Les Avadânas, contes et apologues indiens/37

Traduction par Stanislas Julien.
Paris B. Duprat (1p. 146-147).


XXXVII

LE MAÎTRE DE MAISON ET L’ACHETEUR DE MANGUES.

(Ne faites rien de trop.)


Il y avait jadis un maître de maison, qui remit de l’argent à son domestique et l’envoya dans le jardin d’un voisin pour acheter des mangues dont la beauté lui faisait envie.

« Ayez soin, lui dit-il, de n’en acheter que de belles et de bonnes. »

Le domestique prit l’argent et s’en alla acheter les fruits demandés. Le maître du jardin lui dit : « Les fruits de cet arbre sont tous beaux et excellents ; il n’y en a pas un de mauvais. Il vous suffira d’en goûter un seul pour en être convaincu.

— Il faut, dit l’acheteur, que je les goûte l’un après l’autre ; je ne les prendrai qu’à cette condition. Si je n’en goûtais qu’un seul, comment saurais-je qu’ils sont tous bons ? »

— Il prit donc les fruits, les goûta l’un après l’autre, et les apporta à son maître. Celui-ci les ayant vus, éprouva un profond dégoût et n’en mangea point, de sorte que toutes les mangues furent perdues.

(Extrait de l’ouvrage intitulé : Pe-yuk-ing, le Livre des cent comparaisons, partie II.)