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pour Dieu ; et afin de nous guérir pour Dieu, croyons en sa droite : « Parce que sa droite et la sainteté de son bras ont fait pour lui des guérisons ».
2. « Le Seigneur a fait connaître son salut[1] ». Sa droite, son bras, son salut, c’est Notre-Seigneur. Jésus-Christ, dont il est dit : « Et toute chair verra le salut de Dieu[2] ». C’est encore de ce salut que le saint vieillard Siméon a dit en prenant l’enfant dans ses bras : « C’est maintenant, Seigneur, que vous laissez aller en paix votre serviteur, selon votre parole, car mes yeux ont vu votre salut[3]. Le Seigneur a fait connaître son salut ». À qui l’a-t-il fait connaître ? À une partie du monde ou du monde entier ? Ce n’est point à une partie seulement. Que nul ne nous trompe, que nul ne nous séduise en disant : « Le Christ est ici, ou il est là[4] ». Dire qu’ « il est ici ou là », c’est ne montrer que des parties du monde. Or, « à qui le Seigneur a-t-il révélé son salut ? » Écoute la suite « Devant toutes les nations, il a dévoilé sa justice ». La droite de Dieu, le bras de Dieu, le salut de Dieu et la justice de Dieu, c’est notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ.
3. « Il s’est souvenu de sa miséricorde envers Jacob, et de sa vérité envers la maison d’Israël[5] ». Qu’est-ce à dire qu’ « il s’est souvenu de sa miséricorde et de sa vérité ? » Promettre était un acte de miséricorde : promettre et accomplir sa miséricorde, c’était manifester sa vérité. La miséricorde a donc fait la promesse, et la promesse accomplie a montré la vérité. « Il s’est souvenu de sa miséricorde envers Jacob, et de sa vérité envers Israël ». Quoi donc ? Est-ce seulement de Jacob, seulement d’Israël ? Cette race des Juifs, cette postérité d’Abraham selon la chair, s’appelle ordinairement maison d’Israël ; or, cet Israël était Jacob, car Jacob était fils d’Isaac, et Isaac fils d’Abraham. Jacob était donc petit-fils d’Abraham ; il eut douze fils, et de ces douze fils est issue toute la nation Juive. Est-ce à eux seulement que le Christ était promis ? Si l’on examine ce qu’est Israël, c’est à Israël qu’a été promis le Christ. Israël signifie qui voit Dieu : or, nous verrons Dieu face à face, si nous le voyons d’abord par la foi. Que notre foi ait des yeux, et la vérité de notre foi se manifestera : croyons-en celui que nous ne voyons point, et nous verrons avec joie ; désirons celui que nous ne voyons point, pour jouir de lui quand nous le verrons. Nous sommes donc ici-bas Israël par la foi, un jour nous serons Israël, en voyant Dieu face à face ; non plus en énigme et dans un miroir[6], mais, comme l’a dit saint Jean : « Mes bien-aimés, nous sommes les enfants de Dieu ; mais ce que nous serons un jour n’apparaît point encore. Nous savons que quand il viendra nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu’il est[7] ». Préparez vos cœurs pour cette vision, vos âmes à cette grande joie : pour te montrer son soleil, Dieu te demanderait seulement de préparer les yeux du corps ; mais comme il daigne nous montrer la beauté de sa sagesse, préparez les yeux de votre cœur : Bienheureux ceux dont le cœur est pur, parce qu’ils verront Dieu[8]. « Le Seigneur s’est souvenu de sa miséricorde envers Jacob, et de sa vérité envers Israël ». Quel est cet Israël ? De peur que ta pensée ne s’arrête que sur la nation des Juifs, écoute ce qui suit : « Toutes les extrémités de la terre ont vu le salut de notre Dieu ». Il n’est pas dit : Toute la terre ; mais : « Tous les confins de la terre » ; comme on dit d’un bout à l’autre. Que nul ne déchire, que nul ne sépare le Christ : il est dans une puissante unité, Il n’a donné un si grand prix que pour acheter le monde entier. « Tous les confins de la terre ont vu le salut de notre Dieu ».
4. Donc, parce qu’ils l’ont vu, « que la terre entière jubile au nom du Seigneur ». Déjà vous savez ce qu’est la jubilation, réjouissez-vous et parlez. Si la parole ne peut exprimer votre joie, soyez dans la jubilation, que cette jubilation exprime ce que la parole ne saurait exprimer. Que cette joie cependant ne soit point muette, que le cœur ne se taise ni sur Dieu, ni sur ses dons. Si tu parles pour toi, tu es guéri pour toi : si la droite de Dieu t’a guéri pour lui, chante celui pour qui tu es guéri. « Tous les confins de la terre ont vu le salut de Dieu. Que la terre entière jubile au nom du Seigneur. Chantez, poussez des cris de joie, chantez des psaumes ».
5. « Chantez vos hymnes à notre Dieu sur la harpe, sur la harpe et sur le psaltérion[9] ». Chantez, non seulement de la voix ; joignez-y vos œuvres, afin de ne pas chanter seulement,

  1. Ps. 97,2
  2. Lc. 3,6
  3. Id. 2,28-30
  4. Mt. 24,23
  5. Ps. 97,3
  6. 1 Cor. 13,12
  7. Jn. 3,2
  8. Mt. 5,8
  9. Id. 5