Les Avadânas, contes et apologues indiens/38

Traduction par Stanislas Julien.
Paris B. Duprat (1p. 148-149).


XXXVIII

LE CAMPAGNARD ET LE SEL.

(Ne faites rien de trop.)


Il y avait un campagnard qui ne connaissait pas le sel. Ayant vu un voisin qui mangeait de la viande et des légumes après y avoir mis du sel, il l’interrogea et lui en demanda la raison. « C’est, répondit l’autre, que le sel communique aux choses un goût excellent. »

Le campagnard se dit en lui-même : « Puisqu’un peu de sel communique aux choses un goût excellent, il faut qu’il ait par lui-même une bien grande saveur. »

Cela dit, il en prit une poignée, en remplit sa bouche et l’avala ; mais l’âcreté du sel lui brûla la bouche. « Comment avez-vous pu dire, demanda-t-il à son voisin, que le sel donnait un goût excellent ?

— Il faut, dit celui-ci à ce vrai nigaud, savoir en régler la quantité ; il donne alors un goût excellent. Pourquoi avez-vous avalé une quantité de sel ? »

(Extrait de l’ouvrage intitulé : Ta-tchi-tou-lun livre XXVIII.)