Nouveaux contes berbères (Basset)/93

Ernest Leroux, éditeur (Collection de contes et de chansons populaires, XXIIIp. 67-68).

93

Les deux femmes (170).
(Mzab).

Au temps passée deux femmes, l’une pécheresse, l’autre vertueuse, allèrent consulter un t’aleb. « Que faites-vous dans ce monde ? leur dit-il — Moi, dit la seconde, j’ai obéi à mes parents et je fais l’aumône. — Moi, dit l’autre, j’ai été adultère. — Tu n’auras pas l’approbation de Dieu, dit le t’aleb. » Ensuite il se tut et demeura quelque temps sans parler, puis il reprit : « Vous irez passer la nuit dans le cimetière de Sidi ’Aïssa, chacune se couchera sur son tombeau et récitera dix fois la Sourate : Dis, Dieu… » Elles s’endormirent : un beau jeune homme trouva la femme vertueuse et lui donna en songe à manger. « Tu visiteras mon verger, lui dit-il. » Elle y trouva des dattes nouvelles bien que ce ne fût pas la saison, des raisins, des figues, des prunes, des grenades, des melons, des aubergines. « Ne crains pas, dit-il, Dieu t’aime. » Pour la pécheresse, un ogre noir alla vers elle et lui dit : « Dieu ne veut pas de toi, tu viendras chez moi ; je suis le noir punisseur : je me suis révolté contre Dieu, j’ai volé le bien des gens, j’ai tué des âmes. Dieu t’envoie vers moi : il ne veut pas de toi. » Il la frappa tellement qu’elle en mourut. La femme vertueuse se leva le lendemain et voulut réveiller sa compagne, elle la trouva morte. Elle alla chez le t’aleb et lui raconta ce qu’elle avait vu. « Va avec le bien, lui dit-il. Dieu t’aime, continue ta vie vertueuse » (171).