’il écrit à Timothée Démas et Hermogène m’ont quitté pour aller, l’un en Galatie et l’autre en Dalmatie, et « Luc est seul avec moi ». (2Tim. 4,11) Dans la seconde épître aux Corinthiens, il dit de lui que « son éloge se trouve, à cause de l’Évangile, dans toutes les églises » (2Cor. 8,18) ; et dans sa première épître aux mêmes Corinthiens, il avait déjà dit : « Jésus-Christ apparut à Pierre et ensuite aux onze, selon l’Évangile que vous avez reçu ». (1Cor. 15,5, 1) Or cet évangile est celui de saint Luc. Mais si Jésus-Christ a inspiré le premier ouvrage, il n’est pas moins évident qu’il a aussi inspiré le second. Et si l’on me demande pourquoi saint Luc qui est resté auprès de l’apôtre jusqu’à son martyre, n’a pas prolongé son récit jusqu’à ce moment, je répondrai que le livre des Actes, tel que nous le possédons, remplit parfaitement le but de l’écrivain. Car les évangélistes ne se sont proposé que d’écrire le plus essentiel ; et ils ont si peu ambitionné la gloire de beaucoup écrire, qu’ils nous ont laissé un grand nombre de traditions orales.
Toutes choses sont donc admirables en ce livre, mais principalement le langage simple et familier avec lequel les apôtres, sous la direction du Saint-Esprit, expliquent la divine économie de notre salut. Il faut observer aussi que, dans les questions élevées qui se rattachent à Jésus-Christ, ils ont peu parlé de sa divinité et se sont longuement étendus sur son humanité, sa passion, sa résurrection et son ascension. Car l’important, alors, était d’établir ces points de notre foi ; en sorte que l’on crût en Jésus-Christ ressuscité et monté aux cieux. Nous voyons dans l’Évangile que le divin Sauveur se préoccupe surtout de prouver qu’il a été envoyé par le Père ; et dans le livre des Actes, il insiste spécialement sur ces trois faits.. qu’il est ressuscité, qu’il est monté au ciel, et qu’il est revenu vers celui qui l’avait envoyé. Ce dernier article était celui qu’il fallait proposer le premier ; autrement les dogmes de la résurrection et de l’ascension n’eussent rendu l’ensemble de la foi que plus incompréhensible aux Juifs. C’est pourquoi on les initie peu à peu et comme insensiblement aux plus sublimes vérités du christianisme. Aussi l’apôtre, annonçant Jésus-Christ dans Athènes, ne parle-t-il que de son humanité. Et c’était prudence de sa part ; car lorsque le Christ lui-même révélait aux Juifs son égalité de nature avec Dieu le Père, ils le traitaient de blasphémateur et voulurent plusieurs fois le lapider ; mais comment eussent-ils, après le supplice du calvaire, accueilli ce même langage