Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 3/091-100

Fascicules du tome 3
pages 83 à 90

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 3, pages 91 à 100

pages 101 à 110


Saint Marc VIII. 10 J. C. après avoir nourri quatre mille hommes de sept pains & quelques petits poissons, passa le lac de Genesareth & alla du côté de Dalmanutha. Dans Saint Matthieu, XV. 39. ce fut du côté de Magédan. Cela fait voir que ces deux lieux se touchoient ; car il n’est point nécessaire que ce fût le même lieu, comme le P. Lubin soupçonne que cela pourroit être.

Ce mot est communément appelé portion ou héritage du pauvre, de דל, dal, pauvre, & מנת, portion, qui vient du verbe מנח, manahh, numeravit.

DALMATE. s. m. & f. Nom de Peuple. Dalmata. Les Dalmates étoient originairement Illyriens. Il prirent ce nom du pays qu’ils occupèrent, ou de la ville principale de ce pays. Les Anciens & les Inscriptions les nomment Delmates, Delmatæ, comme nous le dirons en rapportant l’origine de ce nom au mot Dalmatie. Quoi qu’il en soit du Latin, l’usage François est de dire Dalmate. Les Dalmates vivoient dans les forêts, & étoient fort adonnés au larcin & au pillage ; ils étoient braves & belliqueux. Dioclétien étoit Dalmate. Saint Jérôme l’étoit aussi. La Cavalerie Dalmate s’acquit de la réputation dans les armées Romaines sous l’Empereur Claude. Treb. Pollion. Une vieille inscription qui est à Mayence fait mention d’un soldat de la cinquième cohorte des Dalmates. Les Dalmates furent convertis à Jésus-Christ en 866. par Méthodias soutenu de Louis, Roi de Germanie.

DALMATIE. Région d’Europe, voisine de la Macédoine. Dalmatia. La Dalmatie étoit la partie orientale de l’Illyrie, & avoit à l’occident & au midi la mer Adriatique, la partie occidentale de l’Illyrie, ou l’Illyrie propre, & la Pannonie au septentrion ; la Mœsie, la Dardanie & la Macédoine au levant. Ce qu’on appelle aujourd’hui Dalmatie, comprend l’une & l’autre Illyrie & la Liburnie, & se nomme Esclavonie. Elle obéit presque toute au Turc, à la réserve de quelques villes qui sont encore aux Vénitiens.

Pour en parler juste, il faut distinguer la Dalmatie ancienne & la Dalmatie nouvelle. La Dalmatie ancienne fut d’abord composée de vingt villes, & de leur territoire, que prirent les Dalmiens aux habitans de Dalmium, qui se révoltèrent contre le Roi Gentius. C’est de cette ville de Dalmium ou Delminium, qu’ils furent appelés Delmates ou Dalmates, & le pays Delmatie & Dalmatie. Jusques-là la Dalmatie étoit toute au milieu des terres ; mais ils poussèrent plus loin leurs conquêtes, prirent encore soixante autres villes, & s’étendirent jusqu’à la mer Adriatique. Leurs voisins inquiets & jaloux de ces conquêtes, appelèrent les Romains, qui vainquirent les Dalmates, & réduisirent la Dalmatie en Province. Mais les Dalmates secouerent le joug quelque tems après, enleverent aux Liburniens leur pays, & aux Romains l’Illyrie. La Dalmatie s’étendit même beaucoup davantage. Mais, à proprement parler, aujourd’hui la Dalmatie est bornée au couchant par les Îles du golfe de Carnéro, au nord par la Morlaquie, la Croatie, la Bosnie & la Servie ; au levant par l’Albanie, & au midi par le golfe de Venise. La Dalmatie a dépendu du Royaume de Hongrie. Elle peut avoir eu quatre-vingt-dix lieues sur les côtes, mais elle ne s’avance pas beaucoup dans les terres. La Dalmatie est partagée entre trois Souverains. La République de Raguse possede une petite partie de la Dalmatie orientale. Les Turcs tiennent le reste, à quelques villes considérables près, que les Vénitiens possedent avec toute la Dalmatie occidentale. Au reste, on donne quelquefois moins d’étendue à la Dalmatie, que nous n’avons fait ; car on la termine au couchant par la rivière de Kurka, ou Cherca, où commençoit anciennement la Liburnie. Quelquefois aussi on l’étend au-delà des bornes que nous lui avons données, & on y renferme vers le couchant toute la Morlaquie, & vers le levant la partie de l’Albanie qui est au-deçà de la Boyana, & quelquefois même tout ce qui est au-deçà du Drin. La Dalmatie fut érigée en Royaume l’an 1076. Démétrius en fut créé Roi. La capitale de Dalmatie, selon Vigénere sur César, est Jadera, que Villehardouin appelle Jadras.

La mer de Dalmatie ; Dalmaticum, Liburnicum mare, est la partie du golfe de Venise qui baigne les côtes de Morlaquie & de Dalmatie, & qui s’étend depuis l’issue jusqu’au golfe du Drin.

Quelques-uns disent que ce pays a pris le nom de Dalmatie, de Dalmium, qui en étoit la capitale. Cela est plus vraisemblable que de le tirer de l’Hébreu טלם, Taelem, c’est-à-dire, un Sillon & figurément par synecdoque labourage ; & de dire que ce pays gfut ainsi nommé parce qu’il est labourable, & qu’il étoit bien cultivé.

DALMATIE. Nom d’une République de l’Illyrie, dans les siècles précédens. Dalmatia. Delminio, ville autrefois puissante, étoit la capitale de la Dalmatie ou de la République appelée Dalmatie. Elle conquit toute la partie de l’Illyrie qui est le long du golfe de Venise, entre les rivières de Cherca & de Bojana & ce pays en prit le nom de Dalmatie, qu’il conserve encore aujourd’hui. Maty. Ce fut sous Guitius, Roi d’illyrie, que les habitans de Delminio secouerent le joug, se mirent en liberté, & commencèrent à former cette République composée d’abord d’une vingtaine de villes, qu’ils prirent ou qu’ils attirèrent dans leur parti.

DALMATIQUE. s. f. Ornement d’Eglise, espèce de tunique que portent les Diacres & les Soudiacres, quand ils assistent le Prêtre à l’Autel, en quelque Procession, ou autre cérémonie. Dalmatica. On peint S. Etienne revêtu d’une dalmatique. Du Cangedit que les Empereurs & les Rois, dans leurs sacres & autres grandes cérémonies, étoient vêtus de dalmatiques. Cet ornement n’appartenoit autrefois qu’aux Diacres de l’Eglise de Rome. Les autres ne la pouvoient porter que par un indult & concession du Pape dans quelque grande solemnité : depuis on l’a accordée même aux Moines, quand ils ont reçu le Diaconat, comme on le peut voir par un Pontifical rapporté par le P. Martenne, dans son ouvrage des anciens rits de l’Eglise ; & c’est aujourd’hui l’usage qu’ils la reçoivent lorsqu’on les fait Diacres, & lorsqu’ils assistent le Prêtre à l’Autel. Herbert dit que la tunique étoit le propre des Soudiacres, la dalmatique des Diacres, & la chasuble des Prêtres. Le Pape Zacharie avoit coutume de la porter sous sa chasuble, & les Evêques en portent encore. C’étoit un ornement sacerdotal qu’on a pris souvent pour la chasuble, qui étoit blanc moucheté de pourpre, & c’étoit autrefois un habit militaire, à ce que dit Amalarius. Alcuin dit que le Pape Silvestre en introduisit le premier l’usage dans l’Eglise ; mais elle étoit différente de celle d’à présent. Elle étoit faite en forme de croix, avoit du côté droit des manches larges, & du côté gauche de grandes franges, lesquelles signifioient, suivant ce que dit Durandus, les soins & les superfluités de cette vie. On n’en mettoit point par conséquent au côté droit, à cause que l’autre vie en est exempte. C’est aujourd’hui l’usage de donner aux Diacres une dalmatique dans la cérémonie de leur ordination : cet usage, selon le P. Martenne, n’est universellement établi que depuis environ cinq cens ans ; d’où il conclut, contre Médina, que donner la dalmatique n’est point une chose essentielle à l’ordination des Diacres. On trouve dans l’ouvrage du P. Martenne plusieurs Pontificaux ou Rituels des Eglises de Rome, de Mayence, de Besançon, de Tours, où la cérémonie qu’on fait, & les paroles qu’on récite ou qu’on chante en donnant la dalmatique aux Diacres, sont marquées. C’étoit la coutume au tems de Saint Grégoire, lorsqu’on portoit en terre le corps du Pape, le peuple le couvrît de dalmatiques, qu’il partageoit ensuite, & qu’il gardois comme des reliques. Saint Grégoire le défend dans le Concile Romain tenu en 595. Il paroît qu’à la fin du VIe siècle les Evêques de France n’avoient point le droit de porter de dalmatiques ; car S. Arige, Evêque de Gap, ayant demandé cette grâce à S. Grégoire, ce Saint Pape lui en envoya, à lui & à son Archidiacre, en 585. avec la permission de s’en servir ; il en parle comme d’une grace qui ne s’accordoit pas aisément.

La dalmatique est un vêtement dont l’usage est venu originairement de Dalmatie. Capitolin, dans la vie de Pertinax, c. 8. dit qu’on tenoit parmi les meubles de l’Empereur Commode, tunicas, penulasque, lacernas & chiridatas Dalmatarum. Lampride, dans la vie de Commode, c. 8. dit de ce Prince, qu’il parut en public vêtu d’une dalmatique : Dalmaticus in publico processit ; ce qui passoit alors pour une chose infâme, les gens graves & modestes ne paroissant jamais avec des dalmatiques : & le même Historien assure, c. 24. de la vie d’Héliogabale, que cet Empereur avoir souvent paru sur la place en dalmatique après son soupé. Dalmaticatus in foro post cœnam. Mercure, Mai 1733.

Les chappes des Crieurs & des Maîtres de Confrairie sont faites en forme de dalmatiques ou de tuniques. En Berry & en Touraine on l’appelle courtibaut. Les paysans de Berry & autres lieux au-delà de la Loire ont des habits faits en forme de casaques longues, qu’ils appellent daumais, ce qui apparemment est un mot corrompu de dalmatique. Voyez dans les Acta Sanct. Propyleum Mens. Maii Conat. Chronol. pag. 89. & pag. 97. la forme des dalmatiques anciennes. Voyez encore, Tom. VII. Maii Paral. pag. 97 & 108. des dalmatiques de Diacre.

DALON ou DALONE. Abbaye de l’Ordre de Cîteaux, dans le Limousin, fondée en 1120.

DALOT. s. m. Terme de Marine. Canal pour faire écouler les eaux d’un vaisseau. Les dalots sont des morceaux de bois percés & disposés en pente le long du tillac, qui passent au travers du bordage, & servent à faire sortir & écouler l’eau des pompes & des gouttieres. Ces trous ont quatre pouces de diamètre. On les appelle aussi orgues, dallions ou dallons.

DAM.

☞ DAM. s. m. Terme de Théologie dont on se sert pour désigner la peine que les damnés ont d’être privés de la vue de Dieu. Les Théologiens distinguent la peine du dam & la peine du sens. Æterna Divine præsentiæ post mortem privatio, damnum, pœna damni.

Dam, en langage ordinaire, signifioit autrefois perte & dommage, & n’est plus en usage qu’en cette phrase. S’il lui arrive du mal, à son dam, pour dire, ce sera lui qui en souffrira le dommage. Damno suo. En ce sens il vient du Latin damnum. Autrefois on disoit à son dam, comme on dit maintenant à ses dépens. Il a appris à être sage à son dam, c’est-à-dire, à ses dépens, il lui a bien coûté pour cela.

Dam. Vieux mot. Titre d’honneur qu’on donnoit autrefois aux personnes distinguées, tant hommes que femmes, & qui vient de Dominus & Domina. On disoit Dam Dieu, pour dire, Seigneur Dieu, comme les Italiens on dit Domene Dio ; & Vidame pour Vicedominus. On a dit aussi, Dam Chevalier, pour dire, Seigneur Chevalier.

On a fait aussi Dom de Dominus, nom que les Moines ont conservé, & ensuite Damoiseau, Damoisel & Damoiselle. Ce nom entre dans la composition de plusieurs noms de lieux, & dans ces noms il précède ordinairement le nom propre du Seigneur à qui ce lieu a appartenu, & dont il a pris le nom, comme Damgillon, Dammartin, Dampierre, &c.

Dam, dans la langue Flamande, signifie une levée de terre, une sorte de digue pour retenir les eaux de la mer, d’une rivière, d’un canal. Il entre dans la composition d’un grand nombre de noms Géographiques, & est particulier aux villes des Pays-Bas. Ce mot désigne presque toujours un lieu situé sur une de ces digues, & l’on y joint d’ordinaire le nom de la rivière qui passe en cet endroit, comme Rotterdam, Amsterdam : ou le nom de ceux qui l’ont faite, comme Monikendam, &c.

DAM. Autrefois ville, maintenant gros bourg de la Province de Groningue dans les Pays-Bas. Damum.

☞ DAM ou DAMME. Dammum. Ville de Flandre, dans le Franconnat, à une lieue de Bruges. Quelques uns l’appellent Hondtsdamme.

☞ DAM. Petite ville d’Allemagne dans la Poméranie, sur l’Oder, à une lieue de Stetin. On la nommoit autrefois Vadam.

DAMAGE. s. m. Vieux mot dont on s’est servi pour dire dommage. On a dit aussi damagent, pour dommageable.

DAMALA. Petite ville appelée autrement Pleda. Damala, Pleda, anciennement Troezen, Troezeux. Elle est dans la Scavie en Morée près de la côte. C’étoit autrefois une ville Episcopale. Maty.

DAMAN. Ville d’Asie dans les Etats du Mogol. Elle est dans le Royaume de Guzarate, située dans la Presqu’Île de deçà le Gange. Elle a un bon port sur le golfe de Cambaye : elle est aux Portugais, qui la conquirent en 1559. Voyez Davity, Mandeslo & Carré, dans le second tome de son Voyage des Indes Orientales.

DAMAR. Ville de l’Arabie heureuse dans le Royaume d’Yémen.

DAMARAS. s. m. Taffetas des Indes. C’est une espèce d’armoisin.

DAMARIN. s. m. Nom d’homme, Marinus, selon le Martyrologe de Baronius, & Amarinus, selon Monsieur Chasselain au vingt-cinquième de Janvier. Ce dernier est plus vrai. De Saint-Amarin, en changeant le t en d, s’est fait Sain-Damarin, pour Saint-Amarin.

DAMAS. Nom d’une ville très-ancienne & célèbre. Damascus. Elle est dans la Syrie, au pied du mont Liban, dans une plaine très-fertile & très-agréable, qui s’étend entre le mont Liban & les montagnes que l’Ecriture appelle Galaad. Damas est sur une petite rivière nommée par les anciens Chrysorroas. On ne sait quel fut le fondateur de Damas. Josephe, Antiq. Jud. L. I. c. 6. dit qu’elle fut bâtie par Us, fils d’Amram. D’autres disent que Damascus, fils de Mercure & de la Nymphe Alcimede, étant venu d’Arcadie en Syrie, y bâtit cette ville, à laquelle il donna son nom. D’autres veulent qu’elle l’ait pris d’un Géant nommé Ascus, qui ayant lié Denys, le jeta dans la rivière avec Licurge ; ou de ce que Denys poursuivit & atteignit là un certain Damascus, qu’il écorcha tout vif, parce qu’il avoir coupé les vignes. Enfin, l’on dit qu’elle a pris le nom d’un Prince nommé Damascus, qui y a régné. On peut regarder tout cela comme autant de fables, ou de sentimens avancés sans fondemens suffisans. Quoi qu’il en soit, Damas étoit déjà du tems d’Abraham, c’est-à-dire, environ deux mille ans avant J. C. Cette ville fut capitale de Syrie jusqu’à ce que Seleucus eut achevé de bâtir Antioche, qu’Antigonus avoit commencée, c’est--à-dire, jusqu’environ 300. ans avant J. C. Elle fut encore soumise aux Séleucides, & puis aux Romains. Omar, successeur d’Abubecher, la prit l’an 636. comme le marque Guillaume de Tyr, L. I. c. 2. Depuis ce tems-là elle a toujours été aux Musulmans, ayant passé des Sarrasins aux Sultans d’Egypte, auxquels les Turcs l’enlevèrent il y a près de 200. ans. Malgré tant de révolutions, elle est encore une des plus considérables de l’Orient. On y fait beaucoup de commerce, & ses soies, ses laines, ses prunes, ses raisins, ses eaux de senteurs, & ses lames d’épées la font connoître par-tout. Damas est une des premières villes où le Christianisme ait été porté. Saint Paul y alloit persécuter les fidèles environ deux ans après la mort de J. C. lorsqu’il fut renversé & converti en approchant de la ville. Dans la suite Damas fut une Métropole dépendante du Patriarche d’Antioche. Aujourd’hui le Patriarche Grec d’Antioche y réside, aussi-bien que le Beglierbey de la Phénicie ou de la Judée, dont elle est capitale. V. Thevenot, Voyage du Levant, P. II. c. 58. Coppin, Voyage de Phénicie, c. 25.

Il y a trois endroits de l’écriture, où le nom de cette ville est un peu différent en Hébreu de ce qu’il est communément. Car 1o. I. Paralip. XVIII. 5. & 6. elle est appelée non pas דמשק, Dammesek, à l’ordinaire, mais דרמשק, Darmetsek. 2o. Au 4e. L. des Rois, XVI. 10. elle est nommée דומשק, Dumetsek, quoiqu’il n’y ait point de Keri ou de variante dans ces endroits, ce sont apparemment des fautes de Copistes, qui ont d’abord ajouté un ו, & qui l’ont ensuite pris pour un ר, comme cela est arrive souvent.

Si l’on en croit le Géographe Étienne, Damas a tiré ce nom de son Fondateur Damascus, fils de Mercure & d’Alcimède ; & selon Justin, de Damascus, qui y régna. S. Jérôme dit que c’est de l’Intendant de la maison d’Abraham, nommé (Gen. XV. 2.) Éliézer Damesek ; mais il est bien plus vraisemblable qu’il faut dire Éliézer de Damas, & que cela signifie qu’il étoit de la ville ou du territoire de Damas.

Damas vient du mot Hébreu de cette ville דמשק, Dammesek, mais son origine & sa signification sont fort incertaines. Quelques-uns l’interprétent sac de sang, de דם, dam, sang, & שק, sak, sac ; mais ils varient sur la raison qui lui fit donner ce nom. Les uns disent que ce fut parce qu’il croissoit d’excellent vin dans son territoire, mais de bonne foi, que veut dire sac de vin ? Peut-être pourroit-on suivre ce sentiment, si l’on avoit nommé cette ville Tonneau de vin, Cuve de vin : mais un sac est-il un vase à mettre du vin ? Si donc ce nom vient de שק, sac, il n’y a pas d’apparence que דם, dam désigne le sang de la vigne, c’est-à-dire du vin. D’autres prétendent que Damas fut appelé sac de sang, à cause du sang d’Abel qui y fut répandu par Caïn ; mais cela est fondé sur le sentiment faux de ceux qui croient que le Paradis Terrestre & la terre voisine qu’habita Adam après en avoir été chassé, est le pays de Damas & les environs. La plus commune opinion des Orientaux, tant Chrétiens que Musulmans, est que Damas a tiré son nom de Dimschak ou Damaschk Éliéser, serviteur d’Abraham, & que c’est ce Patriarche qui en est le Fondateur. D’Herbelot. Dans Damas, nom de ville, le dernier a est long, & l’on fait sentir l’s finale.

Dans l’Écriture Damas se prend, 1o. Pour la ville de Damas, capitale & Métropolitaine de Syrie ; comme Gen. XIV. 15. II. des Rois, VIII. 5. 6. III. des Rois, X. 34. XI. 23. IV. des Rois, V. 12. VIII. 7. XIV. 28. XVI. 9. XIX. 15. Cant. VII. 4. Is. VII. 8. &c. Act. IX. 2. 3. XXII. 5. 10. XXVI. 12. Galat. I. 7. 2o. Pour la Province dont Damas étoit capitale, qui s’appelle Syrie de Damas, en Latin, Syria Damasci, & en Hébreu, ארם דמשק, Aram Dammesek, & quelquefois Damas tout court, comme III. des Rois, XX. 34. Amos, V. 27. II. Cor. XI. 32. 33.

Acier de Damas. V. Acier.

☞ DAMAS. s. m. Damascenus acinaces. Sorte de sabre fait d’un acier très-fin, d’une trempe excellente, & fort tranchant. Les premiers ont été faits à Damas. Mon sabre est un vrai damas.

Damas. s. m. Etoffe faite de soie, qui a des patries élevées qui représentent des fleurs ou autres figures. Damasceni operis pannus bombycinus. C’est une espèce de moire & de satin mêlés ensemble en telle sorte que ce qui n’est pas satin d’un côté, l’est de l’autre. L’élévation qui fait le satin d’un côté, de l’autre fait le fonds. Les fleurs ont le grain de satin, & le fonds a un grain de taffetas.

Elle est ainsi nommée, à cause qu’elle est venue originairement de Damas en Syrie. On fait de beaux ameublemens de damas de Gênes, de Lucques & de Venise : celui-ci est le plus exquis.

Damas cassart, est un damas dont les trames sont de fil ou de fleuret, & les chaînes de soie. Damasceni operis pannus, partim lineus, partim bombycinus.

Damas ou grand Caën. s. m. Nom que l’on donne à une sorte de linge ouvré qui se manufacture dans la basse Normandie.

Damas se dit aussi d’une espèce de prunes dont le plant nous est venu de Damas. C’est un fruit d’une médiocre grosseur, assez sucré, & qui quitte le noyau. Pruna Damascena.

☞ Il y en a de cinq ou six espèces, qui différent par la grosseur, la couleur, la figure, ou par le tems de leur maturité.

☞ Le damas violet, le rouge & le blanc sont au nombre des bonnes prunes, qui ont la chair fine, tendre & fondante, l’eau douce & sucrée, le goût assez relevé. Le damas noir hâtif a la chair aigrelette. Le damas musqué l’a seche ; plusieurs l’ont verreuse.

Damas, espèce de raisin dont la grappe est fort grosse & longue, le grain très-gros, long & ambré, qui n’a qu’un pépin. La Quint. Nous essayons, par le moyen de nos murs bien exposés, de procurer autant de chaleur qu’il en faut aux pergolèses & aux damas.

Ce mot de damas, dans toutes les significations qu’il a, se prononce ainsi ; le premier a a un son bref, le second a a un son obscur qui allonge la seconde syllabe, l’s finale ne doit point se faire sentir dans la prononciation. Il faut en excepter Damas, nom de ville, de la prononciation duquel nous avons parlé en son lieu.

DAMASAN. Petite ville de France dans le Bazadois, sur la frontière de l’Agenois, Election de Condon.

DAMASCÈNE. adj. Qui est de Damas. Damascenus. Ce mot n’est en usage en François que pour Saint Jean Mansur, qui étoit de Damas, & que nous nommons S. Jean Damascène, & quelquefois S. Damascène. S. Jean Damascène est le S. Thomas des Grecs. Le nom Arabe de sa famille, qui étoit considérable, étoit Mansur. Il vivoit vers le milieu du VIIIe siècle. Le P. Le Quien, Dominicain, a donné une belle édition des Ouvrages de S. Jean Damascène, à Paris 1712. avec des dissertations & de savantes notes. Il y a beaucoup d’autres Grecs qui ont porté le nom de Damascène en Grec & en Latin, comme l’a remarqué Léo Allatius au commencement de ses Prolégomènes sur les ouvrage de ce Saint ; mais, comme ils sont moins connus, ce nom n’est en usage ordinairement en François que pour ce Saint. Il ne faut pas le dire en général des habitans de Damas. Quelquefois, au lieu de S. Jean Damascène, on dit S. Jean de Damas.

Ce mot vient du Latin Damascenus, qui signifie, un homme de Damas.

Damascène. Partie de Syrie, Province de Syrie dont Damas étoit capitale. Damascene. C’étoit la même chose que la Cœlésyrie.

DAMASE. s. m. Nom d’homme. Damasus. Le Pape Damase, élu en 366. & mort en 384. condamna en 369. Ursace & Valens, Ariens, & les Apollinaristes en 377. Il y eut encore dans le XIe siècle un Pape de ce nom, qui mourut 25. jours après son élection.

DAMASÉE. adj. m. Linge fabriqué en façon de damas. On écrit & on prononce damassé. Voyez ce mot.

DAMASIEN. adj. qui n’est en usage que dans cette phrase ; les monts Damasiens : ce sont des montagnes d’Asie, vers la source des rivières de Hoang & de Kiang, qui s’étendent du nord au sud, entre la Chine & l’Inde de de-là le Gange. Damasii montes.

DAMASINE. s. f. Terme de Fleuriste. Anémone incarnate & blanche, panachée distinctement. C’est une des plus belles anémones qu’on puisse voir. Morin, Culture des fleurs.

DAMASONIUM. s. m. Plante qui pousse des feuilles semblables à celles du plantin aquatique, mais plus petites, attachées à des queues longues. Il s’élève d’entre elles des petites tiges de la hauteur de la main, rondes, vides, portant des fleurs ordinairement à trois feuilles disposées en rose. Il leur succède un fruit en étoile, composé de plusieurs pièces creuses, dont chacune renferme une ou deux semences oblongues. Ses racines sont menues, fibreuses, comme celles du plantin aquatique. Cette plante est détersive, astringente, rafraîchissante, & fait perdre le lait aux femmes, étant appliquée sur le sein.

DAMASQUETTE. s. f. Espèce d’étoffe à fleurs d’or & d’argent, ou seulement de soie, qui se fabrique à Venise, & se débite dans le Levant, particulièrement à Constantinople.

DAMASQUIN. s. m. Que l’on nomme plus ordinairement Rotte. Poids dont on se sert dans le Levant, particulièrement à Seyde.

DAMASQUINER, v. a. Terme de Fourbisseur & d’Armurier. Tailler ou ciseler le fer, en sorte qu’il reste plusieurs raies ou entailles de diverses figures dans lesquelles on enchâsse des filets d’or ou d’argent.

☞ Quand on veut damasquiner le fer ou l’acier, on le met au feu, pour lui donner le passe-violet, qui est ce qu’on appelle couleur d’eau : puis on dessine légèrement dessus avec un poinçon de cuivre jaune fort délié l’ornement qu’on veut figurer, & on le taille avec un couteau à tailler des limes.

Cela étant fait, on prend du fil d’or, on le conduit selon le dessein qu’on a formé, on l’enfonce proprement avec une touche de cuivre, on le fait revenir avec de l’eau forte : on prend une sanguine, pour abattre toutes les hachures, & on remet le fer ou l’acier au feu pour lui donner la couleur d’eau. Damasquiner une lame d’épée. Damasquiner le canon d’un fusil ou d’un pistolet. Encausto damasceno acinacem, fistulam ferream distinguere. Les cimeterres sont d’ordinaire damasquinés. Un étui à damasquiner, c’est un étui garni de fer pour travailler à cette sorte d’ouvrage.

Damasquiné, ée. part. Couteau damasquiné. Cuirasse damasquinée.

DAMASQUINERIE. s. f. L’Art de damasquiner.

DAMASQUINEUR. s. m. Celui qui damasquine. Pomey. Damascenus encaustes.

DAMASQUINURE. s. f. Travail de ce qui est damasquiné, ornement d’une arme damasquinée, ou d’une autre pièce de fer damasquinée. Damasceni artificii opus. On dit aussi damasquine.

DAMASSER, v. a. Fabriquer une étoffe ou du linge en façon de damas. Faire de petites figures sur du linge, comme des oiseaux, & autres. Linteum opere damasceno variare.

Damasser, chez les Vanniers, c’est former sur une pièce des ornemens semblables à ceux qu’on voit sur le linge damassé.

Damassé, ée. adj. Linge destiné ordinairement au service de la table, qui est à fleurs ou à personnages, où l’on remarque un fond & un dessein ; ainsi appelé, parce que le travail en est le même que celui du damas. Linteum opere damasceno variatum. Un service de table damassé. Une nappe damassée.

On appelle aussi une étoffe de soie damassée, celle qui paroît de damas d’un côté, & qui a un envers tout uni. Pannus bombycinus opere damasceno distinctus.

Damassé, se dit aussi substantivement pour dire du linge damassé. Un service de damassé. Ac. Fr.

☞ DAMASSIN. s. m. Petit damas moins chargé de chaîne & de trame que les damas ordinaires.

DAMASSURE. s. f. L’ouvrage du linge damassé. Operii damasceni artificium. Cette damassure est fort belle, fort agréable.

DAMASTÈS. s. m. Géant fameux par sa cruauté, surnommé Procuste, parce qu’il obligeoit ses hôtes de s’égaler à la mesure de ses lits.

DAMATER. s. f. Nom de la Prêtresse de Cybèle. Damatris. Voyez Damias & Damie. Quelques-uns veulent qu’on dise Damiatrix, au lieu de Damatris. Voyez sur ce nom Scaliger, dans ses notes sur Festus, Alexander ab Alex. Genial. dier. VI. 8. Panvin, de Civ. Rom. C. 37. Gruter. De vet. Jur. Pont. IV. 8.

DAMATRIUS. s. m. Dixième mois de l’année chez les Thébains & les Béotiens. Damatrius. Junius, dans son livre de anno & mensibus, le confond mal-à-propos avec le mois d’Octobre ; il répondoit au mois de Juin & partie de Juillet, & tiroit son nom de Δημήτηρ, en Béotien Δαμάτηρ, qui est celui de Cérès en Grec, parce que c’est dans ce mois qu’elle donne ses biens, que l’on fait la récolte des blés, dont ils rendoient grâces à cette Déesse.

DAMAVEND. Ville d’Asie, autrefois dans la Province d’Adherbigiane en Medie, aujourd’hui comprise dans la Province nommée Gebal ou Iraque Persienne.

DAMBEA. Province, ou Royaume d’Afrique, qui fait partie de l’empire d’Abyssinie. Dambea. Vossius & les nouvelles Relations le placent vers les sources du Nil. Quelques-uns disent, selon Maty, que le Nil passe dans ce Royaume, qu’il y a même sa source ; mais la carte faite sur le pays par les PP. Manuel d’Almeida Alfonso, Mendez, Pero Pays, & Jeronimo Lobo, Jésuites, qui découvrirent les sources du Nil vers l’an 1629. & la relation qu’en a donnée le dernier, placent le Royaume de Dambea au nord du Nil, qui coule d’abord d’Occident en Orient, & les sources du Nil ne sont point dans le Lac de Dambea, mais à cinq journées de chemin. Voyez Nil. M. Corneille dit Dambée ou Dambea, mais la Traduction Françoise de la relation du P. Jérôme Lobo, & les autres disent Dambea & non Dambée.

Le lac de Dambea, c’est un grand lac dans la Province de Dambea, lequel a vingt-cinq lieues de long du Sud au Nord & environ quinze dans l’endroit où il est le plus large. Il fait plusieurs Iles, les unes désertes, les autres habitées. Le Nil, à cinq journées de ses sources, entre avec rapidité par une des extrémités de ce lac, & s’ouvrant le passage dans le vase du lac, en ressort par un autre endroit, après avoir traversé un quart de lieue de sa largeur.

☞ DAME. s. f. Titre autrefois très-distingué parmi nous, & qui ne s’accordoit qu’aux femmes du premier rang. Celles des hommes les plus qualifiés, portoient simplement le nom de mademoiselle. Domina, illustris matrona. On le donna ensuite aux femmes qui possédoient quelque Seigneurie, puis à toutes les femmes de qualité, aux femmes des gens de robe, des financiers, & par un abus singulier, que l’usage autorise, cette qualification s’est tellement multipliée & avilie, qu’on la prodigue aux femmes des simples bourgeois, & à toutes celles qui veulent la prendre.

☞ Ainsi ce nom marque quelquefois seigneurie, droit d’autorité sur des vassaux. C’est ainsi que l’on dit : cette veuve est dame d’un tel château, d’un tel bourg, d’un tel marquisat. Alicujus loci domina.

☞ C’est quelquefois un simple titre que l’on donne par honneur aux femmes de qualité. Dame à Carreau, qui a droit de se faire porter un carreau à l’Eglise, & à qui l’on porte la robe. On dit de la femme d’un homme qualifié : haute & puissante Dame ; les Dames de la Cour.

☞ Ce nom est quelquefois synonyme à maîtresse de la maison. Je voudrois parler à la Dame de céans. Hera.

☞ Quand on le dit des personnes de la plus basse condition, c’est comme une espéce de titre qu’on leur donne, & qu’on joint ordinairement à leur nom, soit en parlant d’elles, soit en parlant à elles. Dame Françoise, Dame Jeanne.

Dame se prend quelquefois généralement pour toutes les femmes d’un état. Femina. Les Dames Romaines couperent leurs cheveux dans une nécessite publique pour faire des cordages de navires. Les Dames de Lacédémone excitoient leurs enfans à combattre vaillamment pour la patrie.

☞ Dans un sens à-peu-près semblable, nous étendons ce nom à toutes les femmes & à toutes les filles d’une condition un peu honnête, quoiqu’il soit particulièrement réservé à celles qui par leur naissance ou par leur mérite, sont distinguées des autres. Plaire aux Dames, aimer les Dames. Les Dames sont la plus belle moitié du monde. Le goût des Dames attire d’ordinaire celui du reste des auditeurs. Corn. Les anciens Chevaliers soutenoient l’honneur des Dames. C’est dans ce sens qu’on dit Dame sage, Dame vertueuse, prude, &c.

☞ En courant la bague, on dit que la première course est pour les Dames, & elle n’est point comprise dans le nombre de celles qu’on doit courir pour le prix. Prolusio equestris.

☞ Voilà pour les Dames, c’est-à-dire pour faire honneur aux Dames. C’est la même chose au jeu de paume, où l’on appelle donner les Dames, le premier coup qui se sert sur le toît, qui n’est compté pour rien, ainsi que les autres balles qu’on sert ensuite, & qui sont balles de cérémonie, jusqu’à ce que celui qui sert dise, tout de bon. Prolusio pilaris.

Autrefois les Dames présidoient aux Tournois. Nos Dames Françoises ont été peu parées pendant huit à neuf cents ans : leur coiffure étoit simple, peu de frisure, nulle dentelle, du linge uni, mais du plus fin ; leurs robes étoient fort serrées, & couvroient tout-à-fait la gorge. Les Veuves étoient habillées à-peu-près comme les Religieuses. Cet air de modestie continua jusqu’à Charles VI, sous son règne les Dames commencerent à se découvrir les épaules ; sous Charles VII elles prirent des pendans d’oreille, des coliers & des bracelets. Sous François premier elles furent appelées & introduites à la Cour. Par un rafinement de politique, Catherine de Médicis y établit des Filles d’honneur, mais la triste aventure d’une des Filles d’honneur de la Reine Mere Anne d’Autriche, aventure assez connue par le fameux sonnet de l’Avorton, donna lieu à un nouvel établissement, & l’on substitua douze Dames du palais aux douze Filles d’honneur.

☞ On appelle Dame d’honneur, Dame d’atours, Dame du palais, des Dames revêtues de certaines charges qui leur donnent ces sortes de titres chez la Reine & chez les Princesses. Dame d’honneur est la première Dame de la maison & de la suite de la Reine. Honoraria Reginæ affecta. Dame d’atours, celle qui prend soin de la parer. Reginæ cultui, mundoque præfecta. Dame du palais. Palatio præfecta. On peut ajouter à ces expressions, illustris matrona, femina.

Ce mot vient de Dominus & Domina, dont on a fait Dam, titre d’honneur, qu’on donnoit autrefois aux hommes aussi-bien qu’aux femmes. Mén. Voyez Dam, ci dessus.

Borel dit que quelques-uns sont venir le nom de Dame de l’Hébreu dama, qui signifie silere, parce qu’il est de la gravité des Dames de parler peu. Chorier croit que Dame & dama, comme l’on prononce en Dauphiné, vient du Grec δάμαρ, qui signifie une femme mariée. Avant Chorier, Guichard avoit été de ce sentiment. Le P. Papebroch ne veut point que l’on dérive le mot Dame du Latin Dominus, Domina. Il croit que c’est plutôt un mot Franc ou François originairement. Voyez Acta Sanct. April. Tom. I. p. 159.

Dame est aussi un titre d’honneur qu’on donne par excellence à la Vierge Marie, qu’on appelle absolument Notre-Dame. Nostra Domina. Les Eglises de Notre-Dame, l’Office de Notre-Dame, le Salut de Notre-Dame, les Fêtes de Notre-Dame, la Notre-Dame de Mars, de mi-Août. Notre-Dame signifie aussi souvent une Eglise de la Sainte Vierge, une Eglise consacrée à Dieu sous l’invocation de la Sainte Vierge. Notre-Dame de Paris, Notre-Dame d’Amiens, Notre-Dame de Chartres, ce sont les Eglises Cathédrales de ces villes. Il est certain que Notre-Dame de Paris a été bâtie sous Childebert, & que ce prince n’en a commencé le bâtiment que vers les dernières années de son règne. Baudelot. La Nef de Saint Etienne de Bourges, la Croisée de Notre-Dame d’Amiens, le Chœur de Beauvais, & le Portail de Rheims, sont les plus beaux morceaux d’Architecture qu’il y ait en fait d’Eglises Gothiques.

Il y a de même plusieurs Ordres Religieux qui portent le nom de Notre-Dame. Les filles de l’Assomption de Notre-Dame. Voyez Haudriette. Notre-Dame de la Victoire. Voyez Victoire. Notre-Dame de la Merci, Voyez Merci. Les Religieux Hospitaliers de la Charité de Notre-Dame. Voyez Charité. Notre-Dame de Gonzagues. Voyez Gonzagues. Notre-Dame du Refuge. Voyez Refuge. Notre-Dame de Misericorde. Voyez Miséricorde. Notre-Dame du Rosaire. Voyez Rosaire. Notre-Dame de Lorète. Voyez Lorète.

Dame, est aussi un nom qu’on donne aux Religieuses Professes dans les Abbayes, & aux Chanoinesses établies en plusieurs endroits. Illustres moniales. Les Dames de Longchamp. Le Pont-aux-Dames. Le Fort-aux-Dames : c’est une prison auprès du Grand-Châtelet, qui dépend des Dames de Montmartre. Les Dames Chanoinesses de Remiremont en Lorraine. Les Dames du Chœur, à la différence des Sœurs Converses, ou Laies

Pauvre Dame. Nom que l’on donne aux Clarisses ou Religieuses de Sainte Claire, qui suivoient la Règle de Saint François, réformée par Grégoire IX.

Dame-de-la-hache. Les Dames-de-la-hache, ou la compagnie des Dames-de-la-hache, ou du Passe-tems, à Tortose en Catalogne. Espèce de Chevalerie de Dames. Voyez Hache.

Dame, en termes de Médecine, ou plutôt de rapport de Matrones, est une petite pellicule qu’on a cru autrefois être la vraie marque du pucelage, que les Matrones appellent la dame du milieu, les Latins, Hymen. Mais on a depuis découvert qu’elle ne se trouvoit pas aux filles du plus bas âge, & que ce n’étoit qu’une union des caroncules qui sont près de l’orifice externe de la matrice.

Dame. Terme d’Astrologie judiciaire, qui se dit des planètes féminines qui dominent dans quelque endroit d’un thème céleste. Cet homme a la Lune dame du milieu du ciel, & Vénus dame de l’ascendant.

Dame ou Demoiselle. Terme de fortification. C’est une pièce de bois ayant des bras qu’on tient à deux mains pour battre la terre ou le gazon qui se mettent dans un mortier.

☞ C’est aussi un instrument de Paveurs. Voyez Demoiselle.

En termes de mines, une terre qui reste isolée entre les fourneaux lorsqu’ils ont joué, s’appelle aussi dame.

Dame. Terme d’Architecture. On appelle ainsi dans un canal que l’on creuse certaines digues du terrain même, qui étant laissées d’espace ce espace, y font entrer l’eau, comme on le juge à propos, & empêchent qu’elle ne gagne les travailleurs. Moles terræ.

On donne le même nom de dame à certaines petites langues de terre qui sont couvertes de leur gazon, & qu’on laisse de distance en distance. Elles servent de témoins de la hauteur des terres qu’on a fouillées, afin d’en toiser les cubes. Dame en ce sens vient du Flamand dam, qui signifie chaussée, & qui entre dans la composition du nom de plusieurs villes du Pays-Bas, comme Amsterdam, Roterdam, &c.

Dame, se dit aussi en plusieurs sortes de jeux. Regina. Aux Cartes on dit, le Roi, la Dame & le Valet.

☞ La Dame est la carte sur laquelle est peinte la figure d’une Dame, & l’on donne à ces figures le nom de Dame de cœur, Dame de pique, Dame de trèfle & de Dame de carreau.

Au jeu du Hoc, la Dame de pique & le Valet de carreau font Hoc.

Dame, est aussi un petit palet rond ou une petite tranche platte & cylindrique, d’ivoire, d’ébene ou de bois, qui sert à jouer sur un tablier ou un trictrac. Scrupi lusorii. Le jeu de dames se fait avec douze dames blanches & douze noires sur le tablier. Scruporum ludus. Celui du trictrac avec quinze dames de chaque sorte dans le revers du tablier avec deux dez. On y joue diversement, à dames rabattues, au cocquimbert, à toutes tables, ou au simple trictrac.

Dames rabattues. Nom d’un jeu de tables des plus faciles. Le jeu de dames rabattues se joue dans un trictrac avec quinze dames de chaque couleur, deux cornets & deux dez. On ne joue que deux aux dames rabattues. Chacun met toutes ses dames dans la table du trictrac la plus près du jour, & fait six piles ou tas de ses dames sur toutes les flêches qui sont de son côté. Sur chacune des trois premières flêches proche du jour il faut mettre deux dames, & sur chacune des trois autres flèches jusqu’à la bande de séparation il faut mettre trois dames, qui, avec les six précédentes, composent les quinze de chaque joueur. On met toutes ces dames l’une sur l’autre, & non point accouplées en manière de case. À chaque coup de dé on joue deux dames selon le nombre qu’on amené ; mais on ne peut prendre l’as que sur la première case, le deux, sur la deuxième, le trois sur la troisième, &c. Quand on a doublet, on n’en joue qu’un, & l’adversaire joue l’autre, mais on garde le dé. Tout ce qui n’est point joué par l’un des joueurs, l’autre le joue. Quand on a abattu toutes ses dames, on leve à chaque coup deux dames, dans le même ordre qu’on les a jouées, & celui qui le premier a levé toutes ses dames, a gagné la partie.

Les dames, au jeu de trictrac, se nomment aussi tables. Une dame aventurée, au jeu de trictrac, est une dame qu’on avance d’abord beaucoup toute seule, sans être assuré de la pouvoir couvrir promptement.

Au trictrac, une dame couverte est une dame qui n’est pas seule sur la flèche, qui en a une autre avec elle. Qui dit dame couverte, dit case. Qui dit dame découverte, dit demi-case.

On appelle au trictrac une dame découverte, celle qui est seule sur une lame : s’il y en a deux accouplées, elles sont couvertes, ferment le passage, & font un obstacle pour battre une dame plus éloignée.

Dame passée en retour, c’est une dame passée dans le jeu de l’adversaire. Dame passée quant au plein, est une dame qui ne peut plus servir à faire le plein parce qu’elle se trouve au-delà des flèches vides, qu’il faut garnir pour le faire.

Dame surnuméraire, est une dame qui se trouve dans une case déjà faite, qui est la troisième sur une flêche.

Dame, au jeu des échecs, s’appelle autrement la reine. Regina. C’est la seconde pièce du jeu, & la principale pour le mouvement, car elle a celui du fou & de la tour. Le chevalier donne échec au roi & à la dame. Il joue mieux que vous, il vous donneroit la dame.

On dit en ces jeux, aller à dame, quand un pion d’un côté peut parvenir au dernier rang des cases du parti opposé.

On dit proverbialement en ces jeux, dame touchée, dame jouée ; pour dire, que dès qu’on a touché une pièce, on est obligé de la jouer. On dit aux échecs, dame blanche a le cul blanc ; pour dire, que le roi blanc doit être placé d’abord sur une case noire.

On appelle aussi une Dame faite à la hâte, une personne qui prend la qualité de Dame, qui fait la Dame, quoiqu’elle ne le soit point.

Dame. Sorte d’interjection dont se sert le peuple pour marquer de la surprise & de l’étonnement, ou pour mieux affirmer quelque chose. Papæ. Dame ! je n’entends pas le Latin. Mol.

Dame-Dame. s. m. Sorte de fromage entre le lèbe & la côte-rouge.

Dame-Jeanne. Nom que les matelots donnent à une grosse bouteille de verre couverte de natte. Lagena amplior, capacior. On le dit familièrement d’une grosse bouteille qui sert à garder ou à transporter du vin ou autre liqueur.

Dame (Bonne). Plante. Voyez au mot Bon ci-dessus.

☞ DAMEGAN, ville d’Asie, aujourd’hui capitale d’un petit pays nommé Cornus, resserré entre le Ghilan & le Korasan.

DAMEL. Petit Royaume d’Afrique, voisin de Corée, un des départemens du Sénégal.

DAMELOPRE. s. m. C’est une sorte de bâtiment dont on se sert en Hollande pour naviger sur les rivières & les canaux.

☞ DAME-MARIE. Domna Maria. Bourg de France dans la Brie, sur le chemin de Montereau-faut-Yonne à Provins, Généralité de Paris, Élection de Montereau.

DAMEN. s. m. Terme de Relation. Second mois des habitans de l’Ile Formose. Voyez la Description de Cette Isle qui parut à Amsterdam.

DAMER. v. a. Terme de jeu de dames, se dit d’une pièce qui a pu parvenir à l’extrémité opposée du tablier, c’est-à-dire sur la bande d’en haut de l’adversaire ; on la couvre d’une autre dame pour la distinguer des dames simples, & c’est ce qu’on appelle dame damée ; alors elle va & prend en tout sens, à droite à Gauche, en avant & en arrière. Scrupos geminare. Aux Echecs, c’est changer un pion avec la meilleure pièce qu’on a perdue, quand il a été poussé jusqu’aux dernières cases du côté opposé. On dit proverbialement & figurément, damer le pion à quelqu’un, pour dire renchérir sur lui, avoir avantage sur lui, le supplanter : c’est par une métaphore tirée du jeu des Echecs, qui s’est pourtant tournée en un sens contraire.

Damer. En termes d’Architecture, c’est donner un demi-pied de pente. Abrégé de Vitr.

Damé, ée. part. Il a la signification de son verbe, en Latin comme en François.

DAMERET. s. m. On appelle ainsi un jeune homme qui fait le beau, un galant de profession qui affecte de s’attacher à plaire aux Dames. Concinnitatis nimius affectator. N’allez pas peindre Brutus galant, & Caton dameret. Boil.

Il est d’autres maris volages, infidèles,
Fatigans Damerets, tyrans nés des ruelles.

☞ DAMERI. Bourg de France, en Champagne, sur la Maine, entre Ay & Châtillon, renommé par les bons vins que son territoire produit. Dameriarum.

DAMGARTEN. Petite ville de la Poméranie Royale, en Allemagne, à l’embouchure de la rivière de Rekenitz, dans le Comté de Bardr. Damgardia.

DAMGILLON. La Chapelle Damgillon, ou Dangillon. Petite Ville du Berry. Capella Domini Gillonis. Cette ville a pris son nom d’un Seigneur de Sully nommé Gillon, qui en jeta les premiers fondemens : ainsi ce nom est composé de Dom, ou Dam, qui vient de Dominus, Seigneur, & Gillon ; d’où il suit qu’il faut dire & écrire Damgillon, & non pas Angillon, comme a fait du Chêne dans ses Antiq. des Villes de Fr. P. I. C. 113. & après lui M. Corneille, ni d’Angillon, comme écrit encore celui-ci. On peut aussi écrire Dangillon, que l’usage approuve ; mais le vrai nom est Damgillon.

DAMIANISTE. s. m. & f. Nom de secte. Damianistæ. Les Damianistes étaient une branche des Acéphales Sévérites. Ils recevoient le IVe. Concile avec les Catholiques, mais rejetoient toute différence de personnes en Dieu, n’admettant qu’une seule nature incapable d’aucune distinction. Ils ne laissoient pas d’appeler Dieu, Pere, Fils, & Saint Esprit. C’est pour cela que les Sévérites Pétrites, autre sectes d’Acéphales, les appeloient Sabelianistes, & quelquefois Tétrédites. C’est Nicéphore Calliste qui nous apprend ceci, L. XVIII. C. 49.

Les Damianistes furent ainsi nommés de Damien, Damianus, Evêque, qui fut leur chef. Nicéph. cité par Baronius à l’an 535. n. 14.

DAMIANISTE. s. f. Nom que l’on donna au commencement aux Clarisses ou Religieuses de Sainte Claire, parce qu’elles avoient pris leur origine du Monastère de S. Damien, où vivoit Sainte Claire sous la direction de S. François. P. Héliot. Tom. VI. C. 25. Damianista. Innocent IV. par un Bref du 15. Avril 1253. défendit au Général des Frères Mineurs & à tous les autres, de contraindre les religieuses Damianistes à l’observance d’une autre règle que celle qui avoit été donnée par Saint François. Id.

DAMIAS. s. f. Prêtresse de la bonne Déesse, ainsi nommée parce que cette Déesse s’appeloit Damie. Damias. C’est ainsi qu’on lit dans Festus. Denys Godefroy, & après lui M. Dacier, disent que d’autres lisent Damiatrix. Vigénere en effet lit ainsi, & d’autres encore, selon Godefroy, Demiatrix. V. Damie.

☞ DAMIATE. Corneille en fait une petite ville de France, dans le Languedoc, Diocèse de Castres. Dans le dénombrement de la France ce n’est qu’un village.

DAMIE. s. f. Surnom de la bonne Déesse c’est-à-dire, de Cybèle ou de Maïa, comme dit M. Dacier, Damia. Ce nom est Grec, & vient de δῆμος, & selon le dialecte Dorique δᾶμος, peuple. De-là δήμιος ou δάμιος, public.

☞ Ce surnom fut donné à Cibèle par antiphrase, si l’on en croit Festus, qui dit positivement que le sacrifice que l’on faisoit à cette Déesse se nommoit Damium, de que ces noms étoient pris du mot Grec δαμόσιον pour δημόσιον, qui signifie public, pour exprimer par contre-vérité, celui de tous les sacrifices qui étoit le moins public & le plus secret, car on ne sacrifioit à la bonne Déesse que dans des maisons particulières, portes & fenêtres fermées, sans qu’il fût permis à aucun homme d’être présent au sacrifice, & il étoit défendu aux femmes, qui seules pouvoient y assister, de révéler ce qui s’y passoit. C’est peut-être pour cela qu’on a si peu de connoissance de ce qui regarde la bonne Déesse.

Mais M. Dacier, dans ses notes sur cet Auteur, prétend qu’il se trompe ; que ce n’est point par contre-vérité que ce sacrifice se nommoit ainsi, mais parce qu’il se faisoit pour le peuple ; & il cite sur cela Cicéron, qui écrit à Atticus, L. I. Ep. 10. Je crois que vous avez appris que pendant que l’on faisoit le sacrifice pour se peuple chez César, il y entra un homme en habit de femme : il allègue aussi le Glossaire Latin & Grec, qui définit ce sacrifice, un sacrifice qui se faisoit à l’air, en lieu découvert, exposé à l’air.

☞ Quelques-uns disent que cette Damie étoit une Dryade, femme de Faune, qui fut si chaste & si retirée, qu’elle ne vit jamais ni n’entendit aucun homme que son mari : de-là venoit ce grand soin d’exclure les hommes de ses fêtes, & de voiler même dans la chambre où on les célébroit, tout ce qui pouvoir avoir la forme de mâle, peinture, gravure, sculpture, &c. les femmes seules magnifiquement parées, se donnoient toute sorte de licence pendant neuf jours & neuf nuits, dansant, chantant, & faisant tout ce qui leur plaisoit.

DAMIEN. s. m. Nom d’homme. Damianus. S. Côme & Saint Damien étoient frères & Médecins, ils naquirent à Egée, ville d’Arabie, & furent martyrisés sous l’Empire de Dioclétien & de Maximien. L’Eglise fait la fête de S. Damien le 27. de Septembre.

Damien. Ordre, ou Chevaliers de S. Côme & de S. Damien Voyez Côme.

Damien. Nom d’homme. Damianus. Ermites de Saint Damien. Sancti Damiani Eremitæ. Les Célestins ont porté ce nom au commencement de leur Ordre. P. Héliot, T. VI. C. 23.

DAMIER. s. m. Echiquier, tablier divisé en 64. carreaux noirs & blancs, qu’on appelle cases, & sur lesquels on joue aux échecs & aux dames. Alveolus lusorius.

On dit que ce mot se dit du livre des Inspecteurs des troupes & de ceux des Colonels, où sont les noms des Soldats. Ce livre a été apparemment nommé de la sorte, parce qu’il est communément quarré comme un damier.

Damier Terme de Conchyliologie. Espèce de coquillage marin marqueté de petits carrés de différentes couleurs comme un jeu de dames. Deux damiers à bandes jaunes. Gersaint. Deux grands damiers à bandes jaunes & autres volutes. Id.

DAMIETTE. Ville maritime d’Egypte, sur le bras le plus oriental du Nil. Thamiatis, Damiata, Damieta. Cette ville est grande, marchande, peuplée. Damiette s’est agrandie des ruines de Peluse, qui étoit vis-à-vis de l’autre côté du Nil. Les Croisés ont pris deux fois Damiette ; en 1218. ils l’assiégerent la première fois, & l’année suivante ils la forcèrent. En 1221. elle fut rendue au Sultan. En 1249. S. Louis la reprit après deux jours de siége ; mais ayant été fait prisonnier en 1250. il la rendit pour sa rançon. Les Infidèles la brûlèrent, pour empêcher les Chrétiens de s’en emparer de nouveau ; mais elle s’est rétablie, à cause de la commodité de la rade. Damiette, avant que les Musulmans s’emparassent de l’Egypte, avoit un siège Archiépiscopal, sous le Patriarchat d’Alexandrie.

DAMITES s. m. pl. ou DAMITONS. s. f. pl. Toiles de coton qui se fabriquent dans l’Île de Chypre.

DAMIUM. Sacrifice à la bonne Déesse. Voyez Damie, & Vigenere, Annot. sur Tite-Live p. 809.

DAMMA. Voyez DUMMERZÉE.

DAMMARTIN ou DAMP-MARTIN. Dominium Martini, Castrum Domini Martini, Dominus Martinus, Dammartinum. Bourg considérable de France avec titre de Comté. Il est dans l’Île de France, entre Meaux & Senlis.

DAMMIN. Voyez Dommim.

DAMNA. Quelques-uns, comme Ziéglérus & les Desmarais, disent Dimna, Dimnach. C’est la prononciation Hébraïque. Damna. C’étoit une ville de la Tribu de Zabulon, qui fut donnée aux Lévites de la famille de Merari. Jos. XXI. 34. 35. Les Septante en cet endroit ni le I. des Paral. C. VI. n’en parlent point.

דשן, d’où pourroit venir דמנח, Dimnach, signifie en Hébreu fumier.

DAMNA. Voyez Delmino.

DAMNABLE, adj. m. & f. (On n’y prononce pas l’m, non plus que dans tous les dérivés du verbe damner ; mais elle allonge la première syllabe.) Qui peut attirer la damnation ; faire mériter les peines éternelles de l’enfer. Damnandus. Action, doctrine damnable.

L’autre pour s’exempter d’un rigoureux devoir,
Met ces loix au-dessus de son foible pouvoir,
Et suivant de Calvin les damnables maximes,
A l’Auteur de son être il impute ses crimes.

Nouv. ch. de Vers.

☞ Dans une signification plus étendue, damnable se dit de ce qui est pernicieux, détestable. Dessein, entreprise damnable.

DAMNABLEMENT. adv. D’une manière damnable. Damnandum in morem. C’est un malheureux qui a damnablement abusé de la confiance publique.

DAMNATION. s. f. Peine éternelle de l’enfer, punition des damnés. Sempiterna in improbos constituta à summo Judice supplicia. Sur peine de damnation. C’est un défaut universel que de prononcer des arrêts définitifs sur le salut & sur la damnation des autres. S. Evr.

DAMNER. v. a. Condamner aux peines éternelles de l’enfer. Aliquem æternis suppliciis addicere. Le mauvais riche a été damné pour n’avoir pas assisté le Lazare. On se fait honneur de damner les autres de plein pouvoir mais l’on ne témoigne pas la même ardeur dans l’observation de la morale de Jésus-Christ. Il y a si peu de plaisirs au monde, qu’ils ne valent pas la peine de se damner. B. Rab.

Dans la Chaire jamais n’introduis la satire,
Et de peur de damner ne vas point faire rire :
Ne vas point, Casuiste ignorant & chagrin,
Damner pour un ruban ton innocent prochain. Vill.

Damner, signifie hyperboliquement & dans le style familier, importuner, tourmenter excessivement. Vous me faites damner. Vous ferez damner cet homme-là à force de plaider. Le serment ordinaire des Gascons est, Dieu me damne. Dieu me damne, voilà son portrait véritable. Mol.

Rabelais a dit proverbialement, vous vous damnerez comme une serpe, c’est-à-dire, vous vous précipitez aveuglément la tête la première dans l’enfer, parce que quand une serpe tombe, le fer, qui en est la principale partie, tombe le premier, à cause de sa pesanteur.

Damner. Ce mot signifioit autrefois condamner. On disoit aussi damnement & damnation pour condamnation.

Damné, ée. Part. pris quelquefois substantivement. Æternis suppliciis addictus. Souffrir comme une ame damnée, comme un damné. Dieu ne se plaît point aux supplices des damnés ; il ne se plaît qu’en l’ordre de sa Justice, qui les punit, & qui a réglé leurs peines. M. Esp.

......Le funeste lieu
Que réserve aux damnés la Justice de Dieu. Malherbe.

On appelle figurément une ame damnée, un homme entiérement dévoué à toutes les volontés d’une personne puissante. Ce valet est l’ame damnée de son Maître. On le dit aussi d’un méchant homme. Homo nequam. Ce Procureur est l’ame damnée du Palais.

Il faut remarquer que le mot de damné signifioit autrefois condamné en Justice, soit civilement, soit criminellement ; on le trouve encore en cette signification en plusieurs endroits de la Coutume de Normandie : & dans un plaidoyer de l’Université, il est dit, que par les Conciles de Constance & de Bâle avoient été extirpés, damnés & abolis les Annates, déports de Bénéfices, comme abusives exactions.

Damnée (Terre). Damnata terra. En termes de Chimie, c’est la même chose que caput mortuum ; je veux dire, c’est toute la terre, toute la masse qui demeure au fond de la cornue, après qu’on a tiré par le feu tous les autres principes d’un corps.

DAMNIO. Voyez DELMINO.

DAMOISEAU, DAMOISEL. s. m. Jeune Gentilhomme qu’on appeloit ainsi avant qu’il fût Chevalier. Dans l’Amadis, Noranfel demandant à être reçu Chevalier, est appelé Damoisel. Ce nom se donnoit non-seulement aux fils des Chevaliers & des Barons, mais même aux fils ses Rois. Ainsi on trouve dans l’Histoire Damoisel Pepin, Damoisel Louis-le-Gros, le Damoisel Richard Prince de Galles. On appelle aussi Damoiseau un Seigneur moins considérable par rapport à un plus considérable. Pasquier dit que Damoiseau est un diminutif de Dam, comme Damoisel l’est de Dame. Voyez Dam. La qualité de Damoiseau est fort ordinaire en Gascogne. Ceux qui ont possédé la Seigneurie de Commerci l’ont eue sous le nom de Damoiseau, on les appelle encore ainsi aujourd’hui. Damoiseau de Commerci. Voyez M. de la Roque, Traité de la Noblesse.

Ce mot vient de Domicellus ou Domniceilus, diminutif de Dominus, quasi parvus Dominus. On les a aussi appelés Domengers & Ecuyers. Du Cange. On trouve aussi Doncillus pour Domicellus.

Damoiseau étoit autrefois un titre de Seigneurie, aussi-bien que celui de Vidame. L’un & l’autre ne sont plus guère en usage.

M. de Marca, dans son Hist. de Béarn. L. VI. C. 24. dit que la Noblesse de Béarn se divise en trois corps ; les Barons, les Cuers, & les Damoiseaux, Domicellos, qu’on appelle Domengers en ce pays. Les fils des Rois de Danemarck & ceux de Suède ont porté le même titre, comme il paroît par l’Histoire de Danemarck d’Isaac Pontanus, L. VII. & VIII. & par Henri d’Upsal, Hist. Suec. L. III. Des fils des Rois ce titre passa aux fils des Grands Seigneurs & des Barons, & enfin aux fils des Gentilshommes qui n’étoient point encore Chevaliers.

Damoiseau, se dit aussi ironiquement d’un homme qui fait le beau, qui affecte trop de propreté ; un galant de profession. Nimiæ concinnitatis studiosus affectator, compositus, calamistratus muliebriter.

Qui voyant arriver chez lui le Damoiseau,
Prend fort honnêtement ses gants & son manteau.

Dit Molière, en parlant d’un mari corrunode, dans l’Ecole des femmes.

Il est des Damoiseaux dont l’œillade amoureuse
Accompagne toujours la phrase précieuse. Sanlecque.

DAMOISEL. s. m. Voyez le premier article de Damoiseau.

DAMOISELLE. s. f. Vieux mot qui signifie fille noble. Nobilis femina. Il ne se dit plus qu’en terme de Pratique, & dans les Actes publics. Partout ailleurs on du Demoiselle. Voyez ce mot.

Damoiselle. Terme de Marine. Voyez Lisses de porte-haubant.

DAMOT ou DAMOUT. Voyez Damut.

DAMPIERRE. Nom de lieu. Il y a Dampierre dans l’Ile de France, & Dampierre dans le pays d’Aunis.

☞ Il y a aussi plusieurs Villages en Champagne nommés Dampierre.

DAMREMY ou DOMREMY-la-Pucelle. Dam-Remigium. Village du Duché de Bar, fameuse pour avoir été la patrie de Jeanne d’Arc, dite la pucelle d’Orléans. Damremy est sur la Meuse, entre Neufchatel & Vaucouleurs. Maty, Corn.

DAMVILLE. Gros bourg de France dans la Haute-Normandie, sur la rivière d’Iton, dans le Diocèse d’Evreux. Damville fut érigé en Duché-Pairie en 1610. Il appartient à M. le Comte de Toulouse, Amiral de France.

DAMVILLIERS. Petite ville du Duché de Luxembourg, enclavée dans la Lorraine. Damvillerium. Damvilliers, qui est entre Verdun & Montmedy, fut pris par les François en 1637. & cédé à la France par la paix des Pyrénées. Ils en démolirent les fortifications en 1673. Hoffman, Maty, Corn.

DAMUT, DAMOT ou DAMOUT. Royaume de l’Abyssinie en Afrique. On y met une ville capitale du même nom. Maty, Corn.

DAN.

DAN. L’une des douze Tribus des Israëlites, qui étoit enclavée dans celle de Juda, & avoit à l’orient la même Tribu, à l’occident les Philistins, ou la mer méditerranée, au midi la Tribu de Siméon, au septentrion celle d’Ephraïm. Ezéchiel, XXVII. 19. dit que les Israëlites de la Tribu de Dan travailloient bien en fer, & qu’ils en trafiquoient à Tyr, aussi-bien que de casse & de cannelle.

Dan étoit aussi une ville nommée autrement Laïs. C’étoit son premier nom qu’elle avoit avant que les Israëlites s’en emparassent. Elle étoit située au nord de la Terre-Sainte, vers le Liban, dans un pays fort abondant qu’on appeloit Rohob ; Jos. XIX. 47. Jug. XVIII. tout entier. II. des Rois, III. 10. C’est là que Jéroboam mit un des veaux qu’il fit adorer, III. des Rois XII. 29. 30. Amos VIII. 14. Comme cette ville étoit à l’extrémité de la Terre-Sainte, du côté du nord ; de même Bersabée du côté du midi, quand l’Ecriture veut dire, d’un bout à l’autre de la Terre Sainte, elle dit, depuis Dan jusqu’à Bersabée, comme Deut. XXXIV. 1. Jérémie, VIII. 26. &c.

L’Ecriture n’appelle point cette ville le Camp de Dan, Mahane Dan. Jug. XIII. 25. XVIII. 11. 12. comme quelques-uns l’ont cru. C’est un lieu tout différent, qui étoit dans la Tribu de Juda près de Cariathiarim. Jug. XVIII. 11. 12. On dit aussi communément que l’une des sources du Jourdain s’appelle Dan ; mais je ne trouve point cela dans l’Ecriture ; & le 14. v. du Chap. XIV. de la Genèse, que l’on cite, ne le dit point.

Ce nom est Hébreu, דן, dan, Juge ou Jugement de דון, dun, Juger.

Dan. s. m. Nom d’homme. Dan, Danus. Dan est le cinquième des fils de Jacob, selon l’ordre de la naissance, & l’un des douze Patriarches des Israëlites. Jacob l’eut de Bala ou de Bilha, servante de Rachel, Gen. XXX. 5. 6. Dan fut chef d’une des douze Tribus. L’Ecriture fait le dénombrement de sa postérité, Gen XLVI. 23. XLIX. 16. 17. 18. Nombre I. 12. 39. II. 25. 26. 31. VIII. 66. XXVII. 42. 43. Deutéron. XXVII. 13. XXXIII. 22. Jos. XIX. 40. Jug. I. 34. v. 7. XIII. 1. 17. 19.

Dan ou Den. s. m. Terme de Mythologie. Ancien Dieu des Germains. Cluvier prétend, Germ. Ant. L. I. pag. 224. que c’est le même que Theut, & Ζεύς, par conséquent ; car comme, selon lui, de Theut s’est fait Ζεύς, Jupiter, de même de Ζεύς s’est fait Δάν, Dan ; car on a dit Ζεύς, Ζής, & en Dorique, Ζάς : des cas obliques Ζηνός, Ζηνί, &c. s’est formé le nominatif Ζην, & en Dorique Ζάν, puis le Ζ se changeant, comme il arrive souvent en Δ, Δάν, Dan, qui étoit le Grand Theut ou le Grand Mercure. Encore aujourd’hui dan & den, en Sclavon, & selon une autre prononciation, dzen & dzin, signifie jour, comme dies, qui vient de διός, génitif de Ζεύς.

DANACE ou DANAQUE. s. f. Nom d’une ancienne monnoie barbare, dit l’Etymologiste. Danace. Elle valoit un peu plus d’une obole. Suidas dit que la danace étoit la monnoie que les Grecs mettoient dans la bouche des morts pour payer à Caron leur passage aux enfers.

DANACTES. s. m. Nom d’homme. Danax, actis. S. Danactes est dans les Menées au 16. de Janvier, & dans Maxime de Cythère. Chastel, p. 303. Il semble que l’analogie demandoit que l’on dît Danax, & non pas Danactes : nous disons Astianax & non pas Astianacte.

DANAÉ. s. f. Fille d’Acrisius Roi d’Argos, fut enfermée fort jeune dans une tour d’Airain. Jupiter devenu amoureux de cette Princesse, se changea en pluie l’or, & la rendit mere de Persée.

DANAÏDE. s. f. Fille de Danaüs. Danaïs. Les Danaïdes étoient cinquante, & sont fameuses dans la fable ; filles de Danaüs, IXe. Roi d’Argos, & frère d’Egyptus ; elles épouserent les cinquante fils de leur oncle Egyptus, & par conséquent leurs cousins germains. Danaüs qui craignoit l’accomplissement d’un oracle qui lui avoir prédit qu’il seroit chassé du trône par un gendre, persuada à ses filles de tuer chacune son mari la première nuit de leurs nôces. Toutes obéirent à leur père, excepté Hypermnestre, qui épargna son mari, nommé Lyncée. En punition de ce crime, les Poëtes les ont condamnées dans l’enfer à remplir continuellement un tonneau percé. Les Danaïdes s’appeloient aussi Bélides. Voyez ce mot. Leur père Danaüs étoit fils de Bélus l’Egyptien. Les Danaïdes apportèrent d’Egypte en Grèce les Thesmophories ou fêtes & sacrifices de Cérès.

☞ DANAQUE. Voyez Danace.

DANAX. Voyez Danactes.

DANCALI ou DANKALI & DANGALI. Royaume de l’Ethiopie en Afrique, dans la partie méridionale de la côte d’Abex, vers le commencement du détroit Arabique, ou de la mer rouge.

☞ DANCENOIR, Dancenorium. Petite ville ds France dans la Champagne, sur la rivière d’Aube, vers les confins de la Bourgogne.

DANCHÉ, ée. adj. Terme de Blason. Pièce honorable de l’Ecu, dentelée d’un côté en forme de scie. Serratus, denticulatus. On le dit du pal, du chef, de la face & autres pièces semblables, lorsqu’elles sont terminées ainsi.

DANDA. Ville des Indes dans le Royaume de Décan, sur la rivière de Deri, qui entre dans la mer, auprès des Isles que les Portugais nomment Islas Quemadas.

DANDIN. s. m. Espèce de sot & de niais, qui n’a point de contenance ; ce mot n’est que du style familier. Homo insulsus, ineptus, incompositi oris ac gestûs homo. Rabelais a écrit une Histoire de Perrin Dandin, & de Thenot Dandin, dont on tire une moralité qui est d’un grand usage dans le monde pour ceux qui veulent accommoder les procès. Molière a fait une comédie intitulée George-Dandin.

Quelques-uns le dérivent par métathese de l’Hébreu nalad ou danah, qui signifie aller deçà & delà. Pasquier le dérive de dindan, qui est un son de cloches agitées qui vont deçà & delà comme les dandins.

DANDINEMENT. s. m. Mot nouveau qui signifie le balancement ou l’agitation de quelque chose, comme d’un carosse. Des tireboures d’acier pour arrêter le dandinement & cahot des berlines, chaises de poste, & phaétons. Merc. Juin 1725.

DANDINER, v. n. Faire le dandin, marcher en remuant le corps comme les gens qui n’ont point de contenance. Incompositè, ineptè, rusticè se gerere. Il dandine du cul comme un sonneur de cloches. S. Am. Il se dit aussi avec le pronom personnel, & signifie se balancer en sot & en benêt dans une chaise. Il n’est que du style familier.

C’est pour parler tout à son aise,
Se dandiner dans une chaise,
Et se donner des rendez-vous. Des-Houl.

☞ DANEBROY ou DANNEBORG. Voyez Dannebrock.

DANEMARCK ou simplement Danemarc, Royaume de l’Europe Septentrionale. Dania. Le Danemarck est renfermé entre le 54. d. 45. m. de latitude, & le 58. & environ entre le 29. degré & demi de longitude & le 34. & demi. Marty. Ses bornes sont au midi le Duché de Holstein, au couchant & au nord la mer d’Allemagne, & au levant la Manche de Danemarck, & la mer Baltique. Le Royaume de Danemarck se divise en deux parties. La plus considérable est la presqu’île de Jutlande ; l’autre consiste en plusieurs Îles situées dans la Manche de Danemarck, & dans la mer Baltique, & dont les principales sont Zéelande, Fionie, Falster, Mone, Laland, Longeland, Arroë, Alsen, Samsoë, & Bornholm. La Capitale du Royaume est Copenhague, qui est dans l’Île de Zéelande. L’hiver dure environ huit mois en Danemarck ; le reste est presque tout été, & les chaleurs y sont très-grandes, parce que les jours y sont fort longs. Le terroir de Danemarck est assez fertile. On en tire des blés qu’on ne sème qu’après l’hiver, & qui viennent en maturité en trois ou quatre mois. Il produit des chevaux & des bœufs de fort grande taille.

Le Royaume de Danemarck, si l’on en croit les Historiens Danois, commença 1038. ans avant Jésus-Christ, & par conséquent à peu près aussi-tôt que celui des Israëlites. Comme eux jusques-la les Danois n’avoient eu que des Juges. Les dissentions firent élire Dan, fils d’Humblus Seigneur de Zeelande, de Falster, de Laland & de Mone. Les Goths le créerent Roi. Ils prétendent que depuis tant de siècles il n’y a eu que trois races sur le trône. La première depuis Dan jusqu’à Unguin ; la seconde depuis Unguin jusqu’à Frédéric I. qui mit la maison d’Oldenbourg sur le trône en 1522. Jusqu’à Frédéric III. le Royaume de Danemarck avoit été électif : : il le rendit héréditaire en 1660. & les filles même le peuvent posséder.

Le Danemarck se sépara de l’Eglise Romaine sous Frédéric I. qui commença de régner en 1522. & embrassa la Confession d’Ausbourg, qu’il suit encore. Il y a six Sur-intendans Ecclésiastiques, auxquels on donne le nom d’Evêques. Ce sont ceux de Zéelande, de Fionie, d’Alborg, de Wiborg, de Ripen, & d’Arhus.

Les Etats de Danemarck ne comprennent pas seulement le Danemarck, mais encore le Royaume de Norwège ; en Allemagne, le Comté d’Oldenbourg, de Delmenhorst, & une partie du Duché de Holstein, dans l’Océan septentrional, les Îles d’Islande, de Fero, & de Scherland ; dans l’Amérique Septentrionale, le nouveau Danemarck, l’Ile de S. Thomas aux Antilles, le Fort de Christianbourg sur la côte de Guinée, & un autre sur celle de Coromandel.

Quelques-uns croient que Dania, Danemarck, vient du Latin dare, & qu’il a été donné à ce pays, parce qu’il donne beaucoup de biens. Daniam quasi prolificam parentem & multorum honorum datricem appellari. D’autres, avec aussi peu d’apparence, croient que marck, marchia, a été formé de maris archia, c’est-à-dire, Empire de la mer, comme si l’on avoit voulu marquer par ce nom, que le pays qui le porte avoit l’Empire de la mer. D’autres veulent que Danemarck soit composé de Danus, nom du fondateur de la Monarchie dont nous avons parlé, & de march qui en langue du pays signifie champ, campagne, territoire ; de sorte que Danemarck soit la même chose que territoire ou terre de Dan. Mais il est plus vraisemblable que Dan est le nom du peuple qui habitoit ce pays, & non de ce prétendu Roi Dan. Il en est qui veulent que ce nom vienne d’Aha, de l’eau, & qu’il signifie des gens aquatiques, qui demeurent dans les eaux, ils disent qu’ils s’appellent eux-mêmes Daneman, qui veut dire la même chose. Le nom du peuple est Danois. Voyez ce mot.

La Mer de Danemarck. Terme de Géographie. Mare Danicum, anciennement Cimbricum. C’est la partie de la mer d’Allemagne qui baigne la côte occidentale & septentrionale de la Jutlande, ou de l’ancienne Chersonese Cimbrique.

La Manche de Danemarck. Terme de Géographie. C’est un golfe de la mer d’Allemagne, renfermé entre la côte orientale de la Jutlande septentrionale, celle de Suède, & les îles du Danemarck, qui le sépare de la mer Baltique, avec lequel il a communication par les détroits du Sund, du grand & du petit Belt. On l’appelle autrement le Schager-Raak, ou le Catégat, Sinus Scagensis, ou Danicus.

Le Nouveau Danemarck. Contrée des terres arctiques. Dania nova. Il est dans les Cartes ordinaires sur le bord occidental de la mer Christiane, au nord du pays nommé la mer glaciale. Le P. Hennepin assure dans ses nouvelles découvertes, que c’est une terre ferme. Maty. Ce fut Jean Monok, Danois, qui découvrit cette contrée sous Christian IV, l’an 1619. Corn.

☞ DANGALA. Ville d’Afrique dans le Royaume de Sennar ou de Nubie, sur la rive orientale du Nil.

DANGEAU. Bourg de France dans le Perche, sur la Douzaine. Dangellum, Dangeolium, Danjolium.

☞ DANGER. s. m. Terme relatif à la situation d’un homme qui est menacé de quelque malheur, & qui exprime particulièrement le mal qui peut arriver. Péril & risque, regardent le bien qu’on peut perdre, avec quelque différence pourtant. Voyez ces deux mots. Discrimen. Le Soldat qui a l’honneur en récommandation, ne craint point le danger, s’expose au péril, & court tranquillement tous les risques du métier. Le plus lâche s’expose au danger par la honte de reculer. S. Evr. Darius disoit que les dangers le rendoient sage, parce qu’ils réveillent l’attention, & qu’ils augmentent l’expérience. Ablanc. On ne fait d’ordinaire entrevoir aux malades le danger où ils sont, qu’au travers de quelques espérances de guérison. Fléch. L’ame se familiarise insensiblement avec le danger, quelque affreux qu’il soit, à force de le considérer. S. Real.

Ce mot vient, selon Nicod, de damnum gerens ; & selon Ménage, de angarium, en y préposant un d, ou de damnarium, ou de damniarium.

Danger, se dit aussi pour signifier un inconvénient. Incommodum. il n’y a point de danger de sonder ses intentions avant que de lui proposer cette affaire. Il n’y a point de danger d’envoyer quelque valet au logis pour nous faire préparer à dîner.

Tiers & Danger, est un droit que le Roi prend sur plusieurs bois, Se entre autres en ceux de Normandie. Tertia & decima pars silvaticorum fructuum. Il consiste au tiers du prix de la vente, & à la dixième partie de la vente qu’on prélève d’abord au profit du Roi : ainsi sur soixante sous le Roi prend vingt sous pour le tiers, & six sous pour le danger ; c’est l’exemple qui est rapporté dans une ancienne Ordonnance de la Chambre des Comptes de 1454.

Ce mot de danger en ce sens est la même chose que la dixme, & il vient vraisemblablement du Latin denarius.

D’autres disent que ce mot de danger pris pour un droit, vient de ce que pour avoir permission de vendre des bois, on donne au Roi le dixième du prix de la vente, & que par ce moyen on évite le danger qu’il y avoit à les vendre sans la permission du Roi.

Il y a des bois qui ne sont sujets qu’au tiers sans danger, & d’autres au danger sans tiers. En général on appelle danger, ce qui est de droit étroit, & sujet à confiscation. Ainsi on a appelé fief de danger celui dont on ne pouvoit prendre possession qu’après avoir fait foi & hommage au Seigneur, à peine de commise ou de confiscation, comme il y en a plusieurs dans les Coutumes de Troyes & de Chaumont.

Dangers. Terme de mer. On appelle dangers sur la mer, les roches, les bans de sable qui sont cachés sous l’eau, & sur lesquels un vaisseau peut se briser en donnant dessus. Scopuli, vada, arenariæ moles. Il faut envoyer des chaloupes sur tous les dangers qui sont cachés sous l’eau. Bouguer. Etant sur un danger, il faut prendre des marques à terre, comme des arbres, des clochers, des montagnes, &c. pour le reconnoître.

☞ On voit par là que le mot danger a trois significations différentes suivant la diversité des étymologies. Quelquefois il est synonyme à péril & risque, avec la différence que nous avons expliquée.

Autrefois il s’est pris pour Puissance, Domination, Seigneurie, comme dans le Roman de la Rose.

Et si m’aist Dieu, aussi S. Jacques,
Si vous ne me voulez à Pasques
Bailler le corps notre Seigneur,
Sans vous faire presse Greigneur,
Je vous lairai sans plus attendre,
Et l’irai tantost de lui prendre,
Car hors suis de votre danger.

☞ Alain Chartier : Ainsi serez en servitude comme esclave, & ta renommée en danger d’estranges gens.