Hitopadésa/Préface de l’auteur

Hitopadésa, ou l’Instruction utile
Traduction par Édouard Lancereau.
(p. 1-3).

PRÉFACE DE L’AUTEUR.




Gloire au bienheureux Visweswara !


Puissent les gens de bien réussir dans leurs entreprises, et obtenir la faveur de ce Dhourdjati sur la tête duquel s’étend un doigt de la lune[1], comme une raie formée par l’écume de la Djâhnavî !

Ce livre, intitulé Hitopadésa, donne à celui qui en a entendu la lecture la connaissance de la langue sanscrite et des différentes sortes de style, et la science de la politique.

Le sage doit songer à la science et à la richesse comme s’il n’était sujet ni à la vieillesse ni à la mort ; il doit pratiquer la vertu comme si déjà la mort le saisissait par les cheveux.

De tous les biens, la science est, dit-on, le plus grand, parce qu’on ne peut ni l’enlever à autrui ni l’acheter, et qu’elle est impérissable.

De même qu’une rivière, suivant son cours, mêle ses eaux à celles de l’Océan, de même la science introduit un homme auprès du monarque inaccessible : c’est par elle que l’on arrive au comble de la fortune.

La science donne la modestie ; avec la modestie, on acquiert du talent ; par le talent, on obtient la richesse ; par la richesse, le mérite religieux, et par suite le bonheur.

Il y a deux sciences qui mènent à la gloire : la science des armes et celle des livres ; la première est ridicule dans la vieillesse, la seconde est toujours respectable.

L’homme instruit possède toutes les qualités, l’ignorant n’a que des défauts ; aussi un seul homme instruit vaut-il mieux que plusieurs milliers d’ignorants.

Comme on ne peut appliquer un ornement sur un vase que lorsqu’il est neuf, ce livre a pour but d’enseigner la politique aux jeunes gens, en la déguisant sous le voile de la fable.

L’Acquisition des amis, la Désunion des amis, la Guerre et la Paix, voilà ce qui est écrit dans ce livre. Le tout est tiré du Pantchatantra et d’un autre Recueil.

  1. Selon les Hindous, le disque de la lune est divisé en seize parties, appelées Kalâs, dont une est prise par les dieux et les Pâtris, ou mânes, chaque jour de son déclin.