L’Encyclopédie/1re édition/CHOU

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CHOU, s. m. (Hist. nat. Bot.) brassica, genre de plante dont la fleur est à quatre feuilles disposées en croix ; le calice pousse un pistil qui, lorsque la fleur est passée, devient un fruit ou une silique grêle, longue, cylindrique, & composée de deux panneaux pliés en gouttiere, appliqués sur les bords d’une cloison qui divise ce fruit dans sa longueur en deux loges remplies de quelques semences presque rondes. Ajoûtez au caractere de ce genre le port de ses especes, qui consiste principalement dans les feuilles ondées sur les bords, ridées le plus souvent, & de couleur bleue céleste. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

Choux, (Jardinage.) Il y a peu de plantes potageres qui ayent autant d’especes.

Il se distingue en chou pommé blanc, en colsa, chou blond, chou frisé blanc, chou pommé, chou cabu, chou rouge, chou-fleur, chou de Milan ou poncalier, choux-raves.

Les choux rouges ont des feuilles rougeâtres, & la tige très-élevée ; les frisés ont des feuilles toutes découpées & garnies de rides.

Lorsque vous avez coupé les têtes des vos choux, les tiges repoussent l’hyver de petits rejettons appellés brocolis, que l’on mange en salade. Voyez Brocolis.

Les choux-fleurs sont les plus délicats ; ils se sement sur couche en Avril & en Mai. On leur entoure la tête avec quelques liens de paille, afin qu’elle soit moins exposée à l’ardeur du soleil. En les levant en motte de dessus la couche, on leur rogne le bout du pivot ; & souvent pour les faire pommer, & les garantir des gelées, on les met dans la serre dans une planche de demi-pié de haut. Leur graine ne réussit pas en France, il faut en faire venir du Levant.

Les choux de Milan se sement sur couche en Mai, & on les replante en pleine terre, dans des rayons, à un pié l’un de l’autre ; & si l’on veut que les choux grossissent, il faut les arroser souvent dans les chaleurs, & leur donner un labour dans le mois de Juin, afin que la terre soit plus disposée à recevoir utilement les pluies du ciel.

Les choux en général ne se perpétuent que de graines, qu’il faut laisser secher aux montans que l’on a coupés, & ensuite les vanner, & les serrer pour les semer l’année suivante. (K)

Chou, (Mat. med. & Diete.) Les différentes especes de choux qu’on cultive dans nos jardins, sont beaucoup plus d’usage dans les cuisines que dans la Medecine : les feuilles de chou rouge sont pourtant employées par les Apoticaires, qui préparent un sirop de leur suc.

Les choux doivent être rangés avec les plantes alkalines ; car quoiqu’ils ne contiennent que peu ou point d’alkali volatil absolument libre, ou capable de s’élever dans la distillation au degré de l’eau bouillante, cependant la présence de ce principe dans cette plante, & la foiblesse des liens qui l’y retiennent, sont bien annoncés par la facilité avec laquelle il se développe dans sa décoction par le secours de la moindre fermentation.

Quelques anciens ont regardé les choux comme un remede universel. On dit que les Romains l’ont employé à ce titre pendant six cents ans ; & que le grand Caton s’en est servi avec succès pour garantir sa famille de la peste. Pline nous apprend que Pythagore faisoit un cas tout particulier du chou : c’est grand dommage qu’un traité entier que Dieuches, compté par Galien entre les principaux des plus anciens medecins, avoit composé sur les vertus du chou, ne soit pas parvenu jusqu’à nous.

L’école de Salerne a dit du chou, que son suc lâchoit le ventre, & que sa substance le resserroit, Jus caulis solvit, cujus substantia stringit.

Plusieurs anciens l’ont célebré comme vulnéraire, antiscorbutique, utile contre l’hydropisie, & surtout spécifique dans les maladies de la poitrine, par une vertu particuliere, ou par une certaine analogie qu’ils ont cru appercevoir entre cette plante & ce viscere. On ne le regarde aujourd’hui que comme adoucissant l’acrimonie des humeurs de la poitrine, détergeant les ulceres commençans, appaisant très-bien la toux, en un mot comme un béchique incrassant ; mais on peut douter encore à bon droit de cette derniere propriété, & remettre le chou dans la classe des purs alimens, dans laquelle les Medecins ont puisé leurs prétendus incrassans. Voyez Incrassans.

Au reste, comme le choix même des alimens est assûrément de conséquence dans les maladies chroniques, & sur-tout dans les maladies du poumon, le chou, quoique dépouillé de toute vertu médicamenteuse proprement dite, pourroit bien avoir dans ces maladies une utilité réelle. C’est à l’observation à nous instruire sur ce point.

Quant aux qualités malfaisantes que le plus grand nombre des Medecins a attribuées aux choux considérés comme plante potagere ou aliment, on ne voit pas que l’observation réponde à cette prétention, qui dès-lors est nulle de plein droit comme toute loi medicinale fondée sur le seul raisonnement.

Il est évident, & plusieurs auteurs se sont même trahis là-dessus, le célebre M. Geoffroy, par exemple ; il est évident, dis-je, que c’est de la pente à la putréfaction qu’on a dès long-tems observée dans le chou, & sur-tout dans sa premiere décoction plûtôt que de l’expérience, qu’on a déduit la prétendue disposition du chou à produire des sucs grossiers & une bile noire. Les paysans & le peuple de tous les pays de l’Europe s’en nourrissent presque journellement. En Béarn & dans quelques autres provinces voisines, il n’est peut-être pas un seul habitant qui n’en mange au moins une fois par jour ; la garbure de ce pays est un potage aux choux & aux cuisses d’oie, ou au lard, qu’on sert régulierement à souper sur toutes les tables : or on n’a observé ni dans ces provinces ni ailleurs, aucune maladie ou indisposition particuliere qu’on puisse raisonnablement attribuer à l’usage des choux.

C’est avec moins de fondement encore que les mêmes auteurs ont avancé que le chou nourrissoit peu & se digéroit difficilement. On peut avancer au contraire 1°. qu’il contient beaucoup d’aliment vrai, & que cet aliment est même plus solide ou plus analogue aux humeurs nutritives de nos corps, que celui que fournissent les autres familles de végétaux nourrissans ; celui-ci étant dans un état qui le rapproche de très-près de la nature des lymphes animales, ou des sucs des viandes. Voyez Legume & Diete.

2°. Qu’il est peu d’estomacs qui ne le digerent très-bien ; & que si on peut l’accuser de vitier quelquefois la digestion, c’est au contraire en la hâtant ou en lâchant le ventre.

Le sauer-kraut qui est une espece de mets très usité en Allemagne, n’est autre chose que du chou porté par une fermentation, à laquelle on l’a disposé dans cette vûe, à l’état acéteux ou acide. Voyez Sauerkraut. (b)

Chou caraïbe, plante qui doit être rapportée au genre appellé pié de veau. Voyez Pié de veau. (I)