Mécanique analytique/Partie 2/Section 5

Gauthier-Villars (Œuvres de Lagrange. Tome XIp. 345-368).
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Deuxième partie


SECTION CINQUIÈME.

MÉTHODE GÉNÉRALE D’APPROXIMATION POUR LES PROBLÈMES DE DYNAMIQUE, FONDÉE SUR LA VARIATION DES CONSTANTES ARBITRAIRES.


Les équations générales que nous avons données dans la Section précédente, étant du second ordre, demandent encore des intégrations qui surpassent souvent les forces de l’analyse connue ; on est obligé alors d’avoir recours aux approximations, et nos formules fournissent aussi les moyens les plus propres à remplir cet objet.


1. Toute approximation suppose la solution exacte d’un cas de la question proposée dans lequel on a négligé des éléments ou des quantités qu’on regarde comme très petites. Cette solution forme le premier degré d’approximation, et on la corrige ensuite en tenant compte successivement des quantités négligées.

Dans les problèmes de Mécanique qu’on ne peut résoudre que par approximation, on trouve ordinairement la première solution en n’ayant égard qu’aux forces principales qui agissent sur les corps ; et, pour étendre cette solution aux autres forces qu’on peut appeler perturbatrices, ce qu’il y a de plus simple, c’est de conserver la forme de la première solution, mais en rendant variables les constantes arbitraires qu’elle renferme ; car, si les quantités qu’on avait négligées et dont on veut tenir compte sont très petites, les nouvelles variables seront à peu près constantes, et l’on pourra y appliquer les méthodes ordinaires d’approximation. Ainsi la difficulté se réduit à trouver les équations entre ces variables.

On connaît la méthode générale de faire varier les constantes arbitraires des intégrales des équations différentielles, pour que ces intégrales conviennent aussi aux mêmes équations augmentées de certains termes ; mais la forme que nous avons donnée, dans la Section précédente (art. 10), aux équations générales de la Dynamique a l’avantage de fournir une relation entre les variations des constantes arbitraires que l’intégration doit y introduire, laquelle simplifie singulièrement les formules de ces variations, dans les problèmes où elles expriment l’effet des forces perturbatrices. Nous allons d’abord démontrer cette relation ; nous donnerons ensuite les équations les plus simples pour déterminer les variations des constantes arbitraires dans les problèmes dont il s’agit.

§ I. — Où l’on déduit des équations données dans la Section précédente une relation générale entre les variations des constantes arbitraires.

2. Soit un système quelconque de corps animés par des forces accélératrices qui tendent à des centres quelconques, fixes ou non, et qui soient proportionnelles à des fonctions quelconques de leurs distances à ces centres.

Supposons que, en ayant égard aux équations de condition du système, on ait exprimé les coordonnées de chacun des corps en fonctions d’autres variables qui soient tout à fait indépendantes entre elles et qui suffisent pour déterminer la position du système à chaque instant.

On aura, pour le mouvement de tout le système, les équations de l’article 10 de la Section précédente, et il est facile de voir que ces équations seront du second ordre par rapport aux variables de sorte que les valeurs complètes de ces variables, qu’on trouvera par l’intégration et qui seront exprimées en fonctions du temps contiendront deux fois autant de constantes arbitraires qu’il y a de variables. Comme ces constantes doivent demeurer arbitraires, on peut les faire varier à volonté ; ainsi l’on pourra différentier les équations dont il s’agit relativement à ces constantes, qui sont supposées contenues dans les expressions des variables

3. Faisons, pour plus de simplicité,

la quantité deviendra une fonction de et de et si les forces tendent à des centres fixes ou à des corps du même système, la quantité sera une simple fonction de Dans ce cas, en faisant on aura

où l’on pourra changer la caractéristique en puisqu’elle ne sert qu’à représenter des différences partielles.

Ainsi les équations différentiellesdu mouvement du système (art. 10, sect. IV), étant multipliées par se réduiront à cette forme plus simple

4. Différentions ces équations par rapport à la caractéristique [1], que nous regarderons comme relative uniquement aux variations des constantes arbitraires qui sont censées contenues dans les expressions des variables dont est fonction ; et comme la caractéristique qui affecte les termes n’est relative qu’à la variable qui représente le temps, on pourra, par les principes du calcul des variations, changer la double caractéristique en de sorte qu’on aura les équations

De même, si, pour représenter des variations différentes des mêmes constantes arbitraires, on emploie la caractéristique on aura

5. Multiplions maintenant les premières équations respectivement par et retranchons de leur somme celle des dernières équations multipliées respectivement par on aura

Or mais à cause de donc

On aura pareillement

et ainsi des autres formules semblables.

Par le moyen de ces transformations, l’équation précédente deviendra de cette forme

6. Or, si l’on développe les expressions ainsi que les expressions semblables en regardant comme fonction de et de il est facile de voir que les termes multipliés par dans l’équation précédente se détruisent mutuellement. En effet, on a

,
 
ce qui donne, en ordonnant les termes par rapport aux différences partielles de ce développement
 

En changeant les caractéristiques l’une dans l’autre, on aura le développementde l’expression semblable

Mais on voit que ce changement n’en produit aucun dans le développement précédent ; d’où il suit que les deux expressions sont identiques de sorte que, comme elles se trouvent dans l’équation ci-dessus avec des signes différents, elles doivent s’y détruire.

7. Ainsi l’on aura simplement l’équation

dans laquelle on peut changer en puisque et que ne doit point contenir les variables (art. 3).

On voit par cette équation que la quantité

est toujours nécessairement constante relativement au temps auquel se rapportent les différentielles marquées par la caractéristique que, par conséquent, si l’on y substitue les valeurs des variables exprimées en fonctions de et des constantes arbitraires déduites des équations d’un problème quelconque de Mécanique, la variable s’évanouira d’elle-même, quelles que soient les variations qu’on fera subir à ces constantes dans les quantités affectées des caractéristiques et ce qui est une nouvelle propriété très remarquable de la fonction qui représente la force vive de tout le système, et ce qui peut fournir un critère général pour juger de l’exactitude d’une solution trouvée par quelque méthode que ce soit. Mais l’usage principal de cette formule est pour la variation des constantes arbitraires dans les questions de Mécanique, comme nous allons le montrer.
§ II. — Où l’on donne les équations différentielles les plus simples pour déterminer les variations des constantes arbitraires, dues à des forces perturbatrices.

8. Supposons maintenant qu’après avoir résolu le problème contenu dans les équations différentielles de l’article 3 par l’intégration complète de ces équations, il s’agisse de résoudre le même problème, mais avec l’addition de nouvelles forces appliquées au même système, tendantes à des centres fixes ou mobiles d’une manière quelconque, et proportionnelles à des fonctions des distances aux centres. Ces nouvelles forces, qu’on peut regarder comme des forces perturbatrices du mouvement du système, étant d’une nature semblable aux forces d’où dépend la fonction ajouteront à cette fonction une fonction analogue que nous désignerons par De sorte qu’il n’y a qu’à mettre à la place de dans les équations de l’article 10 de la Section précédente, et, par conséquent, à la place de dans les termes de celles de l’article 3 qui contiennent les différences partielles de relatives à pour avoir les équations du nouveau problème, lesquelles seront ainsi

9. Si l’on suppose connues les expressions des variables en et en constantes arbitraires dans le cas où les seconds membres de ces équations sont nuls, on peut, en conservant ces mêmes expressions mais en rendant variables leurs constantes arbitraires, faire en sorte qu’elles satisfassent aussi à la totalité de ces équations ; et l’objet de l’analyse que nous allons exposer est de donner les formules les plus simples pour la détermination de ces constantes devenues variables.

Nous remarquerons d’abord que, puisque ces constantes sont en nombre double de celui des variables comme nous l’avons déjà observé (art. 2), et, par conséquent, en nombre double de celui des équations auxquelles il faut satisfaire, on pourra encore les assujettir à un nombre de conditions arbitraires égal à celui de ces variables.

Les conditions les plus simples et en même temps les plus appropriées à la chose sont que le valeurs de conservent aussi la même forme que si les constantes n’y variaient point. De cette manière, non seulement les espaces parcourus par les corps, mais encore leurs vitesses seront déterminés par des formules semblables, soit que les constantes arbitraires demeurent invariables, comme lorsqu’il n’y a point de forces perturbatrices, soit qu’elles deviennent variables par l’effet de ces forces.

Ces conditions auront de plus l’avantage de réduire au premier ordre les équations différentielles entre les nouvelles variables, de sorte qu’on aura un nombre double d’équations, mais du premier ordre seulement.

10. En employant, comme dans l’article 4, la caractéristique pour désigner les différentielles dues uniquement à la variation des constantes arbitraires, tandis que la caractéristique ne se rapporte qu’aux différentielles relatives au temps les conditions dont nous venons de parler seront exprimées par les équations

dans lesquelles il faut remarquer que toutes les constantes arbitraires doivent devenir variables à la fois, de sorte que la caractéristique indiquera dans la suite la variation simultanée[2] de toutes les constantes arbitraires, au lieu que, dans les formules de l’article 4 et suivants, la même caractéristique dénotait en général les différentielles relatives à la variation de toutes les constantes, ou seulement de quelques-unes d’entre elles à volonté, ainsi que l’autre caractéristique

Donc, en faisant tout varier, les différentielles de seront simplement ou bien comme si le temps seul variait.

Ainsi, dans les équations de l’article 8, la fonction sera la même, soit que les constantes arbitraires soient censées variables ou non mais, en regardant ces constantes comme variables, les différences devront être augmentées des termes dus à la variation des constantes.

D’un autre côté, comme, par l’hypothèse, les fonctions de et des constantes qui représentent les valeurs de satisfont identiquement aux mêmes équations, sans leurs seconds membres, dans le cas où ces constantes ne varient pas, quelles que soient d’ailleurs leurs valeurs, il est clair que les termes

se détruiront d’eux-mêmes et pourront, par conséquent, être effacés.

On aura donc simplement, pour la variation des constantes arbitraires, les équations

qu’il faudra combiner avec les équations données ci-dessus

Ces équations, étant en nombre double de celui des variables et, par conséquent, en même nombre que les constantes arbitraires (art. 2), serviront à déterminer toutes ces constantes devenues variables.

11. Les équations qu’on vient de trouver, étant multipliées respectivement par et ensuite ajoutées ensemble, donnent

Ici indiquent, comme dans l’article 4, des différentielles des fonctions prises en faisant varier seulement les constantes arbitraires d’une manière quelconque, soit qu’elles varient toutes en même temps, ou quelques-unes seulement à volonté.

Or, en regardant comme une fonction de on aura, en différentiant par rapport à

Donc on aura

Retranchons du second membre de cette équation la quantité

qui est nulle en vertu des équations de condition

on aura cette formule générale

en changeant en comme dans l’article 7.

On voit que le second membre de l’équation précédente est la même fonction que nous avons vue devoir être indépendante du temps (art. 7) ; d’où il suit qu’après y avoir substitué les valeurs de en fonctions de et des constantes arbitraires, on pourra y faire nul ou égal à une valeur quelconque.

12. Donc, si l’on suppose, ce qui est toujours permis, que ces fonctions, ainsi que celles qui représentent les valeurs de soient développées en séries de puissances ascendantes de de cette manière

et qu’on substitue ces valeurs dans le second membre de l’équation de l’article précédent, on pourra y faire ce qui les réduira aux seuls premiers termes

Cette équation se réduira ainsi à la forme

13. Les quantités ne peuvent être que fonctions des constantes arbitraires que la double intégration introduit dans les expressions finies des variables et l’on peut aussi les prendre pour ces mêmes constantes.


En effet, les constantes arbitraires qui donnent à la solution d’un problème de Mécanique toute l’étendue qu’elle peut avoir sont les valeurs initiales des variables, ainsi que celles de leurs différences premières, c’est-à-dire les valeurs de et de lorsque ces valeurs sont donc, dans les expressions de que nous avons adoptées Or, étant une fonction donnée de et de il est clair qu’en faisant dans les fonctions ce qui les réduit à ces constantes seront les mêmes fonctions des constantes que les fonctions le sont des variables Par conséquent, au lieu de prendre immédiatement pour constantes arbitraires, on peut prendre celles-ci qui en dépendent. Ainsi l’on aura pour les constantes arbitraires des expressions de et l’on voit que le nombre de ces constantes sera précisément double de celui des variables

De cette manière, la différentielle dans laquelle la caractéristique ne doit affecter que les constantes arbitraires contenues dans à raison des valeurs de qui renferment ces constantes, deviendra

En la substituant dans le premier membre de l’équation de l’article précédent et ordonnant les termes par rapport aux différences marquées par on aura

Comme on peut donner aux différences marquées par la caractéristique une valeur quelconque, il faudra que l’équation soit vérifiée indépendamment de ces différences, ce qui donnera autant d’équations particulières, telles que

14. Les différences marquées par la caractéristique sont proprement les différentielles des constantes arbitraires devenues variables (art. 10) ; ainsi, comme ces différentielles peuvent maintenant être rapportées également au temps il est permis et même convenable de changer les en et l’on aura, pour la détermination des nouvelles variables les équations

qui sont, comme l’on voit, sous une forme très simple, et qui fournissent ainsi la solution la plussimple du problème de la variation des constantes arbitraires.

15. Comme la fonction renferme les quantités il faudra les regarder aussi comme variables dans les différences partielles de cette fonction ; mais, lorsque la valeur de qui dépend des forces perturbatrices, est supposée fort petite, il est clair que les variations de ces quantités seront aussi fort petites, et qu’on pourra, dans la première approximation, les regarder comme constantes dans les différences partielles de et n’avoir égard à leur variabilité que dans les approximations suivantes.

Dénotons par les parties constantes de et par leurs parties variables, qui étant de l’ordre de la quantité seront nécessairement très petites, et soit la valeur de en y changeant en

On aura ainsi

et l’on aura, par le développement,

Les équations différentielles de l’article précédent donneront

car il est évident que les différences partielles relatives à peuvent être rapportées aux quantités analogues

Pour la première approximation, on aura


étant une simple fonction de donc on aura par l’intégration

En substituant ces valeurs dans l’expression de on aura, pour la seconde approximation,

et ainsi de suite.

16. Il y a ici une remarque importante à faire. Si la fonction ne contient le temps que sous les signes de sinus et cosinus, il est clair que la valeur de ne contiendra, dans la première approximation, que les mêmes sinus et cosinus. Mais on pourrait douter si, dans l’approximation suivante, elle ne contiendrait pas des termes où le temps serait hors des signes de sinus et de cosinus, et qui, croissant continuellement, augmenteraient à l’infini la valeur de et rendraient, par conséquent, l’approximation fautive.

Pour lever ce doute, nous remarquerons que de pareils termes ne pourraient venir que d’une partie constante de c’est-à-dire dégagée de tout sinus ou cosinus renfermant le temps

Soit donc cette partie qui sera fonction des constantes arbitraires Ainsi contiendra une pareille fonction de que nous dénoterons encore par

En substituant au lieu de dans l’expression de de l’article précédent, on aura la partie de due à la constante dans la seconde approximation, et cette partie sera

où l’on voit que les termes affectés de se détruisent mutuellement.

Ainsi l’on est assuré que la seconde approximation ne donne dans aucun terme qui croisse avec le temps mais il resterait à voir s’il en pourrait naître dans les approximations suivantes.

Au reste, le même terme constant pourrait donner encore dans des termes multipliés par étant combiné avec des termes non constants de la même fonction mais alors le qui se trouverait dégagé des sinus et cosinus serait en même temps multiplié par des sinus ou cosinus d’angles proportionnels au temps. La même chose aurait lieu si le coefficient de sous les signes de sinus et cosinus était fonction des constantes arbitraires parce qu’alors les différentiations partielles de relatives à ces constantes, feront sortir hors des sinus ou cosinus. Mais on peut remarquer, en général, que, lorsque les approximations successives font paraître des termes de la forme dont il s’agit, dans lesquels des sinus ou cosinus se trouvent multipliés par l’angle qui est sous ces sinus ou cosinus, ces sortes de termes sont presque toujours le résultat du développement d’autres sinus ou cosinus, et l’on peut les éviter en intégrant directement les équations différentielles entre les constantes arbitraires devenues variables.

17. Quoique les constantes arbitraires que nous avons employées soient celles qui se présentent le plus naturellement et qui donnent les résultats les plus simples, il arrive souvent que les différentes intégrations introduisent à leur place d’autres constantes, mais qui ne peuvent être que des fonctions de celles-là.

Nous désignerons, en général, les constantes arbitraires qui sont censées entrer dans les expressions des variables par dont le nombre doit être également double de celui des variables et, pour avoir les relations entre ces nouvelles constantes et les premières, il suffira de supposer dans les valeurs des fonctions et d’égaler les résultats aux quantités De cette manière on aura autant d’équations entre ces différentes constantes, par lesquelles on pourra déterminer les valeurs de en fonctions de

Nous supposerons donc ces fonctions connues, et la différentiation nous donnera tout de suite

Donc, substituant les valeurs trouvées ci-dessus (art. 14) de et divisant par on aura

Il en est de même des valeurs de pour lesquelles il n’y aura qu’à changer dans l’équation précédente en en

18. Mais ces formules contiennent encore les différences partielles relatives aux constantes et il s’agit de les changer en différences partielles relatives à ce qui est facile par les opérations connues.

En effet, comme est censée maintenant fonction de et que ces quantités sont elles-mêmes fonctions de on a tout de suite, par l’algorithme des différences partielles,

et il n’y aura plus qu’à substituer ces valeurs dans celles de

de l’article précédent.

En faisant ces substitutions et ordonnant les termes par rapport aux différences partielles de on voit d’abord que le coefficient de est nul dans la valeur de que celui de est nul dans la valeur de

Ensuite, si, pour représenter la valeur de on emploie la formule

on aura

 

Et, pour avoir la valeur de il n’y aura qu’à changer dans ces formules en et en en remarquant que l’on a

on aura ainsi

 
 
En général, si représente une quelconque des constantes arbitraires et qu’on observe que la valeur des symboles représentés par deux crochets devient nulle lorsque les deux lettres renfermées entre les crochets sont identiques, et qu’elle change simplement de signe lorsqu’on change l’ordre de ces lettres, on aura ces formules générales

19. Le principal usage de ces formules est dans la théorie des planètes, pour calculer l’effet de leurs perturbations en le réduisant à la variation des constantes arbitraires qui sont les éléments du mouvement primitif. Elles sont surtout utiles pour déterminer les variations que les astronomes appellent séculaires, parce qu’elles ont des périodes très longues et indépendantes de celles qui ont lieu dans les variables primitives.

Comme les équations de l’article 18 ne contiennent d’autres fonctions du temps que les différences partielles de la fonction si l’on cherche, par la résolution en séries ou autrement, la partie de la fonction qui est indépendante du temps et ne contient que les constantes arbitraires il suffira de substituer dans ces équations au lieu de et l’on aura directement les équations entre les quantités devenues variables, et le temps lesquelles serviront à déterminer leurs variations séculaires, parce qu’elles sont débarrassées de tout sinus ou cosinus.

§ III. — Où l’on démontre une propriété importante de la quantité qui exprime la force vive dans un système troublé par des forces perturbatrices.

20. Les constantes arbitraires dont nous venons de donner les variations dépendent de la nature de chaque problème et ne peuvent être déterminées que dans les cas particuliers. Il y en a cependant une qui a lieu, en général, pour tous les problèmes où n’est fonction que de c’est celle que l’intégration doit ajouter à car, comme les équations différentielles ne renferment alors que l’élément il est clair que, dans les expressions finies des variables en fonction de on peut toujours mettre plus une constante arbitraire à la place de

Désignons cette constante par et rapportons-y les différences marquées par la caractéristique dans la formule générale de l’article 11. On aura ainsi

Mais, puisque sont fonctions de il est clair qu’on aura

et, de même,

Donc

Par la même raison, on aura

Mais les équations différentielles de l’article 3 donnent

Donc on aura

Ainsi la formule générale de l’article 11 deviendra par ces substitutions, et après la division par

Or, on a

et comme est censée fonction de et de on aura

Donc l’équation précédente deviendra

dont le second membre doit être une fonction des constantes arbitraires, indépendante de

21. En effet, si l’on change en et en (art. 3), il est facile de voir que la quantité

sera la même chose que la quantité

que nous avons vue être toujours égale à une constante et qui se réduit, à (sect. IV, art. 14), d’où résulte l’équation laquelle exprime la conservation des forces vives du système.

Ainsi, en prenant pour une des constantes arbitraires, on aura, pour sa variation due aux forces perturbatrices contenues dans la fonction cette formule très simple

22. On pourrait aussi arriver à cette formule par un chemin plus court. En effet, si l’on reprend les équations de l’article 8, qu’on les ajoute ensemble après les avoir multipliées respectivement par et qu’on intègre en employant les mêmes réductions que nous avons pratiquées dans l’article 14 de la Section précédente, on parviendra directement à l’équation

dans laquelle la quantité qui est sous le signe n’est pas intégrable en général, parce que la fonction à cause de la mobilité qu’on peut supposer aux centres des forces perturbatrices, est censée contenir, outre les variables encore d’autres variables indépendantes de celles-là.

Dans le cas où il n’y a point de forces perturbatrices, on a simplement

Or il est évident qu’on peut conserver cette forme à l’intégrale qu’on vient de trouver, en rendant variable la constante et en faisant

mais il est visible que la quantité

n’est autre chose que la différentielle de en ne faisant varier que les quantités qui dépendent des équations différentielles primitives et qui sont supposées connues en fonctions de en nommant comme dans l’article 20, la constante qui peut toujours s’ajouter à la variable Ainsi, comme les variables ne varient qu’avec le temps il est facile de voir que la quantité dont il s’agit sera la même chose que par conséquent, on aura, comme plus haut, l’équation

23. Cette équation peut donc aussi se mettre sous la forme

pourvu que, dans la différence partielle de on ne fasse varier le qu’autant qu’il est contenu dans les expressions des variables et il résulte de cette formule que, si la fonction ne contient le temps que sous les signes de sinus et cosinus, comme cela a lieu dans la théorie des planètes, l’expression de ne pourra contenir que des termes périodiques, parce que tout terme constant de s’en ira par la différentiation relative à Ainsi, dans la première approximation, où l’on regarde comme absolument constantes les constantes arbitraires qui entrent dans la fonction l’intégrale de c’est-à-dire la valeur de ne pourra pas contenir des termes tels que qui croissent avec le temps Nous avons vu plus haut (art. 16) que la seconde approximation ne peut donner à aucun terme qui ne soit périodique ; donc la même conclusion relative à la valeur de aura lieu encore dans le seconde approximation.


24. La quantité exprime la force vive du système, et elle est égale à . Lorsque le système n’est troublé par aucune force perturbatrice, la quantité est constante, et la force vive ne dépend que des forces accélératrices contenues dans l’expression de comme on l’a vu (sect. III, art. 34). Cette quantité devient variable quand il y a des forces perturbatrices, par conséquent la force vive sera altérée par l’action de ces forces ; mais, par ce que nous venons de démontrer, on voit que ses altérations ne pourront être que périodiques si l’expression des forces perturbatrices est périodique, du moins dans les deux premières approximations. Ce résultat est d’une grande importance dans le calcul des perturbations.

Séparateur

  1. On suppose ici que, ces équations ayant été intégrées, on ait substitué aux variables leurs expressions générales fournies par cette intégration. Les équations deviennent alors identiques et l’on peut les différentier par rapport aux diverses lettres qui y figurent. (J. Bertrand.)
  2. C’est-à-dire la variation des fonctions qui remplacent ces constantes et qui, dans chaque problème, sont parfaitement déterminées, de telle sorte que leur valeur soit une fonction du temps dont la variation n’a rien d’arbitraire. (J. Bertrand.)