Nouveaux contes berbères (Basset)/69

Ernest Leroux, éditeur (Collection de contes et de chansons populaires, XXIIIp. 18-20).

69

La panthère, le chacal et le hérisson (135).
(Bougie).

Le chacal et le hérisson allèrent ensemble sur une route et trouvèrent un silo plein de blé. Le chacal dit à son compagnon : « Descendons manger quelque chose. — « Descends », dit le hérisson. Ils descendirent ensemble et mangèrent jusqu’à ce qu’ils furent rassasiés.

Le chacal demanda : « Combien as-tu de ruses ? — Une et demie. Et toi, combien en as-tu ? — Cent et une. — Attends que je t’enlève une tique du cou, » ajouta le hérisson. Il sauta sur son col et se trouva dehors. Le chacal resta là. « Donne-moi ta moitié de ruse, dit-il à son compagnon. — Mange du blé jusqu’à ce que tu sois rassasié : mets en un peu dans tes oreilles et dans ta bouche : tu te coucheras. Quand viendra le maître du silo, il te jettera dehors et tu t’en iras. » Il suivit ce conseil. Quand le maître arriva, il le trouva étendu et le jeta dehors.

Le chacal trouva des souliers, les mit à ses pieds, et, en route, il rencontra la panthère qui lui demanda : « Qui est-ce qui t’a fait ces souliers-là ? — C’est moi qui les ai faits, répondit le chacal. — Fais-m’en aussi. — Va tuer une vache superbe. » Il alla en tuer une. Quand ils eurent mangé la chair, il lui fit des souliers, puis il lui dit : « Va au soleil, tu y resteras jusqu’à ce qu’ils sèchent. » Elle suivit ce conseil. Quand les souliers furent desséchés, elle ne put pas marcher. Le chacal partit. La panthère se mit à pleurer : des perdrix la trouvant ainsi lui apportèrent de l’eau dans leurs becs jusqu’à ce que la peau fût amollie ; alors elle ôta ses souliers et remercia les perdrix.

Elle se mit en route pour chercher après le chacal. Quand elle l’eut trouvé, il s’enfuit. Elle rencontra un vieillard très âgé. « Comment ferai-je ? lui demanda-t-elle ? — Va égorger une vache, amène les chacals pour qu’ils la mangent : pendant le repas, ils regarderont devant eux ; celui qui regardera de ton côté, prends-le. »

Elle s’en alla et fit comme le vieillard lui avait dit. Elle amena les chacals partout où elle en trouva ; en mangeant, ils regardaient devant eux, mais le coupable regarda de son côté. Elle le vit, le frappa avec ses ongles et le prit par la queue : il la coupa et s’enfuit. Les autres chacals en firent autant.

La panthère retourna vers le vieillard et lui dit : « Il m’a échappé, il s’est enfui. » Ce chacal sans queue dit aux autres : « Allons manger des melons. » Il les amena dans un jardin, les attacha par leurs queues, puis s’écria : « Fuyons ! voilà le maître du jardin ! » Les chacals tirèrent sur leurs queues et les arrachèrent en sorte qu’on ne pouvait les distinguer.

De nouveau, la panthère alla trouver le vieillard et lui dit : « Ils sont tous sans queue. — Fais comme tu as fait la première fois », répondit-il. Elle tua une vache, amena les chacals pour la manger. Ils regardaient devant eux, mais le coupable la regarda : elle le reconnut, le saisit par le col et le tua.

C’est ainsi qu’il arrive à qui fait le mal : il meurt. Le conte est fini.