Traduction par Albert Montémont.
Ménard (Œuvres de Walter Scott, volume 24p. 228-243).


CHAPITRE XVIII.

LE PAVILLON.


Il nous faut maintenant revenir aux cachots de Blaquernal, où un concours de circonstances avait occasionné la réunion momentanée du vigoureux Varangien et du comte Robert de Paris, qui par leurs caractères avaient entre eux une ressemblance plus forte que l’un ou l’autre n’aurait été disposé à l’admettre. Les qualités du Varangien étaient toutes naturelles et simples. C’étaient les vertus d’un homme courageux qui ne connaît point la crainte, et qui toute sa vie a recherché tous les périls avec empressement. Le comte avait cette même bravoure, cette générosité, cet amour des aventures, propres à un rude guerrier, avec les qualités, en partie réelles, en partie de convention, que ceux de son rang et de son pays devaient à la chevalerie. Le premier pouvait être comparé à un diamant qui vient de sortir de la mine, et que l’outil d’un joaillier n’a pas encore touché ; l’autre était la pierre travaillée, qui, taillée à facettes et richement montée, a perdu peut-être un peu de sa substance, mais qui cependant, pour les yeux d’un connaisseur, a plus de brillant et de splendeur que lorsqu’elle était en brut, comme disent les lapidaires. Dans l’un, la valeur est plus artificielle ; dans l’autre, elle est plus naturelle et plus réelle. Le hasard avait donc formé une alliance temporaire entre deux hommes dont les caractères avaient au fond cette ressemblance intime ; ils étaient seulement séparés par une éducation différente, qui avait laissé vivre de part et d’autre des préjugés, et ces préjugés devaient assez vraisemblablement se trouver en opposition les uns avec les autres. Le Varangien noua la conversation avec le comte, sur un ton de familiarité plus voisin de la grossièreté qu’il ne s’en doutait lui-même, et beaucoup de ses paroles, quoique prononcées sans mauvaise intention, pouvaient être mal interprétées par son nouveau frère d’armes. Cependant ce qui devait blesser davantage dans la conduite d’Hereward, c’était un dédain prononcé pour les titres de ceux auxquels il parlait, se conformant en cela aux usages des Saxons, desquels il tirait son origine ; ce mépris, désagréable aux Normands, ne l’était pas moins aux Francs qui possédaient déjà et étaient si jaloux de conserver les privilèges du système féodal, les futilités du blason, et les distinctions militaires que réclamaient les chevaliers comme devant appartenir seulement à leur ordre.

Hereward était disposé, il faut en faire l’aveu, à songer trop peu à ces distinctions, tandis qu’il avait au moins une tendance suffisante à croire à la richesse de l’empire grec qu’il servait. Il croyait à la dignité inhérente de l’empereur Alexis, et il était assez porté à l’accorder aux officiers grecs qui commandaient son propre corps, et particulièrement à Achille Tatius. Hereward savait que cet homme était un lâche et le soupçonnait à demi d’être un traître. Mais l’Acolouthos était toujours le canal par lequel les grâces impériales arrivaient aux Varangiens en général, aussi bien qu’à Hereward ; et il avait toujours la politique de représenter ces faveurs comme une conséquence plus ou moins indirecte de son intercession. Il passait pour épouser vigoureusement la querelle des Varangiens dans toutes leurs disputes avec les autres corps ; il était libéral et avait toujours la main ouverte, donnait à chaque soldat son dû ; et, sauf cette légère circonstance du courage, il aurait été difficile à ces étrangers de souhaiter un chef qui leur plût davantage. En outre, notre ami Hereward était admis dans la société de l’Acolouthos ; il l’accompagnait, comme nous l’avons vu, dans des expéditions secrètes, et en conséquence il n’était pas exempt de ce qu’on peut appeler, d’un terme expressif, quoique vulgaire, l’obéissance servile qu’avaient pour ce nouvel Achille la plus grande partie de ses Mirmidons.

On pourrait dire que leur attachement à leur chef était aussi vif que le permettait un manque absolu d’estime. Le projet formé par Hereward d’effectuer la délivrance du comte de Paris comprenait donc autant de fidélité à l’empire et à son représentant, Achille Tatius, que la chose était possible, tout en reconnaissant que le Franc était injustement traité.

Pour exécuter ce dessein, il conduisit le comte Robert hors des voûtes souterraines de Blaquernal, dont il connaissait tous les détours, car depuis un certain temps il y avait été nombre de fois posté en sentinelle, pour acquérir cette connaissance des lieux, dont Tatius se promettait bien de profiter lorsque la conspiration éclaterait. Quand ils furent en plein air et à quelque distance des sombres tours du palais, il demanda brusquement au comte de Paris s’il connaissait Agelastès le philosophe. Le comte répondit négativement.

« Faites-y bien attention, sire chevalier ; c’est vous nuire à vous-même que de vouloir m’en imposer, dit Hereward. Vous devez le connaître, car je vous ai vu dîner avec lui hier. — Ah, ah ! ce savant vieillard ? Je ne sais sur son compte rien qui vaille la peine d’être communiqué ou caché. C’est un homme rusé, demi-héraut et demi-ménestrel. — Demi-entremetteur, et tout-à-fait coquin. Sous le masque d’une bonne humeur apparente, il exerce le métier de satisfaire tous les vices d’autrui ; avec son spécieux jargon de philosophie, il s’est soustrait aux croyances religieuses et aux principes de la morale ; avec l’apparence de la fidélité la plus dévouée, il arrachera, s’il n’est arrêté à temps, la vie et l’empire à son maître trop confiant, ou s’il n’y parvient pas, il livrera sans scrupule ses complices à la mort et à la misère. — Quoi ! vous connaissez toutes ces choses, et néanmoins vous permettez à cet homme d’agir librement ! — Oh ! soyez tranquille, sire chevalier ; je ne puis encore former aucun complot que ne puisse déjouer Agelastès ; mais le temps viendra, et même le temps approche où l’attention de l’empereur se portera infailliblement sur la conduite de cet homme ; et alors que le philosophe se conduise sagement, ou sinon, par saint Dunstan ! le barbare pourra lui faire un mauvais parti ! Je voudrais seulement sauver de ses griffes un ami insensé qui a prêté l’oreille à ses déceptions. — Mais qu’ai-je à faire avec cet homme ou avec ses complices ? — Beaucoup, quoique vous l’ignoriez encore. Le principal complice de la conspiration n’est autre que le césar, qui devrait être le plus fidèle des hommes ; mais, depuis que Comnène a nommé un Sébasto-crator, officier plus élevé en dignité et plus près du trône que le césar lui-même, Nicéphore Brienne a toujours été mécontent et irrité, quoiqu’il soit difficile de dire depuis combien de temps il participe aux projets de l’astucieux Agelastès. Je sais que ce dernier a libéralement entretenu, pendant plusieurs mois comme ses richesses le mettent à même de le faire, les vices et la prodigalité du césar. Il l’a excité à se montrer dédaigneux avec sa femme, la fille de l’empereur ; il a mis de la mésintelligence entre lui et la famille royale ; et si Brienne ne jouit plus de la réputation d’un homme raisonnable, ni de la renommée d’un bon capitaine, il s’est privé de l’une et de l’autre en suivant les avis de cet adroit sycophante. — Et qu’est-ce que me fait tout cela ? Agelastès peut être à son gré un homme loyal ou un vil esclave qui flatte par une basse complaisance le pouvoir du moment ; son maître, Alexis Comnène, ne m’est pas tellement allié, à moi ni aux miens, que je doive me mêler aux intrigues de sa cour. — Il se peut que vous soyez dans l’erreur ; si ces intrigues compromettent le bonheur et la vertu de… — Mort de cent martyrs ! de pitoyables intrigues et des querelles d’esclaves peuvent-elles autoriser à concevoir le moindre soupçon contre la noble comtesse de Paris ? Les serments de toute ta génération ne réussiraient pas à prouver qu’un seul de ses cheveux a changé sa couleur contre celle de l’argent ! — Bien imaginé vraiment ! noble chevalier ; tu es un excellent mari pour cette atmosphère de Constantinople, qui demande peu de vigilance et une foi robuste. Tu trouveras bien des partisans et des camarades dans notre cour. — Écoute-moi, l’ami, ne parlons plus, et même ne continuons de faire route ensemble que jusqu’au coin le plus solitaire de cette immense cité ; là nous reprendrons la besogne que nous avons commencée il y a si peu de temps. — Quand même tu serais duc, sire comte, tu ne pourrais pas inviter au combat un homme qui y serait plus disposé. Cependant, considère la bagatelle qui nous ferait battre. Si je succombe, mes gémissements ne dureront pas long-temps ; « mais ma mort rendra-t-elle la liberté à ton épouse, si elle est détenue ? lui rendra-t-elle l’honneur, si son honneur est souillé ?… Fera-t-elle autre chose qu’enlever de ce monde la seule personne qui soit disposée à te prêter secours, à ses risques et périls ; qui espère te réunir à ta femme, et le replacer à la tête de tes hommes ? — J’avais tort, j’avais tout-à-fait tort ; mais garde-toi, mon bon ami, d’accoupler le nom de Brenhilda d’Aspremont avec le mot de déshonneur, et au lieu de me tenir ces discours offensants, dis-moi où nous allons. — Au jardin de Cythère d’Agelastès, dont nous ne sommes pas très éloignés ; cependant il y a, pour s’y rendre, une route plus courte que celle que nous suivons maintenant, sinon je ne pourrais m’expliquer comment Agelastès peut se transporter si vite de son riant jardin aux sombres ruines du temple d’Isis et au palais impérial de Blaquernal. — Et pourquoi, et depuis combien de temps penses-tu que ma comtesse soit retenue dans ces jardins ? — Depuis hier. Moi, et plusieurs de mes camarades à ma prière, nous observions attentivement le césar et votre épouse ; le césar laissait paraître une vive admiration pour elle, et la comtesse semblait profondément irritée ; nous jugeâmes qu’Agelastès, l’ami de Nicéphore, serait chargé, comme d’ordinaire, de mener cette affaire à bonne fin, en vous séparant d’abord tous les deux de l’armée des croisés ; votre épouse, afin qu’elle eût le plaisir d’habiter les jardins du respectable philosophe, comme beaucoup de femmes les ont habités avant elle ; tandis que vous, sire chevalier, vous prendriez un logement permanent dans le château de Blaquernal. — Coquin ! pourquoi ne pas m’avoir averti dès hier ? — Quelle vraisemblance y a-t-il que j’eusse pris la liberté de quitter les rangs pour faire une telle communication à un homme qui, loin d’être mon ami, était considéré par moi comme un ennemi personnel ! Il me semble qu’au lieu de tenir un pareil langage, vous devriez être reconnaissant que tant de circonstances se soient réunies pour faire de moi un ami et un aide. »

Le comte Robert sentit la vérité de ce que disait le Varangien, quoique son caractère hautain l’excitât à se venger, suivant son habitude, sur l’individu qui se trouvait sous sa main.

Mais ils étaient alors arrivés à ce que les habitants de Constantinople appelaient le Jardin du Philosophe. Hereward espérait pouvoir y pénétrer, attendu qu’il avait réussi à connaître une partie des signaux particuliers d’Achille et d’Agelastès, car il avait été introduit enfin dans les ruines du temple d’Isis. À la vérité, les conspirateurs ne l’avaient pas admis à partager leur secret tout entier ; mais, confiants dans ses rapports intimes avec l’Acolouthos, ils n’avaient pas hésité à lui communiquer certaines choses, telles que, dans l’esprit d’un homme aussi fin que l’Anglo-Saxon, elles ne pouvaient manquer, avec le temps et peu à peu, de le mettre à même de connaître le reste. Le comte Robert et son compagnon étaient arrêtés devant une porte voûtée, seule issue dans toute la longueur d’une haute muraille, et l’Anglo-Saxon allait heurter, lorsque, comme si cette idée l’avait frappé tout-à-coup :

« Et si ce misérable Diogène vient nous ouvrir ? dit-il. Il nous faut le tuer avant qu’il puisse prendre la fuite et nous trahir. Allons ! c’est une affaire de toute nécessité, et le coquin a mérité la mort par cent crimes horribles. — Tue-le donc toi-même, répliqua le comte Robert ; c’est plutôt un homme de ton espèce, et assurément je ne souillerai pas le nom de Charlemagne du sang d’un esclave noir. — Que Dieu nous protège ! mais il faut vous tenir prêt à me donner un coup de main dans le cas où l’on viendrait à son secours, car je pourrais succomber sous le nombre. — En ce cas, l’action se changerait en une mêlée, en bataille générale ; et, sois-en persuadé, je ne resterai pas inactif, quand je pourrai agir sans manquer à mon honneur. — Je n’en doute pas ; mais ce scrupule me semble étrange ; avant qu’un homme puisse se défendre ou attaquer son ennemi, il faut qu’il s’informe de lui du rang qu’occupaient ses ancêtres ? — Ne craignez rien, ami ; la stricte règle de la chevalerie est, à la vérité, telle que je vous le dis, mais quand la question est : « Se battre ou non ? » il y a une grande latitude pour prononcer l’affirmative. — Je vais alors frapper le coup de l’exorciste, et nous verrons quel démon va nous arriver. »

En parlant ainsi, il frappa d’une manière particulière, et la porte s’ouvrit. Une négresse naine apparut dans l’embrasure… ses cheveux blancs contrastant d’une façon singulière avec son teint noir, et avec le rire particulier à ces esclaves. Elle avait dans la physionomie quelque chose qui, sévèrement interprété, pouvait dénoter de la malice, et un penchant à se réjouir des misères humaines.

« Agelastès est-il… ? » dit le Varangien ; mais il n’avait pas achevé la phrase que la négresse répondit en lui désignant une allée couverte.

L’Anglo-Saxon et le Franc portaient déjà leurs pas dans cette direction, lorsque la vieille murmura plutôt qu’elle ne dit distinctement : « Vous êtes un des initiés, Varangien ; prenez garde aux gens que vous amenez avec vous, quand peut-être vous ne seriez pas le bienvenu, même tout seul. »

Hereward fit signe qu’il la comprenait, et bientôt ils la perdirent de vue. L’allée serpentait agréablement sous les ombrages d’un jardin oriental, où des monceaux de fleurs, des labyrinthes d’arbustes fleuris et de hauts bouquets d’arbres rendaient doux et frais le souffle du vent du midi.

« C’est ici que nous devons user de toute notre circonspection, » dit Hereward à son compagnon en parlant à voix basse, « car ici, très vraisemblablement, s’est réfugiée la biche que nous cherchons. Laissez-moi donc passer devant, car vous êtes trop profondément agité pour un batteur d’estrades. Tenez-vous caché derrière ce chêne ; et que de vains scrupules d’honneur ne vous empêchent pas de vous enfoncer sous ce bois couvert, et sous la terre même si vous entendiez les pas d’un homme. Si les amants sont d’accord, Agelastès fait probablement sa ronde pour empêcher qu’on ne les trouble ! — Mort et furie ! c’est impossible, s’écria le hautain comte…. Notre-Dame des Lances rompues, arrache la vie à celui qui s’est voué à ton service, mais ne le soumets pas à ces poignantes douleurs ! »

Il sentit néanmoins la nécessité de garder un certain empire sur lui-même, et laissa sans plus de remontrances le Varangien poursuivre sa route, en tâchant néanmoins de ne pas le perdre des yeux. En faisant quelques pas du même côté, il put voir Hereward s’approcher d’un pavillon qui se trouvait à peu de distance de l’endroit où ils s’étaient quittés. Là, il le vit appliquer ses yeux d’abord, ensuite ses oreilles à une des croisées cachées par des arbustes odoriférants, qui empêchaient le jour d’y trop pénétrer. Il crut presque voir un vif intérêt se peindre sur la figure du Varangien, et il brûla d’avoir sa part des renseignements qui étaient parvenus à son guide.

Il se glissa donc, sans faire le moindre bruit, à travers le labyrinthe de feuillage qui avait voilé l’approche d’Hereward ; et ses mouvements furent si discrets, qu’il toucha l’Anglo-Saxon pour l’avertir de sa présence, avant que celui-ci eût remarqué qu’il s’approchait.

Hereward ne sachant pas d’abord qui l’avait ainsi approché, se tourna vers le nouvel arrivant avec un visage semblable à un charbon enflammé ; mais reconnaissant bientôt le comte, il haussa les épaules, comme de pitié, pour une impatience que la prudence ne pouvait contenir, et se retirant lui-même, il permit au comte de venir à sa place sur la pointe des pieds regarder à travers les jalousies de la fenêtre ; curiosité dont l’œil le plus pénétrant n’eût pu s’apercevoir dans l’intérieur du pavillon. Le jour douteux qui pénétrait dans cette demeure de plaisir convenait fort bien au genre de pensées qu’on supposait devoir être inspirées par un temple de Cythère. On y voyait des peintures et des groupes de statues du genre de celles qui avaient attiré les regards des deux époux dans le kiosque de la cascade, mais les sujets étaient propres à faire naître des idées plus voluptueuses que dans le premier endroit. Bientôt après, la porte du pavillon s’ouvrit, et la comtesse entra, accompagnée de sa suivante Agathe. La dame, en entrant, se jeta sur le lit de repos, tandis que la suivante, qui était jeune et jolie, se plaçait modestement derrière, et de telle sorte qu’on pouvait à peine la distinguer.

« Que penses-tu, dit la comtesse, d’un ami si soupçonneux qu’Agelastès ? et d’un ennemi si galant que ce césar, comme on l’appelle ? — Que puis-je penser, répondit la soubrette, sinon que ce vieillard nomme amitié ce qui est haine, et que le césar appelle un amour patriotique de son pays, qui ne lui permettra point de mettre ses ennemis en liberté, une affection trop violente pour sa belle captive ? — Quant à cette affection, dit la comtesse, elle ne m’inspirera point d’autres sentiments que si elle était vraiment l’inimitié dont il voudrait lui donner la couleur… Mon fidèle et noble époux ! si tu savais à quelles épreuves ils m’ont soumise, combien tu aurais vite surmonté tous les obstacles pour accourir à mon secours ! — Peux-tu être un homme, dit le comte Robert à son compagnon, et me conseiller de me tenir tranquille et d’écouter de semblables choses ? — Je suis un homme, répliqua l’Anglo-Saxon, et vous, sire comte, vous en êtes un aussi ; mais toute notre arithmétique ne fera point que nous soyons plus de deux ; et il est probable qu’un coup de sifflet du césar ou un cri d’Agelastès, amènerait ici mille bras pour nous rouer, fussions-nous aussi redoutables que Béris d’Hampton… Attendez encore, et tenez-vous tranquille. Je vous le conseille, moins dans l’intérêt de ma propre vie (car, en m’embarquant dans cette maudite affaire avec un homme tel que vous, j’ai montré combien j’en faisais peu de cas), que dans celui de votre propre sûreté et de celle de votre comtesse, qui se montre aussi vertueuse qu’elle est belle. — Il m’en ont d’abord imposé, dit lady Brenhilda à sa suivante. Les mœurs sévères, la science profonde et la droiture inébranlable qu’affectait cet infâme vieillard m’a fait croire au caractère qu’il voulait se donner ; mais le voile est tombé depuis qu’il m’a laissé entrevoir son alliance avec l’indigne césar, et cet homme hideux est maintenant pour moi dans sa laideur naturelle. Néanmoins, si je puis, par adresse ou par ruse, tromper cet architrompeur… puisqu’il m’a ôté à peu près tout autre moyen de secours… je ne me refuserai pas l’aide de la finesse, et il verra peut-être que je puis m’en servir aussi bien que lui. — Entendez-vous ? dit le Varansien au comte de Paris ; que votre impatience ne vienne pas rompre le tissu formé par la prudence de votre épouse. Je mettrai toujours l’esprit d’une femme en balance contre la valeur d’un homme, quoi qu’il s’agisse de faire. Ne lui portons donc pas secours avant que sa sûreté et le succès de notre entreprise nous en imposent le devoir. — Ainsi soit-il, répliqua le comte de Paris ; mais n’espère pas, sire Saxon, que ta prudence me persuade de quitter ce jardin sans tirer une pleine vengeance de cet indigne césar et de ce prétendu philosophe, s’il est vrai qu’il avait feint d’être… » Le comte commençait à élever la voix, lorsque le Saxon, sans cérémonie, lui mit la main sur la bouche. « Tu prends de grandes libertés, » ajouta le comte, en baissant néanmoins le ton.

« Oui, vraiment ! répliqua Hereward ; quand la maison est en feu, je ne m’informe point si l’eau que je jette pour l’éteindre est parfumée ou non. »

Cette réplique ramena le Franc au sentiment de sa situation ; et s’il n’était pas content de l’excuse du Saxon, il garda cependant le silence. Un bruit éloigné se fit alors entendre… La comtesse écouta et changea de couleur. « Agathe, dit-elle, nous sommes comme des champions dans la lice, et voici venir l’adversaire ! retirons-nous dans ce cabinet, pour retarder de quelques instants une attaque si alarmante. » En parlant ainsi, les deux femmes se retirèrent dans une espèce d’antichambre qui communiquait avec l’appartement principal par une porte qui se trouvait derrière le siège qu’avait occupé Brenhilda.

Elle avait à peine disparu, que de l’autre côté, suivant l’usage au théâtre, entrèrent le césar et Agelastès. Ils avaient peut-être entendu les derniers mots de Brenhilda, car le césar dit à voix basse :

Militat omnis amans, habet et sua castra Cupido[1].

« Eh quoi ! notre belle ennemie a-t-elle fait retirer ses troupes ? N’importe, il est évident qu’elle pense à la guerre, quand même l’ennemi n’est pas en vue. Eh bien ! tu n’auras point à me reprocher cette fois, Agelastès, d’aller trop vite en amour et de me priver du plaisir de la poursuite. Par les cieux ! je serai aussi régulier dans mes mouvements que si je portais réellement sur mes épaules tout le fardeau d’années qui fait la différence entre nous deux ; car je soupçonne fortement, vieillard, que c’est le maudit envieux, le Temps, qui a coupé pour toi les ailes de l’amour. — Ne parlez pas ainsi, puissant césar, répliqua le vieillard ; c’est la main de la Prudence, qui, en arrachant des ailes de l’amour quelques mauvaises plumes, lui en laisse encore assez pour voler d’un vol égal et assuré. — Ton vol était cependant moins mesuré, Agelastès, lorsque tu rassemblas les pièces de cette armure… lorsque tu empruntas aux magasins de l’amour cette panoplie dont ta bonté m’a permis de m’armer, ou plutôt de compléter mon équipement. »

Tout en parlant ainsi, il regardait sa propre personne resplendissante de diamants ; il était orné de chaînes d’or, de bracelets, d’anneaux et d’autres ornements qui, avec le costume élégant qu’il portait en arrivant aux jardins de Cythère, faisaient ressortir les avantages de son bel extérieur.

« Je suis charmé, dit Agelastès, que vous ayez pu trouver parmi des brimborions que je ne porte jamais maintenant, et dont j’ai même peu fait usage dans ma jeunesse, quelque chose qui puisse rehausser vos avantages naturels. Rappelez-vous seulement cette petite condition, que ces bagatelles qui ont l’honneur d’orner votre personne en ce grand jour ne peuvent revenir à un possesseur moins illustre, mais qu’elles doivent de toute nécessité rester au grand personnage à qui elles ont une fois servi. — Je ne puis y consentir, mon digne ami, répliqua le césar ; je sais que tu attaches à ces joyaux la valeur que peut y attacher un philosophe, c’est-à-dire qu’ils n’ont de prix à tes yeux que par les souvenirs qu’ils rappellent. Cet anneau avec sa large pierre, par exemple… je te l’ai entendu dire, a jadis appartenu à Socrate : et tu ne dois pas le regarder sans remercier sincèrement le ciel que ta philosophie n’ait jamais été mise à l’épreuve par une Xantippe. Ces agrafes brillèrent autrefois sur l’aimable sein de Phryné, et maintenant elles appartiennent à un homme qui saurait mieux que Diogène le cynique rendre hommage aux beautés qu’elles cachaient ou laissaient voir. Ces boucles aussi… — Je veux épargner ton ingénuité, bon jeune homme, » interrompit Agelastès un peu piqué ; « ou plutôt, noble césar ! gardez votre esprit… vous aurez bientôt ample occasion de le faire briller. — Ne crains rien pour moi ; et maintenant songeons à profiter des avantages que nous possédons, qu’ils soient naturels ou donnés à nous par notre cher et respectable ami. Ah ! » s’écria-t-il, la porte s’ouvrant tout-à-coup, et la comtesse s’avançant presque au devant de lui, « nos désirs sont prévenus. »

Il s’inclina donc avec le plus profond respect devant Brenhilda, qui, après avoir fait quelques changements à sa toilette pour la rendre plus brillante, sortait alors du cabinet où elle s’était retirée.

« Salut à vous, noble dame, dit le césar. Je viens vous visiter avec l’intention de m’excuser de vous retenir, peut-être contre votre gré, dans ces étranges régions dont vous êtes si inopinément devenue l’habitante. — Non pas peut-être, répliqua la dame, mais assurément contre ma volonté, qui est de rejoindre au plus tôt mon époux, le comte de Paris, et les braves soldats qui ont pris la croix sous sa bannière. — Telles furent sans doute vos pensées lorsque vous quittâtes les pays de l’Est, dit Agelastès ; mais, belle comtesse, n’ont-elles éprouvé aucun changement ? Vous avez quitté des rivages où le sang humain coule à la moindre provocation, pour venir dans une région où le premier précepte est d’augmenter la somme de bonheur humain par tous les moyens imaginables. Dans l’Occident celui-là et celle-ci sont le mieux respectés, qui savent le mieux exercer leur force tyrannique en rendant les autres malheureux ; tandis que, dans nos pays plus pacifiques, nous réservons nos couronnes à l’homme spirituel et à l’aimable femme qui savent le mieux faire le bonheur de la personne en qui ils ont placé leurs affections. — Mais, révérend philosophe, répliqua la comtesse, qui travaillez avec tant d’art à me recommander le joug du plaisir, sachez donc que vous contredisez toutes les idées qui m’ont été familières depuis mon enfance. Dans le pays où s’est écoulée ma jeunesse, tant s’en faut que nous admettions vos doctrines, que nous ne nous marions jamais que comme le lion et la lionne, lorsque l’homme a forcé la femme de reconnaître la supériorité de son mérite et de sa valeur. Cela est si fort dans nos mœurs, qu’une jeune fille, même de basse naissance, croirait avoir conclu un mariage indigne d’elle, si elle épousait un homme qui n’eût pas encore de renommée guerrière. — Mais, noble dame, dit le césar, un homme mourant peut encore se flatter de quelque faible espérance. S’il était possible le moins du monde, qu’en se distinguant au milieu des combats, on pût gagner ces affections qui ont été dérobées plutôt qu’accordées volontairement, combien n’y aurait-il pas de guerriers qui seraient jaloux de descendre dans la lice quand le prix de la victoire est si beau ! Quelle est l’entreprise trop difficile pour qu’on ne la tente à une pareille condition ? et où est l’homme dont le cœur ne sentirait pas qu’en dégainant son épée pour une semblable cause, il fait vœu de ne pas la remettre dans le fourreau sans pouvoir dire avec orgueil : Ce que je n’ai pas encore obtenu, je l’ai mérité ! — Vous voyez, madame, reprit Agelastès, qui, pensant que les dernières paroles du césar avaient produit quelque impression, se hâta d’ajouter quelques mots dans le même esprit : « vous voyez que le feu de la chevalerie brûle aussi bien dans le sein des Grecs que dans celui des peuples de l’Occident. — Oui, répondit Brenhilda ; j’ai entendu parler du célèbre siège de Troie, occasionné par la poltronnerie d’un lâche qui enleva la femme d’un homme courageux, refusa de se mesurer en combat singulier avec l’époux qu’il avait outragé, et enfin causa la mort de ses nombreux frères, la destruction de sa ville natale, de toutes les richesses qu’elle contenait, et mourut lui-même de la mort d’un infâme poltron, pleuré seulement par sa maîtresse indigne ; voilà comment les règles de la chevalerie étaient comprises par vos ancêtres. — Madame, vous êtes dans l’erreur, répliqua le césar ; Pâris était un asiatique dissolu, et ce fut le courage des Grecs qui vengea ses outrages. — Vous êtes savant, seigneur, reprit la dame ; mais ne croyez pas que j’ajoute foi à vos paroles avant que j’aie vu un Grec, un chevalier grec, assez brave pour regarder sans crainte le cimier du casque de mon époux. — C’est une chose qui ne serait pas extrêmement difficile. Si l’on ne m’a point flatté, j’ai été moi-même jugé, dans les combats, l’égal d’hommes plus redoutables que celui qui a été si étrangement marié à la belle Brenhilda. — Cela sera bientôt prouvé, reprit la comtesse. Vous auriez peine à nier, je pense, que mon mari, séparé de moi par quelque indigne supercherie, soit à votre disposition, et puisse être amené ici selon votre bon plaisir. Je ne demande pas pour lui d’autre armure que celle qu’il porte d’ordinaire, d’autre arme que sa bonne épée tranchefer ; puis combattez-le dans cette chambre, ou dans toute autre lice aussi étroite, et, s’il prend la fuite, s’il demande quartier, s’il reste mort sous son bouclier, que Brenhilda soit le prix du vainqueur !… Ciel miséricordieux ! » s’écria-t-elle en se laissant tomber sur son siège, « pardonne-moi de supposer même qu’une telle issue soit possible, c’est un crime presque aussi grand que de douter de l’infaillibilité de tes jugements. — Permettez-moi cependant, dit le césar, de saisir ces précieuses paroles avant qu’elles tombent à terre… permettez-moi d’espérer que l’homme à qui Dieu donnera la puissance et la force de vaincre ce fameux comte de Paris lui succédera dans l’affection de Brenhilda ; et, croyez-moi, le soleil ne descend point sur l’horizon avec autant de vitesse que j’en aurai pour courir à la rencontre de votre époux. — Oh ! par le ciel, » dit le comte à Hereward, d’une voix pleine d’anxiété, « c’est trop en attendre de moi ; je n’écouterais point tranquillement un méprisable Grec, qui pâlirait en voyant briller tranchefer, me braver en mon absence, et tenter de séduire la comtesse mon épouse !… Il me semble que Brenhilda laisse prendre plus de liberté que de raison à ce perroquet babillard. Par la croix ! je vais sauter dans l’appartement, les confondre par mon arrivée soudaine ; et arranger ce fanfaron d’une manière dont il gardera le souvenir. — Avec votre permission, » dit le Varangien qui pouvait seul entendre ces paroles violentes, « vous ne serez guidé que par la froide raison tant que je serai avec vous. Quand nous ne serons plus ensemble, alors que le diable de la chevalerie errante vous prenne sur ses épaules et vous emporte où bon lui semblera. — Tu es une brute, » répliqua le comte en le regardant avec un air dédaigneux qui correspondait à l’expression qu’il employait ; « non seulement sans humanité, mais encore privée de tout sentiment naturel d’honneur ou de honte. Le plus méprisable des animaux ne reste pas impassible en voyant attaquer sa compagne : le taureau présente les cornes à son rival… le mâtin recourt à ses dents… et même le cerf timide devient furieux et combat. — Parce que ce sont des bêtes, et que leurs compagnes sont aussi des créatures sans pudeur ni raison, qui ne peuvent comprendre la sainteté d’un choix. Mais d’ailleurs, comte, ne peux-tu donc voir que le but manifeste de cette pauvre femme abandonnée par tout le monde est de te garder ta foi, tout en évitant les pièges dont ces infâmes l’ont entourée ? Par les âmes de mes pères ! mon cœur est tellement touché de sa candeur, de son innocence et de sa fidélité, que moi-même, à défaut d’un meilleur champion, je lèverais ma hache d’armes pour la défendre. — Je te remercie, mon brave ami, je te remercie aussi sincèrement que s’il était possible que tu rendisses ce bon service à Brenhilda, l’alliée de plus d’un noble seigneur, la maîtresse de plus d’un grand vassal ; et, ce qui vaut mieux que des remercîments, je te demande pardon de l’injure que je viens de t’adresser. — Vous n’avez pas besoin de mon pardon : car je ne m’offense jamais d’un mot échappé sans intention sérieuse de m’offenser… Écoutez donc, ils parlent encore. »

« Il serait étrange que cela fût, » disait le césar en marchant à grands pas dans l’appartement ; « mais il me semble, Agelastès, et même je suis presque certain, que j’entends parler dans le voisinage de cet appartement que tu habites seul. — C’est impossible, répliqua Agelastès ; mais je vais aller voir. »

Le Varangien, qui le vit quitter le pavillon, fit comprendre au Franc qu’il fallait qu’ils se couchassent à terre au milieu du petit buisson d’arbres verts où ils étaient. Le philosophe fit sa ronde d’un pas bruyant, mais d’un œil soigneux ; et les deux écouteurs furent obligés d’observer le plus strict silence et de ne faire aucun mouvement, jusqu’à ce qu’il eût terminé son infructueuse recherche, et qu’il fût rentré dans le pavillon.

« Sur ma foi, brave homme, dit le comte, avant de retourner nous mettre aux écoutes, il faut que je te dise à l’oreille que jamais de ma vie je n’eus de tentation plus forte que celle qui me poussait à casser la tête de ce vieil hypocrite, si j’eusse pu le faire sans compromettre mon honneur ; et j’aurais souhaité du fond de mon cœur que toi, qui n’étais pas retenu par cette raison, tu eusses cédé à une impulsion de la même nature. — Une pareille idée m’a passé dans l’esprit ; mais le projet me sembla inexécutable, car je ne pouvais le réaliser sans compromettre notre sûreté à tous deux et particulièrement celle de la comtesse. — Je te remercie encore une fois de ta bienveillance pour elle ; et, par le ciel, si nous devons nous battre enfin, comme c’est assez probable, je ne te refuserai ni un honorable adversaire, ni un juste quartier si les chances du combat tournent contre toi. — Je te remercie ; seulement, pour l’amour du ciel, garde le silence maintenant, et fais ce que tu voudras ensuite. »

Avant que le Varangien et le comte eussent repris leur poste, les personnes qui causaient dans l’intérieur du pavillon, croyant n’être pas écoutées, avaient recommencé leur conversation, parlant bas, mais avec beaucoup de chaleur.

« C’est vainement que vous voudriez me persuader que vous ne savez pas où est mon mari, disait la comtesse, ou que vous n’avez pas l’influence la plus absolue sur sa captivité : quel autre pourrait avoir intérêt à écarter ou à mettre à mort le mari, sinon l’homme qui ose admirer la femme ? — Vous me faites injure, belle dame, répliqua le césar, et vous oubliez que je ne puis être appelé sous aucun rapport le grand ressort de cet empire ; que mon beau-père Alexis, est l’empereur, et que la femme qui se nomme mon épouse est jalouse comme une furie de mes moindres mouvements… Comment la captivité de votre mari et la vôtre dépendraient-elles de moi ? L’affront public que le comte de Paris a fait à l’empereur était de telle nature qu’on pouvait prévoir qu’Alexis s’en vengerait par la ruse ou la force. Cette affaire ne me concernait que comme l’humble esclave de vos charmes ; et c’est par la prudence et l’habileté du sage Agelastès que j’ai pu parvenir à vous arracher du gouffre dans lequel vous auriez certainement péri. Ne pleurez pas, madame, car nous ne connaissons pas encore le destin du comte Robert. Cependant, croyez-moi, il serait sage à vous de choisir un meilleur protecteur, et de le considérer comme n’existant plus. — Un meilleur que lui ? dit Brenhilda. Je ne puis en avoir un meilleur, quand même je choisirais parmi tous les chevaliers du monde ! — Ce bras, » répliqua le césar en se redressant et en prenant une attitude martiale, « déciderait la question, si l’homme dont vous avez une si haute idée existait encore sur la surface de la terre, et en liberté. — Tu es, » dit Brenhilda en le regardant fixement et les traits animés du feu de l’indignation : « tu es… mais il est inutile de te dire quel est ton véritable nom : crois-moi, le monde en retentira un jour, et en appréciera la juste valeur. Écoute ce que je vais te dire : Robert de Paris n’est plus, où il est captif je ne sais où. Il ne peut venir dans la lice où tu sembles brûler de le voir… mais voici devant toi Brenhilda, née d’Aspremont, femme légitime du brave comte de Paris. Elle n’a jamais été vaincue en champ clos par un autre que par le vaillant comte, et puisque tu es si fâché de ne pouvoir combattre son mari, tu n’as assurément rien à objecter si elle veut le remplacer. — Comment, madame ! » s’écria le césar étonné ; « vous proposez-vous d’entrer en lice contre moi ? — Contre toi, et contre tout l’empire grec, si l’on ose soutenir que Robert de Paris est traité avec justice et légalement détenu. — Et les conditions sont-elles les mêmes que si le comte Robert lui-même descendait dans la lice ? Le vaincu doit-il être à la disposition du vainqueur, quoi qu’il arrive ? — Ceci me semble juste, et je ne refuse pas cette chance : seulement, si c’est l’autre champion qui mord la poussière, le noble comte Robert sera mis en liberté, et on le laissera partir avec tous les honneurs convenables. — J’y consens, pourvu que cela soit en ma puissance. »

Un bruit sourd, semblable à celui d’un gong moderne, interrompit en cet endroit la conversation.



  1. Tout amant combat, et Cupidon fait aussi la guerre. a. m.