Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 3/011-020

Fascicules du tome 3
pages 1 à 10

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 3, pages 11 à 20

pages 21 à 30


l’expérience. On a pris des crevettes que l’on a gardées dans l’eau de la mer, au bout de quelques jours on y trouva de petites soles : on mit d’un côté des crevettes avec des soles, d’un autre côté des soles sans crevettes : les soles frayerent des deux côtés ; les crevettes avec des soles donnèrent des soles ; les soles sans crevettes ne donnèrent rien.

☞ CREUSAGE. s. m. Terme de gravure en bois. C’est dans la nouvelle maniere de préparer le bois pour graver les lointains, &c. l’action de le creuser aux places nécessaires avec la gouge, & de le polir avec le grattoir, afin de pouvoir dessiner dessus & les graver. M. Papillon.

CREUSE, ou CREUZE. Nom de deux rivières de France. Crosa, Crosia. L’une qui s’appelle la Grande Creuse, ou simplement la Creuse, porte ce nom, selon Valois, Not. Gall. p. 163. parce qu’elle est creuse, c’est-à-dire profonde, & selon d’autres, parce que c’est celui de sa source. Elle prend sa source dans la haute Marche, & va en Touraine se jeter dans la Vienne, après avoir séparé le Berry du Limousin & du haut Poitou. La Petite Creuse, Crosa minor, se décharge dans la grande, au-dessous des Frosselines, aux confins de la Marche & du Berry.

CREUSE. s. f. Fille de Priam, fut mariée à Énée, & fut mère de Jule ou Ascagne. Comme elle périt dans l’incendie, Virgile fait paroître son ombre à Enée qui la cherchoit, & lui fait dire que la mere des Dieux & Vénus l’avoient enlevée aux Grecs.

CREUSEMENT. s. m. Action de creuser. Cavatio, excavatio. Faire l’estimation du creusement d’un canal. Gault.

CREUSER. v. a. Rendre creux, faire profond. Cavare. Les eaux ont creusé la terre. Souvent on est obligé en Orient de creuser des puits pour trouver à boire. Puteum sodere. Creuser un port. Ab. Les Indiens creusent des boulleaux, des troncs d’arbres, pour faire leurs canots. On creuse, on perce les aunes, pour en faire des tuyaux de fontaine.

Selon E. Guichard, creux, & creuser, s’est fait de l’Hébreux כרה, charah, qui signifie en effet, creuser, fouir en terre. Il est mieux de le tirer de חרש, hharasch, labourer, remuer la terre.

☞ Creuser, v. a. Graver en bois. Voyez Creusage.

On dit figurément en Morale, qu’un homme creuse sa fosse, son tombeau, pour dire, qu’il avance sa mort par un excès de travail, de débauche, &c.

En vain affermis dans le vice,
Vous vous cachez le précipice
Que vous creuse l’impiété ;
Dieu va combler votre misere ;
C’est du trésor de sa colere
Que sort votre incrédulité. Duché.

☞ On dit absolument & sans régime, creuser en terre. Creuser bien avant. Creuser jusque sous les fondemens. En creusant on trouvera un puits.

☞ Dans un sens figuré, on le dit activement pour approfondir, pénétrer dans l’intérieur des choses. On dit creuser une science, une affaire, & absolument, creuser dans une affaire, dans une science.

Les Modernes ont creusé bien plus avant que les Anciens dans la Physique, dans les sciences. On n’a pas encore assez creusé dans ce procès criminel pour découvrir les complices. On dit qu’un homme s’est creusé le cerveau, pour dire, qu’il s’est donné beaucoup d’application, de fatigue, à approfondir certaine matière. Ac. Fr.

Creusé, ée. Part.

CREUSET. s. m. Petit vaisseau de terre cuite & fort seche, qui n’a d’ordinaire ni anse ni poignée, & qui sert aux Monnoyeurs, aux Orfévres & aux Chimistes, pour fondre & calciner l’or, l’argent & les métaux. Catillus in quo liquatur aurum. Catinus. Il est fait en forme de cône renversé. Il y a des creusets de différentes matières : dans nos monnoies il y en a de terre & de fer. Ce qu’on appelle creuset de terre, n’est autre chose qu’un vaisseau en manière de pyramide ou de cône renversé, qui est fait de terre glaise & de pots de grais pilés & tamisés ; on s’en sert pour fondre l’or, l’argent & les autres métaux. Quant au creuset de fer, c’est un vaisseau en manière de petit seau sans anse, qui est de fer forgé, & qui est propre à fondre les métaux, à la réserve de l’or, parce qu’il s’y aigriroit. Boiz. Il y a des creusets de terre qui tiennent jusqu’à trois à quatre cens marcs, mais on ne se sert dans les monnoies que de ceux de cent marcs pour fondre l’or. Les creusets de fer sont ordinairement plus grands que ceux de terre. Il y en a qui tiennent jusqu’à 1400 à 1500 marcs. J’en ai même vu dans la Monnoie de Paris qui tenoient jusqu’à 1700 marcs & plus, & qui y ont servi long-temps. Id. On observe de mettre toujours dans le creuset moins d’or ou d’argent qu’il n’en pour tenir. 1o. Parce que l’or pétille beaucoup lorsqu’il est au plus haut degré de chaleur. 2o. Parce que le Fondeur en pourroit répandre en le retirant du feu pour le jetter en lames. 3o. Afin que si l’Essayeur ne trouve pas l’argent du titre qu’il faut, on puisse remettre dans le creuset, ou du fin, ou de l’alliage. 4o. Afin qu’on puisse plus aisément brasser les matieres quand elles sont en bain. Il se fait aussi de grands creusets pour les fourneaux de Verriers, qui ont beaucoup de capacité.

Charger le creuset, c’est en terme de Monnoie, quand il est au plus haut degré de chaleur, & qu’il paroît blanc, y jetter les matieres que l’on veut fondre. Faite ressuer le creuset, autre terme de Monnoie. Quand un creuset de fer n’est plus en état de servir, on le met le fond en haut sur les barreaux d’un fourneau à vent, & on fait un grand feu, afin de faire fondre l’argent qui est attaché au creuset ; c’est ce qu’on appelle faire ressuer le creuset.

Creuset, s’est dit figurément des épreuves que Dieu envoie. C’est une vertu éprouvée dans le creuset. Il a été mis au creuset de la tribulation. Ces métaphores ont vieilli, & ne se diroient plus que dans le style familier, ou en fait de spiritualité.

Ce mot vient de l’Hébreux keres, qui signifie testa, fictile. Du Cange le dérive de cruselinum, qui a signifié dans la basse Latinité, un petit vaisseau à boire.

CREUSON. s. m. On nomme ainsi à Milan l’écu ou piastre du pays. Il vaut environ 5 livres 17 soldis Milanois.

☞ CREUSURES. Cavités pratiquées sur différentes matières, & qui, selon qu’elles sont plus ou moins profondes, s’appellent trait, crenelures, cannelure, rigole, rainure, &c.

☞ CREUTZNACH ou CREUTZENACH. Cruciniacum ou Crucinacium. Ville d’Allemagne, au Palatin du Rhin sur la Nave, qui la partage en deux parties, avec un château sur une hauteur.

☞ CREVURES ou CREVASSES, en gravure. Endroit où les tailles sont confondues dans l’ouvrage ; défaut qui provient, ou de l’eau forte, ou des coups de burin.

CREUX, euse. adj. Profond. Altus, profundus. Les puits des mines ne sont pas bien creux. Il faut faire des tondemens bien creux dans des terres sablonneuses. Plus les rivières sont creuses, plus elles sont navigables.

On le dit aussi des choses étendues en longueur. Protensus, extensus. Cette maison est fort creuse, fort profonde. Cette forêt est fort creuse, fort étendue.

☞ En terme de chasse trouver buisson creux, c’est ne trouver plus dans l’enceinte la bête que l’on avoir détournée ; & au figuré, l’on dit familièrement qu’on a trouvé buisson creux, quand on n’a pas trouvé la chose ou la personne que l’on cherchoit.

Creux, signifie aussi, qui est vide, qui a une cavité intérieure, soit naturellement, soit par art. Vacuus intus & inanis. Les colonnes, les statues de métal sont creuses en dedans.

☞ On dit qu’un homme a les yeux creux pour dire enfoncés dans la tête : qu’on a le ventre creux, pour dire qu’on a besoin de manger.

Le peuple appelle creux ce que les Géomètres appellent concave.

Creux, se dit figurément des viandes légeres. Levis. Les cornets de métier, les petits choux, la crème fouettée, sont des viandes creuses, par opposition à nourriture solide. On dit aussi de la Musique, des longs récits de vers & de prose, que ce sont des viandes creuses. On dit d’un repas où il n’y a pas suffisamment à manger, qu’il n’y en a pas pour la dent creuse de quelqu’un, pour dire qu’il en mangeroit bien davantage.

Creux, se dit aussi au substantif ; cavité, vide, profondeur. Cavus, cavum. Il est tombé dans un creux, pour dire, dans un trou. On se peut cacher dans le creux d’un arbre. Le creux de la main. Le creux de l’estomac ; cavité extérieure qui est entre l’estomac & la poitrine.

Je ne puis arracher du creux de ma cervelle,
Que des vers plus forcés que ceux de la Pucelle. Boil.

Creux, en terme de Droit, se dit des droits casuels des Curés, & de tout ce qu’ils reçoivent au-delà, du gros ou de leur portion congrue. Les creux sont principalement ce qui est donné aux Curés pour l’administration des Sacremens, & pour les sépultures, les offrandes, les rétributions des Messes, les fondations, &c. Le creux s’appelle aussi honoraire.

Creux, signifie chez les Musiciens, un voix qui descend fort bas. Ima vox, gravis. Ce Chantre a un beau creux de voix.

Creux, chez les Fondeurs, est un moule dans lequel ils jettent leurs figures, ou leurs autres ouvrages. Typus, forma. Un creux sert aussi à ceux qui moulent en plâtre & en cire. On a apporté à Paris tous les creux des plus belles figures de Rome ; les creux de la colonne Trajane, qu’on a fait mouler. On appelle colonne creuse, celle qui est dans un escalier à vis, pour monter jusqu’au dessus. On le dit aussi des poinçons & coins gravés dont l’empreinte fait des figures en relief.

Creux, se dit figurément en choses spirituelles & morales, & signifie, vain, léger, peu solide. Inanis, vanus, vacuus, falsus, levis. C’est un cerveau creux, ou vide ; un esprit creux, ou visionnaire, une pensée creuse, qui n’a point de solidité. Il se repaît de vaines espérances, d’imaginations creuses. Il ne faut presque point songer d’abord aux paroles ; il ne faut songer qu’aux choses, sans lesquelles le discours est creux & vide de sens. Bouh. Les pensées creuses & profondes sont en quelque façon semblables aux abymes, dont la profondeur étonne & trouble la vue. Id. Ce qui paroît trop recherché passe aisément pour creux, & pour chimérique. S. Réal. Il ne se peut rien voir de plus creux ni de plus frivole que cette pensée : c’est du faux tout pur. Bouh.

On dit en ce sens d’un mélancholique, que c’est un songe-creux, un rêveur. Inanibus pascit se somniis.

Creux, en terme de Marine, est la hauteur ou distance qui est entre les baux & les varangues d’un vaisseau, ou depuis le dessous du pont jusqu’à la quille : on l’appelle aussi pontal. Il se prend quelquefois pour le sein d’une voile qui reçoit & enferme le vent.

Creux, en terme de jeu de cartes, se dit d’un jeu dont les cartes ne sont point de suite. Les jeux creux sont les plus difficiles à tenir.

CREUXER, ou KREUX. s. m. C’est en Allemagne tout ensemble une monnoie courante, & une monnoie de compte.

CREX. s. m. C’est un oiseau, ainsi appelé à cause de son cri, & qu’il répète souvent crex, crex. Cet oiseau est aussi appelé Avoseta. Il est haut monté sur ses jambes comme un chevalier, mais un peu plus gros, moindre néanmoins que le corlis. Il a le bec long & noir, ainsi que les jambes & toute la tête ; mais le dessous du cou & de la poitrine, & le dessus des épaules est blanc. Le reste du corps est de couleur cendrée. Ses ailes sont brunes ou noirâtres, avec une ligne blanche sur chaque côté en travers. L’on n’en voit pas en France. Quelques-uns veulent que ce soit un Corlieu ou une Barge. Il se nourrit de petits insectes qu’il trouve sur la terre, & de mouches qu’il attrape en l’air, ainsi que le Vanneau. Il fait beaucoup de bruit en volant. Le Crex étoit de mauvais augure chez les Anciens, sur-tout pour les mariages. Voyez Meziriac, p. 192.

Crex. C’est aussi le nom qu’on donne au cri de l’Avoseta, qui est un oiseau que l’on voit en Italie. Je viens d’entendre le crex d’un Avoseta.

CRI

CRI. s. m. Voix haute & poussée avec effort : grande élévation ou effort de voix. Clamor. On le dit des hommes & des animaux. Les douleurs de la goutte font jetter de hauts cris. Dans le sac d’une ville on entend plusieurs cris & lamentations. Les Victorieux poussent des cris d’allégresse.

☞ Clameur & cri, mots synonymes par l’idée générale mais distingués par l’idée particulière qu’ils présentent à l’esprit. Cri désigne simplement une élévation de voix, souvent modifiée par des épithètes. Clameur dit quelque chose de tumultueux, d’excessif, & presque toujours sans fondement. Respecter le cri public ; mépriser les clameurs des sots, de la populace. Ce mot est ancien dans la langue. Il est Celtique ou bas Breton. Cri se dit de la voix ordinaire & naturelle de certains oiseaux. Le cri des hiboux, des orfraies est de mauvais augure. Le cri de la corneille annonce la pluie.

On le dit aussi d’une voix plaintive & quelquefois basse, qui sert à témoigner l’oppression qu’on souffre. Clamor. Un bon Prince ne doit pas fermer l’oreille aux cris, aux plaintes de son peuple. L’ame accablée par la douleur, se soulage & se relâche par des pleurs & par des cris. Mont. L’affliction lui causoit des cris. S. Evr.

Sion, le jour approche où le Dieu des armées
Va de son bras puissant faire éclater l’appui,
Et le cri de son peuple est monté jusqu’à lui. Rac.

Cri public, signifie, ban, publication qui se fait hautement, & après avoir amassé le peuple, soit en guerre, soit en fait de police. Promulgatio auctore Magistratu, Principis edictum, Regium edictum pronunciatum publicè. On a publié un tel ordre, un tel règlement, à son de trompe, & cri public, au son du tambour. Les cris se font dans les carrefours & lieux publics.

Scaliger dérive ce mot de quæritare. On appelle cri public, ce qui est publié à son de trompe, par ordre de Justice.

Cri, se dit aussi en parlant de ces petits Marchands qui vont vendre ou acheter par la ville de menues denrées Ou marchandises, qui annoncent à haute voix plusieurs choses pour la commodité du public. Propolarum venalitia præconia, rerum venalium præconium. Ainsi on appelle les cris de Paris, ceux des Gazetiers, des Gagne-petits, des Ramonneurs, des Revendeuses, &c.

Cri, en terme de chasse, se dit premièrement du cri naturel de plusieurs animaux, comme du léopard, de la panthère, de la giraffe, du tigre, du loup-cervier, du lievre, du lapin, du chevreuil & du faon. Clamor. Mais à l’égard du loup, on dit qu’il hurle. Ululat. Que le cerf, le daim brament. Clamat. Que le sanglier grumèle. Frendet. Que le bœuf, le bufle & l’ours beuglent. Mugiunt. Le cheval hennit. Hinnit. L’âne brait. Rudit.

Cri, se dit aussi à l’égard des chasseurs, du bruit qu’ils font quand ils parlent aux chiens pour les flatter, ou les animer à poursuivre la bête. Clamor. Comme hourvati, est un cri pour faire retourner les chiens, quand ils sont hors des voies ; geld, hela, cri pour les faire requêter quand ils sont en défaut ; hari, hari, pour les faire craindre quand ils branlent du change. Harlou est le cri qu’on fait à la vue du loup ; & hou, hou, quand on le poursuit. Velleau, est le cri qu’on fait aux chiens courans, à la vue du renard ou du lievre ; tayau, quand on lance le cerf, &c.

Cri ou Cri d’armes, en terme de Blason, est un certain mot qui sert de devise, & qu’on met au cimier des armes : ce qui vient d’un certain cri, ou signal que les chefs de maisons, ou les soldats crioient à la guerre. Alalagmus gentilitius. Autrefois nul n’étoit reconnu pour Gentilhomme de nom, d’Armes & de cri, que celui qui avoit droit de lever banniere ; l’un & l’autre servant à mener des gens à la guerre, à les rallier, & à les assembler près du drapeau. Il y avoit quatre sortes de cris. Le premier pour se rallier pendant ou après le combat : le second étoit un cri d’heureux présage ou d’invocation, comme celui de Clovis, qui voyoit balancer la victoire à la bataille de Tolbiac, Montjoie S. Denis. Le troisieme étoit un défi qui tenoit de la rodomontade ; & le quatrieme servoit à se reconnoître, & à se distinguer des ennemis. Le P. Anselme. L’ancien cri des Rois de France étoit Montjoie S. Denis. Il y avoit aussi des cris de défi, d’invocation, d’exhortation, de résolution, d’événement, de commandement, &c. les cris servoient aussi aux Hérauts dans les tournois, pour appeler les Chevaliers, parce que le cri de plusieurs étoit celui de leurs noms, de leurs maisons & de leurs villes. On dit en proverbe des Maisons d’Ally, Mailly & Crequy, Tel nom, telles Armes, & tel cri. Dans les tournois, chaque Chevalier avoit son cri, mais dans les occasions de guerre, il n’y avoit que les Chefs qui en pouvoient avoir. Le cri servoit à se rallier : à présent le cri de guerre n’est plus que le mot du guet. M. Du Cange a fait une dissertation curieuse du cri d’Armes.

On dit proverbialement qu’il n’y a qu’un cri après une personne ; pour dire qu’on la souhaite, qu’on l’attend avec empressement. On dit aussi qu’il n’y a qu’un cri sur quelque chose, sur une personne, pour dire que chacun en parle de même manière. On dit : chasser à cor & à cri ; pour dire, chasser avec le cor & les chiens. On dit figurément, chercher quelqu’un à cor & à cri, pour dire, le chercher, en demandant par-tout de ses nouvelles.

CRIAGE. s. m. Præco. Crieur public, Officier de la ville de Paris, qui après le son de la trompette ou du tambour, proclame, annonce, déclare quelque chose au public. Ce mot n’est plus en usage. Voyez de Lauriere sur Ragueau.

☞ CRIAILLER. v. n. Crier souvent, faire du bruit à plusieurs reprises & sans sujet. Clamitare. Les femmes sont sujettes à criailler. Elle criaille tantôt après son mari, tantôt après son enfant, tantôt après sa servante.

☞ CRIAILLERIE. s. m. Bruit qu’on fait en criant à différentes reprises, soit en contestant, soit en se plaignant, soit en réprimandant. Clamitatio, clamor importunus, queritatio. Un homme est souvent obligé d’éviter la maison à cause des criailleries de sa femme. Socrate ne se soucioit pas des criailleries de sa femme Xantipe. Ablanc. Les criailleries du Barreau. Id.

CRIAILLEUR, euse. s. Qui criaille, qui fait du bruit. Clamator, clamosus. il n’y a point de plaisir à disputer avec des criailleurs. Il faut ces menus créanciers qui sont des criailleurs. Ces trois mots sont du discours familier.

☞ CRIANT, ANTE. adj. qui fait crier, qui excite à se plaindre hautement. Une injustice criante.

On fait usage de ce mot en parlant d’une cataracte ou membrane dure & qui fait du bruit touchée de l’aiguille de l’Opérateur. Sonans, resonans. En réitérant cette opération de la cataracte sur l’œil droit, après avoir plongé l’aiguille à l’ordinaire, l’Opérateur sentit sous son aiguille une membrane dure & criante, qui résistoit à l’aiguille. Pinson.

☞ CRIARD, ARDE. adj. Qui est sujet à crier, qui se plaint ou gronde souvent & sans sujet. Clamosus, oblatrator. C’est un terme familier. On le dit particulièrement des enfans. Les enfans sont criards. Femme criarde. Les plus grands criards ont le plus d’avantage dans leurs assemblées. Abl.

☞ On appelle oiseaux criards ceux qui crient beaucoup, comme le geay, la corneille, &c.

On appelle dettes criardes, les petites sommes qu’on doit aux Marchands & Artisans pour de menues fournitures de bouche & autres choses ; celles des créanciers qui font du bruit, & viennent importuner leurs débiteurs à force de cris & de plaintes. Clamosa debita. Les plus méchans payeurs ont soin d’acquitter les dettes criardes.

Mémoire juste & bref de nos dettes criardes. Regn.

On dit en Fauconnerie, quand l’oiseau mord, & qu’il est criard, il lui faut mettre un chaperon à bec couvert comme un étui.

CRIARDES. adj. f. pl. On appelle ainsi des toiles extrêmement gommées, dont les femmes font des espèces de jupons, pour soutenir & comme enfler leur jupes de dessous. Ce nom leur vient d’un bruit que ces toiles font, lorsque celles qui en portent, sont obligées de faire quelque mouvement.

CRIBLE. s. m. Instrument à vanner, à nettoyer le grain, le blé, l’avoine. Instrument fait pour l’ordinaire d’une peau tendue au dedans d’un cercle, & percée de plusieurs petits trous, pour séparer le bon grain d’avec le mauvais, & d’avec les ordures. Cribrum, capisterium, incerniculum. Il y a des cribles à pied dans les greniers qui sont composés d’une grande auge élevée, où l’on verse le grain, qui en coulant sur des petites planchettes de bois, & sur plusieurs rangs de fil d’archal, s’évente & se nettoie, tandis que la poudre & les ordures coulent le long d’une peau qui est au derrière.

Isidore dit que cribrum a été appelé de ce nom, quòd ibi currat frumentum.

Il y a un crible de main dont on se sert dans les écuries pour nettoyer l’avoine chaque fois qu’on la donne aux chevaux. Il est composé d’un grand cercle de bois large de trois doigts, & d’une peau de parchemin entièrement percée par des trous de différentes figures. Il y a aussi des cribles qu’on suspend au plancher avec des cordes, afin de pouvoir s’en servir avec moins de fatigue.

☞ CRIBLE, dans l’économie animale, & en matières de Physique, se dit d’un plan percé de petits trous, qui, en refusant passage à certaines parties grossières, en séparent les plus fines, & les admettent. Les Cartésiens se servent de la comparaison du crible pour expliquer comment les sucs de la terre font différens fruits, quand ils montent dans les arbres ; en supposant que les arbres sont percés, comme les cribles, de différente espèce de trous, qui n’admettent que les atomes des figures qui leur ressemblent.

Crible, en termes de Pharmacie, est un instrument dont on se sert, après avoir pilé quelque drogue dans un mortier, pour séparer ce qui est délié d’avec ce qui est grossier. On pile de nouveau ce qui n’a pu passer & on le remet dans le crible. Comme il faut que les poudres soient plus ou moins subtiles, il a fallu aussi inventer plusieurs sortes de cribles. Il y en a qui sont faits avec des écorces de tillet coupé, déliées également, lesquelles on entrelace en façon de treillis. On en fait d’autres avec un tissu de crin de cheval, ou de soie, tendu d’un côté & d’autre avec deux cercles de bois.

Crible des Coquilles. De leur variété peut dépendre celle des coquilles.

On dit d’une chose, qu’elle est percée comme un crible, pour dire, qu’elle a plusieurs trous. Cette tapisserie est vieille & percée comme un crible. Cet homme reçut mille coups en cette défaite, on le trouva percé comme un crible. On dit au figuré. Il faudroit faire passer tout cela par le crible. Tout cela est familier.

CRIBLER, v. act. Nettoyer du grain, du blé, de l’avoine. Cribrare. L’âne de Rabelais disoit qu’il mangeoit fort bien de l’avoine sans cribler, & que tant d’honneur ne lui appartenoit.

Cribler, en termes de Marine, se dit d’un vaisseau qui est percé, soit par des trous de vers, soit par le canon dans les œuvres vives, & qui est en danger de couler à fond.

Cribler, se dit figurément en choses morales, & signifie, Eplucher, éprouver, examiner de près & avec soin. Il se dit des personnes & des choses. Excutere, perscrutari, probare, explorare. Vous n’avez qu’à vous attendre à être criblé comme il faut. Quand Satan crible les hommes par la permission de Dieu, il se trouve plus de paille que de bon grain. Herman. On a bien criblé cette affaire, cette proposition, avant de prononcer.

Je crible mes raisons pour en faire bon choix. Regn.

Il ne se dit plus dans cette acception.

Cribler, signifie aussi, Prendre tout le meilleur, toute la substance d’un négoce, d’une ferme. Il n’y a plus rien à gagner dans un tel trafic, dans un tel parti, ils ont été trop bien criblés. Terme peu usité, même dans le discours familier.

Cribler, en termes de Pharmacie, signifie, Séparer ce qui est délié d’avec ce qui est grossier. Cribrare. Ce mot se dit proprement des choses séches ; & couler se dit des liquides. Lorsqu’on veut cribler quelque chose, on prend le crible par le cercle de dessous, & on le secoue contre quelque chose.

Criblé, ée. part. Cribratus. Ce mot dans le sens propre, se dit du grain qui a passé par le crible qu’on a nettoyé & séparé du reste de ses immondices en le criblant. Un vaisseau criblé de coups de canon. Des voiles criblées sont des voiles percées, déchirées en plusieurs endroits par les boulets de canon. Criblé se dit aussi figurément d’un homme percé de plusieurs coups. Perforatus, vulneratus, faucius. Un Officier criblé de coups. Ch. de Rior. Il a le corps tout criblé des coups qu’il a reçus en quinze batailles.

Criblé, au figuré. On dit d’une Religion où il y a du bon & du mauvais, qu’elle auroit besoin d’être criblée pour retenir le bon, en laissant échapper le mauvais. Tout cela est du discours familier.

On dit proverbialement : Criblé comme une poële à châtaignes.

CRIBLEUR. s. m. Celui qui crible le blé. Cribrarius agitator. Par un Edit du mois de septembre 1704, le Roi a créé en titre d’Offices cinquante Jurés Cribleurs de blé, froment, seigles & orges, sur tous les ports, halles & marchés de Paris.

CRIBLEUX. adj. m. Terme d’Anatomie. On appelle os cribleux, un petit os qui est au haut du nez, qui est percé comme un crible, pour laisser passer plusieurs petites fibres qui viennent des productions mammillaires, & qui vont se répandre dans les membranes qui tapissent les cavités des narines. Os cribrarium, os excussorium. Il est aussi nommé éthmoïde. Voyez Ethmoïde.

CRIBLURE. s. m. Le mauvais grain & les ordures qui restent après qu’on en a retiré le meilleur par le grand crible. Excretum. Je ne veux pas acheter ce tas de blé autant que l’autre, ce ne sont que des criblures.

CRIBRATION, ou CRIBELLATION. s. f. Terme de Pharmacie, est une séparation des parties les plus déliées des médicamens secs, & généralement de tout corps pilé, d’avec les plus grossières, qui se fait par le moyen de différens cribles & tamis. Cribraria excussio.

CRIC. Terme indéclinable, qui exprime le bruit que fait une chose qu’on déchire. Crepitus, fragor, stridor. Il se joint ordinairement avec crac. On prononce le c final dans tous les deux. Quand on rompt une chose avec violence, elle fait cric, crac. Les ivrognes disent aussi dans la débauche, cric & crac, pour s’inviter à boire, ce qui est tiré du Jargon de l’Argot, où il signifie, je boi à toi. Nous avons porté autrefois en France des souliers au cric, crac, qui faisoient quelque espèce d’harmonie. Vign. Marv.

CRIC. s. m. (ne prononcez point le c final.) Terme de Méchanique. C’est une machine qui sert à lever de très-pesans fardeaux. Machina tollendis ponderibus. Elle est composée d’une roue dentée, ou pignon qui se meut avec une manivelle, & qui fait élever une grosse barre de fer aussi dentée, quand les dents du pignon entrent dans les dents de la barre. Le tout est enfermé dans une boëte qui est aussi de fer. Cet instrument sert aux Charrons, à l’artillerie, & ordinairement pour soulever le train d’un carosse.

CRICOARITENOÏDIEN. Terme d’Anatomie. C’est un nom que l’on donne à deux paires de muscles ouvreurs du larynx. Il y a les cricoariténoïdiens postérieurs, & les cricoariténoïdiens latéraux. Les premiers sont la première paire des ouvreurs du larynx, dont les seconds sont la seconde paire. Les cricoariténoïdiens postérieurs sont ceux qui prennent leur origine à la partie postérieure & intérieure du cartilage cricoïde & qui s’insèrent à la partie supérieure & postérieure de l’ariténoïde. Les latéraux prennent leur origine du bord de la partie latérale & supérieure du cricoïde, s’insèrent à la partie latérale & supérieure de l’ariténoïde. On voit dans ce que nous venons de dire la raison & l’étymologie de ce nom.

CRICOÏDE. adj. quelquefois employé substantivement. Terme d’Anatomie. C’est un cartilage du larynx appelé cricoïde, c’est-à-dire, annulaire, par ce qu’il est rond comme un anneau, & qu’il environne tout le larynx. Cricoides. Ce mot est formé de Κρίκος, qui s’est dit par métathèse ou transposition, pour κίρκος, cercle, & de εἶδος, forme, qui a la forme d’un cercle ou anneau. Le cricoïde qui est le second cartilage du larynx, est étroit par devant, large & épais par derrière, sert de base à tous les autres cartilages, & est comme enchassé dans le tiroïde. C’est par son moyen que les autres cartilages sont joints à la trachée-artère ; c’est pourquoi il est immobile.

CRICO-PHARYNGIEN. adj. & subst. m. Qui se dit en Anatomie de quelques muscles du pharynx. Cricopharyngius. Les crico-pharyngiens sont attachés chacun au bas du cartilage cricoïde. Ils ne sont qu’une suite des thyro-pharyngiens, & ne donnent autre marque de distinction que les attaches & une direction un peu différente, en ce qu’en allant en arrière, ils descendent un peu. C’est ce qui m’a fait quelquefois prendre ces deux muscles pour un seul, & le nommer thyro-crico-pharyngien. Winslow. Les plus inférieures de ces fibres font un contour entier en arrière depuis un côté de la base du cartilage cricoïde, jusqu’à l’autre côté, lequel contour fait le commencement de l’œsophage, & a donné occasion à quelques-uns de le regarder comme un muscle particulier sous le nom de muscle œsophagien. Id.

CRICO-THYRO-HYOÏDIEN. adj. & s. Terme d’Anatomie. On dit aussi cricothyroïdien & cricothyroïde. M. Winslow emploie les deux premières indifféremment. Les Crico-thyrohyoïdiens, ou Cricothyroïdes, sont deux petits muscles placés au bas du cartilage thyroïde l’un près de l’autre ; & par leurs extrémités supérieures ils sont attachés latéralement au bord inférieure du cartilage thyroïde, l’un écarté de l’autre. Par cette situation oblique ces deux petits muscles représentent un V romain. Winslow. Crico-thyroïdien est un nom que l’on donne à des muscles du larynx. Les crico-thyroïdiens sont la première paire de muscles propres du larynx. Leur nom vient de ce qu’ils prennent leur origine de la partie latérale & antérieure du cricoïde, & vont s’insérer à la partie inférieure de l’aile du tyroïde.

CRIE. s. f. Promulgatio. Ce mot, qui n’est plus en usage, se disoit autrefois pour cri, proclamation. Il y a encore à Bourges la pierre de la crie, c’est à-dire, ou se faisoient les cris publics.

☞ Il y avoit autrefois à Paris la pierre de marbre dans la cour du Palais qui servoit au même usage : il y en avoit même dans les autres Villes que l’on appeloit crie de la Ville.

CRIÉE. s. f. Publication en Justice des choses à mettre à l’enchère ou au rabais. Auctio. La criée des meubles exécutés se doit faire en place publique, & les jours de marché. On fera la criée & l’adjudication de cette terre à une telle heure à la barre de la Cour. Quand on a résolu l’entreprise d’un bâtiment public, on en fait la criée au rabais.

CRIÉE Parisis. Augmentation de prix des meubles qui s’achettent sur la prisée de l’inventaire. Quand on prend des meubles sur le pied de la prisée d’un inventaire, on est obligé d’y joindre le parisis, qu’on appelle autrement criée. Voyez Parisis. Une veuve peut prendre son préciput en meubles, suivant la prisée, en y ajoutant la criée.

Criée, se dit plus particulièrement de cette formalité essentielle aux décrets qui consiste en quatre publications qui se font à la porte des Eglises Paroissiales, des immeubles dont on poursuit la vente en Justice. Præconium, promulgatio. La première, la seconde criée, &c. On les appelle autrement les quatre quatorzaines, parce qu’il faut qu’il y ait quatorze jours d’intervalle entre chacune. En pays de Droit écrit on fait une quinte & surabondante criée. En ce sens on dit, certifications de criées, certificateur de criées, en parlant de l’attestation de ceux qui attestent que les criées ont été faites dans les règles. Un procès verbal de criées.

Criées, se prend quelquefois pour toute la suite de la procédure du décret. En ce sens on appelle un poursuivant criées, celui sous le nom duquel se fait toute la procédure. On dit qu’un bien est en criées, quand il est saisi réellement. Il faut s’opposer durant le cours des criées pour conserver son hypothèque.

CRIEL, ancien Bourg de la Vicomté d’Eu, qui a eu autrefois trois Paroisses, réduites aujourd’hui à une seule. Descript. Géogr. & Hist. de la haute Norm. T. I. p. 66.

☞ CRIER, v. n. Elever la voix avec effort, pousser un ou plusieurs cris. Clamare, clamorem edere. Il crioit de toutes ses forces. Il crioit si fort qu’on l’entendoit de bien loin. Ne faites point crier ces enfans.

☞ On dit que les boyaux crient à quelqu’un, pour dire qu’ils font du bruit. Intestina murmurant. En parlant d’une chose dure qui frotte rudement contre une autre, on dit figurément qu’elle crie, c’est à-dire qu’elle rend un son aigre & désagréable. Stridere, stridorem edere. Cette porte crie quand on la ferme. Cet essieu crie, Virgile a dit, stridentia plaustra, des chariots dont les roues sont mal graissées.

Nicod dérive ce mot du Grec κρίζω, signifiant la même chose. Ménage le dérive du latin quæritare, d’où les Italiens ont fait aussi gridare. D’autres croient qu’il vient de l’Allemand schreyen, signifiant s’écrier.

Crier, se dit aussi de cette élévation de voix précipitée par laquelle on demande du secours dans un accident inopiné. Crier au feu. Clamare aquam. Crier au meurtre, aux voleurs, à l’aide, au secours. Inclamare. On dit de même crier merci, crier miséricorde.

Crier, signifie aussi prononcer ses paroles d’un ton de voix élevé, vocem tollere. Il y a des gens qui veulent l’emporter sur les autres à force de crier, qui ne sauroient disputer sans crier.

J’ai des forces, du feu, de l’esprit, de l’étude ;
Et jamais sur les bancs on ne vit Bachelier,
Qui sût plus à propos interrompre & crier. Vill.

On dit plumer la poule sans crier ; pour dire, exiger des choses qui ne sont pas dues d’une maniere adroite, sans bruit & sans éclat.

☞ On dit encore crier à pleine tête, comme un fou, comme un enragé, comme un aveugle qui a perdu son bâton : crier à tue-tête. Expressions proverbiales & familières.

Crier, dans la signification de gronder, réprimander en élevant la voix. Objurgare, increpari, vociferari. Cette femme crie toujours après son mari, elle ne fait que crier, laissez-la crier. C’est un maître difficile, de mauvaise humeur, qui sans cesse crie après ses domestiques.

☞ C’est encore élever la voix pour se plaindre, quelquefois avec aigreur. Queri, conqueri, expostulare. On crie d’une chose, d’une injustice, contre une injustice. Il est accoutumé à entendre crier contre lui. On crie depuis long temps contre la dureté & l’insolence des Traitans. Le peuple crie contre les impôts. Il est si naturel de se plaindre & de crier, qu’il y auroit de la stupidité à souffrir sans dire mot.

Crier, élever la voix pour donner conseil. Admonere. Il y a long-temps qu’on lui crie qu’à son âge il devroit être plus sage.

Et que sert à Cotin la raison qui lui crie,
N’écris plus, gueris-toi de ta vaine folie ? Boil.

Crier, blâmer publiquement. Les prédicateurs dans les chaires crient contre la débauche, contre le luxe, contre le vice.

☞ On dit figurément qu’une chose crie vengeance, pour dire qu’elle demande vengeance. Cette injustice crie vengeance.

Crier, jetter certain cri, soit pour rallier les troupes dans un combat, soit pour témoigner sa joie dans une occasion particuliere. Les François en allant au combat criaient autrefois Montjoie Saint-Denis. V. Cri. On crie vivat, vive le Roi. On crie le Roi boit, le jour des Rois.

On dit proverbialement : on a tant crié Noël qu’il est venu ; pour dire, qu’on a tant demandé & desiré une chose, qu’elle est arrivée.

Crier. v. a. signifie, Proclamer en Justice pour trouver des enchérisseurs. Publicare, aliquid per auctionem vendere, præconium facere alicujus rei, auctionari. Ces meubles ont été criés & vendus au plus offrant & dernier enchérisseur. On a crié ces ouvrages, ces réparations au rabais. On le dit plus particulièrement des immeubles. On a crié cette terre dans les formes, on a fait les quatre quatorzaines. Au Châtelet de Paris il faut avoir un congé de crier, avant que de procéder aux criées.

Crier, signifie encore, Publier solemnellement dans les places publiques, & à son de trompe, des réglemens, des ordonnances, ou autres choses qu’il faut que tout le monde sache. Aliquid, auctore magistratu, principe, promulgare, denunciare, edicere. On a crié l’ouverture de la Foire. On a crie un tel à trois briefs jours.

Crier dans a lous, signifie citer quelqu’un, & lui ordonner de comparoître devant le Juge dans le temps marqué.

Crier, dans la même signification, se dit pour proclamer en Justice pour retrouver une chose égarée ou perdue. On fait crier un enfant perdu. On a crié ce bijou.

On le dit aussi de ceux qui vont vendre quelque chose par les rues. On crie de la salade, des choux, des navets, des fruits.

Crier Haro, est un usage de Normandie, qui fait qu’on arrête un homme, on saisit une chose d’autorité privée, pour les conduire sur le champ devant le Juge, ou en prison. On a crié haro sur lui & sur sa bête. Voy. Haro.

On dit aussi figurément, Crier haro sur une personne ; pour dire, Se plaindre hautement d’elle, lui dire des injures partout où on la trouve. Objurgare.

Crier, se dit aussi des chiens de chasse, & signifie, abboyer en chassant. Adlatrare, oblatrare. J’ai des chiens qui crient comme il faut.

Crié, ée. part.

CRIERIE, s. f. Action de celui qui crie, le bruit qu’il fait en criant. On n’entend en cette maison que des crieries perpétuelles. Un bon Juge ne doit pas s’émouvoir par les crieries des parties. C’est un terme familier.

CRIEUR, EUSE. f. Qui fait du bruit soit en quérellant soit, en se plaignant, soit d’autre manière. Clamator, clamosa mulier. Dans les disputes les plus grands crieurs, ont le plus souvent l’avantage. C’est un crieur perpétuel. Cette femme ne peut garder de domestiques, c’est une trop grande crieuse.

Crieur, se dit aussi de ceux qui vendent, ou qui achettent de menues marchandises en criant par les rues. Præco rerum venalium. Un crieur de gazette. Un crieur de vieux passemens d’argent. Un crieur de vieux souliers & de chapeaux.

Crieur, est aussi un Officier public qui va publier par les carrefours les ordres de la Justice, les réglemens, les défenses, les assignations à trois briefs jours. Præco. Le Juré Crieur est assisté de trois Trompettes, quand il fait un cri public.

Chez les Romains il y avoit au Théâtre une espèce de Crieur public, dont l’office étoit de publier de dessus le théâtre, ce que le Prince, ou le Magistrat ordonnoit qui le fût, & de lire ce que les Comédiens lui donnoient à lire, soit pour demander quelque chose au Prince, ou au peuple, soit pour avertir de quelque chose, et faire les Annonces. Voyez Martial, dans la Préface de son second livre ; & Turnèbe, Advers. L. XXV. c. 8.

Crieurs de corps et de Vins. C’étoit autrefois des Officiers de Ville qui étoient établis pour annoncer le vin qui étoit à vendre, les enfans, les papiers, ou les autres choses égarées ou perdues, afin qu’on les pût recouvrer, & pour avertir qu’on eût à prier Dieu pour quelqu’un, & à se trouver à ses funérailles. Præco. Maintenant leurs fonctions sont réduites à faire les cérémonies des enterremens. Vespillo. Aux services des Princes les Jurés Crieurs vont faire la sémonce avec leurs habits de cérémonie & leurs clochettes. Les Maîtres Peintres ont fait défense à tous Crieurs d’entreprendre & de faire aucunes armes, ou banderolles, pour les funérailles & cérémonies.

CRIM. Crimea, autrement CRIMENDA, Crimenda, & SOLAT. Solatum. Ville autrefois, maintenant village des petits Tartares en Europe ; elle est dans la Crimée, à laquelle on donne son nom, sur la rivière de Gérukélu. Quelques-uns veulent que Crim soit le Cimmerium des Anciens. D’Herbelot en parle.

CRIME, s. m. Signifie en général une faute énorme, une action faite contre la prohibition de la loi, soit naturelle, soit divine, soit ecclésiastique, soit civile, laquelle assujettit à quelque peine. Crimen. Les Romains distinguaient deux espèces de crimes : les crimes privés, qui ne regardoient que les particuliers, & dont la poursuite n’était permise par les Loix qu’à ceux qui y étaient intéressés : & les crimes publics, dont la poursuite étoit permise à toutes sortes de personnes, bien que non intéressées. En France les crimes se divisent en capitaux ou cas royaux, comme les crimes d’Etat & de lèze Majesté, assassinat, vol, fausseté, qui méritent la mort, qui sont de la connoissance des Juges Royaux ; & en délits communs, comme simple fornication, violation de vœu, & autres dont le Juge Ecclésiastique peut connoître. Il y a des crimes pour lesquels nos Rois ont déclaré qu’ils ne vouloient point donner ni octroyer d’abolition ni de grace. Bruneau. Ces crimes sont le parricide, le duel, l’assassinat, l’empoisonnement, le rapt commis par violence, l’outrage fait aux Magistrats & Officiers dans l’exercice de leurs charges, &c.

Le mot de crime, pris dans une signification moins étendue, dans le sens grammatical, peut être considéré comme une action énorme qui blesse les loix de la nature.

La faute, dit M. l’Abbé Girard, tient de la foiblesse humaine ; elle va contre les régles du devoir. Le crime part de la malice du cœur : il est contre les loix de la nature. Le péché ne se dit que par rapport aux préceptes de la Religion. Il va proprement contre les mouvemens de la conscience. Le délit part de la désobéissance ou de la rébellion contre l’autorité légitime. Il est une transgression de la loi civile ; voilà pourquoi il est du style du Palais. Le forfait vient de la scélératesse, ou d’une corruption entière du cœur ; il blesse les sentimens d’humanité, viole la foi, & attaque la sureté publique. Il faut pardonner la faute, punir le crime, ne point décider sur le péché, examiner la nature du délit, & avoir horreur du forfait. Les intrigues de galanterie sont des fautes : les assassinats sont des crimes : les mensonges sont des péchés : les duels & les contrebandes sont des délits : les empoisonnemens sont des forfaits.

Ainsi le mot faute peut être regardé comme le mot générique : il dit moins que les autres, quand il n’est point modifié par des épithètes aggravantes. Voyez tous ces mots.

Le nom de crime renferme en soi l’idée d’une détermination & d’un dessein formé de faire injure : ainsi ce n’est pas l’action extérieure qu’il faut punir dans le crime, c’est l’intention intérieure. Le Mait. La simple conception du crime, & même le consentement de la volonté, n’est point du ressort de la Justice humaine. Delaunay. Sous le règne de Tibère le crime étoit moins dangereux que la vertu. S. Evr. Il y a des crimes qui deviennent innocens, & même glorieux par leur éclat : de là vient que prendre des Provinces injustement, s’appelle faire des conquêtes. Roch. Ses ennemis lui ont fait des crimes de tout ce qui leur déplaisoit. Nicol. Lucrece, cette prude farouche, ne put se pardonner le crime d’un autre. S. Evr. Le crime trouve moins d’aversion dans les esprits, lorsqu’on met tant d’adresse & de dextérité à le conduire. Id. Dans le Droit les crimes les plus atroces s’appellent du nom de crimes, & les moindres s’appellent délits. Lange.

Donnez-moi des conseils qui soient plus légitimes,
Et plaignez mes malheurs sans m’ordonner des crimes. Corn.

C’est un crime d’Etat que d’en pouvoir commettre. Id.

Ce mot vient du Latin crimen, qui vient du Grec κρίνω, judico, comme qui diroit, action digne d’être déférée au Juge, & d’être punie. On dit qu’un homme est atteint & convaincu de crime, lorsqu’il a été condamné juridiquement : voyez au mot convaincu, & qu’il est prévenu de crime, lorsqu’il est seulement accusé, & qu’il n’y a qu’un simple décret contre lui.

Crime, en termes de Dévotion, se dit de tous les grands péchés, ou péchés mortels qu’on commet contre Dieu. Il y en a qui se croient gens de bien, seulement parce qu’ils s’abstiennent des crimes les plus grossiers. Claud.

Quelles excuses ne trouverois je pas en votre personne, si le crime pouvoit s’excuser ? Abad. Il sentoit les remords que l’on sent lorsqu’avec beaucoup de vertu l’on est sur le point de commettre un grand crime. Vill. Une femme s’affermit dans le crime, quand on lui ravit la honte qui la pouvoir retenir. Vill.

De mes crimes passés, je fais un saint usage. L’Abbé Tétu.

Crime, se dit aussi dans la conversation ordinaire, d’une faute que l’on commet, ou dans la conduite, ou contre le devoir, ou contre l’amitié. Vous n’avez pu sans crime violer les loix d’une si étroite amitié. S. Evr.

CRIMÉE. Crimea, Tartaria Crimea, ou Procopensis, Taurica Chersonesus. C’est la plus considérable partie de de la petite Tartarie, État d’Europe tributaire du Grand Seigneur. La Crimée est la presqu’île que les Anciens ont connue sous le nom de Chersonese Taurique, ou Scythique, ou Cimmériene, parce qu’ils appeloient les peuples qui l’occupoient Tauriques, Scythes, ou Cimmériens. Ils l’apeloient encore Chersonese Pontique, parce qu’elle s’avance sur le Pont, ou Pont-Euxin, c’est-à-dire, la Mer Noire, qui la baigne au midi & au couchant. Elle a au levant le détroit de Cassa, qui la sépare de la Circassie, & au nord la Mer de Zabache, le lac de Suco-Morzi, & un petit Isthme de demi-lieue de largeur, qui la joint au pays des Tartares Nogais. Les Tartares ont encore tiré dans cet Isthme un fossé du lac Morzi au Golfe de Nigrépoli, pour couper cet Isthime & rendre la Crimée plus inaccessible. On nomme encore ce pays Crim, Tartarie de Crim, ou Tartarie de Précop, ou Précopense, à cause d’une ville qui est dans l’Isthme, & que les Polonois appellent Précop, ou Krimski. Mais le nom le plus ordinaire en François est Crimée, comme l’a remarqué d’Herbelot, & non pas Crim. Voyez sur la Crimée les Mémoires des Missions du Levant, imprimés en 1715. où l’on écrit Crimée. Il y a dans ce livre un voyage de Crimée fait en 1702. par le Sieur Ferrand, Médecin François : il y a des choses curieuses dans cette relation.

CRIMINALISER. v. a. Terme de Pratique, qui se dit lorsque d’un procès civil, on en fait un criminel. Criminaliser une affaire, la rendre criminelle.

Criminalisé, ée. Part.

CRIMINALISTE. s. m. Auteur qui a écrit sur les matières criminelles. J’ai dit que les peines selon l’énormité des crimes sont marquées par le Droit Romain. Parmi nous on pourra lire Masuer, Jean Imber, &c. & les autres Criminalistes. Brun.

Criminaliste, se dit aussi de celui qui est instruit sur les matières criminelles. C’est un bon Criminaliste.

Naudé s’est servi de ce mot dans son Mascurat pour signifier Juge Criminel, Juge du criminel, Lieutenant Criminel. Rerum capitalium cognicor, Judex. Cela montre bien, dit-il, que tous les Juges n’ont pas lu ce qui arriva au Cardinal Paulo Aresio, lorsqu’il n’étoit encore que Criminaliste à Naples. Il quitta ensuite la judicature, & prit l’habit de Théatin, sous lequel il vécut si religieusement, que Pie V, lui donna le bonnet rouge. Masc. p. 323. En parlant de nos Juges de France, il ne faudroit point se servir de ce mot, mais dire Lieutenant Criminel.

CRIMINEL, elle. adj. Ce qui appartient au crime, & se dit tant de la méchante action qui est commise, que de la Justice des Officiers établis pour la punir. Criminalis. L’intention, les circonstances, font qu’une chose est tantôt innocente, tantôt criminelle. L’action criminelle est éteinte & prescrite par le temps de 10. années, à l’égard de la peine, & non pas à l’égard des intérêts civils. Un Juge Civil & Criminel, un Greffier Criminel, sont les Officiers qui instruisent les procès des accusés. Le Code Civil, le Code Criminel.

☞ Autrefois on décidoit les procès criminels par le combat & par le duel. Voyez Combat.

☞ Dans cette acception il se prend quelquefois substantivement, en parlant soit de matière criminelle, soit de procédure criminelle. On dit tirer une affaire au criminel. Il est plus en peine pour le criminel que pour le Civil.

On distingue au Palais le grand criminel & le petit criminel. Le grand criminel se dit des procès qu’on juge à la Tournelle Criminelle, & sur lesquels il peut intervenir condamnation à peine afflictive : & en ce sens on les appelle instruits à l’extraordinaire. Rerum capitalium Tribunal. Le petit criminel se dit de ceux où il ne s’agit que de réparations, ou d’amendes qu’on peut juger aux Enquêtes ; & en ce cas on dit qu’un homme est reçu en procès ordinaire, pour dire, que son affaire est civilisée. Rerum criminalium leviorum Tribunal. Il y a au Parlement un Greffe particulier pour le petit criminel.

☞ On dit proverbialement & figurément, prendre quelque chose au criminel, s’en tenir offensé. Aller d’abord au criminel, juger malignement d’une chose sur la moindre apparence.

Criminel, se dit aussi figurément des organes, des instrumens du crime. Criminalis, nocens. L’Evangile conseille d’arracher les yeux criminels qui nous scandalisent. Il a trempé ses mains criminelles dans le sang du juste.

Criminel, se dit aussi par rapport aux actions, ou aux passions mauvaises, ou illicites. Une femme, parce qu’elle est aimable, est-elle obligée en bonne conscience à se séquestrer du monde, de peur d’allumer des désirs criminels ? S. Evr.

Rien ne peut
Régler de nos désirs la pente criminelle. Pavillon.

D’un criminel amour détruisez le pouvoir. L’Abbé Tétu.

CRIMINEL, ELLE. s. m. & f. Celui, ou celle qui a commis un crime. Nocens, sons. Un accusé se rend criminel par la fuite. Il vaut mieux pardonner à un criminel, que de punir un innocent. Courtin. Sous un règne plein de soupçons, c’est être criminel d’Etat, que d’être capable de le troubler. Le Gend. Un Juge qui ne punit que pour exécuter les loix, ne se repaît point du supplice des criminels, & ne s’en fait point un spectacle de plaisir. Jur. Nous sommes ici-bas comme des criminels dans leur prison, toujours incertains de leur supplice. Nicol. A Venise, comme anciennement à Rome, les criminels sont défendus par des plaidoyers pleins de figures, pour émouvoir la pitié des Juges. S. Didier.

Et parmi les pauvres mortels,
Quelquefois ceux que l’on encense
Ne sont que de grands criminels ;
A qui notre seule ignorance,
Au lieu de châtimens, décerne des autels.

☞ En jurisprudence, on appelle criminel, celui qui est atteint & convaincu de quelque crime, jusqu’au jugement il n’est qualifié que d’accusé.

☞ Un Président du Parlement de Bourdeaux a fait un traité sur la manière dont on faisoit à Rome le procès aux criminels. Le Concile de Mayence de l’an 847. ordonne au 7e Can. que les criminels condamnés à mort ne seront privés ni des prières de l’Eglise après leur mort, ni de la communion pendant qu’ils vivent encore, s’ils sont vraiment pénitens : quelques-uns par le mot de communion n’entendent que l’absolution.

On dit d’un homme qui interroge trop particulièrement un autre, qui lui veut tirer les vers du nez, que c’est un bon Lieutenant Criminel. On dit aussi d’un homme qui interprête mal les choses, qu’il prend tout au criminel, qu’il va toujours au criminel.

CRIMINELLEMENT. adv. D’une manière criminelle. Criminaliter, criminosè, capitaliter. Ce qui, suivant les différentes acceptions du mot criminel, signifie par procédure criminelle, d’une manière qui rend criminel devant Dieu, ou d’une manière odieuse, avec malignité, en mauvaise part. Cette affaire se poursuit criminellement. On aime une femme, on la regarde criminellement. On prend, on interprête une chose criminellement. Le peuple, cette bête féroce, n’entre dans aucune discussion des choses mêmes dont elle juge criminellement. S. Real.

CRIMNUM. s. m. Voyez FROMENTÉE. c’est la même chose.

CRIM-TARTARE. s. m. & f. Nom de peuple. Habitant de Crimée. Crimæus Tartarus. Les Crim-Tartares écrasent le nez de leurs enfans, & croient que c’est une folie de porter un nez devant les yeux. Vign. Marv.

CRIN. s. m. Long poil qui vient au cou & à la queue des chevaux & de quelques autres animaux. Juba. Quand le cheval se cabre, on le prend aux crins. Le crin sert à plusieurs usages, à garnir des sommiers, des matelas, des selles, des chaises, à faire des bourses, des boutons, des cordons de chapeau, &c.

Ce mot vient de crinis, Nicod. Et crinis, selon le P. Pezron, est pris sur le crin des Celtes, qui veut dire, aride, n’y ayant rien de plus sec & aride que les cheveux. Pezron.

☞ On dit populairement prendre quelqu’un au crin & aux crins, le prendre aux cheveux. Se prendre aux crins, se prendre aux cheveux. Ces deux hommes se sont pris aux crins & se sont battus.

Crin d’Archet. Terme de Luthier. Crin qu’on frotte avec de la colophane, & dont on se sert pour faire resonner quelques instrumens de Musique, comme violes, violons, &c. Plectrum.

Crin. Terme de Métallurgie. C’est ainsi qu’on appelle dans l’exploitation des mines une interruption de la mine ou du filon, causée par l’approche d’un ban de pierre.

CRINAL. s. m. Crinale, is. Instrument de Chirurgie pour comprimer la fistule lacrymale. Voyez le Dict. de M. Col de Villars.

CRINIER. s. m. Artisan qui accommode le crin, & le met en état d’être employé par les Selliers, Tapissiers & Bourreliers. Qui jubas aptat in opus quodlibet.

CRINIÈRE. s. f. En terme de Manège, est le crin qui est sur le haut de l’encolure du cheval, tout le crin qui est depuis le toupet jusqu’au garot. Juba. Les crinières larges sont moins estimées que les autres. Ce cheval a une belle crinière. On dit ironiquement de ceux qui ont de vilains cheveux, qu’ils ont une vilaine crinière.

Crinière est aussi une couverture de cheval qu’on met sur les crins depuis le haut de la tête jusqu’au surfaix. Jubæ stragulum. On en use en Angleterre, & en plusieurs autres endroits.

Crinière, se dit plus particulièrement du crin qui est sur le cou des lions. Juba. Un lion en fureur secoue d’abord sa crinière.

On appelle quelquefois la Comète, une étoile à longue crinière. Crinitus cometa. Voy. Comète.

CRINON. s. m. Sorte de petits vers qui viennent sous la peau des enfans, & qui sont en forme de gros cheveux courts, ou de soie de sangliers. Par le moyen du microscope ils paroissent de couleur de cendre, ayant deux longues cornes, les yeux ronds & grands, la queue longue & velue au bout ; en un mot, horribles à voir. Ils occupent ordinairement les parties musculeuses du dos, des épaules ; du gras de la jambe au-dessous de l’épiderme, & causent une démangeaison continuelle & fâcheuse, qui est très-sensible, & des inquiétudes, des cris & des insomnies aux enfans, qui s’aimaigrissent & tombent enfin en langueur : ce qui fait dire à plusieurs meres que leurs enfans sont ensorcelés. Les enfans foibles & délicats y sont le plus sujets. La cause des crinons est la suppression de la transpiration insensible : la matière retenue se pourrit, & les semences ou les œufs qu’elle contient venant à éclorre par une chaleur douce & modérée, se convertissent en ces petits vers. On les découvre, & on guérit l’enfant en le mettant dans un bain, où on le frotte bien avec du miel. Les crinons sortent avec la sueur, & il est facile de les racler & de les arracher avec un rasoir, ou une croûte de pain, tandis qu’ils montrent la tête. Quelques-uns, au lieu de ce bain, mettent les enfans jusqu’au cou dans une lessive où ils font bouillir de la fiente de poule, & les y laissent suer, en excitant les crinons avec leurs mains enduites de miel. Sitôt qu’ils paroissent, on les racle de la même manière : ce qu’il faut continuer deux ou trois jours, jusqu’à ce qu’on n’en voye plus sortir. On les appelle comedones, du verbe Latin comedere, manger, à cause de la maigreur des enfans dont ils mangent la nourriture ; ou crinones, de crinis, cheveu, parce qu’ils sortent d’ordinaire par les pores de la peau, en forme de cheveux courts, ou de poils noire. Voyez DRACUNCULUS.

CRIOBOLE. s. m. Terme d’Antiquaire. Sacrifice d’un mouton, d’un bélier. Criobolium. Le Criobole se faisoit autrefois chez les payens à l’honneur d’Atys, comme le Taurobole se faisoit à l’honneur de Cybèle mere des Dieux. Ce sacrifice se trouve marqué sur plusieurs bas-reliefs anciens par une tête, ou crâne de bélier, avec des festons de fleurs & de fruits. On faisoit souvent le Taurobole & le Criobole ensemble à Cybèle & à son favori, comme on le voit dans de vieilles inscriptions, où ils sont appelés Grands Dieux, & où le Taurobole & le Criobole sont presque toujours joints ensemble. Cet Atys est, à ce que l’on croit, le même que le Soleil, c’est pour cela qu’il est appelé Menotyrannus, Μηνοτύραννος, Roi des mois.

M. D. M. I.
ET ATTIDI SANCTO
MENOTYRANNO
Q. CLODIUS
FLAVIANUS
V. CL. PONT. MAJOR.
XV. VIR S. F. SEPTEM
VIR EPULONUM
TAUROBOLIO CRIOBO
LIOQUE PERCEPTO.

Voyez Saumaise sur Lampridius, C. VII de ses Notes, édit. de Paris in-folio, p. 179. & 180. Dans cette inscription je crois qu’à la première ligne il faut M. D. M. D. au lieu de M. D. M. I. & je l’explique, Magnis Diis, Matri Deûm, &c. comme on le voit tout au long sur beaucoup d’autres qui sont dans Gruter.

CRIOLE. s. m. Terme de Relations. C’est un nom que l’on donne aux familles des descendans des premiers Espagnols qui s’établirent en Amérique dans le Mexique. Les Espagnols qui viennent d’Espagne sont grands ennemis des Crioles, & empêchent qu’ils ne parviennent aux charges. Voyez Hornius. Orb. Polit. On dit plus ordinairement en François Créole que Criole.

☞ On donne généralement le nom de Créole à tout Européen d’origine qui est né en Amérique.

CRIOPHORE. adj. m. Pausanias parle du Temple de Mercure Criophore, ou porte-bélier, ainsi appelé, parce que Mercure avoit empêché que la peste ne désolât la ville de Thebes, en portant un bélier tout autour des murailles. De là venoit qu’à la Fête de Mercure, le mieux fait des jeunes garçons de la ville faisoit le tour de ses murailles, portant un bélier ou un agneau sur ses épaules.

CRIQUE. s. f. Les matelots appellent criques de petits ports sans art, ou plutôt de petits enfoncemens que la mer fait dans la côte, où de petits vaisseaux se peuvent retirer, & se mettre l’abri. Statio tuta.

CRIQUET. s. m. petit cheval de peu de valeur. Mannulus. Il a acheté un petit criquet pour monter un laquais.

Que plût-à-Dieu que faute de Pégase,
Je pusse au moins, monté sur un criquet,
A travers monts voler au Bourniquet,
Et voir de près le Patron de la Case ! P. Du Cerc.

Ménage dérive ce mot de kerkettus, dérivé du Grec κερκος. M. Huet croit qu’on appelle criquet, un petit cheval, par une comparaison hyperbolique avec le grillon, qu’on appelle criquet.

CRISE. s. f. Ce mot dans sa propre signification est synonyme à jugement étant formé du Grec κρίνω, judico, juger.

☞ Les Médecins entendent par là un changement subit de la maladie en mieux ou en pis ; un effort, pour ainsi dire, que fait la nature, ordinairement accompagné d’une sueur ou de quelque autre symptôme qui donne à juger de l’événement de la maladie. Crisis. La doctrine des crises étoit la partie la plus importante de la Médecine des anciens ; elle a été dans tous les tems, & est encore aujourd’hui attaquée & défendue par les Médecins de la plus grande réputation.

La crise se fait ou par excrétion, comme flux de sang, d’urine, de ventre, ou par sueurs & vomissemens, ou bien par abcès. Les crises viennent d’ordinaire le 7. & le 14. ou le 20e. jour. Les maladies fort aiguës se jugent la plupart dans le septieme jour.

Crise, se dit aussi de l’accident qui est alors causé par la nature. Ce malade est en sa crise, en sa sueur, il ne faut pas le découvrir.

Crise, se dit figurément en choses morales. Criticus dies. Cette intrigue est dans sa crise, nous en verrons bientôt le dénouement. Ce procès est dans sa crise, il est sur le point d’être jugé. Je ne sais quelle humeur maîtrise nos volontés, est la crise de nos passions. Théoph.

CRISPATION. s. f. Terme de Chirurgie, qui exprime l’effet que produit le feu appliqué sur des chairs, des muscles, &c. C’est un resserrement des parties extérieures qui se replient sur elles même à l’approche du feu. Les anciens Chirurgiens avec des ferremens rougis au feu brûloient les vaisseaux, pour les fermer par la crispation que cause la bridure. Mem. de l’Acad. des Sciences.

On le dit en Médecine d’un effet à-peu-près semblable qui arrive aux entrailles, aux muscles, &c. à l’occasion de quelque chose qui les irrite, les picote & les contracte.

CRISSER, verb. neut. Qui se dit proprement des dents, quand elles font un bruit aigre, lorsqu’on les serre fortement. Stridere.

Ce mot est apparemment formé du bruit que font les dents. S’il est en usage, ce ne peut être que dans quelques Provinces.

CRISTAL. s. m. (on peut écrire crystal.) Pierre transparente & blanche comme le diamant, mais qui n’en a ni la dureté, ni la vivacité, ni l’éclat. Crystallus, Crystallum. On l’appelle cristal de roche ou de montagne, quand il est net, sans tare, pailles, atomes, petits nuages, rouille, ou quelques autres imperfections. La nature l’a formé hexagone ; & il a les angles si lisses, si polis & si unis, que les Lapidaires n’en sauroient faire de pareils. Les anciens ont cru qu’il venait de congélation. Mais il paroît certain que c’est une terre très-fine & très-déliée, imprégnée de particules cristallines, qui nage au milieu de l’eau. Cette eau, trouvant une issue, abandonne ces particules cristallines, qui se déposent les unes sur les autres, se durcissent & forment le cristal. Il est bien vrai que l’eau en est le véhicule, & tient les parties pierreuses & cristallines en fusion, de même que les fontaines qui font des incrustations autour des objets qu’on leur oppose. De plus si le cristal étoit formé d’eau, il devroit se consumer ou se fondre dans le feu ; il se réduit au contraire en une terre friable, dégagée de tous sels, de laquelle on peut former de nouveaux cristaux, en y ajoutant des sels alkalis fixes.

Il se trouve dans les Alpes, en Italie, en Bohême, & en divers autres lieux de l’Europe. Le cristal a une qualité astringente. On s’en sert dans la diarrhée, dans la dyssenterie, & dans plusieurs autres indispositions. On s’en sert aussi pour augmenter le lait aux nourrices. Le cristal de roche mis en poudre est estimé le meilleur remède contre l’arsenic.

Il y a des cristaux rouges appelés faux rubis ; de violets, ou fausses améthystes ; de jaunes, ou fausses topases de bleus, ou faux saphirs ; d’un rouge jaunâtre, ou fausses hyacintes ; de verts, ou fausses émeraudes, qui sont des cristaux naturellement colorés, sans mélange.

Ce mot vient de κρύσταλλος, glacies, qui vient de κρύος, frigus, στέλλομαι, concresco. On a donné ce nom au cristal, parce qu’il ressemble à la glace. Pour κρύος, il vient, selon le P. Pezron, du Celtique Crou, ou Grou.

Cristal, est aussi un corps factice, ou un verre fort clair & fort net qui se fait dans les verreries. Les beaux verres de cristal, les belles glaces de cristal, se font à Mourran auprès de Venise : c’est ce qu’on appelle cristal de Venise. Un œil de cristal, est un faux œil qu’on met quand on est borgne, & il se fait par les Emailleurs. Oculus cristallinus. Pline dit en parlant des verres de cristal, que leur fragilité même leur donne du prix, & qu’on a mis la gloire du luxe à avoir des choses qui puissent tout d’un coup périr entièrement. Il y a des amis si pointilleux, qu’il faut vivre avec eux avec la même précaution qu’avec des verres de cristal, tant leur amitié est fragile. S. Evr.

Cristal, en termes de Chimie, se dit des sels & de quelques autres matières qu’on fait congeler en manière de cristal.

Cristal de tartre, est du tartre purifié & coagulé en forme de cristaux. C’est la même chose que crème de tartre. Pour le préparer on prend du tartre qu’on fait bouillir dans l’eau : on ôte l’écume, & on le passe par la chausse : quand on l’a laissé refroidir, on trouve des petits cristaux blancs & brillans aux côtés & au fond du vaisseau. On trouve aussi une pellicule ou crême qui nage sur la liqueur. On la ramassoit autrefois, & on la croyoit différente du cristal de tartre ; mais c’est une même matière. Le cristal de tartre est purgatif & apéritif ; il est propre pour les hydropiques, pour les asthmatiques & pour les fièvres intermittentes. Le cristal de tartre de chalibé, est un cristal de tartre empreint des parties les plus dissolubles du fer. Le cristal de tartre émétique, est un cristal de tartre chargé des parties sulfureuses de l’antimoine, qui le rendent vomitif.

On appelle cristal d’alun, de l’alun purifié & réduit en cristaux de la même manière que le tartre. On cristallise tout de même le nitre, le vitriol & les autres sels. Les cristaux d’alun sont quadrangulaires, & brillans comme le diamant. Ceux de nitre sont blancs & oblongs. Ceux de vitriol sont verts, quadrangulaires & éclatans.

Cristal Minéral, est du salpêtre préparé avec le soufre. On prend du salpêtre, par exemple, demi-livre on le met dans un creuset qu’on place dans un fourneau entre les charbons ardens. Lorsque le salpêtre est en fusion, on y jette à diverses reprises deux drachmes de fleur de soufre. Après que la flamme est passée, on renverse le creuset dans une bassine d’étain plate, & on la remue, afin que le sel s’étende. C’est ce qu’on appelle cristal minéral, ou anodin minéral. On le nomme aussi sel prunelle, ou sel de prunelle, parce qu’il est bon contre l’esquinancie qu’on nomme pruna ou prunella.

On appelle Cristaux d’argent ou de lune, un argent pénétré & réduit en forme de sel par les pointes acides de l’esprit de nitre. On s’en sert pour faire escarre en touchant la partie. On en fait prendre aussi intérieurement pour les hydropisies, & pour les maladies du cerveau.

On appelle Cristaux de Mars, un fer pénétré & réduit en forme de sel par une liqueur acide. C’est un admirable remède pour toutes les maladies qui viennent d’obstruction. On les appelle aussi sel, ou vitriol de Mars.

On appelle Cristaux de Vénus, du cuivre pénétré & réduit en forme de vitriol par l’esprit de nitre. Ils sont caustiques. On s’en sert pour consumer les chairs baveuses. On les appelle aussi vitriol de cuivre, ou de Vénus.

Cristaux de Verdet, c’est du vert de gris cristallisé.

Cristal d’Islande. Corps diaphane, pierre transparente que l’on apporte d’Islande. Cette pierre ressemble au talc ; elle est molle comme le talc. On remarque des réfractions tout-à-fait particulières dans ce cristal. 1. Dans les autres corps il ne se fait qu’une réfraction, dans celui-ci il y en a deux différentes, en sorte que les objets paroissent doubles à travers ce cristal. 2. Dans les corps transparens le rayon qui tombe perpendiculairement sur leur surface, passe tout droit, sans souffrir de réfraction & le rayon oblique se rompt toujours ; mais dans le cristal d’Islande le rayon perpendiculaire souffre réfraction, & il y a des rayons obliques qui passent tout droit. Voyez M. Huygens, qui a traité exprès des réfractions extraordinaires de ce cristal.

Cristal, se dit figurément & poétiquement des eaux fort claires. Aqua limpida. Cette source répand le cristal de ses eaux dans cette prairie. Daphné, ne cherchez point le cristal des fontaines, pour vous instruire de vos appas, mes soupirs vous en instruiront assez. Font.

Dans le cristal des eaux souvent Philis se mire,
Et là contre mon cœur elle apprête ses traits. Id.

Couchés près du cristal d’une onde vive & pure,
Nous n’étions jamais las d’admirer la nature.

Nouv. choix de Vers.

CRISTALIER. s. m. Ouvrier qui taille ou qui grave le cristal.

CRISTALLIN, INE. adj. Pur, clair & transparent comme du cristal. Cristallinus. La cascade naturelle de ce ruisseau est une eau pure & cristalline.

Cristallin. s. m. Espèce de verre que l’on fait avec de la soude d’Alican, & du sablon vitrifiés ensemble.

Cristallin, en termes d’Optique, est une humeur épaissie en forme de petite boule posée au milieu de l’œil, dans laquelle se fait la rétraction des rayons de lumière, afin qu’ils se réunissent dans la rétine, & y forment l’image de l’objet qui doit produire la vision. Humor cristallinus. C’est la configuration du cristallin, qui est cause que la vue est plus courte ou plus longue. Quelques uns disent cristalline, féminin. Cristallin est plus en usage, & beaucoup mieux. Voyez Œil, Vision.

En Astronomie on appelle les cieux cristallins deux orbes qu’on s’est imaginé être entre le premier mobile & le firmament, dans l’hypothèse de Ptolomée, selon laquelle on croyoit les cieux solides & susceptibles d’un seul mouvement propre. Cælum cristallinum. Ils ont été imaginés par Alphonse Roi d’Espagne, pour expliquer deux mouvemens qui ont été appelés de trépidation, ou de titubation, ou de variation. Le premier cristallin, selon l’hypothèse de Ptolomée & de Regiomontanus, sert à expliquer le mouvement tardif des étoiles fixes, qui les fait avancer d’un degré en 70. ans, selon la suite des signes, c’est à-dire, vers l’Orient : ce qui cause la précession des signes. Le second cristallin sert à expliquer le mouvement de libration, ou de trépidation, par lequel la sphère céleste est portée d’un pôle à l’autre ; ce qui cause de la différence dans la plus grande déclinaison du soleil. Les Modernes expliquent ces divers mouvemens d’une manière plus facile

CRISTALLINE. s. f. Terme de Chirurgie. C’est une maladie qui vient à la partie honteuse de l’homme par une fluxion d’humeurs, qui la font paroître comme de cristal.

Cristalline. s. f. Espèce de poire. Cristallina. Pyrum cristallinum. La Quintinie met la Cristalline parmi les mauvaises poires. Elle se mange en Février & en Mars.

CRISTALLISATION. s. f. Terme de Chimie & d’Histoire Naturelle. On entend en général par ce mot un phénomène physique, par lequel les parties solides d’un corps, d’une pierre, par exemple, dissoute dans un liquide, se rapprochent & forment une masse solide d’une figure régulière & déterminée. Congelatio. Cristallisatio. Plus particulièrement, on entend par ce mot, des amas de pierres d’une forme régulière & constante.

En Chimie, la cristallisation est une opération chimique, par laquelle les parties ou molécules des sels dissous dans un menstrue convenable, se rapprochent & forment des masses différemment figurées, suivant la nature des différens sels.

Cristallisation. Terme de Lithologie. Ce sont des pierres dures, ou des cailloux, dans lesquels il se trouve des parcelles de cristal en trop petite quantité pour former du vrai cristal, mais suffisamment pour produire un effet brillant aux yeux. En rompant de certains cailloux, on les trouve ordinairement remplis de ces particules de cristal, & c’est ce qu’on nomme cailloux cristallisés.

Cristallisation. Terme de Gabelle. C’est l’épaississement de l’eau marine, soit dans les marais salans, soit dans les chaudières, cuves, plombs, où l’on fait le sel.

CRISTALLISER, v. a. Terme de Chimie. Réduire en cristal après l’évaporation de l’humidité. Congelare. On fait bouillir le salpêtre pour le cristalliser. Quand on fait le sel des puits salans, on fait évaporer l’eau jusqu’au sec, & ce sel se trouve cristallisé. Le tartre se cristallise autour des tonneaux. L’alun fondu dans l’eau se cristallise autour des bâtons qu’on y jette, & fait plusieurs petits corps pyramidaux.

Cristalliser est quelquefois neutre. Faire cristalliser un sel. Il est plus souvent actif & réciproque.

Cristallisé, ée. part.

CRISTALLOMANCE, ou CRISTALLOMANTIE. s. f. Art de deviner, de connoître les choses sécrettes & cachées, par le moyen d’un miroir, en les faisant voir dans un miroir. Autrement Catoptromantie. Cristallomantia. Catoptromantia. On dit qu’il y a des devins qui font voir dans un miroir la personne que l’on veut connoître, par exemple, celui qui a volé, ou fait quelque autre chose que l’on veut savoir. C’est ce qui s’appelle Cristallomance, ou Catoptromance, de κρύσταλλος, glace, eau gelée, & cristal, verre, glace de miroir, ou κάτοπτρον miroir & μαντεία, divination.

CRISTE-MARINE. Plante. La même chose que Crête-Marine. Voy. ce mot.

CRIT. s. m. Petit poignard de 12 ou 15 pouces de long, dont la lame est plate & en onde par les côtés, qui est en usage chez les Siamois, ou plutôt les Macassars. La plupart de ces armes sont d’un acier empoisonné d’un poison si subtil & si puissant, que la moindre égratignure qu’il fait est mortelle, principalement en été. Le Pere Tachard dit qu’il y a de ces lames qui coûtent près de mille écus. Rendre le crit parmi les Macassars, c’est infamie ; le tirer & ne tuer personne, est la dernière des lâchetés. Id. Le Chevalier de Forbin envoya à l’instant lui demander le crit de la part du Roi. Id.

CRITHOMANCE. s. f. Crithomantia. Sorte de divination, qui consistoit à considérer la pâte ou la matière des gâteaux qu’on offroit en sacrifice, & la farine qu’on répandoit sur les victimes qu’on devoit égorger & parce qu’on se servoit souvent de farine d’orge dans ces cérémonies superstitieuses, on a appelé cette sorte de Divination Crithomance, de κριθή, orge, & de μαντεία, divination. Voy. Peucer des Divinations, & son Traducteur.

CRITHOPHAGE. s. m. & f. ou adj. Mangeur d’orge, qui vit d’orge. Crithophagus. S. Macédoine, Prêtre d’Antioche & Solitaire, surnommé le Chrithophage, étoit Syrien de nation, & il vint au monde vers l’an 320. Il vécut 45 ans sur le haut des montagnes des environs d’Antioche, sans autre cellule que les trous qui s’y trouvoient ; & il en passa 40 sans se nourrir d’aucune autre chose que de l’orge broyée & détrempée dans de l’eau avec le son. Baillet, 24.