L’Encyclopédie/1re édition/CATALOGUE
CATALOGUE, s. m. (Littérat. & Librair.) est une énumération ou liste de noms d’hommes, de livres, & d’autres choses disposées suivant un certain ordre. Ce mot, selon du Cange, étoit employé dans la basse latinité, pour signifier collection, du Grec ϰατάλογος de ϰαταλέγω, recenseo.
Nous n’entrerons point dans le détail des différentes collections auxquelles on a coûtume de donner ce nom. V. Cabinet, Etoile. Nous nous contenterons de parler des catalogues de livres, parce que de toutes les collections c’est en effet la plus intéressante.
Ce qui existe, ce qui arrive, ce qu’on peut dire, faire, ou imaginer, tout enfin étant matiere de livres, la vie la plus longue, & l’étude la plus assidue, ne mettent que difficilement en état d’en acquérir la connoissance. Un homme de Lettres doit cependant s’en faire un plan méthodique, afin de savoir caractériser & réduire à des classes convenables ce nombre prodigieux d’écrits qu’on a donnés & qu’on donne tous les jours au public : autrement il est exposé à errer perpétuellement dans l’immensité de la Littérature, comme dans un labyrinthe plein de routes confuses.
Ce système ou plan méthodique consiste à diviser & sous-diviser en diverses classes tout ce qui fait l’objet de nos connoissances ; chacune des classes primitives pouvant être considérée comme un tronc qui porte des branches, des rameaux, & des feuilles. La difficulté à surmonter pour établir entre toutes ces parties l’ordre qui leur convient, est 1°. de fixer le rang que les classes primitives doivent tenir entr’elles ; 2°. de rapporter à chacune d’elles la quantité immense de branches, de rameaux, & de feuilles qui lui appartiennent.
Ces divisions & sous-divisions une fois établies, forment ce qu’on nomme système bibliographique, & s’appliquent à l’arrangement des livres, soit dans une bibliotheque, soit dans un catalogue. Un des avantages que l’on retire de ces divisions & sous-divisions bien établies, est de trouver avec facilité les livres que l’on cherche dans une bibliotheque & dans un catalogue ; elles procurent aussi à l’homme de Lettres le moyen de connoître assez promptement ce qu’on a écrit de meilleur sur les matieres qu’il étudie, ou qu’il se propose d’étudier.
De savans Bibliographes & des Libraires habiles ont donné différens systèmes de catalogues : mais il seroit inutile & trop long de les rapporter ici ; nous nous contenterons d’indiquer les principaux que l’on pourra consulter. On a obligation à Lambecius du catalogue des manuscrits de la bibliotheque de l’empereur ; Mettaire a fait celui de la bibliotheque Harleienne ; Prosper Marchand a suivi des routes qui lui étoient particulieres, & en a donné les raisons dans la préface de son catalogue de Faultrier. Celui de tous qui s’est fait jusqu’à présent le plus de réputation dans ce genre de littérature, & qui en effet a mis le plus d’ordre, d’intelligence, & de raisonnement dans les divisions, & le plus d’instructions sur les livres rares dans ses notes, est M. Martin, Libraire de Paris ; aussi son système est-il le plus généralement adopté. Quoiqu’on le trouve dans tous les catalogues qu’il a donnés au public, nous croyons devoir le rapporter ici en faveur de ceux qui ne sont point à portée de se les procurer.
Si le catalogue de la bibliotheque du Roi étoit achevé, nous croirions n’avoir rien de plus agréable & de plus instructif à donner au public sur cette matiere, que le système que l’on y a adopté. Les divisions générales sont les mêmes que celles de M. Martin : mais on y a porté les divisions à un degré de détails qui ne se trouve dans aucun autre ouvrage de cette nature. On est redevable de ce travail immense, & qui se continue, à M. l’abbé Sallier & à M. Melot. Il ne falloit pas moins que le savoir profond & le zele infatigable de ces deux illustres académiciens, pour commencer & conduire à sa fin, à la satisfaction des connoisseurs, une entreprise aussi difficile & aussi pénible.
M. Martin divise toute la Littérature en cinq classes primitives, & chacune de ces classes comme il suit :
L’Écriture Sainte comprend les textes & versions de l’Écriture-sainte, leurs commentaires, explications, paraphrases, &c. les histoires de la Bible, vies de J. C. & harmonies évangeliques extraites de l’Écriture-sainte ; les critiques sacrées, & les liturgies.
Les Conciles sont ou généraux ou particuliers.
Les Saints Peres se distinguent par l’ordre des siecles dans lesquels ils ont vecu.
Les Théologiens se divisent en scholastiques, moraux, catechétiques ou instructifs ; parénétiques ou prédicateurs ; mystiques, polémiques, ou qui ont écrit pour la défense de la religion chrétienne & catholique, hétérodoxes.
Le Droit canonique renferme les canonistes anciens & modernes, le Droit ecclésiastique François, le Droit ecclésiastique étranger, le Droit ecclésiastique des moines & des réguliers.
Le Droit civil renferme le Droit naturel, public, & des gens ; le Droit Romain, le Droit François, le Droit étranger.
La Philosophie comprend les philosophes anciens & modernes avec leurs interpretes & sectateurs, les traités de la Philosophie universelle, Logique & Dialectique, Morale, Œconomie, Politique, Métaphysique, Physique, Histoire naturelle.
La Medecine comprend les Medecins anciens & modernes, les traités particuliers de Medecine, l’Anatomie, la Chirurgie, la Pharmacie & la Chimie, la Philosophie ou Medecine Hermétique, Paracelsique ou Alchimie.
Les Mathematiques se divisent en traités généraux de Mathématiques, Arithmétique, & Algebre, Géométrie, Astronomie, Gnomonique ou science des Cadrans solaires, Hydrographie ou science de la Navigation, Optique, Musique, Méchanique, Astrologie, &c.
Les Arts se divisent en art de la Mémoire ; art de l’Écriture ; l’art de l’Imprimerie, l’art du Dessein, de la Peinture, de la Gravûre & de la Sculpture ; l’Architecture ; l’art Militaire ; la Pyrotechnie ou l’art du Feu, de la fusion des Métaux, des Feux d’artifice, de la Verrerie ; les divers Arts méchaniques ; la Gymnastique qui comprend l’art de manier & de traiter les chevaux ; l’Escrime, la Danse, les exercices du corps.
La Grammaire comprend les traités généraux de Grammaire, Institutions, Grammaires, & Dictionnaires de diverses langues.
La Rhétorique renferme les traités de l’art Oratoire, & les Orateurs anciens & modernes.
La Poétique comprend les traités de l’art de versifier, les Poëtes anciens & modernes, la Mythologie, les poésies prosaïques ou facéties, plaisanteries, contes, nouvelles, romans, &c.
La Philologie renferme la Critique, qui consiste en critiques anciens & modernes, satyres, apologies, & dissertations critiques, allégoriques, enjoüées, &c. les gnomiques ou sentences, apophthegmes, adages, proverbes, &c. & les hieroglyphiques ou emblèmes & devises.
Les Polygraphes se divisent en auteurs anciens & modernes, qui ont écrit divers traités sur differens sujets, dialogues & entretiens sur differens sujets, épistolaires ou lettres écrites sur differens sujets.
L’étude de l’Histoire demandant la connoissance de la Géographie & de la Chronologie ; les livres qui traitent de ces deux sciences sont à la tête de cette classe, & se divisent, savoir
La Géographie en Cosmographie ou description de l’Univers, géographes anciens & modernes, ou description du globe terrestre, descriptions & cartes particulieres, voyages & navigations.
La Chronologie en Chronologie technique, Chronologie historique ou l’histoire réduite & divisée par tables & divisions chronologiques, histoires universelles. &c.
L’Histoire Ecclésiastique se divise en Histoire ecclésiastique proprement dite, ou Histoire ecclésiastique ancienne & nouvelle, Judaïque & Chrétienne. Il y a des histoires ecclésiastiques universelles, & des histoires ecclésiastiques particulieres ; on les divise en histoire catholique, pontificale, histoire monastique, histoire sainte, histoire ecclésiastique des hérésies & des hérétiques.
L’Histoire catholique & pontificale renferme l’histoire des conciles, générale & particuliere, l’histoire & les vies des papes & des cardinaux.
L’Histoire monastique comprend l’histoire des ordres monastiques & religieux, avec les vies des instituteurs, fondateurs, saints & personnages illustres de chaque ordre, & de plus l’histoire des monasteres ; elle renferme aussi l’histoire des ordres militaires & de chevalerie.
L’Histoire Sainte comprend les martyrologes & vies des saints & des personnes illustres en piété, l’histoire des lieux saints, des églises, cimetieres, &c. des reliques des saints, des saintes images, des miracles, &c.
L’Histoire ecclésiastique des hérésies & des hérétiques se divise en histoire ancienne des hérésies jusqu’au xii. siecle, histoire des nouvelles hérésies depuis le xiii. siecle jusqu’à présent, histoire des inquisitions contre les hérétiques & contre d’autres.
L’Histoire profane se divise en histoire ancienne, histoire moderne, histoire généalogique & héraldique, antiquités, histoire des solennités & des pompes ; histoire littéraire, académique, & bibliographique ; vies des personnages illustres, & traits historiques.
L’Histoire ancienne ou des anciennes monarchies, comprend les histoires des Juifs, des Chaldéens, des Babyloniens, des Assyriens, &c. histoire de la monarchie des Perses ; histoire Greque, Romaine, Byzantine ou de l’empire de Constantinople.
L’Histoire moderne ou des monarchies qui subsistent aujourd’hui, se divise en deux parties. La premiere renferme les monarchies de l’Europe : la seconde les monarchies hors de l’Europe.
Dans la premiere partie sont comprises les histoires d’Italie, de France, d’Allemagne, des Pays-Bas, de Lorraine, des Suisses & des peuples leurs conféderés, d’Espagne, de la Grande-Bretagne, des pays septentrionaux.
Dans la seconde partie sont comprises l’histoire Orientale générale, celle des Arabes, des Sarrasins & des Turcs ; l’histoire Asiatique, l’histoire d’Afrique, l’histoire de l’Amérique ou des Indes occidentales.
L’Histoire généalogique & héraldique comprend les traités généraux & particuliers de la science héroïque, de la noblesse, des nobles, de leurs titres, prérogatives, &c. & des choses qui leur sont propres ; les traités héraldiques ou qui appartiennent à la science du Blason ; les histoires généalogiques des familles illustres.
Les antiquités renferment les rits, usages & coûtumes des anciens ; histoire métallique ou médailles, monnoies, &c. divers monumens de l’antiquité ; descriptions & traités singuliers des édifices publics, des amphithéatres, obélisques, pyramides, &c. divers antiquités, pierres gravées, cachets, lampes, & autres choses qui nous restent des anciens ; mêlanges d’antiquités contenant des collections mêlées, des dissertations, des descriptions de cabinets d’antiquaires, &c.
L’Histoire des Solennités & des Pompes comprend les réjoüissances publiques, entrées, mariages, &c. Histoire des Pompes funebres.
L’Histoire littéraire, académique & bibliographique, comprend l’histoire des lettres & des langues, des sciences & des arts, où il est traité de leur origine & de leur progrès ; histoire des académies, écoles, universités, colléges & sociétés de gens de lettres ; bibliographie ou histoire & description des livres.
Vies des personnages illustres divisées en vies des illustres personnages anciens, Grecs & Romains, en général & en particulier ; vies des hommes illustres & modernes ensemble, ou des derniers tems seulement ; vies des hommes illustres dans les sciences & dans les arts, anciens & modernes.
Extraits historiques, sont les diverses collections tirées & extraites des historiens anciens & modernes ; les monumens, actes & écrits historiques, pieces du tems, &c. traités de paix, de confédération, d’alliance, de treve, &c. entre les princes ; ensemble les pieces, recueils, dissertations, & autres choses concernant les négociations de ces traités ; les dictionnaires historiques, &c.
Ceux qui voudront mettre en pratique le présent système, pourront consulter pour les détails de chaque partie quelques-uns des catalogues de M. Martin, comme ceux de MM. Bulteau, Dufay, comte Hoym, de Rothelin, & Bellanger.
Il a été trouvé dans les manuscrits de feu M. l’abbé Girard, de l’Académie Françoise, un système de Bibliographie, où il regne un ordre fort différent de ceux que l’on a connus jusqu’à présent. Comme on ne se propose pas de le publier en particulier, nous avons crû devoir le placer ici, pour ne pas priver le public de ces nouvelles lumieres sur une matiere vraiment intéressante. M. l’abbé Girard y rend compte en Philosophe des raisons qui l’ont déterminé dans le choix & le rang de ses divisions.
D’abord il considere l’homme dans la naissance du monde, foible & inquiet sur sa destinée, agité par la crainte & par d’autres sentimens qui lui inspirent la défiance de lui-même, & le portent à chercher un protecteur puissant. Conduit par degrés à la connoissance d’un Dieu, il met tous ses soins à se le rendre propice par le culte qu’il croit lui être le plus agréable ; c’est ce qu’on nomme religion chez tous les peuples. Ce qui la concerne soit dans le général, soit dans le particulier, soit pour la maintenir, soit pour la combattre, fait le premier chef de ce plan sous le titre de THEOLOGIE.
L’homme isolé sentit de nouveaux besoins, & chercha dans la protection de ses égaux & de ses voisins, un appui à sa portée ; cela forma la société dont les commencemens n’eurent d’autres motifs que les secours mutuels & les services réciproques ; mais dont les progrès formerent des patries, des états, & des empires ; produisirent des lois & des coûtumes, &c. Tout ce qui regarde la société, ses formes, ses intérêts, ses lois, & ses usages, fait le second chef de ce système sous le titre de NOMOLOGIE.
Quoique le culte & la police remédient aux horreurs de la solitude par les liaisons qu’ils établissent entre les hommes, peu satisfaits du petit volume de leur personne, & de la courte durée de leur existence, ils travaillent à vivre dans l’idée d’autrui, & forment sur le plan de cette image une maniere d’être, à laquelle ils donnent le nom de gloire & de renommée. Ce goût rend les hommes jaloux de leur honneur, sensibles à l’estime des autres, & curieux de ce qui les regarde ; de façon qu’ils s’occupent des actions & des évenemens ; qu’ils travaillent à s’en instruire & à les publier. De-là l’origine d’un troisieme objet d’érudition sous le titre d’HISTORIOGRAPHIE.
Le spectacle pompeux de l’univers, & les merveilles de la nature, frappent assez pour attirer des regards curieux. L’esprit humain avide de connoissances, animé par ses premieres découvertes, aidé de l’expérience, de l’analyse, & du raisonnement, se livre à ces recherches profondes qui font ce qu’on nomme proprement Sciences, objet distingué formant dans ce système le quatrieme chef sous le nom de PHILOSOPHIE.
C’est sans doute par l’acquisition des connoissances & par l’amas des vérités, que l’esprit s’enrichit : mais ici comme ailleurs, il faut faire usage de ce que l’on possede pour en tirer satisfaction. Cet usage ne se trouve que dans la communication avec les autres êtres de notre espece ; & cette communication ne pouvant se faire par une voie plus naturelle ni plus commode que par le moyen de la parole, il en résulte dans les hommes un penchant vif à vouloir briller, flatter, & amuser par le discours. L’on ne doit donc pas être surpris s’ils se sont appliqués à cultiver le langage, & si quelques-uns préférant les amusemens du bel esprit au travail pénible des recherches savantes, se sont attachés à l’éloquence, à la poësie, à la critique, à la pureté des expressions ; enfin à tout ce qui dépend du feu de l’imagination, & à ce qui concerne les regles & les graces de la parole, compris sous le titre de PHILOLOGIE.
Le bonheur étant le but que tout être sensible & intelligent envisage, il est naturel que l’homme ne néglige rien de tout ce qu’il croit être propre à le rendre heureux. C’est par ce desir du bien être, & par la nécessité de pourvoir à ses besoins réels ou imaginaires, que son industrie a été excitée ; qu’en étudiant ce qui plaît aux sens comme ce qui orne l’esprit, il a donné naissance aux Arts. Ce qui les regarde fait le sixieme & dernier chef de ce système sous le titre de TECHNOLOGIE.
M. l’abbé Girard divise donc toute la Littérature en six genres qui sont :
Cette premiere division, toute simple qu’elle est, répond à toute l’étendue de la Littérature, n’y ayant aucun ouvrage que l’on ne puisse rapporter à ces six chefs : mais quoique juste, elle est encore trop générale pour démêler les différences de tout ce qui est écrit, & y établir un ordre parfait. M. l’abbé Girard entre donc dans un plus grand détail, & divise chacun de ces six genres en six classes, & chaque classe en deux ordres.
Ce premier genre de Littérature ne se borne pas dans le système de l’érudition générale, comme dans celui de l’érudition scholastique, à ce qui regarde seulement la religion Chrétienne. D’une bien plus vaste étendue, il embrasse toutes les religions de l’univers présentes & passées, qui se rapportent toutes à six especes générales ; savoir, Christianisme, Judaïsme, Mahométisme, Paganisme, Déisme, & Athéisme.
La religion Chrétienne se divise en trois communions principales ; Romaine, Greque, & Protestante.
La Théologie Juive a produit différens partis : le premier de tous les schismes y fut une suite des factions de l’état ; la desunion des tribus forma de l’ancien Israëlite le Juif & le Samaritain. Ensuite parurent dans le sein du Judaïsme les Esséniens, Pharisiens, & Saducéens, dont les Caraïtes ont pris la place. Ces derniers sont parmi les Juifs ce que les Réformés sont parmi les Chrétiens.
Dans le Mahométisme il y a deux sectes ; celle d’Omar, & celle d’Haly.
Le caractere du Paganisme est la pluralité des dieux : tous les livres écrits sur ces six différentes especes de religions font, comme nous l’avons dit, l’objet de la Théologie considérée comme portion d’un système bibliographique. Nous allons présentement rendre compte des sous-divisions en deux ordres de chacune des six classes.
Les Textes, ce sont les écrits qu’on regarde dans chaque religion comme dépositaires authentiques de la croyance & du culte qu’on y professe ; ils sont ou sacrés ou ecclésiastiques.
Les Textes sacrés partent des Législateurs, & sont respectés comme divins : tels sont chez les Chrétiens les livres de l’ancien & du nouveau Testament ; chez les Juifs, la Bible ; chez les Mahométans, l’Alcoran ; chez les Chinois, les ouvrages de Confucius ; & dans l’ancien paganisme, les oracles des Sibylles, &c. Les Textes sacrés, en langues qui ont été ou qui sont d’usage dans les églises, se nomment versions : ceux qui sont en langues vulgaires, & qu’on lit simplement dans le particulier, sont nommés traductions.
Les Textes ecclésiastiques sont les décisions ou constitutions faites par le concours des principaux chefs d’une religion, reçues & acceptées comme lois émanées d’une autorité sainte, & comme regles indispensables de foi & de conduite. Tel est parmi les Juifs le Thalmud, & tels sont parmi nous les conciles divisés en généraux, nationaux & provinciaux.
Les Commentateurs font ou des interprétations ou des dissertations sur les Textes.
Les Dogmatiques se divisent en Docteurs & en Casuistes.
Les Docteurs sont ceux qui enseignent méthodiquement la doctrine divine. Ceux dont les opinions ont acquis de l’authenticité, sont appellés Peres de l’Eglise, Grecs & Latins, & sont regardés comme dépositaires de la doctrine divine à laquelle on donne le nom de tradition. Les Docteurs modernes sont appellés scholastiques.
Les Casuistes s’attachent à marquer la distinction précise de ce qui est permis ou défendu par la loi & la morale du système reçu dans la société.
Les Prédicateurs se divisent en orthodoxes & en sectaires.
Les Mystiques sont ou contemplatifs ou ascétiques.
Les contemplatifs ne présentent dans leurs écrits que des réflexions spéculatives ou épanchemens de cœur pour nourrir la devotion, faire aimer & estimer les choses divines préférablement aux temporelles.
Les ascétiques, persuadés que la seule contemplation ne suffit pas pour attacher l’homme à Dieu, s’occupent à écrire des maximes & des regles de conduite ; à proposer certaines pratiques de prieres & de mortification, &c.
Les Liturgiques traitent de ce qui concerne le service divin, & la pratique du culte extérieur, d’où se forment les rituels & les eucologies.
Les rituels reglent l’ordre & le cérémonial de l’office, & des fonctions ecclésiastiques, conformément aux usages de chaque église.
Les eucologies n’ont pour objet que la priere, soit publique, soit particuliere.
Ce genre embrasse tout ce qui traite de l’avantage que les hommes trouvent à être réunis en corps de société, dont la conservation est indispensablement attachée à l’observation des lois. Ces six classes sont distinguées par la diversité des liens qui attachent ou associent les hommes les uns aux autres. Ces liens sont ou église, ou patrie, ou congrégation, ou mœurs, ou usages, ou actions communes.
La Discipline dans ce système général de Littérature, ne se borne pas comme dans nos écoles, au seul gouvernement de l’église Catholique, elle embrasse toutes les lois & tous les reglemens faits pour gouverner les sociétés fondées sur les liens de culte & de religion, & peut se diviser en discipline chrétienne, & en discipline héteronome.
La discipline chrétienne varie selon les différentes communions qui partagent l’Eglise universelle : mais toutes ces diversités peuvent être réduites sous les communions Romaine, Greque & Protestante.
La discipline héteronome renferme tout ce qui concerne le gouvernement des églises non Chrétiennes, telles que celles des Juifs, des Musulmans, & des Gentils idolatres.
Le Droit civil : de tout tems les hommes se sont réunis pour se fortifier contre leurs ennemis, & veiller avec plus de sûreté à leur mutuelle conservation, ce qui a formé des patries d’où le Droit civil a pris naissance. Il se partage assez naturellement en deux especes, Politique & Jurisprudence.
La Politique a pour objet le Droit public ; c’est-à-dire, qu’elle regarde les intérêts, la gloire, la puissance, la forme & l’administration des états ; d’où les actes conventionnels, les manifestes, les mémoires de négociations, &c.
La Jurisprudence veille aux intérêts des particuliers, décide leurs différends, &c. d’où les lois, les jugemens rendus, les Jurisconsultes, les Praticiens, &c.
Corporologie : au milieu des sociétés générales que forme l’église ou la patrie, il s’en éleve de particulieres qui peuvent se diviser en cénobitiques & associations.
La cênobitique comprend les regles claustrales & les autres écrits qui concernent le gouvernement des communautés religieuses.
Les associations renferment toutes les sociétés auxquelles la conformité de profession, d’emploi ou d’occupations, donne naissance dans le corps civil de l’état. Telles sont les académies, les ordres de chevalerie, les compagnies, les corps & métiers, &c. leurs statuts, leurs reglemens, & leurs usages particuliers.
L’Éthicologie : outre les sociétés fondées sur des lois authentiques, il en est une libre & naturelle que l’humanité inspire, & que la raison approuve ; c’est ce qu’on nomme commerce ordinaire de la vie. Les mœurs en sont le lien, & font l’objet de l’éthicologie. Les livres qui appartiennent à cette classe sont distingués par la forme que les auteurs ont donnée à leurs ouvrages ; ce sont ou des traités ou des caracteres.
Les Traités de morale sont ou des discours suivis ou méthodiques, adressés au public ou à quelques personnes particulieres, par forme de leçons.
Les Caracteres ne font précisément que mettre les mœurs en tableau par des descriptions, qui sans attaquer les personnes, tracent néantmoins tous les traits personnels.
La Thesmologie comprend les livres qui traitent des usages reçus dans les sociétés ; ces usages se distinguent par le cérémonial & les modes.
La Praxéonomie traite des sociétés particulieres & momentanées, de leurs regles, de leurs formes, &c. & se divise en aetiologie & ludicrologie.
L’aetiologie embrasse les pratiques familieres & domestiques.
La ludicrologie comprend les jeux de hasard, d’adresse ou de conduite.
Les Notices sont des ouvrages purement énumératifs, ou des listes méthodiques, tantôt municipales, tantôt nominales.
Les Notices municipales ont pour objet les offices ; charges, emplois, siéges & tribunaux ; elles servent à faire connoître la puissance, ainsi que la forme des états & des corps civils.
Les notices nominales exposent les noms des personnes, soit des membres qui composent les différentes sociétés, soit des têtes qui étendent & soûtiennent les familles, soit de ceux qui forment l’ordre & la durée des successions sur les thrones & dans les places distinguées.
Les Histoires narrent les évenemens qui touchent le corps général de quelque société, soit que cette société forme une patrie, ou une simple congrégation ; ce qui divise cette classe en histoires nationales & congrégationales.
Les histoires nationales ont pour objet toutes les sociétés politiques d’état & de nation.
Les congrégationales ont les autres sociétés particulieres, telles que celles de religion.
Les Personologies sont, ainsi que l’étymologie de la dénomination le fait entendre, une sorte d’historiographie qui a pour objet les personnes en particulier. Cette forme, comme les autres, a deux ordres sous les noms de vies & de voyages. Sous le nom de vies est compris tout ce qui porte le titre de mémoires.
La Littérologie a pour objet les faits & les évenemens littéraires, & se divise en doctrinologie, bibliographie.
La doctrinologie fait l’histoire des Sciences & des Arts ; c’est-à-dire, qu’on y prend soin de faire connoître le tems & les circonstances de leur origine, ainsi que le cours de leurs progrés.
La bibliographie instruit des écrits, que la plume ; conduite par le talent de l’esprit, a donnés au public ; ce qui se fait ou par des extraits & des analyses, ou par des catalogues.
Les Fictions, enfans de la seule imagination, & faites pour amuser, se masquent d’un faux air d’histoire par une narration suivie, & se divisent en romans & en contes.
Les Collections comprennent tous les ouvrages historiographiques faits de diverses pieces d’assemblage sans aucun enchaînement d’évenemens & de circonstances ; elles peuvent se réduire à deux objets différens, les antiquités & les compilations.
Les antiquités rassemblent ce qui regarde les monumens que la main des hommes a fabriqués, & que les tems n’ont pas détruits, tels que les bâtimens, les inscriptions, les médailles, les chartres, & autres choses pareilles.
Les compilations ramassent les différens faits indépendans les uns des autres, tels que les mémoriaux & les dictionnaires historiques.
La nature présente une multitude d’êtres contenus dans un espace, d’où naît l’envie de calculer les uns, & de mesurer l’autre ; de façon que le nombre & la grandeur deviennent une occupation d’esprit, & sont véritablement des connoissances préliminaires & nécessaires à l’étude de la nature.
Un regard ensuite plus attentif fait qu’on regarde le monde comme un vaste pays où l’on voudroit voyager, & dont la totalité se distribue en deux parties, le ciel & la terre. Ce sont deux objets nouveaux à traiter.
A l’idée générale des régions doit naturellement succéder celle d’habitation ; on y rencontre une multitude d’êtres successivement produits & renouvellés, ou par voie de génération, ou par voie de végétation. Leur description fait le travail des Naturalistes.
Le travail constant & infatigable de la nature la fait envisager dans un état d’action, dont la connoissance devient intéressante par le desir de dévoiler ses mysteres ; de-là l’étude de la Physique.
L’étude de la nature en action conduit nécessairement à celle de l’état de vie. Une curiosité bien placée par l’intérêt qu’on prend & qu’on doit prendre à sa conservation, détermine l’homme studieux à approfondir la machine animale, pour savoir en quoi consiste la vie ; quels en sont les ressorts ; ce qui en fait la bonne œconomie & la santé, & pour decouvrir aussi les causes & les regles de sa destruction ou de sa langueur ; d’où la Medecine.
Après avoir considéré la nature sous ses différentes faces, il n’étoit pas naturel d’oublier le plus admirable de ses aspects ; celui où s’appliquant & cherchant à connoître, elle paroît toute spirituelle. L’esprit humain se repliant souvent sur lui-même & sur ses opérations, s’étudie & travaille sur son propre fonds, non-seulement pour se comprendre ainsi que tout ce qu’il imagine être comme lui au-dessus de la sphere corporelle, mais encore pour se faire une méthode de penser & de raisonner, qui serve à le conduire au vrai & au bon. Voilà les raisons sur lesquelles sont fondées les divisions de la Philosophie, dont nous allons rendre compte en particulier.
Les Mathématiques ayant pour objet le nombre & la grandeur, se divisent en Arithmétique & Géométrie ; sous le nom d’Arithmétique est compris l’Algebre.
La Cosmographie se divise en Astronomie & Géographie.
La Physiographie s’attache à faire connoître les productions de la nature, & se divise en Psycologie & Végétologie.
La Psycologie considere les êtres produits par voie de génération, & doüés de vie ; c’est-à-dire, des animaux de toute espece.
La Végétologie comprend tout ce qui est produit par l’action continuelle de la nature, tels que sont les plantes, les fruits, les métaux, les minéraux, les coquillages, &c.
La Physique est ou spéculative ou pratique.
La spéculative renferme les systèmes, & la pratique les expériences.
La Medecine a pour but ce qui concerne la vie & la santé de l’animal : ses deux branches sont la Physiologie & Pathologie.
La Physiologie considere la constitution, les fonctions, & toute l’œconomie des parties qui composent le corps animé.
La Pathologie étudie les altérations qui peuvent troubler cette machine vivante ; comment on peut prévenir ces accidens, & y remédier : ce qu’on nomme diete & thérapeutique qui, ainsi que la Chirurgie & la Pharmacopée, appartiennent à ce dernier ordre.
La Spiritologie se divise en Métaphysique & Logique.
La Métaphysique cherche à connoître ce que c’est que l’esprit & la pensée, les propriétés & les opérations de l’ame raisonnable. Elle pousse même ses recherches jusqu’à la divinité.
La Logique s’applique à conduire l’esprit humain dans les routes de la vérité par des regles sûres & lumineuses. C’est à elle qu’appartient tout ce qui regarde la direction du raisonnement, soit dans la position des principes, soit dans la déduction des conséquences.
Les avantages que procurent les graces du discours, à ceux qui les possedent, font que les hommes se portent avec ardeur à ce qui peut perfectionner leur langage, & leur valoir la réputation de bel esprit. De-là une foule d’ouvrages caractérisés par un goût particulier pour l’art de la parole, & par les tournures & les idées singulieres d’une imagination ingénieuse. Le mot de Philologie caractérise parfaitement ce genre de littérature, qui se divise comme les autres en six classes.
La Lexicologie embrasse tout ce qui concerne les langues, soit pour en donner l’intelligence, en conserver la pureté, en faire connoître le génie. Les auteurs de cette classe sont ou grammairiens ou vocabulistes.
Les grammairiens établissent des regles & des principes, discutent la nature des mots pour en connoître les divers accidens, &c. ils traitent aussi de l’orthographe & de la ponctuation.
Les vocabulistes font des observations sur la pureté du langage, en distinguent le bon usage du mauvais. Ils travaillent enfin à bien représenter la valeur ou la signification des mots, & font ce qu’on nomme dictionnaire.
L’Éloquence a pour objet les embellissemens du discours : tantôt elle enseigne les regles de son art, tantôt elle les met en œuvre ; ce qui distingue ses écrivains en rhéteurs & en orateurs.
Les rhéteurs donnent des préceptes sur les figures du langage, la construction des périodes, &c.
Les orateurs sont uniquement appliqués à l’exécution. Les oraisons funebres, les discours académiques, les éloges des hommes illustres, &c. composent cet ordre.
Les Poemes, par leur grande diversité, ne sont pas d’une division aussi facile dans l’arrangement d’une bibliotheque, que dans un traité de poësie. Il faut donc chercher dans le génie même de la poësie quelque différence assez grande pour que les poëtes qui se sont attachés à une espece se soient rarement attachés à l’autre, & que par conséquent on puisse fonder là-dessus un partage convenable au système bibliographique. Mr l’abbé Girard trouve dans la verve poëtique deux ames qui vont peu ensemble : l’une élevée & sérieuse, qui frappe vivement l’imagination par la force des images ; l’autre voluptueuse, qui flate ou amuse par l’agrément ou la douceur de la mélodie : de façon qu’il distingue les poëmes en épimétriques & lyriques.
Les épimétriques s’adressent à l’esprit ; ils narrent, peignent, raisonnent ou font parler ; tels sont les poëmes épiques ou héroïques, les odes, les élegies, les satyres, les éclogues, les idylles, les madrigaux, les épigrammes, &c.
Les lyriques sont faits pour les organes de la voix & des oreilles ; ce sont les chansons.
Le Theatre. M. l’abbé Girard en fait une classe à part & distinguée des poëmes, parce qu’il n’y regarde la versification que comme un accessoire qui ne sert point à caractériser cette sorte d’ouvrages, étant manifestement marqués à un coin très-différent de celui de la cadence & de la mesure des expressions. Ceux qui ont consacré leurs talens aux pieces de théatre se distinguent en tragiques & en comiques.
Les Lettres. Il n’est ici question que des lettres amusantes : celles qui traitent de dévotion ou de politique appartiennent à d’autres classes. Dans celle-ci on les divise en ingénieuses & galantes, selon que l’esprit & le cœur y ont part.
La Critique examine, juge & met au creuset tous les ouvrages. Elle se divise en polygraphique & monographique.
La polygraphique s’attache indifféremment dans un même ouvrage à plusieurs objets & de toutes sortes d’especes.
La monographique n’attaque qu’un ouvrage ou qu’un auteur en particulier, par un écrit destiné à ce seul sujet & fait exprès pour l’examiner d’un bout à l’autre.
Il est si naturel à l’homme de penser à ses besoins, qu’il n’est pas douteux que les arts n’ayent été d’abord l’unique objet de son travail. Mais quoiqu’il les ait mis au premier rang de ses occupations, il ne leur a pas consacré les prémices de ses écrits, laissant à la pratique le soin de les conserver. Quoique l’on ait écrit un peu tard sur cette matiere, elle a produit un fort grand nombre d’ouvrages, qui peuvent aussi se partager en six classes.
Les Arts civiques sont ceux que la politique adopte par préférence dans la constitution du gouvernement. Ils sont souvent cultivés par les citoyens du premier rang. Les uns ont pour but la force & la gloire de l’état ; les autres la richesse, & se divisent en célebres & pécuniaires.
Les Arts célebres méritent ce nom, parce qu’ils offrent de la réputation à ceux qui en font profession, & rendent célebres ceux qui s’y distinguent : tels sont l’Art militaire, la Navigation.
Les Arts pécuniaires sont moins nobles, mais ils sont utiles, tels que le Commerce & la Finance.
Les Arts Académiques sont caractérisés par le génie, dont l’étude a deux principaux objets, le dessein & les forces mouvantes. L’un renferme les arts iconographiques ; les autres sont le fondement de ce qu’on nomme méchanique.
Les Arts iconographiques représentent, peignent & construisent : ainsi l’Ecriture, l’Imprimerie, la Peinture, la Gravûre, l’Architecture, &c. composent cet ordre.
La Méchanique enseigne à distribuer sagement & à appliquer à propos les forces mouvantes, d’où naissent la pyretique, l’hydraulique, la pulsative, la statique & l’élatérique.
Les Arts gymnastiques ont pour objet ce que l’homme est capable d’exécuter par les mouvemens reglés & compassés de ses organes & de ses membres. Ils sont ou symphoniques ou dextériques.
Les symphoniques embrassent le Plain-Chant, la Musique & la Déclamation.
Les dextériques sont enfans de l’action & de l’exercice. La Danse, la Lutte, l’Art de monter à cheval, de faire des armes, & tout ce qui dépend de l’adresse & de l’agilité sont de cet ordre.
Les Arts plastiques travaillent la matiere pour en faire des ouvrages de consistance. La différente façon de la manier fait ou des manufacturiers ou des manœuvriers.
Les manufacturiers forment, c’est-à-dire qu’ils donnent à ce qu’ils employent un nouvel être, par la fusion, la composition ou le tissu.
Les manœuvriers adaptent simplement, c’est-à-dire qu’ils font leurs ouvrages en coupant, taillant, joignant, &c. les matériaux dont ils se servent.
Les Arts nutritifs se partagent en ruraux & condimentaires.
Les Arts ruraux embrassent le labourage, la culture des jardins, des vignes, des prairies ; la pêche, la chasse, & les autres occupations de la campagne.
Les Arts condimentaires assaisonnent les alimens pour les rendre agréables & en varier le goût. La Boulangerie, la Cuisine, l’Office, &c. sont de ce nombre.
Les Arts mystériques marchent sous le voile du symbole & dans l’obscurité de la divination, ce qui les distingue en symboliques & judiciaires.
Les symboliques comprennent tout ce que les hommes ont imaginé pour produire leurs idées par des figures & des allusions : tels sont le blason, les emblemes, les devises, les hyeroglyphes, les énigmes, les logogryphes, la steganographie, &c.
Les Arts judiciaires, qu’on pourroit à juste titre nommer illusoires, sont tous les Arts magiques, enfans de l’oisiveté, de la malice ou du dérangement de l’imagination.
Ceux qui seroient curieux de connoître un plus grand nombre de systèmes bibliographiques, pourroient encore consulter Garnerii systema bibliothecæ collegü Parisiensis Societatis Jesu, & les autres dont nous avons parlé au commencement de cet article. La diversité des opinions sur l’ordre & les divisions d’un système bibliographique, semble prouver que c’est une chose assez arbitraire : cependant il doit y en avoir un vraiment conforme à la raison, & je pense que c’est celui où les matieres sont rangées dans le même ordre que l’esprit humain en a acquis la connoissance ; il est vrai qu’il faut beaucoup de philosophie pour saisir cet ordre & le suivre. Mais je ne craindrai point de dire que le système figuré des connoissances humaines que l’on trouve au commencement du premier Volume de cet Ouvrage, peut servir d’introduction & de modele à ce travail. Quiconque voudra prendre la peine de l’étudier & de le comparer aux autres systèmes, après les avoir comparés entr’eux & en avoir bien observé les différences, pourra pousser les divisions plus loin, & dresser un plan méthodique ou système, qui ne laissera plus rien d’indéterminé, & qui sauvera l’inconvénient de trouver quelquefois le même livre dans plusieurs classes différentes.
Qu’on me permette, à l’occasion du mot catalogue, d’annoncer ici un ouvrage imprimé depuis peu en Allemagne, sous le titre de Bibliotheque curieuse, historique & critique, ou Catalogue raisonné des livres difficiles à trouver, par David Clément. Cet ouvrage, dont il n’y a encore que deux Volumes in-4°. & qui doit en avoir un plus grand nombre, est rempli de recherches fort savantes & fort curieuses. Les matieres y sont rangées selon l’ordre alphabetique des noms des auteurs, & m’ont paru bien propres à satisfaire la curiosité des amateurs de livres.
Cet article a été fait par M. David l’aîné, un des Libraires associés pour l’Encyclopédie, sur un des manuscrits légués par feu M. l’abbé Girard à M. le Bréton, son imprimeur & son ami. Ce manuscrit est intitulé Bibliotheque générale ou Essai de Littérature universelle. On voit par cet ouvrage que M. l’abbé Girard, si connu par ses préceptes de la Langue Françoise, & surtout par ses Synonymes, joignoit à la connoissance des signes, une connoissance très-étendue des choses.