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de soi ; et aussi parce que ses disciples ne connaissaient pas la résurrection, et qu’ils étaient encore trop imparfaits ; enfin, pour que les Juifs ne parussent pas avoir puni en lui un violateur de la loi ; ménageait le plus souvent ses termes et ne s’éloignait pas ouvertement de la loi. Mais une fois les disciples séparés, les Juifs rejetés, alors que beaucoup allaient croire et obtenir rémission de leurs péchés, alors que le soin de parler de lui était confié à d’autres, ce n’était plus à lui, comme de juste, de se célébrer lui-même. Ainsi donc, semble-t-il dire, si je n’ai pas enseigné ce que je devais enseigner, il ne faut pas l’imputer à mon ignorance, mais à la faiblesse de mes auditeurs. Voilà pourquoi, ayant dit : « Le Saint-Esprit vous introduira dans toute vérité », il a ajouté : « Il ne parlera pas de lui-même ». Mais que le Saint-Esprit n’ait pas besoin d’apprendre, saint Paul le déclare formellement. « Nul ne connaît », dit-il, « ce qui est en Dieu, que l’Esprit de Dieu ». (1Cor. 2,11) De même donc que l’esprit de l’homme connaît sans avoir appris d’un autre, ainsi le Saint-Esprit « recevra de ce qui est à moi », c’est-à-dire, il ne vous apprendra rien qui ne soit conforme à ma doctrine[1]. « Tout ce qui est à mon Père est à moi ». Puis donc que ces choses sont à moi, et que le Saint-Esprit vous enseignera ce qu’il a appris de mon Père, il dira ce qui est de moi.

3. Mais pourquoi le Saint-Esprit n’est-il pas venu avant que Jésus-Christ s’en allât ? Parce que, tant que la malédiction subsistait, que le péché n’était point détruit et que les hommes étaient condamnés et destinés au supplice, le Saint-Esprit ne pouvait point venir. Il faut donc, dit-il, que l’inimitié soit détruite, et que nous soyons réconciliés avec Dieu (Eph. 2,14, 16), pour que nous puissions recevoir ce don. Et pourquoi le Sauveur dit-il : « Je vous l’enverrai ? » C’est comme s’il disait : je vous préparerai, afin que vous puissiez le recevoir. Car comment pourrait-on envoyer celui qui est partout ? Mais de plus, en disant cela, Jésus-Christ marque la distinction des personnes : voilà pourquoi il parle de la sorte. Et comme le Fils et le Saint-Esprit ne peuvent se séparer, le Sauveur persuade à ses disciples de s’attacher à lui, de l’honorer et de l’adorer. Il pouvait lui-même opérer toutes ces choses, mais il lui laisse faire des miracles, afin qu’ils connaissent sa dignité. Comme le Père a pu produire tout ce qui existe, et que le Fils a créé pareillement, pour nous montrer sa puissance ; le Saint-Esprit de même est venu pour se faire connaître. C’est pour cette raison que le Fils s’est incarné, laissant à l’opération du Saint-Esprit l’occasion de s’exercer, pour fermer la bouche à ceux qui voudraient se servir de ce témoignage de son ineffable bonté pour favoriser leurs sentiments impies.

Effectivement, s’ils disent : Le Fils s’est incarné, parce qu’il est inférieur au Père, nous leur répondrons : Que direz-vous donc du Saint-Esprit ? Quoiqu’il n’ait pas pris une chair, vous ne direz pas néanmoins qu’il est plus grand que le Fils, ni que le Fils lui est inférieur. Voilà pourquoi, dans le baptême, on nomme la Trinité : car le Père peut tout faire, tout accomplir, et le Fils aussi, et le Saint-Esprit de même. Mais comme, à l’égard du Père, personne ne le révoque en doute, et que le doute tombe sur le Fils et sur le Saint-Esprit ; dans le sacrement du baptême on nomme la Trinité, afin que vous reconnaissiez la communion et l’unité d’essence et de dignité dans le don des biens ineffables qui nous y est fait en commun par les trois Personnes. Que le Fils puisse faire par lui-même dans le baptême ce qu’il fait en commun avec le Père et avec le Saint-Esprit, la preuve en est claire dans ce qu’il disait parlant aux Juifs ; écoutez-le : « Afin que vous sachiez que le Fils de l’homme a le pouvoir dans la terre de remettre les péchés ». (Mc. 2,10) Et : « Afin que vous soyez des enfants de lumière ». (Jn. 12,36) Et encore : « Je leur donne la vie éternelle ». (Id. 10,28) Et derechef : « Afin que les brebis aient la vie, et qu’elles l’aient abondamment ». (Id. 10)

Maintenant, voyons à l’égard du Saint-Esprit, nous lui verrons faire la même chose : « Les dons du Saint-Esprit », dit l’apôtre, « qui se font connaître au-dehors, sont donnés à chacun pour l’utilité ». (1Cor. 12,7) Celui donc qui fait ces choses peut, à plus forte raison, remettre les péchés. Et encore : « C’est l’Esprit qui vivifie ». (Jn. 6,64) Et : « il vous donnera la vie par son Esprit qui habite en vous ». (Rom. 8,11) Et : « L’Esprit est à cause de la justice » (Id. 10) qu’il produit en vous. Et encore : « Si vous êtes

  1. « Conforme à ma doctrine », ou « qui ne vienne de ma part ». Etant comme mon envoyé et mon ambassadeur, l’interprète et l’exécuteur de mes volontés.