Ma vie (Cardan)/Chapitre XXXV

Traduction par Jean Dayre.
Texte établi par Jean DayreHonoré Champion (p. 94).

XXXV

MES ÉLÈVES ET MES DISCIPLES

Le premier d’entre eux fut Ambrogio Bizozoro, plus tard capitaine d’un vaisseau ragusain, homme d’esprit et de courage ; le second Lodovico Ferrari[1], bolonais, qui enseigna les mathématiques à Milan et dans sa patrie, savant distingué en cette matière ; le troisième Giovanni Battista Boscano qui fut maître des requêtes au Sénat de l’empereur Charles V ; le quatrième Gaspare Cardano, petit-fils d’un autre Gaspare, mon oncle : il devint médecin et professa publiquement la médecine (157) à Rome ; le cinquième Fabrizio Bozzi qui suivit la carrière des armes dans la région de Turin, quoiqu’on le regardât comme milanais ; le sixième Giuseppe Amato, secrétaire du gouverneur de la province ; le septième Cristoforo Sacco qui fut nommé notaire public ; le huitième Ercole Visconti[2], musicien, jeune homme fin et charmant ; le neuvième Benedetto Cattaneo, pavesan, qui se consacra au droit ; le dixième Giovanni Paolo Eufomia[3], musicien et assez cultivé ; l’onzième Rodolfo Silvestri[4], bolonais, qui devint médecin et qui exerce la médecine à Rome pendant que j’écris ceci ; le douzième Giulio Pozzi, bolonais, le seul qui manqua à son devoir de témoigner pour moi ; le treizième Camillo Zanolino, également bolonais, médecin et notaire public, aux manières raffinées ; le quatorzième Ottavio Pizzo, calabrais, qui est maintenant près de moi. Les plus distingués d’entre eux furent le second, le quatrième et le onzième, mais, de ces trois, les deux premiers moururent jeunes, le second à quarante-trois ans, le quatrième avant quarante ans.

(158) « Pour qui n’a pas de mesure, la vie est courte et la vieillesse rarement atteinte. Quoi que tu aimes ou que tu désires, ne te laisse pas trop aller à tes goûts. »


  1. Voir chap. XLI. — Cardan a consacré une notice au plus glorieux de ses disciples dans les XII geniturarum exempla (V, 500-501) et en a écrit une courte biographie (IX, 568). Né le 2 février 1522, Ferrari entra chez Cardan à l’âge de quatorze ans, sans posséder aucune connaissance littéraire, et profita si bien des leçons de son maître qu’à dix-huit ans il pouvait enseigner les mathématiques. Collaborateur de Cardan dans l’étude des équations du troisième degré, il donna seul la solution de celles du quatrième degré. Sur son rôle dans la polémique qui mit aux prises Cardan et Tartaglia, voir chap. XLVIII, note 8.
  2. Voir chap. XXX, XLIII, etc.
  3. Voir chap. XLII. Eufomia se fit le complice du second fils de Cardan, Aldo, dans un vol avec effraction commis par celui-ci aux dépens de son père, à Bologne le 22 juillet 1569 : un coffre fut forcé et on vola environ trois cents livres d’argent et des pierres précieuses d’une valeur de cent trente-deux écus. Les coupables furent arrêtés, Eufomia condamné aux galères, Aldo banni. (Rivari, op. cit. — Cf. chap. XXVII, note 6 et chap. XLI.)
  4. Voir chap. XLIII. Silvestri qui avait fidèlement accompagné son maître à Rome lui succéda au Collège des médecins le 24 novembre 1576 (Bertolotti, loc. cit.) et assura l’édition posthume de De sanitate tuenda ac uita producenda (Rome, F. Zanetti, 1580, in-fol.)