Les éditions du Bien public ; Les Trois-Rivières (p. 30-31).

b — Les Acadiens

Après 1755, les noms acadiens frappent l’attention : les Trois-Rivières ont profité d’un bon contingent de ces rescapés du pire dérangement que rapporte l’Histoire moderne. La Grand’Cadie et la Petite-Cadie de Yamachiche deviennent l’Acadie chez nous. Déjà la Pointe-du-Lac possédait des Maheu, des Bertrand, des Pinaut, des Bériau, noms acadiens ; la nouvelle recrue amena les noms de Comeau, Landry, Martin, Bastarache, Thibault, Giasson, Dorion, Doucet, Morel, Garceau, Haché. Arrachés de leurs heureuses terres de Port-Royal, que les Anglais trouvaient de leur goût, transportés d’abord à Boston, et deux ans plus tard, rembarqués pour la Martinique, ils conspirent en français de n’y pas aller. Ils enferment le capitaine et se rendent maîtres du navire. Un Doucet prend la barre du gouvernail, débarque son monde à Québec et relâche le bateau. Les Acadiens, s’adressent à M. de Vaudreuil et reçoivent des terres à St-Grégoire, à St-Jacques l’Achigan et par ici. Bienvenus !

On trouve de tout dans les vieux registres.

La prononciation ancienne reparaît dans les fautes d’épellation. Ainsi on a Laparle, Arpentigny, Lasarte, Bartrand, Boucharville, Gilardeau, Mertin et Delpé, qu’on prononce Martin et Dalpé ; Berton, Beloin, Deloncour, Gaillou, Troquet, pour Breton, Blouin, Denoncourt, Gadiou, Trottier, comme d’autres prononcent encore Bargeron, Labarge et Barquiaume.

Les friands d’étude des races aimeront à savoir que dans ces presque deux cents ans de registre, on trouve deux mentions de mariages avec des indiennes et encore que ce sont des noms importés d’en bas du fleuve : en 1795, sépulture de « Jeanne Mokatpe, micmake, femme de Jean Martin Michaux, âgée de 26 ans », et en 1755, baptême d’une fille de 7 ans de Pierre Langlais et de Michelle Chapôna, algonquine. Fort peu d’apparence de sangs-mêlés dans les deux cas.

Après la guerre de 1776-1783, mille à quinze cents soldats allemands du général baron Von Riedesel se fixent aux États-Unis et au Canada : nous trouvons chez nous les noms de Offman et Henri Kune ; un Portugais à qui M. de Calonne se faisait comprendre en mêlant le français, le latin et les gestes ; Wineur pour Weaner, qui resta et qu’on appelait le bonhomme Lallemand, puis Jean-Joseph le Polonais (Bonaki), et quelques Anglais, probablement des Loyalistes. On retrace aux registres de la seigneuresse Montour, entre 1810 et 1850 : Brown, Christopher Cramer, Woolsey, Beatty, McDonald, Johnston, Barnet, Hockart, qui sont partis, et des Sills, qui ont fait souche et M. Hooper, le dernier à disparaître, un beau vieillard, cultivateur, qui venait souvent aux Vêpres, qui contribuait chaque année à la messe pour les biens de la terre, qui parlait bon français avec les autres patrons de la beurrerie, ainsi qu’à ses chevaux, dressés à marche donc, et arrête donc !