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« Lors en effet que tu te seras converti au Christ, le voile sera enlevé » ; tu portais la circoncision secrètement, tu porteras la croix sur le front. – Pour nous, continue l’Apôtre, « contemplant à face découverte la gloire du Seigneur, nous nous transformons en sa ressemblance, nous élevant de clarté en clarté, comme par l’Esprit du Seigneur[1] ». Ah ! ne t’attribue pas cette transformation, ne la regarde point comme ton œuvre ; autrement, méconnaissant la justice de Dieu et voulant établir la tienne, tu ne serais pas soumis à cette divine justice. Passe au Christ, ô toi qui t’honores d’être circoncis. Ne mets-tu pas ta gloire dans ce que tu rougirais de montrer ? Sans doute, la circoncision est un signe, un signe véridique et commandé par Dieu mais c’est un signe de ce qui est caché ; car le Nouveau Testament était voilé dans l’Ancien, comme l’Ancien se révèle dans le Nouveau. Hâte-toi donc de mettre à découvert ce signe caché et de placer sur ton front ce qui est voilé sous tes vêtements. Ignore-t-on que le Christ était figuré par là ? Aussi on employait le couteau de pierre ; et le Christ était la Pierre[2]. Aussi la circoncision se faisait le huitième jour ; et le huitième jour est consacré au Seigneur à cause de sa résurrection. Aussi l’Apôtre en quittant ces ombres pour s’attacher au Christ et rejeter le voile antique, sait-il de quoi il a à se glorifier. « À Dieu ne plaise que je me glorifie, dit-il, sinon dans la croix de Jésus-Christ Notre-Seigneur ! » Et que venait-il d’enseigner ? « Que ceux qui se font circoncire ne gardent pas la loi, mais veulent que vous vous fassiez circoncire pour se glorifier en votre chair[3] ». Et vous, que voulez-vous, ô grand Apôtre ? – Que tu arbores le signe sacré sur ton front. « À Dieu ne plaise que je me glorifie, sinon dans la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ ! » Je sais maintenant ce que j’ignorais ; la nouvelle alliance est faite, et voilà mis au grand jour ce qui était dans les ténèbres. La lumière s’est levée sur ceux qui étaient assis à l’ombre de la mort[4] ; ils voient ce qu’ils ne voyaient pas ; ce qui était secret est maintenant à découvert. La Pierre fondamentale est descendue parmi nous, tous elle nous a circoncis spirituellement, et sur le front des fidèles rachetés elle a gravé le symbole de l’humilité.

7. Maintenant donc glorifions-nous de la croix du Christ, et n’ayons pas honte des abaissements du Très-Haut. Jusques à quand dureront cette distinction des aliments et cette distinction des aliments et cette circoncision de la chair ? Voilà des hommes qui font un Dieu de leur ventre et qui mettent leur gloire dans l’ignominie[5]. Qu’ils croient enfin, puisqu’ils le voient accompli, ce qui leur était annoncé d’avance. Ah ! si nous avons appelé son avènement, ne soyons point ingrats envers le Sauveur, puisqu’il est arrivé : « Cependant comment les Juifs sont-ils devenus, relativement à la grâce nouvelle, des bannis, des étrangers, des transfuges ? C’est que leur zèle pour Dieu n’est pas conforme à la science ». À quelle science ? C’est qu’ils méconnaissent la justice de Dieu et cherchent à établir la leur » ; c’est que ne voyant Dieu que dans ses commandements, ils s’estiment capables de les accomplir par leurs propres forces et s’éloignent ainsi du secours divin qui leur est pourtant nécessaire. « Car le Christ est la fin de la loi », il en est le perfectionnement, « en ce sens qu’il communique la justice à qui croit en lui[6] ». En effet quand on croit en lui, comme il justifie l’impie », l’impie et non le saint, l’impie qu’il rend saint, « la foi est imputée à justice. « Si Abraham lui-même doit sa justification à ses œuvres », comme s’il en était l’auteur et l’auteur par lui-même ou le premier principe, « il a de quoi se glorifier, mais non devant Dieu[7] ». Cependant celui qui se glorifie doit se glorifier en Dieu », et pouvoir dire avec assurance : « Dans votre justice délivrez-moi et sauvez-moi ». C’est le Seigneur effectivement qui délivre et qui sauve, non pas ceux qui s’attribuent ce qu’ils ont reçu, mais ceux qui espèrent en lui. « Il y a sagesse à savoir même de qui on a reçu le bienfait[8] ». Qui parle ainsi ? Un homme qui a prié Dieu pour obtenir de lui la tempérance. Mais peut-on, sans quelque tempérance, accomplir, je ne dis pas toute justice, mais un devoir quelconque de justice, puisque c’est le plaisir qui porte au péché, sans quoi on ne pécherait pas ? La justice, hélas l’a moins d’attraits, peut-être même n’en offre-t-elle pas du tout, au moins n’en éprouve-t-on pas pour, elle autant qu’il conviendrait. Pourquoi cette espèce de dégoût ? Ne vient-il pas

  1. 2Co. 3, 15-16, 18
  2. 1Co. 10, 4
  3. Gal. 6, 14, 13
  4. Isa. 9, 2.
  5. Phi. 3, 19
  6. Rom. 10, 2-3
  7. Id. 4, 5, 2
  8. Sag. 8, 21