Lettres d’un Provençal à son épouse/10

, par M. H……Y
(p. 43-45).
Réponse quatrième

RÉPONSE QUATRIÈME

Marseille, le……


Tu as bien raison, mon aimable époux, de dire que l’imagination est la base du plaisir. J’usai du moyen de ton Éléonore et j’en userai plus d’une fois. Au reçu de ta lettre, que je lus à Lisette, j’envoyai chercher un porte-faix. Je me mis à la fenêtre donnant sur le jardin ; les rideaux tombaient sur moi, en sorte que l’on ne voyait pas ma figure. Lisette instruisit le manant de ce qu’il avait à faire. Il entra doucement, commença par me tâter légèrement les fesses par-dessus mes jupons. J’en frissonnai de plaisir ! Je me figurais que c’était un homme charmant, timide et qui n’osait pas… Je tressaillis en sentant sa main commencer par me prendre le bas de la jambe, monter jusqu’au mollet, se promener lentement sur ma cuisse et sembler craindre de me prendre le cul. Lorsqu’il me le prit, je me pâmai : mes cuisses s’entr’ouvrirent, un de ses doigts froissa les lèvres de mon con ; j’en répandis un ruisseau de foutre. Il soulève mes jupes petit à petit comme s’il eut craint de m’éveiller, présente son braquemart aux portes du plaisir, le frotte légèrement sur les babines et finit par l’y engloutir, le retirer, puis l’y replonger définitivement. Il fourragea l’œillet et la boutonnière, c’était un vrai Hercule ! Il me tint près d’une demi-journée. Je fus curieuse de voir si sa figure répondait à ses forces ! je me retournai comme il m’exploitait encore, et je vis le plus vilain mâtin qu’on puisse voir sur terre, mal-propre et mal fait. L’idée que je m’en étais formée m’ayant fait jouir jusqu’alors, aussitôt que je l’eus aperçu, je débandai à la minute et lui dis d’un ton de surprise : Malheureux ! que veux-tu faire là ? — Madame… — Et il ne put prononcer une seule parole. Son vit, qui jusque là avait été constamment raide, devint flasque subitement ; son imagination se figura, sans doute, que j’allais le faire assommer pour prix de son audace. Double preuve que notre imagination influe également sur nos désirs et nos craintes. Lisette paya et renvoya ce malotru. La jouissance ne serait pas si forte si l’on connaissait l’individu auparavant. J’attends ta lettre demain et me déclare

Ta meilleure amie,
B…

Lettres d’un Provençal, 1867, Figures
Lettres d’un Provençal, 1867, Figures