Histoire financière de la France/Chapitre XI

CHAPITRE XI.


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Règne de Henri IV.


1589 - 1610.


SOMMAIRE.


Tableau de la France à l'avènement de Henri IV. - Pénurie du trésor et détresse du roi. - Collusion des membres du conseil de finance. — Sully y est admis, et se rend dans quatre généralités. - Abus et déprédations dévoilés. — États-généraux de Rouen en 1596. — Discours de Henri IV à l'assemblée. - Latitude qu’il lui laisse. - Faute commise par les députés. — Conseil de raison. - Droit de vingtième ou de pancarte sur les denrées et les marchandises. - Réformes interrompues par le nécessité de reprendre Amiens. - Emprunts et autres opérations extraordinaires facilités par la confiance. - Paix de Vervins. - Sully appelé à la surintendance des finances. — État des dettes et montant des tributs de toute nature. - Remise de vingt millions d'arrérages sur les tailles, et règlements protecteurs de l’agriculture. - Sédition à l’occasion de la pancarte, apaisée par la présence de Henri IV. - Abolition de cet impôt et son remplacement, remboursement d’offices. - Extinction de six millions des rentes hypothéquées sur les revenus. - Dégrèvement accordées sur les tailles. - Opposition intéressée au remboursement entier des rentes constituées sur la ville de Paris. - Rachat des droits et domaines engagés ou aliénés. - Adjudication publique des gabelles et des cinq grosses fermes. — Chambre de justice.- Règles établies pour la comptabilité des recettes et des dépenses, la reddition des comptes et l’ordonnancement.- Droit de paulette ou annuel des offices. - Droit dé franc-fief.- Douanes et péages intérieures.- Mémoires rédigés par Sully pour le roi.- Déférence de Henri IV et de son ministre aux bons avis du parlement.- Edits bursaux surpris par les courtisans.- Protection accordée par le roi au commerce maritime et aux manufactures, nonobstant l’opinion contraire de Sully et du parlement.- -Prospérité du royaume. - Elevation du revenu public.- Travaux d’utilité et d'embellissement.— Pensions.- Économies annuelles; leur montant et leur destination.


1589.- Le crime qui abrégea les jours de Henri III ne mit un terme ni aux malheurs publics, ni au désordre des finances; et le roi que les Français devaient chérir un jour se trouvait réduit à solliciter de l’étranger des secours en hommes et en argent, parfois même à des expédients plus fâcheux, pour entretenir les troupes qu’il était dans la nécessité d’opposer aux ennemis de la France et de sa couronne. Le même embarras se prolongea pendant plusieurs années encore après la soumission de la capitale (1594) d’abord sous l’administration du marquis d’0, italien; joueur effréné, qui avait participé aux dilapidations du règne précèdent, et, après la mort de ce surintendant, par les déprédations d’un conseil de finances, composé de neuf surintendants et de huit intendants auxquels le roi crut pouvoir confier la direction des finances. « mais qui avoient encor pis fait que leur devancier. » Des expéditions importantes manquèrent faute d’argent et le prince, qui les dirigeait en personne ; « n’avoit quasi pas un cheval sur lequel il pût combattre, ni un harnois complet qu’il pût endosser. » Avec quinze canons, des munitions pour deux mille coups, et un petit corps d’armée; Henri IV se promettait d’enlever la ville d’Arras aux Espagnols(1596). Il lui fallait huit cent mille livres pour assurer le succès de cette entreprise; mais vainement, en exposant ses pressants besoins aux membres du conseil, le roi « les príoit, les conjuroit, par leurs loyautez et sincères affections envers lui et la France, de fournir ces fonds : » ils répondaient froidement que, « loin de pouvoir lui procurer une somme notable, ils se trouvoient bien empeschez à recouvrer des fonds pour faire rouler sa maison[1]. »

Si la connivence coupable des membres du conseil avec les comptables et les traitants augmentait la détresse qu’éprouvait le roi, une cause générale et plus funeste de la pénurie du trésor existait dans l'épuisement des ressources du pays. Pendant les huit dernières années du règne précédent, huit cent mille individus, de tous sexes et de tous rangs, avaient péri victimes des guerres civiles ou des fureurs religieuses. On comptait neuf villes rasées; les autels étaient dépouillés, ou les églises démolies; le feu avait anéanti deux cent cinquante villages; cent vingt-huit mille maisons étaient détruites et les campagnes offraient de toutes parts les traces des brigandages commis par les soldats de tous les partis; le commerce était interrompu, et les ateliers sans travaux. Cependant, à la faveur de la confusion qui régnait encore, les agents du fisc ou les fermiers étendaient arbitrairement les impôts; les grands seigneurs, entraînés à de fortes dépenses, établissaient et levaient à leur profit des taxes dans leurs terres ou dans leurs gouvernements. Tel est, d’après un écrivain contemporain, le spectacle que présentaient le royaume et sa population, lorsqu’un monarque réparateur monta sur le trône où le portèrent la valeur et la clémence, auxiliaires puissants d’une légitimité que voulaient méconnaître le fanatisme et l’ambition excités par des puissances ennemies[2].

Henri IV connaissait l’épuisement de la France et les désordres qui l’entretenaient. Mais pressé par le désir de soulager son peuple, il éprouvait que les meilleures intentions d’un bon roi ne peuvent être accomplies s’il n’est secondé par le zèle d’un ministre intègre autant qu’éclairé. Henri trouva ce ministre dans Sully, le compagnon de ses périls et de ses succès, son ami, son confident; dans Sully, dont toutes les vues, inspirées par l’amour du bien public, étaient soutenues par un dévouement sans bornes à la personne et à la gloire de son roi.


1595.- Sully fut simplement admis d'abord dans le conseil de finance, d’où s’efforcèrent de l'écarter les autres membres qui redoutaient sa sagacité et l’austère vertu qui formait son caractère. Bientôt il eut reconnu que les principaux revenus n’étaient pas affermés au quart de leur valeur; que les fournitures étaient portées à un prix exorbitant; et que les traitants continuaient de se livrer à leurs concussions habituelles, par la certitude qu’ils avaient de trouver pour juges les associés qu’ils s’étaient faits dans le conseil, parmi les seigneurs en crédit et les magistrats des cours souveraines. A l’occasion d’un renouvellement du bail des gabelles, seulement, vingt personnes s'étaient partagé neuf millions sept cent mille livres[3].

La première opération de Sully fut de se rendre auprès des receveurs généraux de quatre généralités. Une semblable mission fut confiée en même temps, sur d'autres points, à différents commissaires. Mais lui seul obtint de la sienne des résultats importants; malgré les obstacles de tous genres que lui suscitèrent les membres du conseil, les intendants des provinces, les trésoriers de France, et tous les. officiers intéressés à faire échouer son entreprise, il connut les abus qui se commettaient dans le recouvrement et dans l'emploi des deniers, découvrit les ruses dont se servaient les comptables pour détourner les revenus à leur profit; et, combinant dès lors les moyens de restitution et de contrôle, il se convainquit de la possibilité d'introduire plus de régularité dans les opérations, et plus de clarté dans leurs descriptions. Enfin, ce qui fut pour le moment un secours bien précieux, Sully fit restituer et ramener à Henri IV une somme de dix-huit cent mille livres que quatre receveurs généraux avaient détournée pour eux-mêmes ou pour leurs associés à la cour. Un autre fruit de ce voyage fut de donner au roi une preuve évidente de l’infidélité des personnes qui l'entouraient.

Les fonds recueillis dans les quatre généralités avaient été versés aux trésoriers de l’épargne; mais Sully conserva la preuve de la somme remise, dans les bordereaux signés des receveurs généraux, et il dit à ces comptables qu’il avait déchiré ces pièces. Peu de temps après, le roi ayant besoin de fonds pour une entreprise utile, les trésoriers et le contrôleur général d’Incarville déclarèrent qu’il ne leur restait pas la somme qui leur était demandée. Sully prétendit qu’elle devait exister. L’altercation dura trois jours ; enfin, après vérification des livres, et comparaison faite des enregistrements avec les bordereaux que produisit alors Sully, il fut reconnu qu’il avait été fait omission en recette de quatre-vingt-dix mille écus. D’Incarville s’en excusa sur la négligence supposée d’un commis. « Bien ! bien ! dit le roi, c’est assez ; il n’en faut plus parler : nous avons tous raison, puisque mes quatre-vingt-dix mille écus sont recouvrés. Mais, une autre fois, que contrôleurs et commis soient plus soigneux et diligents, car je ne veut plus que l’on m’en joue de telles.... Cela m’apprend de qui je dois me fier ou défier. »


1596. — Les réformes que nécessitaient les abus dévoilés par Sully ne pouvaient s’opérer que lentement et à l’aide de la paix ; mais les hostilités qui continuaient avec les Espagnols, et en Bretagne avec les ligueurs, exigeaient avant tout des ressources extraordinaires. Henri IV voulut les obtenir du consentement de la nation. « Je me suis résolu, écrivait-il à Sully, de reconnaître si les nécessitez qui m’accablent proviennent de le malice, mauvais ménage ou ignorance de ceux que j’emploie, ou bien de la diminution de mes revenus ou pauvreté de mon peuple ; et, pour cet effet, convoquer les trois ordres de mon royaume pour en avoir avis et secours. » Dans cette intention le roi convoque à Rouen les états-généraux. Dans la crainte que les nobles ne prétendissent faire un corps séparé, auquel ils ne voudraient pas admettre les officiers royaux qui se trouvaient en grand nombre à cette assemblée, les députés se firent appeler messieurs les notables.


Le roi fit lui-même l’ouverture de l’assemblée, « à laquelle, en substance, il dit :

« Comme il n’avoit nullement voulu imiter les rois ses devanciers, en l’affectation et désignation de certains députez particuliers à sa fantaisie, pour en disposer suivant icelle, soit bonne, soit mauvaise, mais en avoir déféré la nomination à ceux de l’église, de la noblesse et du peuple, aussi ne leur vouloit-il, maintenant qu’ils étoient assemblez, en corps, prescrire aucunes règles, formes, bornes, ni limites; mais, en leur laissant la liberté entière de leurs opinions, voix, suffrages et délibérations, les prioit-il seulement d’avoir pour principal but en icelles le rétablissement du royaume et de la dignité royale en son entière et ancienne gloire, amplitude et splendeur; la paix, le repos et la tranquillité publique, la décharge et soulagement du peuple, et surtout des plus pauvres, lesquels en général il aimoit comme ses chers enfants. Trouvoit bon qu’ils réglassent et retranchassent toutes superfluitez, prodigalitez et dépenses non nécessaires, moyennant qu’auparavant ils entrassent en parfaite connoissance de celles qui étoient inévitables, et sans lesquelles l'estat et la dignité royale ne se peu voient consacrer ni maintenir; et la-dessus regardassent à faire un fonds certain, pour subvenir continuellement, en temps et à propos, à icelles, soit par le ménagement de ses revenus, soit par l’amélioration et augmentation d’iceux ou d’autres voyes qu’ils jugeroient les plus convenables, de quoi il leur bailloit la disposition absolue, et combien que sa barbe grise, sa longue expérience, ses grands travaux, et tant de périls qu’il avait courus pour sauver l'estat, méritassent bien d'être exceptez des règles générales; que néanmoins ne vouloit-il pas laisser de s’y soumettre comme les autres, tenant pour une des plus infaillibles marques de la décadence des royaumes et principautez lorsque les rois vont méprisant les lois, croient de s’en pouvoir dispenser, et veulent distribuer leurs faveurs, honneurs, charges, dignitez et offices, avec autres égards et considérations que l’intégrité, intelligence, vaillance, noblesse et loyauté d’un chacun, selon la diversité des applications, opérations et fonctions nécessaires : à quoi aussi étoit-il bien résolu de ne manquer afin de leur servir de modèle et d’exemplaire pour les rendre tant plus soigneux et diligents à s’acquitter de leur devoir, lequel il leur recommandoit au nom de Dieu[4]. » Ce discours, dans lequel se peignent avec une énergique simplicité l'âme et le cœur de Henri, fut suivi de l’ordre de soumettre aux députés tous les mémoires, états et instructions qu’ils demanderaient, « afin qu’ils ne pussent pas former des excuses de bien faire. »

Jamais en effet états-généraux n’eurent plus de latitude pour faire le bien; et jamais circonstance plus favorable ne s’était offerte pour fixer un droit public en matière d’impôt. Nul doute que, si l’assemblée, dont la convocation avait pour principal objet le rétablissement des finances, eût demandé à Henri IV d’assurer le vote libre et périodique des contributions publiques, elle n’eût obtenu de la sagesse et de la loyauté du roi qui avait conçu la pensée de la réunir cette garantie contre le retour des prodigalités dont la France venait d’être victime. Mais cette fois encore les états dépassèrent le but qu’ils voulaient atteindre. Sans aucun motif blâmable, uniquement parce qu’ils étaient dépourvus, en ce qui concerne les intérêts de l’état et les véritables principes du gouvernement monarchique, des lumières et de l’expérience qui ne pouvaient être le partage d’assemblées réunies de loin en loin, et composées de personnes étrangères aux affaires publiques, les députés renouvelèrent la faute qu’avaient commise par d’autres motifs les assemblées tenues au temps du roi Jean. Ils confondirent l'autorité administrative, inhérente à la royauté, avec les droits de discussion et de haute surveillance, qui appartient à la représentation générale d’une nation, en ce qui concerne l’établissement des impôts et l’emploi de leur produit. Cette garantie, dont l’erreur des états généraux allait priver la France pour deux siècles encore, il était réservé à un petit-fils de Henri de la lui accorder un jour, comme un gage d’union et de paix.

L’assemblée proposa de former un conseil permanent, dont les membres devaient être choisis par elle et confirmés par les cours supérieures. Ce conseil, sous le nom de conseil de raison, devait partager les revenus de l’état par portion égale avec le roi, et être chargé aussi de l’ordonnancement et du paiement de la moitié des dépenses publiques, sans être tenu de rendre compte tant des rentrées que des dépenses, ni au roi, ni à son conseil, ni à aucune cour supérieure, mais seulement à une autre assemblée qui serait réunie trois ans après[5].

Il fallait premièrement former un revenu de trente millions de livres, pour assurer l’acquittement des dépenses annuelles; et le net des impôts était de beaucoup inférieur à ces besoins reconnus. Dans l’état déplorable où se trouvaient le commerce intérieur et l’agriculture, l’assemblée n’avait pas sans doute l’intention de les charger de nouvelles impositions : croyant ne pas les atteindre en faisant revivre les taxes sur les consommations qui avaient été créées sous le règne du roi Jean, et que Louis XI avait supprimées en partie, elle s’arrêta en conséquence à l’établissement, pour trois ans, d’un droit du vingtième ou sou pour livre sur les vivres, denrées et marchandises de tout genre, à la seule exception du blé. Ce droit devait être perçu à l’entrée des villes, bourgs et bourgades, d’après un tarif d’évaluation des objets assujettis. Les députés estimèrent qu’il produirait cinq millions de livres, estimation qui se trouva exagérée de quatre cinquièmes, en raison des frais énormes que la perception entraînait.

Le projet d’institution du conseil de raison était inconvenant; l’exécution pouvait même en être dangereuse, en introduisant dans l’état un pouvoir nouveau et indépendant. Cependant le roi se détermina à adopter la proposition des notables, d’après l’assurance que lui donna Sully de paralyser l’action de cette autorité extraordinaire. Dans cette vue, lors de la division des revenus, le ministre composa les quinze millions affectés aux dépenses que devait acquitter la couronne des impôts d’un recouvrement assuré, facile, et dont le produit était susceptible de doubler ou de tripler, par le seul moyen d’une meilleure régie. De ce nombre étaient les gabelles, les anciennes aides, les traites, les droits de navigation. Dans l’autre moitié, au contraire, dont la disposition était laissée au conseil de raison, Sully fit entrer une partie des tailles, et le nouveau droit du sou pour livre, dont les produits devaient souffrir des lenteurs et des difficultés dans la rentrée, en même temps que de fortes non-valeurs.

Après ce partage, les membres du conseil de raison furent livrés à leur inexpérience. Divisés d'opinions, embarrassés sur le choix des moyens d’exécution, privés des avis que le ministre leur refusait avec intention; reconnaissant enfin, après quelques mois, et l’étendue de l’obligation qu’ils avaient prise, et leur impuissance, ils supplièrent le roi de les en délivrer. La couronne rentra ainsi sans efforts et sans trouble dans toutes ses prérogatives; mais, par la faute de ses représentants, la nation fut privée du droit de délibération qu’elle pouvait obtenir[6].


1597. - Sully cependant trouvait dans la réforme des abus une partie des fonds que réclamait la continuation de la guerre. Il avait augmenté les revenus de deux millions par le renouvellement des baux de quelques parties de droits qui étaient affermés à vil prix au duc de Florence, sous le nom de plusieurs traitants italiens; et déjà sa vigilance et sa fermeté dégageaient la comptabilité publique des fictions et de la confusion si favorables aux financiers, lorsque la surprise d’Amiens miens par les Espagnols vint retarder encore la libération de l’état. La sûreté du royaume voulait que l’ennemi fût promptement chassé de cette place importante mais l’urgente nécessité laissait à peine le choix des moyens à employer pour se procurer sans retard les fonds qu’exigeait cette entreprise inattendue. Le roi, de concert avec des députés de l’assemblée de Rouen qui se trouvaient à Paris, s’arrêta aux mesures suivantes[7] :

Un emprunt volontaire de douze cent mille livres, qui fut rempli en peu de jours; par l’effet de la confiance qu’inspiraient l’économie et les réformes déjà introduites dans l’administration des finances;

Une addition de quinze sous par minot aux droits sur les sels, dont le produit devait servir au remboursement de l’emprunt;

Une recherche de la fortune des financiers, sans en excepter les trésoriers de France; mais les comptables détournèrent l’examen qui devait mettre leurs malversations au grand jour, par une première restitution de douze cent mille écus, qu’ils déguisèrent sous le nom de prêt;

Et aussi la création d’offices triennaux dans les finances, dont la vente, faite sous la surveillance de Sully, produisit douze cent mille écus.

Cette dernière opération mit de nouveau en évidence la corruption et la cupidité des membres du conseil, par une circonstance qui peut donner une idée des dilapidations qui durent être commises lors de l'aliénation des offices créés sous les règnes précédents. Un traitant, nommé Robin, offrit à madame de Sully un diamant de six mille écus pour son mari, et un de deux mille écus pour elle, afin d’obtenir que Sully ne s’opposât pas à l'adjudication que le conseil voulait lui faire des nouveaux offices de la généralité de Tours et d“Orléans, moyennant soixante-douze mille écus. Éconduit de ce côté, mais mieux accueilli par deux dames de la cour qui l'appuyèrent auprès du chancelier, le traitant avait obtenu du conseil un arrêt favorable. Sur ces entrefaites, Sully retirait quatre-vingt mille écus par la vente en détail de la simple moitié des offices que demandait Robin. Sans se mettre en peine de l'arrêt du conseil, Sully ne dissimula pas qu’il en connaissait les motifs : l'arrêt fut annulé, et des supplications obtinrent que le roi ne serait pas instruit de cette collusion[8].


1598. - Enfin, Amiens fut repris, la Bretagne réduite, et la paix rendue à la France par le traité de Vervins.


1599.- Peu àprès, Sully reçut, en récompense des services rendus dans sa nouvelle carrière, la place de surintendant des finances, que le roi rétablit en sa faveur. Ce prince judicieux avait reconnu l'inconvénient d’un conseil composé de personnes qui « n’étoilent jamais d’accord quand il s’agissoit du bien public, mais qui étoient toujours d'intelligence quand il s’agissait soit d’impôts et de voler. » Le ministre, affranchi alors des obstacles qui s’étaient opposés à l’accomplissement ses projets, put se livrer avec toute l’ardeur du zèle qui l'animait à l’exécution du plan qu’il avait formé pour le bonheur des peuples, et pour libérer l’état des engagements que la mauvaise administration des règnes précédents, et les désordres inséparables des guerres civiles, airaient légués à Henri IV.

Les dettes s exigibles approchaient de cent quarante-sept millions, en y comprenant trente-deux millions accordés par des traités secrets aux princes, aux seigneurs aux commandants qui vendirent à Henri IV leur soumission et la remise des places, ou forteresses dont ils s'étaient rendus maîtres. Les rentes assignées sur les différentes branches de revenus formaient, avec l'aliénation du domaine, un capital de cent cinquante-sept millions. Il existait en outre pour trois millions quatre cent mille livres de rentes créées sur la ville de Paris, au temps François Ier, de Henri II et de ses trois fils, ce qui représentait au denier douze, taux de leur constitution, un capital de quarante et un millions. La dette de France formait donc une masse de trois cent quarante-cinq millions.

Ce n’était pas assez pour Sully de connaître la somme des engagements auxquels l’état devait satisfaire, il voulut aussi se rendre compte du montant des tributs en tout genre que supportait la population du royaume. Ses recherches le conduisirent à connaître que, pour trente millions d’impôts qui étaient levés au nom du roi, la nation payait annuellement plus de cent soixante-dix millions; et dans cette somme, qui réunissait à tous les impôts exigés par forme de perception l’évaluation des frais de justice, des dîmes ecclésiastiques, des annates envoyées et des dispenses achetées à Rome, ainsi que les sommes payées aux églises pour l’administration des sacrements, n’était pas comprise l’estimation des droits seigneuriaux et des obligations manuelles résultantes de la féodalité. Sully, persuadé dès lors que la principale cause de l’épuisement de la France était dans l'énormité de ces diverses charges, conçut le projet d’en diminuer le poids ou de les rendre plus supportables en les répartissant d’une manière moins inégale[9].

Sur les trente millions d’impôts, déduction faite de trois millions de droits dont jouissaient les aliénataires qui les faisaient percevoir pour leur propre compte, et des dépenses payables par prélèvements, qui ne montaient pas à moins de seize millions, il ne revenait encore à l’épargne, malgré quelques améliorations déjà obtenues, que onze millions environ, somme bien inférieure aux besoins du gouvernement.

Avec des moyens aussi faibles, mais aidé des ressources inépuisables de l’économie, de l’ordre et de l’intégrité, fort surtout de la confiance et de l’appui du monarque, Sully devint le réparateur de la fortune publiques.

Henri IV et surtout son ami pensaient que la terre, est pour la France la source unique des richesses. « Le labourage let le pâturage, disait Sully, sont les deux mamelles de l’état. » D’après ce principe, l’agriculture fut le premier et le constant objet de la sollicitude du monarque et de son ministre.

1599.- Un nouveau voyage dans les provinces avait convaincu Sully que les terres restaient en friche parce que les cultivateurs ruinés ne pouvaient faire les avances qu’exige la culture; cependant ils étaient poursuivis et dépouillés sans pitié pour le paiement des arrérages dus sur les tailles de plusieurs années, qui s’élevaient à vingt millions. Le roi fit remise entière de cette somme, « plus désireux, disait-il, d’acquérir le nom de père du peuple, lui faisant du bien, que de laisser quelque souvenance à la postérité d’autre titre plus spécieux[10]. »

L’assiette de cet impôt sur les paroisses et la répartition, entre les taillables étaient de nouveau livrées à l’arbitraire, soit par l’effet de la négligence ou de la partialité des officiers d’élection et des asséeurs, ou des trésoriers de France et des commissaires départis, soit parce que les seigneurs exerçaient une influence usurpée sur ces opérations, auxquelles ils faisaient procéder en leur présence et même dans leurs châteaux. Beaucoup de roturiers qui avaient porté les armes pendant les guerres civiles s'arrogeaient les titres et les prérogatives de la noblesse que l'on n’osait leur refuser, et augmentaient ainsi les nombre des exemptions qui retombaient à la charge des autres taillables. Un règlement mit fin à ces désordres; et Henri IV, exauçant les vœux exprimés tant de fois, mais toujours en vain, dans les assemblées d'états-généraux, fit défense de saisir sous aucun prétexte le bétail des agriculteurs, ni les instruments de labourage. Enfin, une discipline exacte et sévère garantit l’habitant des campagnes de l’insolence et de l’oppression du soldat pendant les marches ou dans les cantonnements.

Ces premiers bienfaits furent suivis d'autres non moins précieux.

Le roi prononça l’abolition de toutes les taxes que des villes, des bourgades et des communautés avaient, pendant les moments de troubles, établies sans autorisation. Il en fut de même des impositions arbitraires que les seigneurs avaient établies sur leurs vassaux ou dans leurs gouvernements, pendant les guerres civiles. Une défense sévère de rien percevoir au-delà de ce que portaient les ordonnances arrête le cours de ces concussions; 5 et la résistance qu’un grand seigneur[11] voulut opposer à cette mesure fournit à Sully l’occasion de faire respecter l’autorité d’un roi protecteur des peuples, et de manifester la fermeté inflexible dont il savait s’armer toutes les fois qu’un intérêt privé entrait en balance avec le bien public.


1601.- L'imposition du sou pour livre, consentie pour trois ans, par les états-généraux, avait été prorogée pour trois autres années, par simple enregistrement. Ce droit, connu sous le nom de pancarte, était onéreux, et la forme de sa perception était incommode au commerce autant que dispendieuse pour le gouvernement, en ce qu’elle assujettissait les marchandises et les denrées à des visites répétées, et qu’elle exigeait une armée de commis dont les vexations irritaient les consommateurs. Des symptômes de sédition s’étaient manifestée à l'occasion de la pancarte dans les provinces au-delà de la Loire. Des villes et leurs magistrats avaient pris les armes, et des commis avaient été tués. Henri IV se rendit à Blois, puis à Poitiers, où se trouvèrent des députés de la Guyenne. Là il écoute les plaintes des peuples : par de douces remontrances, il calma la sédition sans qu’il fût besoin de châtiment, et fit rétablir la pancarte. Mais ce ne fut que pour l’honneur de l’autorité royale : ce prince, instruit des inconvénients dont le sou pour livre était la cause, en prononça l’abolition. Son produit fut couvert en partie par un droit sur les vins et les autres boissons, à l’entrée des bourgs francs de tailles ou abonnés[12].


1601.- Vers le même temps Sully commença l’exécution du projet qu’il avait formé de réduire d’année en année les tailles, qu’il regardait avec raison comme un impôt violent et vicieux dans sa nature, principalement dans les lieux où il ne portait pas uniquement sur les biens-fonds. Le ministre fit rembourser et supprimer encore une très grande quantité d’offices dans la magistrature et les finances, notamment ceux des comptables triennaux, dont lui-même avait provoqué l’établissement à l’époque de la surprise d’Amiens : ce qui prouve que, si cet homme sage avait pu, dans un moment de détresse, faire une ressource de la vente des emplois publics, il ne voyait pas moins dans chaque création d’offices un emprunt dont, toutes les classes de la société, et l’état même, payaient les intérêts à un taux exorbitant, en raison des exemptions, des privilèges attachés aux fonctions, et des taxes nouvelles attribuées en émoluments à ceux qui achetaient les places.

Ces réductions, ces réformes encourageantes pour l’habitant des champagnes, firent refleurir l’agriculture et bénir le roi qui la protégeait mais elles furent précédées ou suivies d’opérations dans lesquelles le trésor trouva un ample dédommagement du judicieux abandon qu’il faisait en faveur de la classe la plus utile à l’état.


1601.- Les aliénations faites précédemment avaient livré trois millions de revenus en tailles, aides, gabelles, traités, péages et autres droits, à des grands seigneurs et à des princes étrangers. Au nombre des aliénataires étaient « la reine d’Angleterre, le comte palatin, le duc de Wirtemberg ; la ville de Strasbourg, les Suisses, Venise, le duc de Florence, madame sœur du roi, plusieurs traitants italiens, tous les princes et les seigneurs qui avaient été de la ligue, le connétable de Montmorency, MM. de Bouillon, Duplessis, et une infinité d’autres, » qui les faisaient exploiter à leur profit par des fermiers particuliers, ce qui ajoutait aux frais et aux vexations, suites inévitables de la multiplicité des exacteurs. Sully fit rentrer ces revenus dans les mains du roi ; et, nonobstant les clameurs et les réclamations des possesseurs, il déclara que chacun d’eux serait payé au trésor royal, sur le pied des baux existants ; mais que personne ne pouvait se plaindre de ce que le roi, en faisant administrer ces impositions par ses officiers, augmentât son revenu de six cent mille écus. En effet, les seuls droits de traite foraine perçus dans le ressort du parlement de Toulouse, sous le non de patente du Languedoc, et dont le connétable de Montmorency retirait net neuf mille écus, en furent affermés cinquante mille[13].


1601.— Par une opération analogue à l'égard des domaines de la couronne, Sully faisait rentrer le roi dans une grande partie de biens aliénés sans titre valable, et de ceux qui avaient passé entre des mains étrangères, en garantie d’engagements qui se trouvaient plus que remplis, ou qui pouvaient l’être à peu de frais. Quant aux biens aliénés de bonne foi, attendu que le prix de cession avait été au-dessous de leur valeur, on en ordonna la revente. Nonobstant les obstacles que la qualité et le crédit de plusieurs des détenteurs des domaines opposèrent à l'exécution entière des projets du ministre, il procure ainsi le recouvrement d’immeubles pour une valeur de quatre-vingt millions, représentés par trente-cinq millions en biens dont la rentrée fut immédiate, et par quarante-cinq millions en propriétés dont une compagnie obtint la jouissance pour seize années, à la charge de les rendre libres de tout engagement à l’expiration de ce terme.


1601.- Les rentes constituées absorbaient la moitié des produits qui leur servaient d’hypothèques. De longues recherches donnèrent au ministre le moyen de connaître les diverses natures de ces engagements. Beaucoup de constitutions excédaient la fixation assignée aux emprunts, ou elles ne résultaient d’aucun emprunt autorisé dans les formes voulues. Des rentes avaient été accordées à titre gratuit, par forme de don ou de récompense, “soit à des favoris, soit aux membres du conseil qui avaient négocié les emprunts. Les unes avaient été établies, contre le vœu des édits, en échange d’anciennes créances, non vérifiées, que des spéculateurs achetaient à vil prix ; d’autres représentaient le remboursement de la finance de certains offices dont les titulaires avaient néanmoins disposé à leur profit ; enfin on en payait encore qui avaient été précédemment rachetées. Une commission fut chargée de l’examen de tous les titres constitutifs ; et cette révision, dirigée d’après un règlement détaillé fait par Sully, valut à l’état six millions de rentes dont l’extinction aida à continuer la diminution de l’impôt onéreux des tailles.

Plus tard (1607), le ministre remboursa une partie des rentes sur l’hôtel de ville de Paris ; mais les instances réitérées du prévôt des marchands et des échevins empêchèrent que l’opération se fît en entier ; et des considérations politiques, nécessaires alors, portèrent le roi à céder à une opposition qui n’avait d’autre motif que l’intérêt personnel des rentiers. Ils trouvaient désavantageux pour eux de recevoir le remboursement, à raison du denier douze, d’un capital dont ils ne pouvaient plus faire l’emploi qu’au denier seize. La réduction dans le taux de l’intérêt, favorable à la fois au commerce et à tous les genres d’industrie, avait été prononcée précédemment par un édit dont les transactions particulières avaient confirmé les dispositions. Ce changement était la conséquence naturelle du rétablissement de la tranquillité et de l'abandon des emprunts publics; mais il résultait encore de la grande quantité de métaux précieux du Nouveau-Monde, que l'Espagne avait répandus dans le royaume pendant les guerres civiles, et dont la présence, en augmentant la masse du numéraire en circulation, diminuait sa valeur d’échange. Cette fois donc le gouvernement et les contribuables furent exclus du bénéfice que devait leur assurer une mesure de bonne administration, parce que l’intérêt privé l’emporta sur les vues de Sully pour la réduction de la dette perpétuelle; et le rachat des constitutions sur la ville, qu’il voulait effectuer en totalité, n’eut lieu que pour treize cent vingt-neuf mille livres, Plus tard encore, sous un autre ministre, on verra les mêmes motifs triompher de l’intérêt général[14].

Les produits des gabelles et des droits de traite ou de douanes, affermés d’abord par bailliage, puis par évêché, enfin par province, avaient été remis, sous le règne précédent, à un seul fermier pour chaque branche de ces droits, dans les parties du royaume qui s’y trouvaient sujettes. Mais la courte existence laissée à chaque bail, presque aussitôt annulé que conclu, était comme un avertissement donné aux traitants de grossir promptement leurs profits, et de préparer de nouveaux pots-de-vin ou de nouvelles conditions en faveur des favoris et des membres du conseil, dilapidateurs de la fortune publique. Tous les baux, en outre étaient rétrocédés par ceux qui les avaient obtenus, et qui se trouvaient ainsi possesseurs de bénéfices lucratifs sans aucun soin d'exploitation. Sully, instruit des collusions qui avaient accompagné les adjudications, ferma la main aux titulaires; puis, ordonnant aux sous-traitants de lui rapporter leurs marchés et de verser directement à l’épargne les termes échus et à écheoir, il connut tous ceux qui avaient des intérêts secrets dans les baux, et acquit la preuve que le produit des sous-fermes était deux fois supérieur au montant des adjudications qui avaient été faites dans le conseil, ou par les trésoriers de France; Une telle lésion autorisait la résiliation des traités. Elle fut prononcée sans indemnité, cette fois; et le ministre adopta la méthode du bail général pour chaque branche particulière de revenus, en excluant l’intervention des sous-fermiers. Afin d’écarter toute idée et toute possibilité de collusion, il fit l'adjudication aux enchères publiques. Il exigea en outre des-adjudicataires le serment qu’aucun étranger ne participait à leurs marchés. Par ces moyens, le produit des droits de traite, réunis sous le nom de cinq grosses fermes[15], et celui des gabelles, furent presque doublés. Le bail concernant cette dernière partie réunit pour la première fois dans les mêmes mains l’approvisionnement des greniers à sel au recouvrement du droit : il était alors de trois cent quatre-vingt dix-sept livres douze sous par muid; ce qui portait le prix bursal de la denrée à un son sept deniers par livre. Mais dans cette somme trois cent livres seulement étaient perçues pour le compte du trésor. L’excédant avait pour objet les gages des cours de judicature, des paiements à faire au duc de Guise, l’extinction de l’emprunt fait pour le siège d’Amiens, et le remboursement d’offices que Sully se promettait de supprimer.


1604. - Les traitants et les financiers, qui avaient échappé aux premières poursuites ordonnées contre eux par un sacrifice de trois millions six cent mille livres, continuaient d’être l’objet de l’animadversion et de l’envie, à cause de leurs grandes fortunes. Deux fois encore leurs opérations furent examinées par une commission instituée sous le nom de chambre de justice. Sully, « que l’on ne peut accuser d’avoir favorisé les financiers, » ne s’y prêta que malgré lui, et s’opposa même à ces recherches. Connaissant la corruption que les règnes précédents avaient répandue, il prévoyait que la recherche proposée ne serait qu’une occasion de trafic honteux entre ceux qui auraient besoin de protection et ceux qui en auraient à rendre. C’est pourquoi, et afin d’éviter cette espèce de transaction honteuse pour un gouvernement, qui doit ou ignorer les délits, ou les punir s’il les connaît, le ministre demandait que, sans rechercher la gestion des employés secondaires, on se bornât à traiter de gré à gré avec les chefs ; que, si au contraire un examen en forme était entrepris, on fermât l’oreille à toute espèce de sollicitation. Le roi le promit ; mais comme l’avait prévu Sully, les moins coupables furent les seule punis, et les courtisans enrichirent sans que le trésor en profitât beaucoup[16].

« Si, dit l’auteur des Considérations sur les finances, si Sully s’étoit montré disposé à transiger sur les malversations des comptables, c’est qu’il pensoit que les peines pécuniaires prononcées contre les coupables sont une bien faible réparation des maux causés par des concussions qui avoient si grandement contribué à la ruine du peuple et de l’état ; il sentoit qu’une bonne administration doit moins chercher à profiter de ces abus que s’occuper des moyens d’en prévenir le retour : c’est de quoi il s’occupa sans relâche. »

Des règlements particuliers à chaque nature d’imposition, en donnant les moyens nécessaires pour assurer la perception, déterminèrent les mesures propres à en écarter les abus[17].

Tous les comptables furent obligés de tenir des registres-journaux, ce que La plupart d’entre eux négligeaient de faire nonobstant les règlements plusieurs fois renouvelés sous les règnes précédents. Il était par conséquent impossible de connaître, sans de longues recherches, l’état, la nature et le montant des opérations de recette ou de dépense. A cette mesure indispensable, et sans laquelle l'ordre ne peut exister dans l’administration des finances, il ne manqua que l’application des écritures en parties doubles, déjà usitées dans le commerce. Si Sully eût adopté cette méthode, dont sa fermeté et sa surveillance pouvaient établir l’usage, il eût avancé de deux siècles le moment où, par elle, l’exactitude et la fidélité des descriptions ont été fixées dans la comptabilité des dépositaires de la fortune publique[18].

Il arrivait que des employés sortaient de place en conservant une partie des deniers dont le recouvrement leur avait été confié. Pour arrêter ces détournements, on imposa aux nouveaux titulaires l’obligation de poursuivre la reddition des comptes de leurs prédécesseurs; et le paiement de leurs appointements et remises était suspendu jusqu’à la rentrée des reliquats.

On soumit les receveurs-généraux à rendre pour leurs opérations des comptes uniformes, détaillés avec clarté, à l’appui desquels devaient être jointes les pièces justificatives. Les articles de recettes sujets à discussion furent assujettis à des formules particulières.

Afin de prévenir l’arbitraire et les dilapidations que la négligence des trésoriers de France et des commissaires-départis avait, laissé introduire dans la quotité des émoluments attribués aux divers agents qui concouraient à la répartition et au recouvrement des impôts, on régla ce qui appartenait aux élus, aux receveurs, pour leurs gages, droits, taxations, pour les frais de confection des comptes, et pour les épices des membres de la chambre des comptes. L’économie, sur ce qui regardait les chambres seules, fut de deux cent mille écus par an.

Les dépenses et les charges ordinaires qui s’acquittaient dans les provinces par les receveurs étaient une autre, source d’abus et de spéculations ruineuses pour le trésor et pour ses créanciers. Sully, après deux années de recherches et d’un travail assidu, parvint à dégager les dépenses de tout ce que la faveur ou l’incurie avait toléré : alors il fit statuer que les dépenses seraient autorisées par des états arrêtés chaque année dans le conseil du roi ; et la chambre des comptes reçut l’ordre de ne pas admettre les paiements qui excéderaient les allocations portées sur ces rôles de paiement. Il fut fait défense aux comptables de différer, sous aucun prétexte, de satisfaire aux assignations qui seraient délivrées sur leurs caisses, afin d’éviter le déplacement des espèces et leur envoi à Paris. Enfin les trésoriers de France, si fertiles en expédients profitables pour eux, furent assujettis à n’effectuer aucun paiement que d’après les ordres du surintendant des finances, lequel devint par ce moyen l’ordonnateur unique et légal des dépenses de l’état. « Ainsi se trouvèrent comblées les mines où les commis avaient coutume de puiser leur opulence. » On ne peut s’empêcher de reconnaître, après deux siècles, que l’esprit judicieux du ministre de Henri IV l'avait conduit à découvrir et à poser les principes d’ordre et de régularité auxquels est revenue aujourd’hui l’administration des finances.


1604.- Depuis que le fâcheux système de la vénalité avait été adopté comme ressource habituelle de l’administration, les rois s’étaient privés de la libre disposition des emplois publics, dont un gouvernement ne doit jamais se dessaisir. Du moins la mort d’un titulaire aurait dû faire rentrer la couronne dans ses droits. Ce retour devait être la conséquence du principe alors existant que toute charge est une aliénation du domaine, et d’un principe plus constant, consacré dans tous les états bien constitués, qu’une fonction ou une gestion publique n’est qu’une délégation temporaire et personnelle de la puissance administrative, qui réside tout entière dans le chef du gouvernement. Mais, dans ce cas même, les emplois ne revenaient plus au roi, depuis l’adoption d’une mesure que la détresse du trésor avait suggérée aux conseillers de Charles IX. Par un édit[19], dont l'enregistrement n’avait été fait que sur le très exprès commandement, le gouvernement de ce prince avait imposé à tous les titulaires de charges et d’offices l’obligation de verser dans six mois à l’épargne le tiers de la somme à laquelle serait taxés la valeur de chaque emploi. À ce prix, chacun fut maître de disposer à son gré de l’office, ou de le transmettre à ses héritiers sans payer une nouvelle finance. Depuis ce moment, les places étaient devenues l’objet de négociations presque publiques qui ne profitaient qu’aux intrigants et aux gens en crédit, et dont le résultat trop fréquent avait été de confier à des hommes inhabiles ou mal famés les fonctions importantes de la magistrature ou de la finance. Déterminé sans doute par le désir de remédier à ces inconvénients, mais plus encore par la certitude d’obtenir une nouvelle branche de revenu qui ne pesât que sur les classes les plus riches, Sully fit rendre un édit qui assurait l’hérédité des offices à la veuve et aux héritiers des titulaires, sous la condition par ceux-ci de payer annuellement au trésor le soixantième denier de la finance à laquelle leurs charges avaient été évaluées. Mais si la taxe n’était pas acquittée dans l’année, en cas de décès du titulaire, l’office revenait au fisc, et était revendu à son profit. La taxe du soixantième, nommée d’abord paulette, du nom de Charles Paulet, qui en suggéra l’idée, reçut plus tard le titre d'annuel du offices, sous lequel il en sera encore fait mention[20].

Ce ministre, supérieur à son siècle à tant d’égards, partageait les préjugés de la noblesse, qui enviait aux roturiers l’acquisition des terres seigneuriales. Il fit revivre le droit de franc-fief, dont l’origine remontait à l’époque où les seigneurs, partant pour les croisades, avaient cédé leurs biens à tous ceux qui avaient pu les acheter. Ce droit était fondé sur l’incapacité naturelle aux roturiers, dans le système féodal, d’acquérir et de posséder des terres du fisc. A différentes époques de la monarchie, on l’avait porté à trois années du revenu des biens qui se trouvaient entre les mains des non nobles : François Ier le fixa et le fit acquitter à raison d’une année pour vingt années de jouissance ; et ce fut sur le même pied que Henri IV en ordonna le recouvrement. On ne s’aperçut pas que ce droit atténuait pour la noblesse la valeur des biens qu’elle devait vendre; car les plébéiens, qui voulaient en devenir propriétaires, n’omettaient pas de faire entrer dans le calcul du prix d’acquisition les charges dont le fief allait être grevé entre leurs mains.

Le commerce intérieur, cette seconde source de la prospérité des états, ne trouva pas sous le gouvernement de Henri IV une protection aussi constante ni aussi générale que l’agriculture. Quoique ce prince dût être éclairé sur les dommages immenses que la multiplicité des douanes et des péages intérieurs causait aux relations des différentes provinces entre elles, ainsi qu’au transit et aux exportations de la France et de l’étranger, ce funeste système prévalut sur les réclamations générales et sur les observations de l’expérience. Le roi maintint des droits dont l'établissement, dans les premières années de son règne, avait été du moins justifié par la nécessité des circonstances. c’est ainsi que fut perpétuée la nouvelle imposition d’Anjou, établie d’abord sur les vins pour subvenir aux dépenses du siège de La Rochelle et de celui de Craon, et qui, au lieu de cesser avec la guerre, comme il avait été promis, fut étendue à une infinité d’autres marchandises, et ajoutée à perpétuité aux autres droits déjà perçus au passage de la Loire. C’est ainsi que prit naissance le péage de Vienne, si préjudiciable dans la suite au commerce du midi, sous le nom de douane de Valence. Il avait été créé pour fournir à un gouverneur de Vienne vingt mille écus pour prix de sa soumission à Henri IV, et il devait s’éteindre après l’acquittement de cette somme ; mais cette dernière condition ne fut pas observée. Toutes les marchandises des provinces circonvoisines et des pays étrangers, venant de Lyon, ou dirigées sur cette ville soit par terre soit par eau, furent tenues de passer à Vienne ou à Sainte-Colombe, et d’acquitter un droit réglé sur un tarif divisé seulement en vingt classes. Enfin, d’après l’interprétation donnée aux ordonnances par les fermiers de la douane de Lyon, ils obtinrent que les denrées de la Provence, du Languedoc et du Dauphiné, lorsqu’elles étaient destinées pour l’étranger, seraient assujetties à passer par Lyon pour y payer les droits dus à la douane dont jouissait cette ville privilégiée. Ces droits, qui, réunis, montaient à sept et demi pour cent, furent cependant réduits à deux et demi pour les marchandises envoyées en Espagne. « À l’égard des autres pays, remarque l’auteur des Considérations sur les finances, ou bien on pensa que leur argent n’étoit pas si utile à gagner, ou, par une de ces inconséquences dont on ne peut ou rendre raison, on ne comprit pas que l’exportation en souffriroit. »

Indépendamment de ces taxes onéreuses et incommodes, il en fut imposé d’autres non moins nuisibles, qui n’eurent pas même, comme celles dont nous venons de parler, le faible avantage d’être perçues au profit des villes et de l’état.

Au commencement de son règne, Henri IV avait reconnu, comme principe constitutif du gouvernement, que « l’enregistrement du parlement étoit nécessaire pour la validité des édits[21]. » C’était contracter l’engagement d’observer une formalité qui, dans l’absence d’un droit public légalement établi, donnait du moins aux peuples une sorte de garantie contre les actes arbitraires des ministres; et, dans ce principe, le parlement trouvait en quelque sorte l’autorisation d’opposer au moins des remontrances aux demandes qui lui paraîtraient immodérées. Sully, de son côté, s’efforçait d’entretenir le monarque dans les intentions qu’il avait annoncées, en puisant dans l’histoire des impôts les exemples les plus capables de faire impression sur son esprit. Dans un mémoire historique, il rappelait au roi que, dès l’origine de la monarchie, les levées de deniers, lors même qu’elles étaient nécessitées par les besoins de l'état, n’avaient eu lieu que du consentement des peuples : il retraçait les soulèvements, les troubles causés par les princes, qui, les premiers, avaient violé un droit établi par une ancienne possession, droit que plusieurs rois de la troisième race avaient publiquement reconnu, que Saint-Louis avait respecté, et qui ne s’était affaibli, par interruption, qu’à l’époque où les dissensions et l’ambition des seigneurs avaient livré la France à l’Angleterre, sur la fin du règne malheureux de Charles VI. Henri IV donna même un exemple remarquable à des remontrances du parlement qui lui parurent dictées par des vues d’intérêt pour l’état et pour les peuples. Un règlement avait été préparé dans l’intention de remédier aux désordres qui s’étaient introduits dans la fabrication des monnaies, sous les règnes précédents ; mais il annonçait un affaiblissement du titre des espèces. Le parlement, instruit à cet égard par l’expérience des temps passés, représenta tout ce qu’avait de funeste pour le royaume une pareille opération, qui ne profitait qu’aux étrangers. Ces raisons furent goûtées par le roi; et Sully, qui avait préparé l’édit, déclara que, loin de prétendre tirer profit des dispositions présentées, il n’avait eu en vue que l’avantage des peuples, qu’il se rendait aux observations du parlement, et qu’il retirait l’édit; que, pour remplir ses premières vues, il serait préparé un nouveau règlement, à la discussion duquel plusieurs membres du parlement seraient appelés[22].

Henri IV, pourtant, s’écarta en quelques circonstances de la promesse qu’il avait faite. Pressé, sollicité par les grands seigneurs et par les courtisans, il accorda trop fréquemment à leur importunité soit la création, en titre d’office, d’un grand nombre d’emplois inutiles, soit l’établissement de péages ou de taxes locales qu’il croyait de peu d'importance. La plupart de ces créations en faveur de particuliers n’étaient point vérifiées au parlement; mais les édits n’en devenaient pas moins, entre les mains de ceux qui les avaient obtenus, autant de moyens d’exaction sur le peuple et sur le commerce. Sully, dans différentes occasions, avait représenté fortement au roi les inconvénients de ces gratifications; mais il s’éleva avec fermeté contre l’établissement, en faveur du comte de Soissons, d’un droit de quinze sous par balle de marchandises qui sortaient du royaume. Henri IV croyait n’avoir accordé qu’une gratification de trente mille livres. Lorsque son ministre lui eut démontré que le produit annuel du droit ne serait pas moindre de trente mille écus, il laissa il Sully la liberté d’empêcher l’exécution de ses ordres[23].

Ces erreurs tenaient plus à l’esprit du siècle et aux habitudes de la cour qu’au caractère du prince ; elles doivent être pleinement rachetées à nos yeux par la protection éclairée que Henri accorda à la navigation cet à l’industrie manufacturière.

Les étrangers avaient mis des droits d’ancrage assez considérables sur nos vaisseaux qui relâchaient dans leurs ports ; et le gouvernement avait tellement négligé d’user de représailles à leur égard, que leurs navires étaient employés en France préférablement aux nationaux. Henri IV sentit qu’une juste réciprocité était nécessaire pour écarter cette concurrence, préjudiciable au commerce français : nonobstant donc l’avis contraire de Sully, et l’opposition, cette fois peu judicieuse, des cours de parlement, le sage monarque ordonna d’exiger des navires étrangers les mêmes droits auxquels leur puissance avait assujetti les nôtres. Ce fut pareillement contre l’opinion de Sully que le roi appela des ouvriers étrangers, qui introduisirent dans le royaume la fabrication des tapisseries façon de Flandres et des toiles façon de Hollande. La France doit encore à la prévoyance de Henri IV la propagation de la culture des mûriers, et le rétablissement des manufactures d’étoffes d’or et de soie, qui ont occupé si utilement depuis une nombreuse population. Sully, éloigné par l’austérité de ses mœurs de tout ce qui servait au luxe et aux plaisirs, voulait ne favoriser que la fabrication des étoffes et des draps ordinaires à l’usage du peuple, sans encourager des établissements qui ne produisaient, selon lui, que de superbes babioles. Le roi vit mieux que son ministre, en reconnaissant qu’il était nécessaire de procurer à la France des objets que réclamait le goût de ses habitants, afin qu’elle cessât de les acheter chèrement au dehors[24].


1605. — La France ne tarda pas à ressentir les effets du gouvernement paternel de Henri et de l’administration sage de son ministre. L’agriculture, protégée, devint florissante ; l’aisance reparut dans les campagnes ; la bourgeoisie s’enrichit ; et le commerce maritime, encouragé, étendit ses spéculations jusqu’aux Indes. Par l’effet d’une surveillance constante que Sully entretenait dans les provinces pour assurer l’exécution des règlements, l’arbitraire de la répartition s’exerçait moins librement à l’égard des tailles ; les abus de la perception étaient réduits, et les concussions arrêtées. Les dégrèvements résultant d’une réduction de cinq millions sur l’impôt et de la taxe incommode du sou pour livre se trouvaient couverts en grande partie par une meilleure régie des droits d’aides, des traites, des gabelles ; par les droits aliénés dont l’état s’était remis en possession ; par les revenus des domaines recouvrés ; par le droit de franc-fief et par celui d’annuel, qui ne portaient ni, sur l’industrie ni sur l’agriculture. Mais, en résultat, la totalité des impositions, qui approchait de trente millions au commencement du règne, était réduite à vingt-six millions, dont, déduction faite de six millions pour le restant des rentes et des gages assignés sur les produits, il entrait net dans l’épargne vingt millions ; et sur cette somme, les économies annuelles, après l’acquittement des dépenses de l’état, donnaient de trois à quatre millions, qui formaient un fonds de réserve. Dans le même espace de temps, la France s’était libérée d’une dette exigible de cent quarante-sept millions ; sur sept millions de rentes qui avaient été éteintes, il en avait été racheté pour un capital de cent millions ; de nombreux offices étaient remboursés ; plus de quarante millions avaient été employés à remettre en état les fortifications des places frontières, à l’armement des galères, à l’approvisionnement des arsenaux, à l’entretien des routes, à des travaux qui devaient faciliter la navigation des rivières, à la restauration des églises, à l’embellissement et à l’ameublement des maisons royales, au rachat des joyaux de la couronne, ou à des dons conformes à la bienfaisante générosité du monarque. On poussait avec activité les travaux d’un canal, celui de Briare, où furent construites les premières écluses à sas qu’on ait vues ailleurs qu’en Italie : ce canal devait ouvrir les communications entre les deux mers, en réunissant la Seine à la Loire. Enfin, la dépense annuelle avait reçu une augmentation de deux millions par l’établissement des pensions que le roi avait accordées à un grand nombre de gentilshommes qui s’étaient voués à son service. Cette charge n’était pas nouvelle pour l’état. Devenue cette fois la juste récompense du dévouement à la légitimité, elle aurait du s’éteindre avec ceux qui l’avaient nécessitée. Perpétuée au contraire sous le règne suivant et plus tard, elle devint un moyen trop ordinaire d’abuser de la fortune publique.


11610. — Ainsi, le crédit était rétabli ; il avait été pourvu à tout ce que pouvait réclamer la sûreté de l’état, la prospérité publique, l’équité et la dignité du souverain ; et le roi avait à sa disposition une réserve de quarante-deux millions, dont vingt-trois millions en espèces, suivant des écrivains, et quatorze millions seulement, d’après d’autres documents, étaient déposés à la Bastille[25] : le reste consistait en créances sur le clergé, sur les financiers et sur les receveurs généraux. Le désir de thésauriser n’avait pas été le motif d’une telle accumulation de richesses. Ce résultat remarquable d’une administration de douze années était destiné à subvenir aux premiers frais d’une guerre qui avait pour objet l’abaissement des ennemis de la France. La sagesse et le mystère qui présidèrent aux préparatifs de cette grande entreprise, l’économie et l’intégrité qui en avaient réuni les moyens, semblaient présager un glorieux succès, et au royaume un long cours de prospérité, lorsque le bras d’un fanatique priva la France d’un roi auquel les meilleurs princes ambitionnent d’être comparés.


  1. Lettre de Henri IV à Sully, 15 avril 1596.
  2. Le Secret des finances, par Fromenteau, t. 1, 2, 3, et Preuves.
  3. Économies royales, t. 8.
  4. Économies royales de Sully, t. 3, chap.6.
  5. Économies royales de Sully, chap. 7 du t. 3. — Considérations sur les finances, par Forbonnais, t. 1.
  6. Économies royales, t. 3, chap. 7 et 10.
  7. Économies royales, chap. 7 et 11 du t. 3.- Forbonnais.
  8. Économies royales, chap. 12 du t. 3. — Forbonnais, t. 1.
  9. Économies royales, t. 3, p. 390 à 395.- Forbonnais, t. 1.
  10. Economies royales, p. 397, t. 3.
  11. Le duc d’Epernon, entre autres, qui se faisait par de semblables violences soixante mille écus de rente sur ses vassaux, osa entreprendre à ce sujet M. de Sully, qui soutint en homme de guerre son opération de finances. (Forbonnais, d’après les Économies royales, t. 3.)
  12. Mémoires sur les impositions, par Moreau de Beaumont, t. 3, p. 289 à 292.- Forbonnais, t. 1.
  13. Économies royales, chap. 21 du t. 3. — Forbonnais, t. 1.
  14. Forbonnais, t. 1. - Edit du 18 juin 1602.
  15. Le bail des cinq grosses fermes fut ainsi nommé parce qu’il réunit des droits qui précédemment avaient composé autant der fermes particulières. Ces droits étaient :
    1° Ceux de haut passage, de domaine forain et d’imposition foraine;
    2° La traite domaniale, établie sous le règne de Henri III en 1577;
    3° Les droits à l’entrée sur les drogueries et épiceries, dont l’établissement avait été ordonné par Charles VIII, Louis XII et François Ier;
    4° Les droits à l’importation, créés du temps de Henri III, en 1581 et 5° tous ces mêmes droits qui avaient été établis dans la ville de Calais, après la prise de cette place par le duc de Guise en 1558.
  16. Économies royales. — Forbonnais, t. 1.
  17. Moreau de Beaumont. — Dict. des fin., art ; Comptables, t discours prét., p.
  18. La proposition d'appliquer à la comptabilité publique les écritures en parties doubles fut faite à Sully, en 1607, dans un ouvrage composé exprès par Simon Stevin, de Bruges. En 1807, un ministre, administrateur habile autant que juste appréciateur du mérite des procédés de comptabilité, adopte ce système d’écritures pour la description des opérations du trésor et de ses préposés : le premier effet de cette heureuse innovation fut de mettre in grand jour des déficit nombreux et considérables que le mode de comptabilité précédemment suivi permettait de dissimuler; et chaque jour démontre les avantages de cette méthode, tant pour l'état que pour les comptables aux-mêmes.
  19. Edit du 8 juin 1568.
  20. Edit du 12 sept. 1604.
  21. Remontrances de la chambre des comptes à Louis XV.
  22. Remontrances du parlement au régent en 1718.
  23. Forbonnais, t. 1.
  24. Mémoires sur les impositions, par Moreau de Beaumont, t. 4. p. 625. — Forbonnais, t. 1 et 4.
  25. Économies royales, t. 14. — Remontrances du parlement du 22 mai 1615. — Forbonnais, année 1610.