Les Avadânas, contes et apologues indiens/41

Traduction par Stanislas Julien.
Paris B. Duprat (1p. 155-157).


XLI

LES OISEAUX ET L’OISELEUR.

(Du danger des dissentiments.)


Jadis, un oiseleur avait tendu ses filets dans un marais et y avait mis, pour appât, des aliments du goût des oiseaux. Une multitude d’oiseaux accourut à l’envi pour les manger. L’oiseleur tira les cordes de son filet et tous les oiseaux y tombèrent. Dans le nombre, il y en avait un qui était grand et fort ; il enleva le filet et s’envola avec tous ses compagnons.

L’oiseleur voyant l’ombre du filet, la suivit et courut après eux. Un homme dit à l’oiseleur : « Les oiseaux volent dans les airs et vous les poursuivez à pied. Il faut que vous soyez fou.

— Pas tant que vous dites, répliqua l’oiseleur ; quand le soir sera venu, ces oiseaux chercheront un gîte pour la nuit, et tous ne prendront pas la même direction ; de cette façon, il faudra bien qu’ils tombent en mon pouvoir. »

Cet homme continua donc de les poursuivre sans s’arrêter un instant. Quand le soleil fut sur son couchant, il leva les yeux, et vit les oiseaux qui, tout en volant, se disputaient entre eux. Les uns voulaient voler vers l’orient, les autres vers l’occident ; ceux-ci voulaient se diriger vers une grande forêt, ceux-là du côté d’un ruisseau ; leurs contestations n’avaient pas de fin. Un instant après, ils tombèrent sur la terre. L’oiseleur eut enfin son tour, il les prit tous et les tua.

(Extrait de l’ouvrage intitulé : Tchou-king-siouen-tsi-pi-yu-king, c’est-à-dire le Recueil des comparaisons tirées des livres sacrés.)