Mécanique analytique/Partie 1/Section 5

Gauthier-Villars (Œuvres de Lagrange. Tome XIp. 113-188).
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Première partie


SECTION CINQUIÈME.

SOLUTION DE DIFFÉRENTS PROBLÈMES DE STATIQUE.


Nous allons présentement montrer l’usage de nos méthodes dans différents problèmes sur l’équilibre des corps ; on verra par l’uniformité et la rapidité des solutions combien ces méthodes sont supérieures à celles que l’on avait employées jusqu’ici dans la Statique.

CHAPITRE I.

DE L’ÉQUILIBRE DE PLUSIEURS FORCES APPLIQUÉES À UN MÊME POINT,
DE LA COMPOSITION ET DE LA DÉCOMPOSITION DES FORCES.

1. Soit proposé de trouver les lois de l’équilibre d’autant de forces qu’on voudra, toutes appliquées à un même point et dirigées vers des points donnés.

Nommant les distances rectilignes entre le point commun d’application de ces forces et leurs points de tendance, on aura la formule


pour la somme des moments de toutes les forces, laquelle doit être nulle dans l’état d’équilibre.

Soient les trois coordonnées rectangles du point auquel toutes les forces sont appliquées ; et soient de même les coordonnées rectangles du point auquel tend la force celles du point auquel tend la force celles du point auquel tend la force et ainsi des autres ; ces coordonnées étant toutes rapportées aux mêmes axes fixes dans l’espace. On aura évidemment

 

et la quantité se transformera en celle-ci

dans laquelle on aura

Il n’est pas inutile de remarquer que, dans ces expressions, les quantités sont égales aux cosinus des angles que la ligne c’est-à-dire la direction de la force fait avec les axes des que, de même, sont les cosinus des angles que la direction de la force fait avec les mêmes axes ; et ainsi de suite (sect. II, art. 7).

§ I. — De l’équilibre d’un corps ou point tiré par plusieurs forces.

2. Cela posé, supposons en premier lieu que le corps ou point auquel les forces sont appliquées soit entièrement libre ; il n’y aura alors aucune équation de condition entre les coordonnées et la quantité devra être nulle indépendamment des valeurs de (sect. II, art. 10) ; ce qui donnera sur-le-champ ces trois équations particulières

Ce sont les équations qui renferment les lois de l’équilibre de tant de forces qu’on voudra, concourantes à un même point.

3. Si, dans les expressions de on fait ce qui est permis, puisqu’il est indifférent à quels points pris dans les directions des forces elles soient supposées tendre, on aura ces équations

d’où l’on tire, en supposant que le nombre des forces soit

et ces expressions de font voir que le point auquel sont appliquées les forces est dans le centre de gravité des points auxquels ces forces tendent.

De là résulte le théorème de Leibnitz, que, si tant de puissances qu’on voudra sont en équilibre sur un point et qu’on tire de ce point des droites qui représentent tant la quantité que la direction de chaque puissance, le point dont il s’agit sera le centre de gravité de tous les points auxquels ces lignes seront terminées.

Si donc il n’y a que quatre puissances et qu’on imagine une pyramide dont les quatre angles soient aux extrémités des droites qui représentent les puissances, il y aura équilibre entre ces quatre puissances lorsque le point sur lequel elles agissent sera dans le centre de gravité de la pyramide ; car on sait, par la Géométrie, que le centre de gravité de toute la pyramide est le même que celui de quatre corps égaux qui seraient placés aux quatre coins de la pyramide. Ce dernier théorème est dû à Roberval.

4. Supposons, en second lieu, que le corps ou point sur lequel agissent les forces ne soit pas tout à fait libre, mais qu’il soit contraint de se mouvoir sur une surface ou sur une ligne donnée ; on aura alors, entre les coordonnées une ou deux équations de condition, qui ne seront autre chose que les équations mêmes de la surface ou de la ligne dont il s’agit.

Soit donc

l’équation de la surface sur laquelle le corps ne peut que glisser ; on ajoutera à la somme des moments des forces le terme (sect. IV, art. 3), et l’on aura, pour l’équation générale de l’équilibre,

étant une quantité indéterminée.

Or, étant une fonction connue de on aura, par la différentiation,

donc, substituant et égalant ensuite séparément à zéro la somme des termes multipliés par chacune des différences on aura ces trois équations particulières de l’équilibre

d’où, chassant l’indéterminée on aura ces deux-ci

lesquelles renferment, par conséquent, les conditions cherchées de l’équilibre du corps sur la surface proposée.

5. Si l’on applique maintenant ici la théorie donnée dans l’article 5 de la Section IV, on en conclura que la surface doit opposer au corps une résistance égale à

et dirigée suivant la perpendiculaire à la surface qui aurait pour équation c’est-à-dire perpendiculairement à la même surface sur laquelle le corps est posé ; et, comme on a

il s’ensuit que la pression du corps sur la surface (pression qui doit être égale et directement contraire à la résistance de la surface) sera exprimée par et agira perpendiculairement à la même surface ; c’est uniquement à cette condition que se réduisent les deux équations trouvées ci-dessus pour l’équilibre du corps, comme on peut s’en assurer par la méthode de la composition des forces.

6. Au reste, dans le cas d’un seul corps tiré par des puissances données, on peut trouver encore plus simplement les conditions de l’équilibre, en substituant immédiatement dans l’équation

à la place de la différentielle sa valeur

tirée de l’équation différentielle de la surface donnée sur laquelle le corps peut glisser et égalant ensuite séparément à zéro les coefficients des différentielles et qui demeurent indéterminées, suivant la méthode générale de l’article 10 de la Section II.

On aura ainsi, sur-le-champ, les deux équations

qui reviennent à celles que l’on a trouvées plus haut.

Pareillement, si le corps était assujetti à se mouvoir sur une ligne de figure donnée et déterminée par les deux équations différentielles il n’y aurait qu’à substituer ces valeurs de et dans et l’on aurait, en divisant par

pour la condition de l’équilibre.

Mais, dans tous les cas où il y aurait plusieurs corps en équilibre, la méthode des coefficients indéterminés, exposée dans la Section précédente, aura toujours l’avantage, tant du côté de la facilité que de celui de la simplicité et de l’uniformité du calcul.

§ II. — De la composition et de la décomposition des forces.

7. L’équation identique

trouvée dans l’article 1, montre que le système des forces dirigées suivant les lignes est équivalent au système des trois forces dirigées suivant les lignes (sect. II, art. 15). Ainsi les quantités donnent les valeurs des forces décomposées suivant les trois coordonnées rectangles et tendantes à diminuer ces coordonnées, comme les forces sont supposées tendre à diminuer les lignes


8. En général, si des forces quelconques dirigées suivant les lignes agissent sur un même point, on peut toujours réduire toutes ces forces à trois autres dirigées suivant les lignes pourvu que ces trois lignes ne soient pas toutes dans le même plan. Car, comme trois lignes placées dans différents plans suffisent pour déterminer la position d’un point quelconque dans l’espace, on pourra toujours exprimer les valeurs des lignes en fonctions des trois quantités et, par le théorème de l’article 15 de la Section II, les forces seront équivalentes[1] aux trois forces exprimées par les formules

et dirigées suivant les lignes ou seulement suivant les éléments si quelques-unes de ces lignes étaient circulaires.

Ces formules peuvent être d’une grande utilité dans plusieurs occasions, et surtout lorsqu’il s’agit de trouver les résultantes d’une infinité de forces qui agissent sur un même point, comme l’attraction d’un corps de figure quelconque.

9. Soit la masse d’un corps dont chacun des éléments soit regardé comme le centre d’une force proportionnelle à et à une fonction de la distance en faisant l’élément donnera, dans l’expression de le terme dont l’intégrale relative à toute la masse sera le résultat de l’attraction de cette masse ; et, comme cette intégration est indépendante de la différentiation relative à on pourra donner à l’intégrale dont il s’agit la forme S de sorte qu’en faisant

S

on aura

et il ne s’agira plus que de substituer au lieu de dans la fonction sa valeur exprimée en fonction des coordonnées qui déterminent la position de chaque particule dans l’espace et des coordonnées du point attiré, et d’exécuter ensuite séparément l’intégration relative aux premières et les différentiations relatives aux dernières.

Dans le cas de la nature, on a donc et, par conséquent, S

Soient les coordonnées de chaque particule du corps ; on aura, en supposant la densité de cette particule exprimée par fonction de

donc

S

Or, étant les coordonnées du point attiré, on a (art. 1)

donc


S

10. Le cas le plus simple est celui où le corps attirant est une sphère. Dans ce cas, en faisant et supposant le centre de la sphère dans l’origine des coordonnées du point attiré, on a

étant la solidité de la sphère, qu’on sait être égale à en prenant pour le rayon et pour le rapport de la circonférence au diamètre.

Si la densité était variable dans l’intérieur de la sphère, en la supposant fonction de on ferait S

On peut encore avoir la valeur de lorsque le corps attirant est un sphéroïde elliptique, dont la surface est représentée par l’équation

étant les demi-axes des trois sections principales, et les coordonnées rectangles de la surface prises sur les trois axes et ayant leur origine dans l’intersection commune des axes, qui est le centre du sphéroïde. Mais l’expression générale de cette valeur dépend d’une formule intégrale assez compliquée et par laquelle il est impossible d’avoir en fonction de

Cependant, si l’on suppose que le sphéroïde soit peu différent de la sphère ou que la distance du point attiré au centre du sphéroïde soit fort grande par rapport à ses axes, on peut exprimer la valeur générale de par une série convergente délivrée de toute intégration. M. Laplace a donné, dans sa Théorie des attractions des sphéroïde,[2], une très belle formule par laquelle on peut former successivement tous les termes de la série et qui montre en même temps que la valeur de étant la solidité du sphéroïde, ne dépend que des quantités et qui sont les carrés des excentricités des deux sections qui passent par le même demi-axe

J’ai trouvé qu’en partant de ce résultat et faisant usage du théorème que j’ai donné dans les Mémoires de Berlin de 1792-93[3], on pouvait construire tout d’un coup la série dont il s’agit, par le seul développement du radical

suivant les puissances de et en ne conservant que les termes qui contiennent des puissances paires de et et transformant chacun de ces termes, comme en

étant la solidité du sphéroïde, qui est exprimée par

Ainsi, pour avoir tout de suite la série ordonnée suivant les puissances de et on fera

et l’on développera d’abord le radical suivant les puissances de en ne retenant que les puissances paires, on aura

On développera ensuite les radicaux suivant les puissances de et l’on transformera ces puissances en puissances de par la formule donnée ci-dessus. De cette manière, si l’on fait, pour plus de simplicité,

et étant les excentricités des deux ellipses formées par les sections qui passent par les demi-axes et on aura pour une expression en série de cette forme

dans laquelle

On n’a poussé l’approximation que jusqu’aux quatrièmes dimensions de et de mais il est facile de la porter aussi loin qu’on voudra.

Si le sphéroïde était composé de couches elliptiques de différentes densités, alors, en faisant varier dans l’expression de les quantités et par conséquent aussi et on aurait S pour la valeur de relative à ce sphéroïde.

Ayant ainsi la valeur de en fonction des coordonnées rectangles du point attiré, on aura immédiatement, par la différentiation, les forces suivant ces coordonnées, dues à l’attraction totale du sphéroïde.

Et si, au lieu des coordonnées et on prend le rayon avec deux angles et tels que l’on ait

on aura l’attraction du sphéroïde décomposée, dans le sens du rayon qui joint le point attiré et le centre du sphéroïde, perpendiculairement à ce rayon dans le plan qui passe par le demi-axe et perpendiculairement au même rayon dans un plan parallèle à celui qui passe par les demi-axes et par les trois différentielles partielles

Ces formules sont surtout utiles dans la théorie de la figure de la Terre.

CHAPITRE II.

De l’équilibre de plusieurs forces appliquées à un système de corps, considérés comme des points et liés entre eux par des fils ou par des verges.

11. Quelles que soient les forces qui agissent sur chaque corps, nous avons vu ci-dessus (art. 7) comment on peut toujours les réduire à trois, dirigées suivant les trois coordonnées rectangles du même corps et tendantes à diminuer ces coordonnées.

Nous supposerons donc, pour plus de simplicité, ici et dans la suite, que toutes les forces extérieures qui agissent sur un même point soient réduites à ces trois, Ainsi la somme des moments de ces forces sera exprimée, en général, par la formule

par conséquent, la somme totale des moments de toutes les forces du système sera exprimée par la somme d’autant de formules semblables qu’il y aura de corps ou points mobiles, en marquant par un, deux, trois, … traits les quantités qui se rapportent aux différents corps que nous nommerons premier, deuxième, troisième, …

De cette manière, on aura donc, pour la somme des moments des forces qui agissent sur trois ou sur un plus grand nombre de corps, la quantité

et il ne s’agira plus que de chercher les équations de condition

résultantes de la nature du problème.

Ayant ou seulement leurs différentielles en fonctions de et prenant des coefficients indéterminés on ajoutera à la quantité précédente les termes

et l’on égalera ensuite séparément à zéro les membres affectés de chacune des différences (sect. IV, art. 5).

§ I. — De l’équilibre de trois ou plusieurs corps attachés à un fil
inextensible ou extensible et susceptible de contraction
.

12. Considérons premièrement trois corps attachés fixement à un fil inextensible ; les conditions du problème sont que les distances entre le premier et le deuxième corps, et entre le deuxième et le troisième, soient invariables, ces distances étant les longueurs des portions de fil interceptées entre les corps.

Nommant la première de ces distances et la seconde, on aura

pour les équations de condition ; donc

et l’équation générale de l’équilibre des trois corps sera

Or il est visible qu’on aura

donc, en différentiant,

ces valeurs étant substituées, on aura les neuf équations suivantes pour les conditions de l’équilibre du fil

et il n’y aura plus qu’à éliminer de ces équations les deux inconnues et ce qui peut se faire de plusieurs manières, lesquelles fourniront aussi des équations différentes, ou présentées différemment, pour l’équilibre des trois corps attachés au fil : nous choisirons celle qui paraîtra la plus simple.

On voit d’abord que, si l’on ajoute respectivement les trois premières équations aux trois suivantes et aux trois dernières, on obtient ces trois-ci, délivrées des inconnues et

lesquelles montrent que la somme de toutes les forces parallèles à chacun des trois axes des coordonnées doit être nulle, et ne sont qu’un cas particulier des équations générales trouvées dans la Section III, § I.

Il ne reste donc plus qu’à trouver quatre autres équations ; pour cela, faisant abstraction des trois premières, j’ajoute respectivement les trois du milieu aux trois dernières ; j’ai celles-ci, où ne se trouve plus,

et qui, par l’élimination de donnent les deux suivantes :

Enfin, considérant séparément les trois dernières équations qui contiennent seul et éliminant on aura ces deux autres-ci

Ces sept équations[4] renferment les conditions nécessaires pour l’équilibre des trois corps et, étant jointes aux équations de condition et égales à des quantités données, suffisent pour déterminer la position de chacun d’eux dans l’espace.

13. Si le fil, supposé toujours inextensible, était chargé de quatre corps, tirés respectivement par les forces suivant les directions des trois axes des coordonnéesrectangles, on trouverait, par des procédés semblables qu’il me paraît inutile de répéter, les neuf équations suivantes pour l’équilibre de ces quatre corps :

Il est facile maintenant d’étendre cette solution à tel nombre de corps qu’on voudra, et même au cas de la funiculaire ou chaînette ; mais nous traiterons ce cas en particulier, par la méthode exposée dans le § II de la Section précédente.

14. On aurait une solution plus simple à quelques égards, si l’on introduisait d’abord dans le calcul l’invariabilité des distances

Ainsi, en se bornant au cas de trois corps et nommant les angles que les lignes font avec le plan des et les angles que les projections de ces lignes sur le même plan font avec l’axe des on aura

Substituant les valeurs de tirées de ces équations dans la formule générale de l’équilibre de trois corps

en faisant varier simplement les quantités dont les variations demeurent indéterminées, et égalant séparément à zéro les quantités multipliées par chacune de ces variations, on aura les sept équations

dont les cinq premières coïncident immédiatement avec celles qu’on a trouvées dans l’article 12 par l’élimination des indéterminées et et dont les deux dernières s’y réduisent facilement, en éliminant les par le moyen de la quatrième et de la cinquième.

Mais, si de cette manière on parvient plus directement aux équations finales, c’est qu’on a employé une transformation préliminaire des variables, laquelle renferme les équations de condition ; au lieu qu’en employant immédiatement les équations avec des coefficients indéterminés, comme dans l’article 12, la solution du problème est réduite à un pur mécanisme de calcul. De plus, on a, par ces coefficients, la valeur des forces que les verges et doivent soutenir par leur résistance à s’allonger, comme on le verra ci-après.

15. Si l’on voulait que le premier corps fût fixe, alors les différences seraient nulles et les termes affectés de ces différences disparaîtraient d’eux-mêmes dans l’équation générale de l’équilibre. Ainsi les trois équations de l’article 12, savoir

n’auraient point lieu ; donc les équations

n’auraient pas lieu non plus, mais toutes les autres demeureraient les mêmes. Ce cas est, comme l’on voit, celui où le fil serait attaché fixement par une de ses extrémités.

Et, si le fil était attaché par ses deux extrémités, alors on aurait non seulement mais aussi et les termes affectés de ces six différences dans l’équation générale de l’équilibre disparaîtraient et feraient, par conséquent, disparaître aussi les six équations particulières qui en dépendent.

En général, si les deux extrémités du fil n’étaient pas tout à fait libres, mais qu’elles fussent attachées à des points mobiles suivant une loi donnée, cette loi, exprimée analytiquement, donnerait une ou plusieurs équations entre les différences qui se rapportent au premier corps, et les différences qui se rapportent au dernier ; et il faudrait ajouter ces équations, multipliées chacune par un nouveau coefficient indéterminé, à l’équation générale de l’équilibre trouvée plus haut ; ou bien on substituerait dans cette équation générale la valeur d’une ou de plusieurs de ces différences tirée des équations dont il s’agit, et l’on égalerait ensuite à zéro le coefficient de chacune de celles qui restent, ainsi qu’on l’a fait ci-dessus (art. 14). Comme cela n’a aucune difficulté, nous ne nous y arrêterons pas.

16. Pour connaître les forces qui proviennent de la réaction du fil sur les différents corps, il n’y aura qu’à faire usage de la méthode donnée pour cet objet dans la Section précédente (art. 5).

On considérera donc que l’on a, dans le cas présent,

 

Donc :

1o On aura, par rapport au premier corps dont les coordonnées sont

donc

Ainsi le premier corps recevra par l’action des autres une force égale à et dont la direction sera perpendiculaire à la surface représentée par l’équation en y faisant varier simplement or il est visible que cette surface n’est autre chose qu’une sphère dont le rayon est et dont le centre répond aux coordonnées par conséquent, la force sera dirigée suivant ce même rayon, c’est-à-dire le long du fil qui joint le premier et le second corps.

2o On aura de même, par rapport au second corps dont les coordonnées sont

donc

d’où il s’ensuit que le second corps recevra aussi une force dirigée perpendiculairement à la surface dont l’équation est en faisant varier cette surface est de nouveau une sphère dont le rayon est mais dont le centre répondra aux coordonnées du premier corps ; par conséquent, la force qui agit sur le second corps sera aussi dirigée suivant le fil qui joint ce corps au premier.

3o On aura encore, par rapport au second corps,

donc

De sorte que le second corps sera poussé de plus par une force égale à dont la direction sera perpendiculaire à la surface représentée par l’équation en faisant varier çette surface n’étant autre chose qu’une sphère dont le rayon est il s’ensuit que la direction de la force sera suivant ce rayon, c’est-à-dire suivant le fil qui joint le deuxième corps au troisième.

On fera le même raisonnement par rapport aux autres corps et l’on en tirera des conclusions semblables.

17. Il est évident que la force produite dans le premier corps, suivant la direction du fil qui joint ce corps au suivant, et la force égale à mais directement contraire, qui agit sur le deuxième corps suivant la direction du même fil, ne peuvent être que les forces qui résultent de la réaction de ce fil sur les deux corps, c’est-à-dire de la tension que souffre la portion du fil interceptée entre le premier et le deuxième corps, de sorte que le coefficient exprimera la quantité de cette tension. De même le coefficient exprimera la tension de la portion du fil interceptée entre le deuxième et le troisième corps, et ainsi de suite.

Au reste, on a supposé tacitement, dans la solution du problème dont il s’agit, que chaque portion du fil était non seulement inextensible, mais aussi raide, en sorte qu’elle conservait toujours la même longueur ; par conséquent, les forces n’exprimeront les tensions qu’autant qu’elles seront positives et tendront à rapprocher les corps ; mais, si elles étaient négatives et tendaient à les éloigner l’un de l’autre, alors elles exprimeraient plutôt les résistances que le fil doit opposer au corps par le moyen de sa raideur ou incompressibilité.

18. Pour confirmer ce que nous venons de démontrer et pour donner en même temps une nouvelle application de nos méthodes, nous supposerons que le fil auquel les corps sont attachés soit élastique dans le sens de sa longueur et susceptible d’extension et de contraction, et que soient les forces de contraction des portions du fil interceptées entre le premier et le deuxième corps, entre le deuxième et le troisième, ….

Il est clair, par ce qu’on a dit dans l’article 9[5] de la Section II, que les forces donneront les moments

Il faudra donc ajouter ces moments à ceux qui viennent de l’action des forces étrangères, et que nous avons vus plus haut (art. 11) être représentés par la formule

pour avoir la somme totale des moments du système ; et, comme il n’y a, d’ailleurs, aucune condition particulière à remplir relativement à la disposition des corps, on aura l’équation générale de l’équilibre en égalant simplement à zéro la somme dont il s’agit ; cette équation sera donc

Substituant les valeurs de trouvées ci-dessus (art. 12) et égalant à zéro la somme des termes affectés de chacune des différences on aura les équations suivantes pour l’équilibre du fil dans le cas dont il s’agit

lesquelles sont analogues à celles du même article pour le cas où le fil est inextensible et donnent, par la comparaison,

D’où l’on voit que les quantités [6], qui expriment ici les forces des fils supposés élastiques, sont les mêmes que celles que nous avons trouvées ci-dessus (art. 16), pour exprimer les forces des mêmes fils dans la supposition qu’ils soient inextensibles.

19. Reprenons encore le cas d’un fil inextensible chargé de trois corps, mais supposons en même temps que le corps du milieu puisse couler le long du fil ; dans ce cas, la condition du problème sera que la somme des distances entre le premier et le deuxième corps, et entre le deuxième et le troisième, soit constante ; ainsi, nommant, comme ci-dessus, et ces distances, on aura et, par conséquent,

On multipliera donc la quantité différentielle par un coefficient indéterminé et on l’ajoutera à la somme des moments des différentes forces qu’on suppose agir sur les corps, ce qui donnera cette équation générale de l’équilibre

d’où (en substituant les valeurs de et et égalant à zéro la somme des termes affectés de chacune des différences ) on tirera les équations suivantes pour l’équilibre du fil

dans lesquelles il n’y aura plus qu’à éliminer l’inconnue

On voit par là comment il faudrait s’y prendre, s’il y avait un plus grand nombre de corps dont les uns fussent attachés fixement au fil et dont les autres y pussent couler librement.

§ II. — De l’équilibre de trois ou plusieurs corps attachés à une verge
inflexible et raide
.

20. Supposons maintenant que les trois corps soient unis par une verge inflexible, en sorte qu’ils soient obligés de garder toujours entre eux les mêmes distances ; il faudra, dans ce cas, que l’on ait non seulement et mais que la différentielle de la distance entre le premier et le troisième corps, que nous désignerons par soit aussi nulle ; par conséquent, en prenant trois coefficients indéterminés, on aura cette équation générale de l’équilibre

Les valeurs de et ont été déjà données ci-dessus ; à l’égard de celle de il est clair qu’on aura

et par conséquent

Faisant ces substitutions et égalant à zéro la somme des termes affectés de chacune des différences on aura ces neuf équations particulières

d’où il faudra éliminer les trois inconnues indéterminées en sorte qu’il ne restera que six équations pour les conditions de l’équilibre.

21. D’abord il est clair, par la forme même de ces équations, qu’en ajoutant respectivement les trois premières aux trois suivantes et ensuite aux trois dernières, on obtient sur-le-champ ces trois équations, délivrées de

Rien n’est plus facile que de trouver encore trois autres équations par l’élimination de mais, pour y parvenir de la manière la plus simple et la plus générale, je commence par déduire des équations de l’article précédent ces neuf transformées

lesquelles étant, comme l’on voit, analogues aux équations primitives, donneront de la même manière, par la simple addition, ces trois-ci :

Les trois équations trouvées ci-dessus montrent que la somme des forces parallèles à chacun des trois axes des coordonnées doit être nulle ; les trois que nous venons de trouver renferment le principe connu des moments (en entendant par moment le produit de la puissance par son bras de levier), par lequel il faut que la somme des moments de toutes les forces, pour faire tourner le système autour de chacun des trois axes, soit aussi nulle. Ainsi ces six équations ne sont que des cas particuliers des équations générales données dans la Section III, §§ I et II.

22. Si le premier corps était fixe, alors les différences seraient nulles, et les trois premières des neuf équations de l’article 20 n’existeraient pas ; il n’y aurait donc alors que six équations, qui, par l’élimination des trois inconnues se réduiraientà trois.

Pour arriver à ces trois équations, on peut s’y prendre d’une manière analogue à celle dont on s’est servi pour trouver les trois dernières équations de l’article précédent, pourvu qu’on ait soin de faire en sorte que les transformées ne renferment point les indéterminées et qui entrent dans les trois premières dont il faut maintenant faire abstraction ; or c’est ce que l’on obtiendra par ces combinaisons

et, si l’on ajoute maintenant les trois premières de ces transformées aux trois dernières, on aura sur-le-champ ces trois-ci

lesquelles auront toujours lieu, quel que soit l’état du premier corps, puisqu’elles sont indépendantes des équations relatives à ce corps. Ces équations renferment, comme l’on voit, le même principe des moments, mais par rapport à des axes qui passeraient par le premier corps.

23. Supposons qu’il y ait un quatrième corps attaché à la même verge inflexible, pour lequel les coordonnées rectangles soient et les forces parallèles à ces coordonnées Il faudra donc ajouter à la somme des moments des forces la quantité

ensuite, comme les distances entre tous les corps doivent demeurer constantes, on aura, par les conditions du problème, non seulement comme dans le cas précédent, mais aussi en nommant les distances du quatrième corps aux trois précédents. Ainsi l’équation générale de l’équilibre sera, dans ce cas,

Les valeurs de sont les mêmes que ci-dessus ; quant à celles de il est visible qu’on aura

et par conséquent

Faisant ces substitutions et égalant à zéro la somme des termes affectés de chacune des différences on trouvera douze équations particulières, dont les neuf premières seront les mêmes que celles de l’article 20, en ajoutant respectivement à leurs premiers membres les quantités suivantes

et dont les trois dernières seront

24. Comme il y a en tout douze équations et qu’il y a six indéterminées, à éliminer, il ne restera, pour les conditions de l’équilibre, que six équations finales, comme dans le cas de trois corps ; et l’on trouvera, par une méthode semblable à celle de l’article 21, ces six équations, analogues à celles de cet article,

Au lieu des trois dernières, on pourra aussi substituer les trois suivantes, qu’on trouvera par la méthode de l’article 22, et qui, étant indépendantes des équations relatives au premier corps, ont l’avantage d’avoir toujours lieu, quel que soit l’état de ce corps :

25. On voit maintenant comment il faudrait s’y prendre pour trouver les conditions de l’équilibre d’un nombre quelconque de corps attachés à une verge ou à un levier inflexible. En général, il est visible que, pour que la position respective des corps demeure la même, il suffit que les distances des trois premiers corps entre eux soient constantes et que les distances de chacun des autres corps à ces trois-ci le soient aussi, puisque la position d’un point quelconque est toujours déterminée par les distances de ce point à trois points donnés. On fera donc, pour chaque nouveau corps qu’on ajoutera au levier, les mêmes raisonnements et les mêmes opérations qu’on a faites dans l’article 23 relativement au quatrième corps, et chacun d’eux fournira trois nouvelles équations particulières avec trois nouvelles indéterminées à éliminer ; en sorte que les équations finales seront toujours en même nombre que dans le cas de trois corps, et elles seront de la même forme que celles que nous venons de trouver dans l’article précédent.

Au reste, il est visible que ces équations rentrent dans celles que nous avons trouvées en général, pour l’équilibre d’un système libre quelconque, dans les articles 3 et 9 de la Section III. En effet, puisque, à cause de l’inflexibilité de la verge, les distances des corps entre eux sont inaltérables, il s’ensuit que l’équilibre doit avoir lieu si les mouvements de translation et de rotation sont détruits on aurait donc pu, par cette seule considération, résoudre le problème précédent d’après les formules des articles cités ; mais nous avons cru qu’il n’était pas inutile d’en donner une solution directe et tirée des conditions particulières de la question.


§ III. De l’équilibre de trois ou plusieurs corps attachés
à une verge à ressort
.


26. Considérons de nouveau le cas de trois corps joints par une verge, et supposons de plus que la verge soit élastique dans le point où est le second corps, en sorte que les distances de celui-ci au premier et au dernier soient constantes, mais que l’angle formé par les lignes de ces distances soit variable, et que l’effet de l’élasticité consiste à augmenter cet angle et, par conséquent, à diminuer l’angle extérieur formé par un des côtés, et par le prolongement de l’autre.

Nommons la force de l’élasticité[7] et l’angle extérieur qu’elle tend à diminuer ; le moment de cette force sera exprimé par (sect. II, art. 9), de sorte que la somme des moments de toutes les forces du système sera

Or les conditions du problème sont les mêmes ici que dans l’article 12, c’est-à-dire et Donc on aura cette équation générale de l’équilibre

et il ne s’agira que d’y substituer les valeurs de celles de et sont les mêmes que dans l’article cité.

Pour trouver la valeur de on remarquera qu’en nommant, comme dans l’article 20, la distance rectiligne entre le premier corps et le troisième, dans le triangle dont les trois côtés sont l’angle opposé au côté est en sorte que, par le théorème connu, on aura

d’où l’on tirera par la différentiation la valeur de et comme, par les conditions du problème, on a

il suffira de faire varier et ce qui donnera

cette valeur étant substituée dans l’équation précédente, il est facile de voir qu’elle deviendra de la même forme que l’équation générale de l’équilibre dans le cas de l’article 20, en supposant dans celle-ci par conséquent, les équations particulières seront encore les mêmes dans les deux cas, avec cette seule différence que, dans celui de l’article cité, la quantité est indéterminée et doit, par conséquent, être éliminée, au lieu que, dans le cas présent, cette quantité est toute connue[8] et qu’il n’y a que les deux indéterminées à éliminer ; en sorte qu’il doit rester une équation finale de plus que dans le cas cité, c’est-à-dire sept équations finales au lieu de six. Or, comme, soit que la quantité soit connue ou non, rien n’empêche de l’éliminer avec les deux autres il est clair qu’on aura aussi, dans le cas présent, les mêmes équations qu’on a trouvées dans les articles 21 et 22 ; et, pour trouver la septième équation, il n’y aura qu’à éliminer dans les trois premières, ou dans les trois dernières des neuf équations particulières de l’article 20, et substituer pour sa valeur

27. Au reste, si dans la valeur de on n’avait pas voulu supposer et nuls, on aurait eu une expression de cette forme

et étant des fonctions de alors les trois termes

de l’équation générale seraient devenus

Mais, et étant deux quantités indéterminées, il est visilole qu’on peut mettre à leur place moyennant quoi la quantité dont il s’agit deviendra


comme si et n’eussent point varié dans l’expression de

Si plusieurs corps étaient joints ensemble par des verges élastiques, on trouverait de la même manière les équations nécessaires pour l’équilibre de ces corps ; et, en général, notre méthode donnera toujours, avec la même facilité, les conditions de l’équilibre d’un système de corps liés entre eux d’une manière quelconque et animés de telles forces extérieures qu’on voudra. La marche du calcul est, comme l’on voit, toujours uniforme, ce qu’on doit regarder comme un des principaux avantages de cette méthode.

CHAPITRE III.

De l’équilibre d’un fil dont tous les points sont tirés par des forces quelconques, et qui est supposé flexible, ou inflexible, ou élastique, et en même temps extensible ou non.

28. C’est ici le lieu d’employer la méthode que nous avons exposée dans le § II de la Section IV.

Nous supposerons toujours, pour plus de simplicité, que toutes les forces extérieures qui agissent sur chaque point du fil soient réduites à trois, dirigées suivant les coordonnées rectangles de ce point. Ainsi, en nommant l’élément du fil, lequel est proportionnel à l’élément de la courbe multiplié par l’épaisseur du fil, on aura, pour la somme des' moments de toutes ces forces, relativement à la longueur totale du fil, cette formule intégrale (sect. IV, art. 12)

S

et, comme la quantité n’est qu’une transformée de (art. 1), si les forces sont telles que cette quantité soit intégrable, en nommant son intégrale, on aura, comme dans l’article 5 de la Section IV,

et la somme des moments sera exprimée par S

§ I. — De l’équilibre d’un fil flexible et inextensible.

29. Considérons d’abord le cas d’un fil parfaitement flexible et inextensible ; l’élément de la courbe de ce fil étant exprimé par

il faudra, par la condition de l’inextensibilité, que soit une quantité invariable et qu’ainsi l’on ait, par rapport à chaque élément du fil, cette équation de condition indéfinie Multipliant donc par une quantité indéterminée et prenant l’intégrale totale, on aura S et, si l’on n’a point d’autre équation de condition, on aura l’équation générale de l’équilibre en égalant à zéro la somme des deux intégrales S et S

Or, ayant on aura, en différentiant suivant

donc

SSSS

changeant en et intégrant par parties pour faire disparaître le avant suivant les règles données dans l’article 15 de la Section IV, on aura ces transformées

SS
SS
SS

Ainsi l’équation générale de l’équilibre deviendra

S

30. On égalera d’abord à zéro (sect. IV, art. 16) les coefficient de sous le signe S, et l’on aura ces trois équations particulières et indéfinies

d’où, éliminant l’indéterminée il restera deux équations qui serviront à déterminer la courbe du fil.

Cette élimination est très facile, car on n’a qu’à intégrer les équations précédentes, ce qui donnera celles-ci

étant les constantes arbitraires ; ensuite on aura, en chassant

équations qui s’accordent avec les formules connues de la chaînette.

Si l’on veut parvenir directement à des équations purement différentielles et sans signe on mettra les équations trouvées sous cette forme

d’où, éliminant on aura d’abord ces deux-ci :

Ensuite, si l’on multiplie les mêmes équations respectivement par on aura, à cause de

l’équation

et il n’y aura plus qu’à substituer successivement dans cette dernière équation les valeurs de tirées des deux précédentes.

31. Comme la quantité peut représenter le moment d’une force tendante à diminuer la longueur de l’élément (sect. IV, art. 6), le terme S de l’équation générale de l’équilibre du fil (art. 29) représentera la somme des moments de toutes ces forces qu’on peut supposer agir sur tous les éléments du fil ; en effet, chaque élément résiste par son inextensibilité à l’action des forces extérieures, et l’on regarde communément cette résistance comme une force active qu’on nomme tension. Ainsi la quantité exprimera la tension du fil.

32. À l’égard de la condition de l’inextensibilité du fil, représentée par l’invariabilité de chaque élément de la courbe on ne peut pas l’introduire dans l’équation de la courbe, en remplacement de l’indéterminée comme dans le cas où le fil forme un polygone, parce que, par la nature du Calcul différentiel, la valeur absolue des éléments de la courbe et, en général, de tous les éléments infiniment petites demeure indéterminée ; mais aussi, par la même raison, il n’est pas nécessaire qu’il y ait autant d’équations que de variables, et il suffit d’une équation de moins pour déterminer une ligne, soit à simple ou à double courbure. Ainsi la solution que nous venons de trouver par notre méthode est complète à l’égard des équations différentielles et ne demande plus que des intégrations qui dépendent des expressions des forces

33. Considérons maintenant les termes de l’équation générale de l’article 29 qui sont hors du signe S ; et supposons premièrement que le fil soit entièrement libre. Dans ce cas, les variations et qui répondent aux deux points extrêmes du fil, seront toutes indéterminées et arbitraires ; par conséquent, il faudra que chaque terme affecté de ces variations soit nul de lui-même. Donc il faudra que l’on ait et c’est-à-dire que la valeur de devra être nulle au commencement et à la fin du fil. On remplira cette condition par le moyen des constantes. Ainsi, comme les trois premières équations intégrales de l’article 30 donnent pour le premier point du fil, où les quantités affectées de deviennent alors nulles,

et pour le dernier point du fil, où se change en S,
SSS

on aura, dans le cas dont il s’agit,

et


SSS

Ces trois équations répondent, comme l’on voit, à celles de l’article 12 de la Section présente.

34. Supposons, en second lieu, que le fil soit attaché par un de ses bouts ou par tous les deux ; et, si c’est le premier bout qui est fixe, les variations seront nulles, et il suffira d’égaler à zéro les coefficients de c’est-à-dire de faire

Par la même raison, lorsque le second bout sera fixe, il suffira de faire Mais, si les deux bouts étaient fixes à la fois, alors il n’y aurait aucune condition particulière à remplir, puisque les variations seraient toutes nulles.

35. Supposons, en troisième lieu, que les extrémités du fil soient attachées à des lignes ou surfaces courbes, le long desquelles elles puissent glisser librement ; et soient, par exemple,

les équations différentielles des surfaces auxquelles le premier et le dernier point du fil sont attachés. On aura pareillement, en changeant en

on substituera donc ces valeurs dans les termes dont il s’agit, et l’on égalera ensuite à zéro les coefficients de

En général, on traitera la partie qui est hors du signe dans l’équation générale de l’équilibre comme si elle était seule et qu’elle représentât l’équation de l’équilibre de deux corps séparés et placés aux extrémités du fil.

36. Supposons, par exemple, que le fil soit attaché par ses deux bouts aux extrémités d’un levier mobile autour d’un point fixe. Soient les trois coordonnées rectangles qui déterminent dans l’espace la position de ce point fixe, c’est-à-dire du point d’appui du levier ; et soient, de plus, la distance entre ce point d’appui et l’extrémité du levier à laquelle est attaché le premier bout du fil ; la distance entre le même point d’appui et l’autre extrémité du levier à laquelle est attaché le second bout du fil ; la distance entre les deux extrémités du levier, et, par conséquent, aussi entre les deux bouts du fil : il est clair que ces six quantités sont données par la nature du problème, et il est visible en même temps que, étant les coordonnées pour le commencement de la courbe du fil et les coordonnées pour la fin de la même courbe, on aura

Or, ces quantités étant invariables, en différentiant pas ces trois équations de condition déterminées, on aura

lesquelles, étant multipliées chacune par un coefficient indéterminé, devront être ainsi ajoutées à l’équation générale de l’équilibre. Ainsi, prenant pour les trois coefficients dont il s’agit et égalant à zéro les coefficients des six variations on aura autant d’équations particulières déterminées, qui seront

et qui, par l’élimination de se réduiront à trois.

Ces trois équations, étant ensuite combinées avec les trois équations de condition ci-dessus, serviront à déterminer la position des deux extrémités du fil.

On voit par là comment il faudra s’y prendre dans d’autres cas semblables.

37. Enfin, si, outre les forces qui animent chaque point du fil, il y en avait de particulières appliquées aux deux extrémités du fil, et représentées par pour le premier bout du fil, et par pour le dernier bout, ces forces donneraient les moments

et il faudrait ajouter encore cette quantité au premier membrue de l’équation générale de l’équilibre, c’est-à-dire à la partie qui est hors du signe, laquelle deviendrait alors

et sur laquelle on opérerait, dans les différents cas, comme on vient de le voir dans les articles précédents.

38. Supposons maintenant que le fil, animé dans tous ses points par les mêmes forces et tiré de plus, dans ses deux extrémités, par les forces doive être couché sur une surface courbe donnée, dont l’équation soit

et que l’on demande la figure et la position de ce fil sur la même surface pour qu’il soit en équilibre.

Ce problème, qui serait peut-être difficile[9] à traiter par les principes ordinaires de la Mécanique, se résout très facilement par notre méthode et par nos formules ; en effet, par l’équation de la surface donnée, on a, en changeant en

ainsi il n’y aura qu’à substituer cette valeur de dans les termes sous le signe de l’équation générale de l’équilibre du fil (art. 29), et ensuite égaler séparément à zéro les quantités affectées de et de On aura par ce moyen ces deux équations indéfinies

lesquelles serviront à déterminer la courbe du fil, étant combinées avec l’équation de la surface et étant débarrassées, par l’élimination, de l’indéterminée

39. De plus, comme on suppose le fil appliqué dans toute sa longueur à la même surface, on aura aussi, pour ses deux points extrêmes,

On fera donc encore ces substitutions dans les termes hors du signe de l’équation générale, ou plutôt dans la formule donnée dans l’article 37, dans laquelle on a eu égard aux forces on égalera ensuite séparément à zéro les quantités affectées de chacune des quatre variations restantes on aura ces quatre nouvelles équations déterminées

auxquelles il faudra satisfaire par le moyen des constantes.

40. Mais, au lieu de substituer, ainsi que nous venons de le faire, la valeur de en et tirée de l’équation on pourrait regarder cette même équation comme une nouvelle équation de condition indéterminée ; il faudrait alors multiplier cette équation par un autre coefficient indéterminé en prendre l’intégrale totale et l’ajouter à l’équation générale de l’équilibre (art. 29). De cette manière la partie sous le signe deviendrait

S
et l’on aurait immédiatement ces trois équations indéfinies

lesquelles, par l’élimination de redonneront les mêmes équations déjà trouvées (art. 38). Mais ces dernières ont de plusl’avantage de faire connaître en même temps la pression que chaque élément du fil exerce sur la surface, d’après la théorie donnée dans l’article 5 de la Section IV.

En effet, il est facile de déduire de cette théorie que les termes

provenant de l’équation de condition

peuvent représenter l’efjet d’une force égale et appliquée à chaque élément du fil dans une direction perpendiculaire a la surface qui a pour équation

c’est-à-dire à la surface même sur laquelle le fil est supposé couché. Cette surface, par sa résistance, produit la force laquelle sera, par conséquent, égale et directement contraire à la pression exercée par le fil sur la même surface.(sect. IV, art. 7) ; de sorte que la pression de chaque point du fil sera égale à ou bien, en substituant les valeurs de tirées des équations ci-dessus,

On appliquera ensuite les mêmes raisonnements à la partie de l’équation générale qui est hors du signe S et l’on en tirera des conclusions analogues.

41. Si le fil couché sur la surface donnée n’était tendu que par des forces appliquées à ses extrémités, on aurait et, par conséquent, (art. 30) ; donc est égal à une constante. Ainsi la tension du fil serait partout la même (art. 31), ce qui s’accorde avec ce qu’on sait d’ailleurs. Dans ce cas, la formule générale de l’équilibre du fil se réduirait à

SS

dont le premier terme est la même chose que S ou Ainsi cette équation exprime que la longueur de la courbe formée par le fil sur la surface représentée par l’équation doit être un maximum ou un minimum ; et la pression exercée par le fil sur chaque point de cette surface sera alors

Or on sait que exprime l’angle de contingence de la courbe, lequel est égal à en nommant le rayon osculateur. Ainsi la pression sera égale à et, par conséquent, en raison inverse du rayon osculateur.

§ II. — De l’équilibre d’un fil, ou d’une surface flexible et en même
temps extensible et contractible
.

42. Jusqu’ici nous avons supposé que le fil était inextensible ; regardons-le maintenant comme un ressort capable d’extension et de contraction, et soit la force avec laquelle chaque élément de la courbe du fil tend à se contracter ; on aura, comme dans l’article 18 (en mettant à la place de et en changeant en ), pour le moment de cette force, et S pour la somme des moments de toutes les forces de contraction qui agissent sur toute la longueur du fil. On ajoutera donc cette intégrale S à l’intégrale

S

qui exprime la somme des moments de toutes les forces extérieures qui agissent sur le fil (art. 28), et, égalant le tout à zéro, on aura l’équation générale de l’équilibre du fil à ressort.

Or il est visible que cette équation sera de la même forme que celle de l’article 29 pour le cas d’un fil inextensible, et qu’en y changeant en les deux équations deviendront identiques. On aura donc, dans le cas présent, les mêmes équations particulières pour l’équilibre du fil qu’on a trouvées dans l’article 30, en mettant seulement dans celles-ci à la place de et, si l’on élimine la quantité comme on a éliminé la quantité on aura, pour la courbe formée par un fil extensible, deux équations qui seront identiquement les mêmes que celles qui ont lieu pour un fil inextensible.

43. À l’égard de la quantité qui représente l’élasticité ou la force de contraction de chaque élément il est naturel de l’exprimer par une fonction de l’extension que cet élément subit par l’action des forces Ainsi, en supposant que soit la longueur primitive de on pourra regarder comme une fonction donnée de mais, comme par la nature du Calcul différentiel la valeur absolue des éléments demeure indéterminée, la valeur de sera aussi indéterminée et ne pourra être connue que par le moyen d’une des trois équations de l’équilibre du fil. Ainsi, quoique ûans le cas présent notre analyse paraisse donner une équation de trop, elle ne donne néanmoins que les équations nécessaires pour déterminer la courbe du fil et la résistance de chacun de ses éléments.

Puisque la quantité de la solution de l’article 30 répond exactement à la quantité qui exprime la force réelle avec laquelle chaque élément du fil est tendu par l’action des forces extérieures, il s’ensuit qu’on peut aussi regarder cette quantité comme représentant la tension du fil inextensible. C’est ce que nous avons déjà trouvé a priori dans l’article 31.

44. Appliquons les mêmes principes à la détermination de l’équilibre d’une surface dont tous les éléments soient extensibles et contractibles. L’élément d’une surface dont les coordonnées sont et où l’on regarde comme fonction de est exprimé par la formule

Ainsi, en appelant [10] la force d’élasticité avec laquelle cet élément tend à se contracter, la somme des moments de toutes ces forces sera exprimée par l’intégrale double

SS

qui, étant ajoutée à l’intégrale double

SS
est l’élément de la surface, donnera la somme des moments de toutes les forces, laquelle doit être nulle dans l’équilibre.

En faisant, comme dans l’article 31 de la Section IV,

on aura

donc (sect. IV, art. 33 et 34)

Substituant ces valeurs dans l’intégrale double SS et faisant disparaître par des intégrations par parties les différences partielles des variations marquées par on aura


SS
SS

(art. cités).

Les intégrales simples relatives à et à se rapportent aux limites et disparaissent d’elles-mêmes, dans le cas où l’on suppose que les bords de la surface sont fixes, parce qu’alors les variations sont nulles dans tous les points du contour de la surface.

Les termes sous le double signe SS étant ajoutés à ceux de l’intégrale double SS on égalera séparément à zéro les coefficients des variations et l’on aura les trois équations[11]

Les deux premières donneront la valeur de la force qu’il faudra substituer dans l’expression de de la troisième, de sorte qu’on n’aura, en dernière analyse, qu’une seule équation à différences partielles pour déterminer la surface d’équilibre.

En effet, quoique la force doive être supposée une fonction connue de l’élément de la surface dans son état de contraction ou d’extension, elle n’en demeure pas moins indéterminée, parce que la grandeur absolue des éléments de la surface ne peut entrer dans le calcul ; de sorte que la valeur de ne peut être déterminée que par les conditions mêmes de l’équilibre : c’est ici un cas semblable à celui de l’article 43.

45. Pour éliminer la quantité on substituera dans les deux premières équations la valeur de tirée de la dernière ; elles deviendront

Soit, comme dans l’article 28,

on aura, puisque est censée fonction de

et les deux équations deviendront, en divisant par

lesquelles donnent simplement celle-ci

d’où

résultat conforme à celui de l’article 36 de la Section IV. Ensuite la troisième équation donnera, en regardant comme fonction de

ce sera l’équation de la surface.

Si la surface différait très peu d’un plan, en sorte quel l’ordonnée fût très petite, alors, en négligeant les quantités très petites du second ordre, on aurait

or

étant une constante, et l’équation de la surface serait

En supposant qu’il n’y ait d’autres forces que la gravité qui agisse suivant l’ordonnée pour l’augmenter, on aura par conséquent, en négligeant toujours les secondes dimensions de

équation intégrable en général, mais avec des fonctions imaginaires qui rendent cette solution peu susceptible d’application.

§ III. — De l’équilibre d’un fil ou lame élastique.

46. Reprenons le cas d’un fil inextensible ; mais, au lieu de le supposer en même temps parfaitement flexible, comme on l’a fait jusqu’ici, supposons-le élastique, en sorte qu’il y ait dans chaque point une force, que j’appellerai qui s’oppose à l’inflexion du fil et qui tende, par conséquent, à diminuer l’angle de contingence[12]. Nommant cet angle on aura, comme dans l’article 26 (en changeant seulement en ) pour le moment de chaque force donc S sera la somme des moments de toutes les forces d’élasticité qui agissent dans toute la longueur du fil, laquelle devra donc être ajoutée au premier membre de l’équation générale de l’équilibre dans le cas d’un fil inextensible et parfaitement flexible (art. 29).

Toute la difficulté consiste à ramener l’intégrale S à la forme convenable ; pour cela, il faut commencer par chercher la valeur de or nous avons trouvé plus haut (art. 26)

d’où l’on tire

Pour appliquer cette formule au cas présent, il suffit de remarquer que les coordonnées par lesquelles nous avons exprimé les quantités (art. 12 et 20), deviennent ici en sorte qu’on aura

donc

et

Donc enfin on aura, en négligeant les infiniment petits du troisième ordre,

Comme cette valeur de est infiniment petite du deuxième ordre, il s’ensuit que et par conséquent aussi l’angle sera infiniment petit du premier ordre ; de sorte qu’on aura

c’est l’expression de l’angle de contingence dans une courbe quelconque à double courbure, et qui revient à celle de l’article 41.

47. On différentiera maintenant suivant pour avoir la valeur de et comme, par la condition de l’inextensibilité du fil, on a déjà (art. 29) et, par conséquent aussi, on pourra traiter, dans la différentiation dont il s’agit, et comme constantes ; ainsi l’on aura

Substituant dans S et faisant, pour abréger,

on aura

SSSS

Ces expressions étant traitées suivant les règles données dans l’article 15 de la Section IV, en y changeant d’abord en et intégrant ensuite par parties pour faire disparaître le avant on aura les transformées suivantes :

S
S
S
S
S
S

On ajoutera donc ces différents termes à ceux qui forment le premier membre de l’équation générale de l’équilibre de l’article 29, et l’on aura l’équation de l’équilibre d’un fil inextensible et élastique.

48. Égalant d’abord à zéro les coefficients des variations qui se trouvent sous le signe S, on aura ces trois équations indéfinies

d’où il faudra éliminer l’indéterminée ce qui les réduira à deux, qui suffiront pour déterminer la courbe du fil.

Une première intégration donne

étant des constantes arbitraires, et l’élimination de donnera

dont la dernière est déjà contenue dans les deux autres.

Ces équations sont de nouveau intégrables, et l’on aura

étant de nouvelles constantes.

Or nous avons supposé plus haut (art. 47)

le carré du dénominateur de cette quantité est

Donc, si l’on ajoute ensemble les carrés des trois équations précédentes, on aura celle-ci, sans différentielles,

et si l’on divise ensemble deux des mêmes équations, on aura celle-ci, où l’élasticité n’entre pas,

Ces deux équations sont ce qu’il y a de plus simple pour déterminer la courbe élastique, en ayant égard à la double courbure.

49. On suppose communément que la force élastique qui s’oppose à l’inflexion est en raison inverse du rayon osculateur. Ainsi, en nommant ce rayon, on aura étant un coefficient constant.

Mais on sait que donc ainsi la quantité que nous avons supposée égale à (art. 47), deviendra et, par conséquent, constante, en supposant, ce qui est permis, constante. Ainsi les trois premières équations (art. 48) seront

Si l’on ajoute ensemble ces trois équations, après avoir multiplié la première par la deuxième par et la troisième par on aura, à cause de

l’équation

Soit l’épaisseur du fil ; on aura L’équation précédente étant intégrée, en supposant constant, donnera

Cette valeur de exprime la tension de la lame élastique, c’est-à-dire la résistance avec laquelle elle s’oppose à la force qui tend à l’allonger, comme dans l’article 31.

50. Le cas le plus simple et le plus ordinaire est celui dans lequel les forces qu’on suppose agir sur tous les points de la lame élastique sont nulles, et où la courbure de la lame vient uniquement des forces appliquées à ses deux extrémités. Dans ce cas, les équations intégrales de l’article 48 donnent, en mettant pour sa valeur

mais l’intégration ultérieure de celles-ci est peut-être impossible en général[13].

Lorsque la courbure de la lame est toute dans un même plan, en prenant pour ce plan celui des et et faisant la première équation, qui est alors la seule nécessaire, devient

laquelle, étant différentiée, donne

multipliant par et intégrant derechef,

d’où l’on tire

et de là

et, comme on a par la première équation on aura

Ainsi tout se réduit à intégrer les valeurs de et mais ces intégrations dépendent de la rectification des sections coniques. Jusqu’à présent, il ne paraît pas qu’on ait été plus loin dans la solution générale du problème de la courbe élastique.

51. Considérons maintenant les termes de l’équation générale qui sont hors du signe S ; ces termes sont

et il faudra les faire disparaître indépendamment des valeurs de

Donc : 1o si le fil est entièrement libre, il faudra que les coefficients des douze quantités soient nuls, chacun en particulier.

Or, d’après les premières équations intégrales de l’article 48, on voit qu’en faisant commencer les intégrations au premier point du fil, les coefficients de sont égaux à et ceux de deviennent S S S Ainsi il faudra que l’on ait, dans le cas dont il s’agit,

et

SSS

Ensuite il faudra que l’on ait aussi

et

pour faire disparaître les termes affectés de et il est clair que les secondes équations intégrales du même article donneront

et

SS
S

2o Si la première extrémité du fil est fixe, alors

par conséquent, ne seront pas nuls ; mais la condition que les coefficients de soient nuls donnera

SSS

et, si la position de la tangente à cette extrémité était donnée aussi, on aurait, de plus,

par conséquent, ne seraient pas nuls, mais la nullité des coefficients de donnerait

S
S
S
On raisonnera de la même manière par rapport à l’état de la seconde extrémité du fil.

3o Enfin, si, outre les forces qui agissent sur tous les points du fil, il y en avait de particulières appliquées à l’une et à l’autre extrémité, il n’y aurait qu’à ajouter aux termes ci-dessus les suivants

et s’il y avait, de plus, d’autres conditions relatives à l’état de ces extrémités, on opérerait toujours de la même façon et d’après les mêmes principes.

52. Si l’on voulait que le fil fût doublement élastique, tant à l’égard de l’extensibilité qu’à l’égard de la flexibilité, alors on aurait, dans l’équation générale de l’équilibre, à la place du terme S celui-ci S c’est-à-dire simplement à la place de en nommant la force d’élasticité qui résiste à l’extension du fil (art. 42). Mais il faudrait, de plus, dans ce cas, regarder comme variable dans l’expression de par conséquent, il faudrait ajouter à la valeur de de l’article 47 ces deux termes

On aurait donc à ajouter à la valeur de S du même article les termes

SS

Le dernier se réduit d’abord à

S

donc il faudra ajouter à la valeur de S les termes

S
Le dernier terme de cette expression, étant analogue au terme S sera susceptible de réductions semblables ; à l’égard des deux autres, il n’y aura qu’à y substituer pour sa valeur en marquant toutes les lettres d’un trait ou de deux.

De là il est facile de conclure qu’on aura, pourla solution du casprésent, les mêmes formules que dans le cas où le fil élastique est supposé inextensible, en y mettant seulement à la place de et ajoutant aux termes hors du signe S les deux termes

Comme, dans l’équation de la courbe, la quantité doit être éliminée, il s’ensuit que l’équation de la lamé élastique sera la même, soit qu’on la suppose extensible ou non. Mais la tension du fil, qui est exprimée par ou par lorsque le fil n’est pas élastique (art. 43), sera augmentée, par l’élasticité de la quantité à cause de (art. 49).

§ IV. — De l’équilibre d’un fil raide et de figure donnée.

53. Venons enfin au cas d’un fil inextensible et inflexible on aura ici, pour la somme des moments des forces, la même formule intégrale que dans le cas de l’article 28, c’est-à-dire S ensuite la condition de l’inextensibilité du fil donnera, comme dans le même article, et celle de l’inflexibilité donnera puisque l’angle de contingence doit être invariable ; mais ces deux conditions ne suffisent pas encore dans le cas où la courbe est à double courbure, comme on va le voir.

Pour traiter la question de la manière la plus simple et la plus directe, je remarque que tout consiste à faire en sorte que les différents points de la courbe du fil conservent toujours entre eux les mêmes distances or, en considérant plusieurs points successifs dont les coordonnées soient

il est clair que les carrés des distances entre le premier de ces points et les suivants seront exprimés par les quantités

Supposons, pour abréger,

;

les quantités précédentes, étant développées, deviendront

 

Il faudra donc que les variations de ces quantités soient nulles dans toute l’étendue de la courbe, ce qui donnera ces équations indéfinies

 

mais étant égal à on a aussi

de là on aura, de plus,

et ainsi de suite. De sorte que les équations de condition pour l’inextensibilité et l’inflexibilité du fil seront c’est-à-dire, en différentiant et changeant en
 

Il est clair qu’il suffit de trois de ces équations pour déterminer les trois variations d’où l’on peut d’abord conclure que, dès qu’on aura satisfait aux trois premières, toutes les autres, qu’on pourrait trouver à l’infini, auront lieu d’elles-mêmes : c’est aussi de quoi on peut se convaincre par le calcul même, comme on le verra plus bas (art. 60)[14].

54. On aura donc par notre méthode cette équation générale de l’équilibre

S
S
S
S

laquelle, par les transformations enseignées, se réduira à la forme suivante :

S
S
S

55. Égalant d’abord à zéro les coefficients de sous le signe S, on aura ces trois équations indéfinies

lesquelles, renfermant trois variables indéterminées ne serviront qu’à déterminer ces trois quantités ; en sorte qu’il n’y aura aucune équation indéfinie entre les différentes forces qu’on suppose appliquées à tous les points de la verge et les conditions de l’équilibre dépendront uniquement des termes qui sont hors du signe S. Mais, comme ces termes contiennent les inconnues il faudra commencer par déterminer ces inconnues.

Pour cela, il faut intégrer les équations précédentes, ce qui est facile, et l’on aura ces trois-ci

étant trois constantes arbitraires.

Ces équations donnent, par l’élimination de ces trois autres-ci

lesquelles sont aussi intégrables, et dont les intégrales sont

étant de nouvelles constantes arbitraires.

Ces trois dernières équations serviront à déterminer les trois quantités et et les trois premières équations intégrales donneront les valeurs de Ainsi l’on aura toutes les inconn ues qui entrent dans les termes qui sont hors du signe S ; il suffira pour cela de marquer, dans les six équations qu’on vient de trouver, toutes les lettres d’un trait ou de deux, à l’exception des constantes arbitraires, de supposer nulles, dans le premier cas, les quantités affectées du signe lesquelles sont censées commencer au premier point du fil, et de changer, dans le second cas, en S dans les mêmes quantités, pour les rapporter au dernier point du fil.

56. Cela posé, voyons maintenant les conditions qui peuvent résulter de l’anéantissementdes termes hors du signe S dans l’équation générale de l’équilibre (art. 54).

Et d’abord, si l’on suppose la verge entièrement libre, les variations et seront toutes indéterminées ; par conséquent, il faudra égaler à zéro chacun de leurs coefficients, et il est visible qu’il faudra pour cela que les quantités ainsi que soient nulles.

Donc les trois premières équations intégrales de l’article précédent, étant rapportées au premier et au dernier point du fil, donneront ces six conditions

SSS

et les trois dernières intégrales donneront de même les six suivantes :

SSS
SSS
SSS
Donc

et, par conséquent,

SSS
SSS

Ces six équations sont donc les seules qui soient nécessaires pour l’équilibre d’une verge inflexible, lorsqu’il n’y a pas de point fixe c’est ce qui s’accorde avec ce que nous avons remarqué plus haut (art. 25), et c’est aussi ce qu’on aurait pu déduire immédiatement de la théorie donnée dans la Section III, ainsi que nous l’avons observé dans l’article cité.

57. Supposons maintenant qu’il y ait dans la verge un point fixe et que ce point soit la première extrémité de la verge ; dans ce cas, on aura

en sorte que les termes affectés de ces variations disparaîtront d’eux-mêmes il suffira donc d’égaler zéro les coefficients de ainsi que les coefficients de

Or il est aisé de voir que, pour cela, il suffira que l’on ait

et ensuite

comme dans le cas précédent ; et l’on trouvera les mêmes conditions que dans l’article précédent, à l’exception de ce que ne seront pas nulles.

On aura donc

SSS

ensuite

et les trois autres équations se réduiront à celles-ci
S
S
S

c’est-à-dire à

SSS
SSS
SSS

ou, ce qui est la même chose, à

S
S
S

Ce sont les seules condition s nécessaires pour l’équilibre, et il est clair qu’elles répondent à celles que l’on a trouvées dans l’article 24.

58. Si la verge était fixement attachée par sa première extrémité, en sorte que non seulement le premier point de la courbe fût fixe, mais aussi la tangente à ce premier point, alors on aurait non seulement.

mais aussi

par conséquent, tous les termes affectés de ces quantités disparaîtraient d’eux-mêmes et il ne resterait qu’à faire évanouir les termes affectés de et de

On n’aura donc, dans ce cas, que ces conditions

Donc les constantes auront encore les valeurs
SSS

ensuite les trois dernières intégrales de l’article 55, étant appliquées au dernier point de la verge, donneront

SSS

Et, si l’on applique ces mêmes équations au premier point, on aura

d’où, éliminant et résulte l’équation

Cette équation est nécessaire pour empêcher que la verge ne tourne autour de sa première tangente, qui est supposée fixe, et il est facile de voir que son premier membre devient nul lorsque la verge est une ligne droite.

59. On pourrait regarder comme un défaut de notre méthode la longueur de cette solution, qui est, en effet, plus longue que celle de l’équilibre d’un fil flexible ; tandis que, par les méthodes ordinaires, ce dernier problème est beaucoup plus difficile que celui de l’équilibre d’une verge raide tirée par des puissances quelconques, parce qu’il faut déterminer, par la composition des forces, la courbe que le fil doit prendre pour être en équilibre, au lieu que, dans le cas de la verge, cette courbe est donnée et que l’équilibre ne demande que la destruction des moments des forces. Mais, lorsqu’on veut suivre pour tous ces problèmes une marche uniforme et passer de l’un à l’autre graduellement, à mesure qu’on y ajoute de nouvelles conditions, il est évident que le cas d’un fil inflexible est moins simple que celui d’un fil flexible, parce que l’inflexibilité exprimée analytiquement consiste dans l’invariabilité des distances mutuelles des points du fil. Et si, dans ce cas, la courbe étant donnée, elle ne doit plus être un résultat du calcul comme dans le cas d’un fil flexible, c’est une circonstance que l’analyse doit indiquer et qu’elle indique, en effet, par les trois indéterminées qui restent dans les trois équations indéfinies entre de l’article 55, et qui font que ces équations peuvent s’adapter à une courbe quelconque donnée. Ainsi l’on ne doit pas regarder ces équations comme une superfluité inutile ; outre qu’elles servent à déterminer les trois inconnues d’où dépendent les conditions de l’équilibre, et qui expriment[15] en même temps les forces qui s’opposent à ce que les valeurs des trois fonctions varient par l’effet des forces qui agissent sur le fil.

Il est vrai que les trois indéterminées doivent être remplacées par les trois équations de condition qui consistent en ce que les fonctions différentielles doivent être censées données. Mais, comme, par la nature du Calcul différentiel, la valeur absolue des différentielles reste indéterminée et qu’il n’y a que leur rapport qui puisse être donné, ces trois conditions ne peuvent équivaloir qu’à deux, qui renferment les rapports des trois quantités et ces deux rapports suffisent pour déterminer la courbe.

En effet, par ce qu’on a démontré plus haut (art. 46), on voit que l’angle de contingence formé par deux côtés successifs de la courbe se trouve exprimé par en conservant les valeurs de de l’article 53 ; de sorte que le rayon osculateur sera exprimé par Ce rayon étant donc supposé donné, la courbe sera donnée si elle est à simple courbure, et, pour les courbes à double courbure, il ne sera pas difficile de prouver que la seconde courbure, provenant de l’angle de contingence formé par les plans qui passent successivement par deux éléments contigus de la courbe, dépendra du rapport des trois quantités [16]. Ainsi les trois conditions dont il s’agit, rapportées à la courbe, se réduisent à ce qu’elle soit donnée, comme le problème le suppose[17].

On pourrait étendre l’analyse de ce problème au cas d’une surface ou d’un solide dont tous les points seraient tirés par des forces quelconques mais nous allons faire voir comment on peut la simplifier en partant des mêmes équations de condition et en déterminant d’avance par ces équations la forme des variations des coordonnées.

CHAPITRE IV.

De l’équilibre d’un corps solide de grandeur sensible et de figure quelconque, dont tous les points sont tirés par des forces quelconques.

60. Puisque la condition de la solidité du corps consiste en ce que tous ses points conservent constamment entre eux la même position et les mêmes distances, on aura entre les variations les mêmes équations de condition qu’on a trouvées dans l’article 53 car il est visible qu’en imaginant dans l’intérieur du corps une courbe quelconque, il suffira que tous ses points gardent les mêmes distances entre eux, quelque mouvement que le corps reçoive ; ainsi l’on pourra, par leur moyen, déterminer immédiatement les valeurs de ces variations.

Pour cela, je remarque que, comme en passant aux différences secondes il est toujours permis de prendre une des différences premières pour constante, on peut supposer constante et, par conséquent, moyennant quoi la deuxième et la troisième équation de l’article cité deviendront

La première de ces équations donne d’abord et, différentiant,

cette valeur étant substituée dans la seconde équation, elle se trouvera toute divisible par et l’on aura, après la division,

d’où l’on tire, en intégrant,

étant une constante. Ayant on trouvera

donc, intégrant de nouveau et ajoutant les constantes on aura

et, ces valeurs étant substituées dans la première équation de condition, savoir

il viendra

Enfin on aura, par une troisième intégration et par l’addition des nouvelles constantes

Et il est facile de se convaincre que ces expressions ne satisfont pas seulement aux trois premières équations de condition de l’article 53, mais aussi à toutes les autres qu’on pourrait trouver à l’infini, et qui sont toutes renfermées dans cette équation générale

Telles sont donc les valeurs de pour un système quelconque de points unis ensemble de manière qu’ils conservent toujours entre eux les mêmes distances ; ainsi ces valeurs serviront non seulement pour le cas d’une courbe quelconque mobile et invariable dans sa figure, mais aussi pour le cas d’un corps solide de figure quelconque.

Euler a trouvé le premier ces formules simplés et élégantes pour exprimer les variations des coordonnées de tous les points d’un corps solide mobile dans l’espace. Il y est parvenu par des considérations tirées du Calcul différentiel, mais différentes de celles qui nous y ont conduit, et, ce me semble, moins rigoureuses[18]. Voir, dans le Volume de l’Académie de Berlin pour 1750, le Mémoire intitulé : Découverte d’un nouveau principe de Mécanique.

61. Puis donc que les valeurs précédentes de satisfont déjà aux équations de condition du problème, il est clair qu’il suffira de les substituer dans la formule

S

et de faire en sorte qu’elle devienne nulle, indépendamment des quantités qui sont les seules indéterminées qui restent.

Or, comme ces quantités sont les mêmes pour tous les points du corps, il faudra dans la substitution les faire sortir hors du signe S ; et l’on aura conséquemment cette équation générale de l’équilibre d’un corps solide de figure quelconque

SSS
SSS

d’où l’on tirera les équations particulières de l’équilibre, en ayant égard aux différentes circonstances du problème.

62. Et d’abord, si le corps est supposé entièrement libre, les six variations seront toutes indéterminées, et il faudra égaler séparément à zéro les quantités par lesquelles elles se trouvent multipliées ; ce qui donnera ces six équations déjà connues

SSS
SSS

En second lieu, s’il y a dans le corps un point fixe autour duquel il ait simplement la liberté de pouvoir pirouetter en tous sens et qu’on nomme les valeurs des coordonnées pour ce point, il faudra que l’on ait

donc

d’où l’on tire

On substituera ces valeurs dans l’équation générale de l’article précédent et, mettant sous le signe S les quantités qui sont constantes par rapport aux différents points du corps, on aura cette transformée

S
S
S
laquelle ne fournira plus que trois équations, savoir
S
S
S

En troisième lieu, s’il y a dans le corps deux points fixes et que soient les valeurs de pour le second de ces points, on aura, de plus,

donc, comparant ces valeurs de avec les précédentes, on aura

Les deux premières de ces équations donnent

et, comme ces valeurs satisfont aussi à la troisième équation, il s’ensuit que la variation demeure indéterminée.

Faisant donc ces substitutions dans la transformée trouvée ci-dessus, on aura

ainsi les conditions de l’équilibre seront renfermées dans cette seule équation


63. Ces différentes équations répondent à celles que nous avons données dans la Section III, pour l’équilibre d’un système de points isolés de forme invariable ; et nous aurions pu appliquer immédiatement les conditions de cet équilibre à celui d’un corps solide de figure quelconque, dont tous les points sont tirés par des forces données. Mais nous avons cru qu’il n’était pas inutile, pour montrer la fécondité de nos méthodes, de traiter cette dernière question en particulier et sans rien emprunter des problèmes déjà résolus.

Au reste, si les deux points du corps que nous venons de supposer fixes étaient mobiles sur des lignes ou des surfaces données, ou même joints entre eux d’une manière quelconque on aurait alors une ou plusieurs équations différentielles entre les variations des coordonnées qui répondent à ces points ; et, substituant à la place de ces variations leurs valeurs en d’après les formules générales de l’article 60, on aurait autant d’équations entre ces dernières variations, au moyen desquelles on déterminerait quelques-unes de ces variations par les autres ; on substituerait ensuite ces valeurs dans l’équation générale, et l’on égalerait à zéro chacun des coefficients des variations restantes, ce qui fournirait toutes les équations nécessaires pour l’équilibre.

La marche du calcul est, comme l’on voit, toujours la même, et c’est ce qu’on doit regarder, comme un des principaux avantages de cette méthode.

64. Les expressions trouvées plus haut (art. 60) pour les variations font voir que ces variations ne sont que les résultats des mouvements de translation et de rotation que nous avons considérés en particulier dans la Section III.

En effet, il est visible que les termes qui sont communs à tous les points du corps, représentent les petits espaces parcourus par le corps, suivant les directions des coordonnées en vertu d’un mouvement quelconque de translation ; et l’on voit, par les formules de l’article 8 de la même Section, que les termes représentent les petits espaces parcourus par chaque point du corps, suivant les mêmes directions, en vertu de trois mouvements de rotation autour des trois axes des ces quantités répondant aux quantités de l’article cité. Ainsi l’on aurait pu déduire immédiatement les expressions dont il s’agit de la seule considération de ces mouvements, ce qui aurait été plus simple, mais non pas si direct. L’analyse précédente conduit naturellement à ces expressions et prouve par là, d’une manière encore plus directe et plus générale que celle de l’article 10 de la Section III, que, lorsque les différents points d’un système conservent leur position relative, le système ne peut avoir à chaque instant que des mouvements de translation dans l’espace et de rotation autour de trois axes perpendiculaires entre eux.

Séparateur

  1. Nous avons remarqué plus haut que ce théorème est soumis à des restrictions. La même observation s’applique à la conclusion qu’on en déduit-ici. Voir une Note de M. Poinsot à la fin du Volume. (J. Bertrand.)
  2. Voir Mécanique céleste, t. II, Livre III, Chap. I et II. (J. Bertrand.)
  3. Œuvres de Lagrange, t. V, p. 645.
  4. Il est à peine besoin de faire observer que ces sept équations sont, en quelque sorte, évidentes a priori, et qu’on pourrait les écrire sans recourir au principe des vitesses virtuelles. Mais le but de Lagrange n’est pas de traiter chaque question particulière de la manière la plus simple il veut seulement montrer comment on peut se dispenser d’un raisonnement spécial à chaque cas, et réduire la Statique à un simple mécanisme de calcul. Lagrange, du reste, n’a jamais dit ni prétendu dire qu’il fût convenable d’aborder ainsi l’étude de la Mécanique. (J. Bertrand.)
  5. Il vaut mieux renvoyer, pour l’évaluation de ces moments, à l’article de la Section II ; on y trouvera la démonstration du résultat indiqué ici. Quant à l’article 9, nous avons fait remarquer qu’il suppose l’emploi d’une locution détournée qui n’est pas sans inconvénients. (J. Bertrand.)
  6. Il est évident, a priori, qu’il doit en être ainsi ; et, si Lagrange s’est abstenu de le faire remarquer, c’est pour la raison indiquée plus haut (art. 12). On comprend, en effet, qu’une fois l’équilibre établi, le fil ayant pris une certaine longueur qui ne varie plus, peu importe que cette longueur soit ou ne soit pas assujettie à demeurer constante. (J. Bertrand.)
  7. Le mot force est ici détourné de sa signification habituelle. Lagrange regarde comme évident que, l’ensemble des forces qui sont produites par l’élasticité ayant une somme de moments égale à zéro lorsque l’angle est invariable, cette somme peut être considérée, en général, comme proportionnelle à et il la représente alors par n’exprimant une force que si l’on adopte la convention de l’article 9, Section II. Voir la Note relative à cet article. (J. Bertrand.)
  8. Il faudrait, pour que fût considéré comme quantité connue, que et le fussent eux-mêmes ; or il n’en est pas ainsi est une fonction inconnue de et ne paraît pas susceptible d’une détermination directe. (J. Bertrand.)
  9. On ne comprend pas comment Lagrange a pu considérer ce problème comme difücile à traiter directement. Les équations auxquelles il parvient expriment simplement que les deux tensions aux extrémités d’un élément, étant combinées avec les forces qui sollicitent cet élément, donnent une résultante normale à la surface. Cette condition est évidente a priori. (J. Bertrand.)
  10. Cette manière d’évaluer l’ensemble des forces que développe l’élasticité sur un point n’est pas suffisammentjustifiée. Il est vrai qu’ici, comme dans plusieurs passages précédents, Lagrange détourne le mot force de sa signification habituelle ; mais il n’est nullement évident que la somme des moments des forces qui agissent sur un élément soit proportionnelle à la contraction de l’élément. Nous pouvons même ajouter que cela n’est pas exact. Poisson en a fait la remarque dans les Mémoires de l’Institut pour l’année 1812 ; du reste, la solution qu’il donne manque elle-même de généralité elle suppose les tensions d’un élément rectangulaire perpendiculaires aux côtés de cet élément, ce qui n’a pas lieu en général. (J. Bertrand.)
  11. Il importe de remarquer ici que les conclusions de Lagrange ne subsisteraientplus si l’on supposait fonction de la seule variable et fonction de la seule variable comme on serait tenté de le faire en se rappelant les hypothèses dans lesquelles ont été établies (sect. IV, art. 33, 34) les formules que Lagrange applique ici. En effet, pour qu’une intégrale

    SS

    soit nulle dans ces hypothèses, il n’est plus nécessaire que l’on ait en chaque point

    mais il suffit que l’on ait

    S

    pour toutes les valeurs de

    S

    pour toutes les valeurs de et

    pour toutes les valeurs de et de Rapprocher cette remarque de la Note relative à l’article 32 de la Section IV. (G. D.)

  12. L’expression adoptée par Lagrange pour l’évaluation de la somme des moments des forces d’élasticité n’est pas admissible pour les courbes à double courbure. Binet en a fait la remarque dans le tome X du Journal de l’École Polytechnique. Voir aussi un Mémoire de Poisson qui fait partie du tome III de la Correspondance sur l’École Polytechnique. Ces géomètres remarquent avec raison qu’il doit entrer, dans l’expression de la somme des moments, un terme proportionnel à la variation de l’angle de deux plans osculateurs consécutifs. (Voir une Note à la fin du Volume.) (J. Bertrand.)
  13. Cette intégration a été effectuée par Binet, qui a même considéré les équations plus générales auxquelles on est conduit en rétablissant dans la somme des moments des forces d’élasticité le terme proportionnel à la variation de l’angle de deux plans osculateurs consécutifs. (Comptes rendus de l’Académie des Sciences, 1844, Ier semestre, p. 1115.) (J. Bertrand.)
  14. Ces équations expriment que conservent la même valeur pendant le déplacement de la courbe. Cette condition équivaut aux trois équations suivantes :

    La première est évidente ; la deuxième exprime que la courbure de la ligne considérée est une fonction déterminée de l’arc la troisième, enfin, combinée avec les deux autres, exprime que la seconde courbure est une fonction déterminée de . En écrivant les équations de condition sous cette forme, qui ne diffère de celle de Lagrange que par les diviseurs que nous avons introduits, les calculs resteraient absolument les mêmes ; seulement les multiplicateurs désignés plus loin par seraient finis, tandis qu’il faut, dans la notation de Lagrange, leur supposer des valeurs infinies de différents ordres. Cette circonstance a été signalée comme un inconvénient de la méthode. En adoptant, en effet, la locution si souvent employée par Lagrange, les multiplicateurs représenteraient les forces qui tendent à faire varier les fonctions et il doit sembler extraordinaire que ces forces soient infinies et surtout qu’une transformation tout algébrique suffise pour leur faire prendre des valeurs finies ; mais on se rend compte de cette singularité en remarquant que les coefficients ne sont nommés forces que par une locution figurée, familière à Lagrange. Nous avons averti plusieurs fois qu’il ne fallait pas prendre cette locution à la lettre. (Voir la Note relative à l’art. 9, sect. II.) (J. Bertrand.)

  15. Voir la note relative à l’article 53. (J. Bertrand.)
  16. Cette seconde courbure dépend aussi de (J. Bertrand.)
  17. On voit, d’après les résultats précédents, que deux courbes sont superposables lorsque les rayons de première et de seconde courbure s’expriment, dans l’une et dans l’autre, par une même fonction de l’arc. Si donc deux courbes ont l’une et l’autre leurs rayons de courbure constants et égaux chacun à chacun, ces courbes sont identiques ; et, comme on peut toujours déterminer une hélice dont les rayons de courbure soient donnés, toute courbe qui a ses rayons de courbure constants est une hélice. Plusieurs géomètres ont donné des démonstrations élégantes de ce théorème. Voir deux Notes, l’une de M. Puiseux, l’autre de M. Serret, Journal de Mathématiques de Liouville, Ire série, t. VII, p. 65, et t. XVI, p. 193. (J. Bertrand.)
  18. La démonstration d’Euler est, il est vrai, moins directe que celle de Lagrange ; mais il m’a été impossible de découvrir le point de vue sous lequel on peut l’accuser de manquer de rigueur. (J. Bertrand.)