Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/431-440

Fascicules du tome 1
pages 421 à 430

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 431 à 440

pages 441 à 450



vient, pour dire, que plus on en a, & plus on en veut avoir. Ce proverbe vient d’Amiot, Evêque d’Auxerre, qui ayant dit d’abord au Roi Henri III, que son ambition étoit bornée, & qu’il se contentoit d’un petit bénéfice, qu’on lui donna alors, ne laissa pas de demander l’évêché d’Auxerre. Et comme le Roi lui reprocha que cela étoit contre ses premiers sentimens, il répondit : Sire, l’appétit vient en mangeant ; ce qui a été dit depuis en toutes sortes d’occasions. Il est demeuré sur son appétit ; pour dire, il n’est pas pleinement satisfait, rassasié.

APPÉTITION. s. f. C’est la même chose qu’appétit, en tant qu’il signifie une passion de l’ame. Les appétitions sont des passions qui nous font désirer ou craindre certaines choses. La connoissance de ce qu’il nous faut faire ou ne pas faire, ne suffit pas : il faut encore que les désirs soient bien réglés ; c’est ce qui engage notre Auteur (M. Gundling) à traiter des appétitions ou passions humaines. Histoire littéraire de l’Europe, Tom. V. Mai 1727. p. 59 & 60. Ces appétitions sont de deux sortes, l’espérance & la crainte. Id. Ce mot n’est guère en usage.

APPÉTITIF, IVE. adj. Appetendi vis, facultas. Terme de morale, qui se dit de la faculté qui est en nous appétitive, ou concupiscible.

APPIADE. s. f. Appias, & au pluriel APPIADES. Terme de Mythologie. Appiades. Surnom que l’on donnoit aux Divinités, dont les temples étoient à Rome proche des eaux ou fontaines d’Appius. Quelques-uns n’en comptent que deux, Vénus & Pallas ; d’autres en mettent cinq, en ajoutant à ces deux-ci, la Concorde, la Paix & Vesta. Il paroît par un endroit d’Ovide, où parlant de Vénus, il lui dit : vous & vos Appiades, qu’il y en avoit plus d’une avec cette Déesse. Voyez Cœl. Rhodig. Liv. XII chap. 1. Turneb. Adv. Lib. V. cap. 7.

APPIEN, ENNE. adj. Appius. Qui est fait par Appius, qui appartient par quelque endroit à Appius. Ce mot n’est d’usage qu’au féminin dans cette phrase : la voie Appienne, via appia ; nom d’un grand chemin, qui prénant à la porte Capène, conduisoit de Rome jusqu’à Brindes, à l’extrémité de l’Italie vers l’Orient. Ce fut Appuis Claudius, qui étant Censeur, le fit faire l’an de Rome 441 & son nom lui fut donné. La voie Appienne est un des beaux ouvrages des Romains ; elle subsiste encore, au moins en bien des endroits, & est pavée, dit-on, non pas de petits pavés comme ceux de nos grands chemins & de nos rues, mais de grands pavés, tels que ceux dont on pave nos églises.

APPIÉTRIR. Voyez Apiétir.

APPIOS. Voyez Apios.

APPLANER. Voyez Aplaner.

APPLANEUR. Voyez Aplaneur.

APPLANIR. Voyez Aplanir.

APPLANISSEMENT. Voyez Aplanissement.

APPLANISSEUR. Voyez Aplanisseur.

APPLATIR. Voyez Aplatir.

APPLATISSEMENT. Voyez Aplatissement.

APPLAUDIR. v. n. Battre des mains pour témoigner qu’on approuve quelque chose. Plaudere, applaudere. Tous les écoliers ont applaudi à celui qui a soutenu cette thèse. Applaudir à un Auteur.

Applaudir, dans le sens figuré, c’est témoigner de quelque manière que ce soit, qu’on approuve les actions ou les discours de quelqu’un. Un lâche adulateur applaudit même aux extravagances d’un sot qui peut lui être utile. Il n’est pas besoin d’avoir une complaisance fade pour tout ce que disent les autres, & de leur applaudir niaisement. Bell.

Tel vous semble applaudir, qui vous raille & vous joue.

Applaudir, est aussi actif. Chacun l’a applaudi d’une si belle action. Les hommes n’aiment point à admirer les autres ; ils cherchent eux mêmes à être goûtés & à être applaudis. La Bruy. Son discours fut généralement applaudi.

Applaudir, se dit aussi avec le pronom personnel, & signifie, s’admirer soi même, se savoir bon gré de ce qu’on a fait, s’en féliciter. Sibi plaudere, Mirari sese. Quel supplice d’entendre un fat qui s’applaudit d’une pensée usée & triviale ! Bell.

Un cœur noble est content de ce qu’il trouve en lui,
Et ne s’applaudit point des qualités d’autrui. Boil.

Vous vous applaudissez de mon inquiétude. Mol.

Applaudi, ie. part.

APPLAUDISSEMENT. s. m. Approbation marquée par des battemens de mains, par acclamation ou de quelque manière que ce soit. Plausus, applausus. Chercher, donner, recevoir des applaudissemens. Les Tragédies de Corneille ont eu un applaudissement universel. Le Prince a fait son entrée avec de grands applaudissemens. Cette valeur indiscrète, emportée, qui cherche le danger pour le danger même, n’a pour but que les applaudissemens des hommes. Bell. Le sage ne se repaît point des applaudissemens du vulgaire.

APPLAUDISSEUR. s. m. Qui applaudit. Ce mot est nouveau. Les ouvrages dignes de mépris trouvent enfin de nombreux applaudisseurs, qui peu à peu se sont familiarisés avec le médiocre & le mauvais. La tragédie d’Abensaïd, par M. l’Abbé le Blanc, a eu un succès qui fait en quelque sorte autant d’honneur aux Applaudisseurs qu’à l’Auteur même. Observ. sur les écr. mod.

☞ APPLEBY Voyez apleby.

APPLEDCRE, ville d’Angleterre. Appledora. Elle est dans le comté de Kent, sur la rivière de Rhoten, au nord du château de Khyr.

APPLÉGÉ, ée. adj. Terme de Droit. Dénoncement applégé, est un dénoncement pour lequel on donne plége, ou caution. Accusation applégée. Voyez les Coutumes d’Anjou & du Maine, & le style de Touraine. Une personne bien applégée, est une personne bien cautionnée.

APPLÉGEMENT. s. m. Terme de Coutume. Action, ou acte, par lequel on donne plége ou caution. Satisdatio. Instrumentum satisdationis. Voyez l’ancienne Coutume d’Anjou. Au premier livre des Etablissemens de France, les applégemens & contre-applégemens sont expliqués de cette manière : Si aucuns hom vient à son Seigneur, soit Gentilhomme ou Coutumiers, pourquoi li Sires ait voerie en sa terre, & il die : Sire, un riches hom est venus à moi d’une méson, ou de pré, ou de vignes, ou de terre, ou de cens, ou d’autres choses, & m’a dessaisi de nouvelle desseisine, que j’ai explaitié au sceu & veu, au servage de Seigneur, en jusques à ores, qu’il m’en a dessaisi à tort & à force, dont je vous pri que vous pregniez la chose en votre main. Li Sire li doit répondre : Li feré-je se vous metez plaiges à poursuivre le plet, à ce que s’il vous a dessaisi à tort & à force, si comme vous avez dit. Et se il ne met pleiges, si Sires n’a mie à dessaisir l’autre ; & se il dit : Je vous en mettré volontier bons pleiges, il doit donc les pleiges prendre bons & suffisans, selon ce que la querelle sera grande ; & quand il aura pris bons pleiges, il doit l’autre partie mander par certains mesages, & li doit dire que cil a mis bons pleiges, & que il l’a dessaisi à tort & à force, & de telle chose, & la nommera l’en, je vuel savoir se vous mettrez pleiges au deffendre la ; & se il dist : Je ni mettré ja pleiges, l’en doit l’autre laisser en la saisine pour les pleiges que il a mins ; & ce cil dist : Je i mettré bons pleiges au deffendre, que il ni a riens eu, & que ce est ma droiture, la Justice li doit mettre jour aus deux parties, & tenir la chose en sa main, jusques à tant que le quiex que soit ait gaignié la saisine par droit.

Applégement de refus de plége. Terme de la vieille pratique du Palais. C’est se plaindre au Juge supérieur de ce que l’inférieur n’a pas voulu ordonner la main-levée en donnant caution.

☞ On entend par applégement, dit Ferrière, les complaintes qui sont intentées pour acquérir ou pour recouvrer une possession.

☞ Le contre-applégement, est la défense du défendeur, qui se plaint du trouble qui lui est fait.

☞ Ces mots ne sont plus d’usage au Palais, mais se trouvent encore dans plusieurs de nos Coutumes.

APPLÉGER. v. a. Vieux terme de Coutume. Appléger & cautionner un marché, c’est donner plége, ou caution d’un marché que l’on fait. Ragueau.

APPLICABLE. adj. m. & f. Ce qu’on destine, ce qu’on doit appliquer à quelque chose. Applicandus, addicendus. Dans les défenses des Lettres de Chancellerie, on met toujours, à peine d’amende applicable un tiers à nous, un tiers à l’exposant, & un tiers à l’Hôtel-Dieu. Il faut blanchir & préparer une bordure, avant que l’or soit applicable dessus. Dans un sens figuré on dit qu’un passage est ou n’est pas applicable au sujet dont il s’agit.

APPLICATION. s. f. Action par laquelle on applique une chose sur une autre. Applicatio. Application d’un emplâtre. Enseigner, apprendre l’application de l’appareil. Application d’un remède sur la partie malade.

Application, se dit au figuré, & signifie, attention de l’esprit à considérer un objet auquel il s’attache. Attentio, intentio. Il travaille avec une extrême application. La poësie demande une grande application d’esprit. God. On remarque que ceux qui s’appliquent aux mots & aux embellissemens, conçoivent les choses moins fortement, parce que leur esprit n’étant pas capable de cette double application, ce premier soin affoiblit la vivacité de leurs pensées. Port-R. Ces esprits profonds, dont la conduite est le fruit d’une application chagrine ou laborieuse, laissent lire sur leur visage l’importance de leurs projets. Les Asiatiques fuyoient le travail, jusqu’à l’application un peu tendue au discours. Perr. Nous ne considérons qu’avec dégoût, & sans beaucoup d’application, les idées abstraites de l’entendement. Maleb. L’application continuelle des Savans à la lecture, les rend distraits, & les enfonce en eux-mêmes. Bell.

Application, se dit aussi de l’adaptation d’un passage, d’une maxime à un sujet. Accommodatio, traductio. L’application de l’Apologue me semble dangereuse. Voit. Cette application me paroît juste.

Application, signifie aussi la destination d’une chose à son usage. Addictio, destinatio. On fait l’application des sommes d’argent qu’il a laissées par son testament.

☞ On dit aussi application d’une science à une autre, usage que l’on fait des principes de l’une pour perfectionner l’autre. Application de l’algèbre à la géométrie, de la géométrie à la physique.

l’Application des mérites de Jésus-Christ, est un terme dogmatique, qui signifie, l’action, ou l’acte par lequel Jésus-Christ nous donne, nous cède, nous transporte son droit aux biens qu’il a mérités par sa très-sainte vie, & par sa mort & passion. C’est l’application des mérites de Jésus-Christ, qui nous rend dignes de l’héritage céleste. L’application des mérites de Jésus-Christ, demande en nous de grandes dispositions. Ce sont celles qu’il faut apporter aux Sacremens, & que le Concile de Trente explique dans la VIe Session.

☞ APPLIQUE. s. f. Terme qui désigne une chose qu’on applique à d’autres dans certains ouvrages. Or d’applique. Pièces d’applique.

☞ En Orfévrerie, on appelle pièces d’applique, tout ce qui s’assemble par charnières, coulisses, goupilles, vis, écroues, agraffes, cliquets, crampons, boucles, clous ou rivures.

Applique, signifie aussi l’art par lequel on applique, on enchâsse quelque chose sur une autre : comme dans les ouvrages de rapport & de marqueterie, de damasquinure. Vermiculatum, tessellatum opus.

APPLIQUÉE. adj. f. pris substantivement. Terme de Géométrie. On sousentend ligne. Quelques Géomètres appellent Appliquées, ce que l’on appelle plus communément Ordonnées. Ce sont des lignes parallèles entr’elles, tirées à tous les points du diamètre d’une courbe, & terminées de part & d’autre par la courbe, ou, comme on le prend plus ordinairement, terminées d’un côté par la courbe, & de l’autre par le diamètre auquel elles sont appliquées.

APPLIQUER, v. a. Poser, mettre une chose sur une autre, en sorte qu’elle y soit adhérente. Admovere, apponere. Il y a plusieurs manières d’appliquer ; comme celle d’attacher avec des liens, appliquer un homme au carcan, à la question ; ou avec quelque matière gluante, appliquer une affiche à une porte, une emplâtre sur une plaie, de l’or sur une bordure ; ou avec des chevilles & ferremens, appliquer des moulures sur une menuiserie ; ou avec de simples filets, appliquer une broderie sur un habit, &c.

Appliquer, se dit aussi de ce qui se fait par un simple attachement passager. Appliquer des ventouses, des sangsues, des cautères. Cucurbitas imponere, aptare, admovere. Appliquer un soufflet, un coup de pied, des coups de bâton. Colaphum, calcem, fustem impingere. Cette dernière expression est familière.

Appliquer, se dit aussi en parlant de la destination d’une chose à certains usages ; ☞ de l’emploi d’une chose à l’égard d’une autre. Addicere, destinare. Il a appliqué cette succession à payer ses dettes. On applique les amendes aux pauvres, aux prisonniers. Un tel Bénéficier a appliqué aux réparations de son Bénéfice l’argent de ses bois.

Appliquer, se dit aussi au figuré, en parlant de l’esprit, apporter une grande attention à quelque chose. Appliquer son esprit, ou s’appliquer à la Poësie, aux Mathématiques. Se tradere.

☞ On dit absolument d’un homme qu’il s’applique ; pour dire, qu’il s’attache fortement à quelque chose. Il se dit encore figurément de l’adaptation d’un passage, d’une maxime, & que l’on fait convenir à quelque sujet. Accommodare. Et dans ce sens il s’emploie aussi au réciproque. On peut appliquer tel apologue : tel apologue peut s’appliquer & cet homme s’applique bien des choses qui ne lui conviennent point. Un avare ne s’applique jamais ce qu’on dit en général contre l’avarice.

☞ Dans cette acception il signifie s’attribuer, ou prendre pour soi, ou s’approprier. S’appliquer les louanges qu’on donne aux autres. S’appliquer le bien que les autres font. S’appliquer une chose qui a été donnée pour les autres.

Appliquer, se dit aussi en matière de piété, & signifie, donner, procurer, conférer. Conferre, impertire. Les Sacremens de la nouvelle Alliance sont des instrumens du Saint Esprit, qui servent à nous appliquer la grâce. Boss. C’est aussi par les Sacremens que Jésus-Christ nous applique ses mérites, c’est-à-dire, qu’il nous communique ses droits, qu’il nous fait participans des mérites infinis qu’il a acquis, & du droit qu’il a comme Homme-Dieu, en vertu de ses mérites, de ses actions, de ses souffrances, aux biens surnaturels de la grâce & de la gloire.

Appliquer, s’emploie aussi souvent avec le pronom personnel, & sur-tout parmi les Chirurgiens, & signifie, se poser, se mettre. Imponi, accommodari, admoveri. Les bandes & les compresses s’appliquent mieux étant mouillées.

Appliquer, en Astrologie, se dit lorsqu’une planète plus légère, ou d’un mouvement plus violent, va à une autre plus tardive, ou à son aspect. La Lune applique à la conjonction de Saturne, lorsqu’elle est au premier degré d’Ariès, & Saturne au sixième.

APPLIQUÉ, ÉE. part. On appelle absolument, un homme appliqué, celui qui est fort attaché à l’étude d’une science, à une profession, à une chose dont il fait sa principale occupation.

APPLIS. Terme de Coutume. En Bresse, on nomme Applis, les outils que le propriétaire fournit à son métayer lorsqu’il entre dans sa terre.

APPOINT. s. m. Menue monnoie que l’on donne ou que l’on ajoute pour achever une somme que l’on ne peut faire en grosses pièces. Pour faire cent francs, il faut quatre louis de 24 livres, un écu de 5 livres, & un appoint de 20 sols en monnoie.

Appoint, terme de Banque. C’est la somme qui fait la solde d’un compte ou le montant d’un article.

APPOINTEMENT. s. m. Gages, pension qu’un grand Seigneur donne pour retenir d’honnêtes gens à son service. Idonea ad victum cultumque præsidia à Principe attributa, assignata. Dans cette acception, ce mot n’est employé qu’au pluriel. Le Roi donne de grands appointemens aux Officiers qui le servent. Il y a cette différence entre gages, & appointemens, que les gages sont certains & ordinaires, attribués aux Officiers par Edits & Patentes, & se payent par les Trésoriers ordinaires ; au lieu que les appointemens sont des pensions, ou gratifications annuelles que le Roi accorde par brevet pour un temps incertain, & se payent au Trésor royal. Dans les maisons ordinaires, comme le mot d’appointement est plus honnête, on le dit des hauts Officiers, comme Intendans & Secrétaires ; & gages se dit des moindres domestiques. Voyez Gages & Honoraire.

Lorsqu’un homme aide à la dépense, à la subsistance d’un autre qui n’a pas de quoi subsister commodément par lui-même, on dit familièrement, c’est lui qui fournit à l’appointement, aux appointemens.

Appointement, en termes de Palais, se dit des règlemens ou jugemens interlocutoires qui établissent la contestation des parties, où l’on rédige leurs qualités, & les conclusions des demandes sur lesquelles seulement les parties doivent écrire & produire, & les Juges prononcer. Decretum, dictum, interdictum. L’appointement est ce qui fait la contestation en cause, après lequel on ne peut décliner, ni évoquer. Les Juges ne peuvent prononcer que sur ce qui est compris dans les appointemens. Il y a plusieurs sortes d’appointemens. Le premier est un appointement en droit qu’on donne en première instance, quand les parties ont fait quelque demande où il s’agit du droit. Le second est l’appointement en faits contraires, quand il ne s’agit que des faits qu’il est permis à chacun de vérifier. Le troisième à écrire & produire, & donner cause d’appel, comme quand on appointe une cause sur le rôle à la Grand’Chambre. L’appointement de conclusion est un Arrêt de règlement sur l’appel d’une Sentence rendue en procès par écrit. ☞ L’appointement au Conseil est un règlement qui se donne à l’Audience sur la plaidoirie des parties, qui les appointe à écrire & produire sur une appellation verbale portée en l’Audience de la Grand’Chambre qui n’y peut pas être jugée, parce qu’il y a plusieurs titres à voir, différentes parties, ou autres circonstances : les Juges en ce cas appointent l’affaire au conseil, après avoir entendu les Avocats des parties, pour être le procès jugé par écrit.

☞ Il n’appartient point aux premiers Juges, en prononçant sur l’appel des Juges inférieurs, d’appointer les patries au Conseil, mais ils doivent prononcer par bien ou mal jugé. Le quatrième, est un appointement à oüir droit, en matière criminelle, après le recollement & la confrontation. On dit aussi, un appointement en droit & joint, quand on forme incidemment quelques demandes qui sont appointées & jointes au procès. Il y a aussi des appointemens à mettre en matières sommaires & provisoires, qui obligent à mettre & produire les pièces dans trois jours pardevant un Rapporteur nommé.

On appelle aussi appointemens, les jugemens en forme d’arrêt tout dressés, qu’on fait recevoir à l’Audience, pour les autoriser, quand les parties en sont d’accord, ou quand elles ont été renvoyées au parquet pour les juger, ou par-devant les anciens Avocats. En ce cas les Procureurs passent entre eux les appointemens, ou le Procureur qui résiste est sommé de comparoir à l’audience pour voir recevoir l’appointement.

☞ APPOINTER. v. a. Vieux & hors d’usage. Rendre pointu. Acuminare, cote pugionem asperare. Ch. est. Dict. Montagne édit. de Rouen 1641, 571.

Appointer. Terme de Palais, se disoit autrefois pour accommoder, terminer à l’amiable. Il n’est maintenant en usage que pour régler par un appointement en justice, prononcer un appointement. Ainsi lorsque sur une affaire qui se plaide à l’audience, mais qui est trop embarrassée pour y pouvoir être jugée, les Juges ordonnent que les parties produiront par écrit, on dit que les Juges l’ont appointée. Cette affaire est trop compliquée pour être jugée à l’audience ; elle sera appointée. Les parties ont été appointées à écrire & produire.

☞ Dans les appointemens volontaires, le dispositif porte, appointé, & oüi sur ce le Procureur-Général du Roi ; & on appelle ces arrêts, arrêts d’appointé.

Du Cange dérive ce mot de appunctare, qui signifioit, non-seulement, terminer & vuider une affaire, mais aussi la mettre en état d’être instruite & jugée ensorte que les faits & les demandes fussent certaines.

On dit proverbialement, que des gens sont toujours appointés contraires, quand ils se contredisent toujours, lorsqu’ils sont de différentes opinions, & de différens intérêts. Adversi dissidentes.

Appointer. Terme de Corroyeur, c’est fouler un cuir pour la dernière fois, & le tenir prêt à mettre en suif. Subigere ultimùm. Appointer une vache.

Appointer. Terme de Tapissier. C’est plier un matelas en deux, & y coudre vers chaque bout deux ou trois points pour l’arrêter. Appointez ce matelas & l’emportez.

Appointer une piéce d’étoffe. C’est y faire quelques points d’aiguille avec de la soie, du fil ou de la ficelle, pour empêcher qu’elle ne se déplie, & qu’elle ne se frippe. Voyez Empointer.

APPOINTÉ, ÉE. part. Il a les significations de son verbe en latin comme en françois.

Appointé, que les parties mettront leurs productions au Greffe. Formule dont les Juges se servent quand ils appointent une cause.

Appointé & Joint, se dit d’un réglement qui appointe un incident qu’on joint à une instance déja appointée.

☞ Il est aussi substantif. Un appointé à mettre. Un appointé en droit.

On appelle à la guerre des soldats appointés, ceux qui ont une plus haute paye que les soldats ordinaires. Cui majus stipendium assignatum est. Il y a eu aussi des Officiers appointés, qui avoient quelques gratifications du Roi, même hors le service. Mais ces choses changent souvent & sont maintenant peu en usage.

Ce mot vient de ce qu’autrefois on disoit Appointer un soldat ; pour dire, Le mettre au rang de ceux qui devoient faire la pointe en quelque assaut, ou occasion périlleuse.

Appointé, en terme de Blason, se dit des pièces qui se touchent par les pointes : comme deux chevrons opposés, des épées, des flèches, & autres pièces semblables mises en pairle, peuvent être appointées en cœur. Cuspidibus obversis positi.

APPOINTEUR. s. m. se dit odieusement de ces Juges extraordinaires qui ne viennent à l’Audience que rarement, & pour faire appointer la cause d’une partie qu’ils veulent favoriser. Interventor. Dans le temps qu’il ne falloit que quatre Appointeurs pour empêcher le jugement d’une cause, ces gens étoient fort dangereux.

Appointeur se dit quelquefois de ces gens qui s’empressent à faire toutes sortes d’accommodemens. Sequester, Internuntius. Rabelais fait une agréable histoire des Appointeurs de procès, Perrin Dandin, & Thenot Dandin.

Ces propos n’étoient rien au prix de l’embarras.
Où se trouva réduit l’Appointeur de débats. La Font.

De semblables discours rebutaient l’Appointeur Id.

Puisqu’on plaide & qu’on meurt, il faut qu’on se propose
D’avoir des Appointeurs, & d’autres gens aussi :
On n’en manque pas, Dieu merci. Id.

APPOINTISSER. v. a. Terme populaire qui signifie rendre pointu. Acuminare, In acumen exacuere. Les pointes des flèches des Sauvages de l’Amérique étoient faits autrefois d’un gros os d’orignac, qu’ils appointissoient avec des roches. Les François leur en ont porté de fer. Denys, Descript de L’Amer. Sept. P. I. c. 2.

APPOLTRONNER. v. a. Rendre poltron. Daubigné, T. III, Liv. 3, ch. 23, parlant des satyres que les Ligueurs répandoient contre Henri IV, dit qu’on ne pouvoit lui reprocher aucune imperfection que nature n’avouât. Ce qui étoit tacitement reprocher à ses ennemis, que plusieurs d’entre eux étoient adonnés à certains vices que nature abhorre & qui appoltronnent. M. le Duchat à la marge de la p. 184 de la Sat. Mén. in-8o. S’appoltronner, s’accagnarder, devenir poltron, est dans Cotgrave. Nicot range sous le mot poltron le verbe poltroniser, que Cotgrave a mis aussi dans son Dictionnaire, & que Monet explique dans le sien par faire le poltron : se comporter en poltron. Ignaviter agere.

☞ APPONDURE. s. f. Terme de Rivière, dont on se sert dans la composition d’un train. C’est une portion de perche employée pour fortifier le chantier quand il est trop foible. Encyc.

APPORT. s. m. Lieu public, espèce de marché où s’assemblent les Marchands de denrées, & portent des marchandises pour vendre. Locus mercatoribus frequens celeber. A Paris il y a deux Apports ; l’Apport Baudoyer vers saint Gervais, & l’Apport de Paris au Grand Châtelet. Le peuple par corruption les appelle porte Baudets, & porte de Paris. A la campagne on appelle Apport, le concours du peuple ou des marchands qui viennent des lieux d’alentour à la fête d’un Patron de village, ou d’une petite ville.

Apport, en termes de Palais, est un acte que l’on donne à celui qui dépose un écrit. Scheda depositi, ou Commissi instrumenti testis. Par exemple, un particulier a un écrit sous seing privé, auquel il veut donner une date certaine. Il le porte chez un Notaire ; cet acte contient que le particulier N. demeurant… est comparu tel jour, a déposé & mis ès mains de N. l’un des Notaires soussignés l’original de… pour le garder & mettre au rang de ses minutes, & en délivrer des expéditions à qui il appartiendra, dont acte. La partie signe la minute de l’acte, étant ensuite de l’original, qui demeure au Notaire.

Apport de sac, ou des pièces. C’est la remise faite au Greffe d’une Cour supérieure, en conséquence de son ordonnance, des pièces d’un procès instruit par des Juges inférieurs dont la juridiction ressortit à cette Cour. L’acte que délivre le Greffier, s’appelle Acte d’Apport.

Apport, dans la coutume de Rheims, signifie tous les biens, meubles & immeubles ; que la femme contractant mariage apporte à son mari : plus tous les biens qui lui sont avenus par succession depuis le mariage contracté : enfin les dons de nôces que le futur époux ou les parens donnent à la future épouse avant la célébration & solennité des épousailles. Ragueau. En Auvergne, apports sont des rentes, des revenus. Apport est relatif à la chose qui produit des fruits, & peut-être aussi à celui qui doit ; au lieu que le revenu est relatif à celui qui retire du profit d’une chose, ou à celui à qui il est . Id.

APPORTAGE. s. m. Peine & salaire de celui qui apporte quelque fardeau. Avectionis, convectionis pretium, merces. ☞ Il vous en coûtera l’apportage de vos fagots. Terme usité sur les ports.

APPORTER. v. a. Prendre une chose dans un lieu pour la mettre dans un autre. ☞ Porter une chose d’un lieu plus ou moins éloigné, au lieu où est la personne qui parle, ou dont on parle. Afferre, apportare. Apportez ici ce paquet. Apportez-moi cette bouteille.

☞ Porter, dit, M. l’Abbé Girard, n’a précisément rapport qu’au fardeau. Apporter renferme l’idée du fardeau & celle du lieu où l’on le porte. Transporter a non-seulement rapport au fardeau & au lieu où l’on doit le porter ; mais encore à l’endroit d’où on le prend. Emporter, enchérit par-dessus toutes ces idées, en y ajoutant une attribution de propriété à l’égard de la chose dont on se charge.

☞ Nous faisons porter ce que, par foiblesse ou par bienséance, nous ne pouvons porter nous mêmes. Nous ordonnons qu’on nous apporte ce que nous souhaitons avoir. Nous faisons transporter ce que nous voulons changer de place. Nous permettons d’emporter ce que nous laissons, ou donnons aux autres.

☞ Les Crocheteurs portent les fardeaux dont on les charge. Les domestiques apportent ce que leurs Maîtres les envoyent chercher. Les Voituriers transportent les marchandises que les Commerçans envoyent d’une Ville dans une autre. Les voleurs emportent ce qu’ils ont pris.

Apporter, se dit aussi des choses que l’on amène, que l’on conduit. Ce vaisseau a apporté des Indes plusieurs marchandises. Les Courtiers apportent des lettres. Les torrens apportent beaucoup de sable & de fange dans les vallées.

Apporter, se dit figurément en choses morales, & signifie, 1.o Venir dire : on nous apporta hier les nouvelles de la perte de la bataille. 2.o Alléguer : apportera-t-il son âge pour excuse ? Apporter de mauvaises raisons pour se défendre. Ablanc. Cet Avocat a apporté plusieurs lois & autorités pour la défense de sa cause. Il signifie, 3.o être la cause de quelque chose : cette prise apportera de la honte aux vainqueurs. Id. Les dissentions publiques apportent de grands malheurs. Il faut tâcher de regagner dans la vieillesse, par un mérite solide, ce que l’on perd par le dégoût que l’âge apporte. S. Evr.

☞ Il signifie aussi employer. Apporter beaucoup de précaution, des facilités, des tempérances dans une affaire. Adhibere.

On dit proverbialement, bien venu celui qui apporte, on sous-entend des présens.

On dit d’une femme, qu’elle a apporté beaucoup de bien en mariage, pour dire, qu’elle a eu beaucoup de bien en mariage. Acad. Fr.

APPORTÉ, ÉE. part.

APPOSER. v. a. Terme de pratique. Appliquer une chose sur une autre. Apponere. Une adjudication seroit nulle, si on n’avoit apposé des affiches aux lieux nécessaires. On appose des sauvesgardes sur les portes des maisons. Apposer le sceau, le scellé. Obsignare. Un Commissaire n’est point paresseux, quand il faut apposer un scellé en quelque lieu. Dans les provinces, ce sont les Juges qui apposent eux même le scellé. Le Procureur du Roi peut faire apposer le scellé sur les biens d’une personne morte, pour la conservation des droits des héritiers mineurs, ou absens. Les créanciers d’un débiteur absent, ou d’un banqueroutier, peuvent faire apposer le scellé chez lui. Pour faire une saisie réelle, il faut apposer des brandons & panonceaux.

On dit apposer une condition à un contrat, à un traité, apposer une clause extraordinaire à un contrat, pour dire y mettre, y insérer une condition. Acad. Franç.

APPOSÉ, ÉE. part. Appositus.

APPOSITION. s. f. Action d’apposer une chose sur une autre. Appositio. Le scellé se fait par apposition d’un sceau public sur les coffres & serrures d’une maison. Consignatio. On ferme les lettres par l’apposition d’un cachet. On dit aussi l’Apposition des affiches & des écriteaux, &c.

Apposition, se dit aussi en Physique des corps qui prennent leur accroissement par la jonction des parties de même espèce que celles dont ils sont composés. On croit que la plûpart des minéraux se forment par apposition des parties qui se joignent & s’attachent ensemble.

Apposition. Terme de Grammaire. C’est une figure qui consiste à mettre deux ou plusieurs substantifs de suite au même cas, sans conjonction. Par exemple, Flandre, théâtre sanglant où se passent tant de scènes tragiques, triste & fatale contrée, trop étroite pour contenir tant d’armées qui te dévorent. Flech. En latin on met souvent le nom commun & le nom propre au même cas ; ce qu’on appelle Apposition ; Urbs Roma, Fluvius Sequana. Au lieu qu’en français, l’ordinaire dans ces rencontres est de mettre le nom propre au génitif. La ville de Rome, la rivière de Seine. Gram. gen. & rais.

☞ On observe avec raison dans le Dict. Encyc. que selon cette définition, ces façons de parler, la foi, l’espérance, la charité sont trois vertus Théologales ; S. Pierre, S. Matthieu, S. Jean, &c. étoient Apôtres, qui ne sont que des dénombremens, seroient des appositions ; qu’ainsi l’on doit dire que l’apposition consiste à mettre ensemble sans conjonction deux noms dont l’un est un nom propre, & l’autre un nom appellatif ; ensorte que ce dernier est pris adjectivement, comme qualificatif de l’autre. Flandre, Théâtre sanglant… Cicéron, l’Orateur Romain… Ainsi le rapport d’identité est la raison de l’apposition.

APPRAYER. v. a. Terme de Coutume. C’est mettre une terre en pré. Ragueau.

APPRÉBENDEMENT. s. m. Terme en usage parmi les Dames Chanoinesses de Remiremont. C’est la cérémonie de la réception d’une Chanoinesse, réception qui lui donne droit à une prébende. Voyez au mot Barbette.

APPRÉBENDER. v. a. En usage à Rémiremont, chez les Chanoinesses de cette abbaye. Recevoir une Chanoinesse, lui donner une prébende. Præbenda donare.

APPRÉCIATEUR. s. m. Celui qui met le prix légitime aux choses. Æstimator. On a ordonné que cette maison seroit estimée, & mise à prix par des experts & appréciateurs. Les appréciateurs des grains. ☞ Dans l’usage ordinaire, ce mot se joint toujours à quelque épithète. Juste appréciateur du mérite.

APPRÉCIATIF. adj. m. Amour appréciatif ; terme de Théologie. Aimer Dieu d’un amour appréciatif, c’est l’aimer plus que toute autre chose ; & l’amour appréciatif est un amour de Dieu sur toutes choses. C’est être prêt de tout faire, de tout perdre, de tout souffrir, plutôt que de lui déplaire. Le commandement de Dieu nous oblige à l’aimer de cet amour appréciatif.

APPRÉCIATION. s. f. Estimation de la valeur d’une chose. Æstimatio. On ne le dit guère que des grains, denrées, ou choses mobiliaires. On condamne les débiteurs à payer les choses dues en espèce, sinon la juste valeur, suivant l’appréciation qui en sera faite par experts.

APPRÉCIER. v. a. Estimer & mettre un prix à une chose ; en déterminer le prix ou la valeur. Æstimare, pretium imponere, statuere. On apprécie les grains des redevances seigneuriales ou sur le prix des trois dernières années, ou sur le pied de ce qu’ils ont valu au jour du marché le plus proche du terme de l’échéance, suivant les extraits qu’on en trouve aux greffes des Justices des lieux. Apprécier des meubles, un fauteuil, une tapisserie. Ce livre a été apprécié à tant. On dit dans le même sens apprécier le mérite de quelqu’un.

APPRÉCIÉ, ÉE. part. Æstimatus. Prendre les choses sur le pied qu’elles ont été appréciées.

Ces mots viennent d’appretiare. Quelques-uns les font venir de l’italien aprezzare.

APPRÉHENDER. v. a. Terme de Palais, signifie, prendre, saisir. Apprehendere, comprehendere. Un tel sera pris & appréhendé au corps, & constitué prisonnier.

Appréhender, en termes de Palais, signifie aussi accepter. Adire hæreditatem ou apprehendere, capescere. Appréhender une succession, la prendre & l’accepter. Une succession à laquelle un tuteur a renoncé, peut être appréhendée par son pupille, quand il est parvenu à sa majorité. On peut instituer plusieurs héritiers avec subordination les uns aux autres, afin que si les premiers nommés ne veulent ou ne peuvent pas appréhender la succession, elle puisse être recueillie par les derniers, chacun suivant l’ordre & le degré dans lequel il est institué.

APPRÉHENDER. v. a. Craindre, avoir peur. Metuere, vereri, reformidare. Ce mot se construit de plusieurs manières. 1.o Il veut tous les noms qui suivent à l’accusatif, ainsi que tous les autres verbes actifs : un brave homme ne doit point appréhender la mort. On doit appréhender la pauvreté, comme quelque chose d’affreux. Il appréhendoit une paix fourrée. 2.o Il veut quelquefois la particule de & le verbe qui suit à l’infinitif : on doit sur toutes choses appréhender d’offenser Dieu. Les mondains & les voluptueux appréhendent extrêmement de mourir. 3.o Il veut quelquefois la particule que, & le verbe qui suit au subjonctif. J’appréhende que quelqu’un ne vous dresse des embûches. Vos amis appréhendent que vous ne vous perdiez vous même. Nous devons appréhender que la mort ne nous surprenne. 4.o Il veut quelquefois la préposition pour ; j’appréhende pour sa vie, pour sa liberté, pour son salut. Dans un si grand malheur chacun appréhenda pour soi. Il n’appréhendait rien ni pour lui, ni pour sa religion.

☞ M. l’Abbé Girard distingue ainsi les mots craindre, appréhender, redouter, avoir peur qui paroissent se ressembler, & fixe leur vraie signification. On craint par un mouvement d’aversion pour le mal, dans l’idée qu’il peut arriver. On appréhende, par un mouvement de désir pour le bien, dans l’idée qu’il peut manquer. On redoute par un sentiment d’estime pour l’adversaire, dans l’idée qu’il est supérieur. On a peur par un foible d’esprit pour le soin de sa conservation, dans l’idée qu’il y a du danger. Le défaut de courage fait craindre. L’incertitude du succès fait appréhender. La défiance des forces fait redouter. Les peintures de l’imagination font avoir peur. Le commun des hommes craint la mort au-dessus de tout. Les gens d’honneur pensent que l’infamie est ce qu’il y a de plus à craindre. Plus on souhaite ardemment une chose, plus on appréhende de ne la pas obtenir. Un Auteur doit toujours redouter le jugement public. Les femmes ont peur de tout.

APPRÉHENDÉ, ÉE. part. Il a les significations de son verbe en latin comme en françois.

APPRÉHENSIF, IVE. adj. Timide, qui craint ce qui n’est guère à craindre. Timidus, meticulosus, formidolosus. Il s’est dit, & ne se dit plus.

☞ APPRÉHENSION. s. f. Mot qui a différentes acceptions.

En termes d’Anatomie, il se prend pour l’action principale de la main, par laquelle elle prend & serre quelque chose. L’action de la main est l’appréhension. L’homme a deux mains afin de la mieux faire. Dionis. prehensio, apprehensio.

Appréhension. Terme de Palais, signifie la prise du corps d’un criminel ou d’un débiteur. Comprehensio.

Appréhension, en termes de Logique, signifie la première idée que l’esprit se forme de quelque chose, sans en porter aucun jugement. La première opération de l’entendement est l’appréhension. Intellectio, apprehensio.

APPRÉHENSION. Synonyme de crainte, peur. Timor, metus. Il a grande appréhension du tonnerre. Mon sérieux, mon embarras marquoient assez l’extrême appréhension que j’avois d’elle & de son mérite. Dieu ne nous menace de ses châtimens, que pour nous retenir dans de justes appréhensions, nous empêcher de tomber dans le relâchement. Boss.

Appréhension. Allarme, effroi, terreur, crainte, frayeur, épouvante, peur, synonymes. L’appréhension naît de ce qu’on attend. L’alarme de ce qu’on apprend. L’effroi de ce qu’on voit. La terreur de ce qu’on imagine. La crainte de ce qu’on fait. La frayeur de la présence subite du danger. L’épouvante de ce qu’on présume. La peur de l’opinion qu’on a.

☞ APPRENDRE. v. a. Il se conjugue comme prendre. Acquérir une connoissance qu’on n’avoit pas. Discere. Apprendre la Philosophie, l’Histoire, les Mathémathiques. Apprendre à lire, à chanter, à danser. apprendre une nouvelle.

☞ On dit proverbialement qu’il fait bon vivre, & ne rien savoir, on apprend toujours.

Apprendre, signifie aussi, enseigner, donner à quelqu’un une connoissance qu’il n’avoit pas. Docere. Il y a des Maîtres pour apprendre aux jeunes gens les sciences & les arts. C’est un tel qui m’a appris la Philosophie.

Apprendre, faire savoir. Nuntiare, renuntiare. C’est un tel qui m’a appris cette nouvelle.

Apprendre. Instruire. Certiorem facere. Apprenez-moi son secret, la résolution qu’il a prise.

Apprendre, être informé de quelque chose. Accipere auditione, famâ aliquid accipere. Sa présence nous fait voir quelque chose de plus merveilleux que tout ce qu’un bruit confus, & la voix de tant de nations avoit pu vous apprendre. Pat.

Apprendre, signifie quelquefois s’accoutumer, prendre une ferme résolution de faire une chose. Apprenez à user comme il faut de votre fortune. Apprenez à ne point abuser des talens que Dieu vous a donnés. Apprenez à vous endurcir au travail.

Ainsi par la vertu, & non par la durée,
Notre vie ici-bas doit être mesurée ;
Et j’aurais donc vécu bien inutilement,
Si je n’avais appris à mourir un moment.

M. De Scart.

Apprendre, signifie encore : se mettre quelque chose bien avant dans l’esprit & dans la mémoire, afin d’y faire une sérieuse attention. Discere. Apprenez que vous devez aimer Dieu sur toutes choses. Apprenez de moi que je suis débonnaire, disoit le Fils de Dieu.

Apprenez, que suivi d’un nom si glorieux,
Par-tout de l’univers j’attacherais les yeux. Rac.

Apprendre, se dit aussi pour, pénétrer, découvrir, deviner, prévoir. Discere, cognoscere, pervidere, intelligere. Plusieurs croient que par les figures de la Géomance, on peut apprendre le bon ou le mauvais succès d’une entreprise. Apprendre par les sacrifices le succès des affaires. Vaug.

☞ On dit par manière de menace à quelqu’un qui a fait une faute, je lui apprendrai son métier, je lui apprendrai à vivre : c’est-à-dire, je trouverai bien le moyen de le ranger à son devoir. Apprenez à qui vous vous jouez. Faites attention, considérez.

☞ On dit aussi que les bêtes nous apprennent à vivre, pour dire que les hommes peuvent quelquefois tirer d’utiles instructions de ce qu’ils voient faire aux bêtes.

Apprendre & étudier, synonymes. Etudier, dit M. l’Abbé Girard, c’est uniquement travailler à devenir savant. Apprendre, c’est y travailler avec succès. On étudie pour apprendre, & l’on apprend à force d’étudier. On ne peut étudier qu’une chose à la fois ; mais on peut en apprendre plusieurs ; cela dépend de la connexion qu’elles ont avec celle qu’on étudie.

☞ Plus on apprend, plus on sait, & quelquefois plus on étudie, moins on sait. Les plus savans ne sont pas ceux qui ont le plus étudié ; mais ceux qui ont le plus appris.

☞ On voit des personnes étudier continuellement sans rien apprendre, & d’autres tout apprendre sans rien étudier.

☞ Le temps de la jeunesse est le temps d’étudier ; mais ce n’est que dans un âge avancé qu’on apprend véritablement ; car il faut que l’esprit soit formé pour digérer ce que le travail a mis dans la mémoire.

Apprendre & s’instruire, synonymes. Il semble qu’on apprend d’un maître, en écoutant ses leçons, & qu’on s’instruise par soi-même, en faisant des recherches. Quelquefois on apprend ce qu’on ne voudroit pas savoir ; mais on veut toujours savoir les choses dont on s’instruit.

☞ On apprend les nouvelles publiques par la voix de la renommée. On s’instruit de ce qui se passe dans le cabinet par ses soins & son attention à observer & à s’informer.

☞ Il arrive souvent qu’on oublie ce qu’on avoit appris ; mais il est rare d’oublier les choses dont on s’est donné la peine de s’instruire. Pour devenir habile, il faut commencer par apprendre de ceux qui savent & travailler ensuite soi-même, comme si on n’avoit rien appris.

Apprendre, enseigner, instruire, synonymes. Apprendre, c’est donner des leçons dont on profite. Enseigner, c’est uniquement donner des leçons. Instruire, c’est mettre au fait des choses par des mémoires détaillés.

☞ Enseigner & apprendre ont plus de rapport à ce qui est propre à cultiver l’esprit & à former une belle éducation : c’est pourquoi l’on s’en sert à propos, lorsqu’il est question des arts & des sciences. Instruire a plus de rapport à ce qui est utile à la conduite de la vie & au succès des affaires ; ainsi il est à la place, lorsqu’il s’agit de quelque chose qui regarde ou notre devoir ou nos intérêts.

☞ Le Professeur enseigne dans les écoles publiques ceux qui viennent entendre ses leçons. L’Historien apprend à la postérité les événemens. Le Prince instruit ses Ambassadeurs de ce qu’ils ont à négocier. Le pere instruit aussi les enfans de la manière dont ils doivent vivre dans le monde.

☞ Il faut savoir à fond pour être en état d’enseigner. Il faut de la méthode & de la clarté pour apprendre aux autres ; de l’expérience & de l’habitude pour instruire. Bien des gens se mêlent d’enseigner ce qu’ils devroient encore étudier. Quelques-uns en apprennent aux autres plus qu’ils n’en savent eux-mêmes. Peu sont capables d’instruire.

Apprendre, informer, faire savoir, synonymes. Informer, c’est avertir les personnes des événemens qui peuvent être de quelque conséquence. Faire savoir, c’est simplement rapporter ou mander fidèlement les choses. Voyez ces mots.

APPRIS, ISE. part. Eruditus, institutus, edoctus. On dit familièrement qu’un jeune homme est bien appris, lorsqu’il sait & pratique toutes les règles de la civilité & de la bienséance.

APPRENTIF, ou plutôt APPRENTI. s. m. Se dit en termes de Commerce, de ceux qui apprennent les arts méchaniques chez les maîtres, & alors il signifie proprement celui qui passe chez un maître le temps convenable, & marqué par les statuts, pour apprendre un métier. Tiro. Les artisans ne sauroient tenir qu’un apprenti. Il faut obliger les apprentis de servir un certain temps.

☞ On le dit aussi figurément d’une personne peu habile dans les choses dont elle se mêle, de celui qui est novice dans les arts & dans les sciences. Il n’est point apprenti à manier les armes. Un apprenti Peintre ne pouvant exprimer les charmes & les traits d’Hélène, s’avisa de mettre beaucoup d’or à son tableau : ce qui fit dire à son maître, qu’il l’avoit faite riche, ne l’ayant pu faire belle. Entretiens d’Aris. & d’Eug. Tiro usu forensi, qui est encore apprenti dans le métier d’Avocat, qui n’a point encore l’expérience du barreau.

On dit proverbialement, apprenti n’est pas maître, pour dire, qu’un coup d’essai n’est pas parfait.

☞ APPRENTIE. s. f. C’est, disent les Auteurs du grand Vocabulaire, quelqu’une qui s’instruit dans un métier. N’en déplaise aux Auteurs, cette façon de parler est mauvaise. On ne s’instruit point dans un métier, on l’apprend. On apprend d’un maître ; on s’instruit soi-même. Voyez Apprendre. Puella tirocinio mancipata. L’apprentie d’une coëffeuse. Jeune apprentie. Tiruncuata.

La République de Platon.
Ne seroit rien que l’Apprentie
De cette famille amphibie.

La Font. dans son discours à Madame de la Sablière, en parlant des Castors.

☞ Comme on dit apprenti plutôt qu’apprentif, on doit dire apprentie plutôt qu’apprentive. Ainsi on n’auroit pas dû changer le vers de la dixième satire de Boileau, où on lisoit

Vais-je épouser ici quelque Apprentie Auteur ?

& dans lequel on a mis depuis apprentive auteur.

☞ Les Auteurs du grand Vocabulaire, toujours tournés à la critique, traitent de longue dissertation cette remarque, quoiqu’exprimée en peu de mots. Il n’y avoit qu’à écrire de cette manière, disent-ils, sans dissertation. Non, cela ne suffit pas toujours. On n’est pas cru sur sa parole, quand il y a des raisons pour & contre.

☞ Dussent-ils encore le trouver mauvais, j’ajouterai que, malgré l’autorité de l’Acad. qui dit apprentie, le mot d’apprentisse est beaucoup plus en usage : d’où je conclus qu’il est meilleur ; puisque l’usage est le maître des langues vivantes.

☞ APPRENTISSAGE. s. m. Etat, occupation, étude d’un apprenti. Tirocinium, rudimentum. Mettre quelqu’un en apprentissage. Faire son apprentissage. Etre, entrer en apprentissage. Sortir d’apprentissage. Tirocinia ponere.

Apprentissage, se dit aussi du temps que les apprentis doivent être chez les maîtres. On ne reçoit point de maître par chef-d’œuvre, qu’il ne justifie d’avoir fait son apprentissage. Les brevets d’apprentissage doivent être enregistrés dans le registre de la Communauté durant son apprentissage.

Brevet d’Apprentissage, est l’acte passé pardevant Notaires, par lequel l’apprenti s’oblige envers un maître moyennant une somme, ou quelquefois à la charge de lui donner plusieurs années de son service.

Apprentissage, se dit aussi au figuré, & signifie le commencement d’un exercice, l’essai que l’on fait de ce qu’on a appris. Vous eussiez fait sur moi l’apprentissage d’une impitoyable vertu. Voit. Comme le Prince étoit né pour la guerre, il ne lui fallut point d’apprentissage pour le former. Bourdal.

Voudrois-tu qu’à mon âge,
Je fisse de l’amour le vil apprentissage ? Racin.

☞ On le dit particulièrement des épreuves que l’on hasarde. Les jeunes Chirurgiens font leur apprentissage sur les pauvres malades.

Apprentissage, en termes de Fauconnerie, se dit aussi des leçons que donnent les vieux faucons ou autres oiseaux de proie, à leurs petits, pour voler & prendre le gibier.

APPRENTISSE. Voyez Apprentie.

Apprentisse. C’est ainsi, selon Columelle, qu’on appelle une jeune chienne qui a mis bas pour la première fois. Tiruncula.

APPRÊT. s. m. Ce qu’on prépare pour quelque cérémonie qui n’est pas éloignée pour quelque réjouissance. Apparatus, apparatio. Dans ce sens il ne se dit guère qu’au pluriel. On fait de grands apprêts pour l’entrée du Roi. On fait des apprêts à Versailles pour un grand festin. On dit que rien n’approcha jamais des magnifiques apprêts que l’on fit l’année 1697 pour les nôces du Duc de Bourgogne & de la Princesse de Savoie.

Des plus riches habits les apprêts éclatans
Réparent faiblement les injures du temps. Corn.

Rome de tant d’apprêts, qui s’indigne & se lasse,
N’a point accoutumé les Rois à tant d’audace. Crebil.

On dit aussi les apprêts de guerre. Au regard des apprêts de guerre, il les fit si sécrètement, que les Portugais n’en eurent aucune nouvelle, ni aucun soupçon. Bouh. Xav. Liv. III. Préparatifs de guerre est le vrai mot.

Apprêt, signifie aussi manière d’apprêter, & se dit chez les Artisans, & sur-tout chez les Chapeliers, de la lie, des gommes, & autres drogues qu’ils mettent dans leurs chapeaux. Quand ils veulent bien vanter un chapeau, ils disent qu’il n’y a guère d’apprêt, ☞ c’est-à-dire, qu’il est bien foulé, & qu’il n’y a point trop de gomme.

☞ On dit aussi l’apprêt des cuirs ; pour dire, la manière de les apprêter.

Apprêt, se dit aussi chez les Vitriers, de la couleur qu’on met sur le verre. Savoir l’apprêt des couleurs, c’est savoir colorier le verre. ☞ Ici le mot d’apprêt ne désigne pas l’action d’apprêter les couleurs, mais celle de les appliquer sur le verre. La couleur d’apprêt étoit autrefois fort en usage pour les vitreaux des églises.

On dit aussi qu’il y a de l’apprêt dans de la toile ; pour dire, qu’on employe de la chaux ou de la colle pour la blanchir.

Apprêt, dans les manufactures de lainage, signifie les façons que l’on donne aux étoffes de laine, après qu’elles ont été fabriquées & foulées, afin de les rendre plus unies, d’une meilleure qualité, plus agréables à la vue, & d’un meilleur débit. Quand on dit qu’une pièce de drap a eu tous ses apprêts, cela veut dire qu’elle a été lainée, tondue & pressée comme il faut.

Apprêt des étoffes de soie, & principalement des satins. C’est la façon de leur donner du lustre & de la consistance.

Apprêt. Terme de Tonnelier. C’est ainsi qu’on appelle un petit morceau de bois, taillée en coin, qu’on chasse entre le cercle & la douve, pour serrer le joint ou le fond.

Apprêt, se dit aussi de l’assaisonnement des viandes. L’apprêt des viandes coûte d’ordinaire plus que les viandes mêmes.

APPRÉTADOR. s. m. Ornement que les femmes mettent sur leur tête, fait d’une chaîne de diamans, d’un filet de perles, ou autres choses semblables, pour se coëffer, & serrer leurs cheveux. Ce mot est purement espagnol, & vient de apretar, qui signifie serrer.

La veuve sur la fin vient à la sépulture,
Rompt son apprétador, coupe sa chevelure,
Et jette dans la fosse avec tous ses atours,
La matière & l’espoir des secondes amours.

P. le Moine.

APPRÊTE. s. f. Petits morceaux de pain menus, & taillés en long, qu’on prépare pour manger des œufs. ☞ C’est ce qu’on appelle communément mouillette. Faire, couper des apprêtes. Il est vieux.

☞ APPRÊTER. v. a. Souvent employé avec le pronom personnel. Préparer, mettre en état les choses nécessaires pour ce qu’on a dessein de faire. Parare, præparare, accurare, instruere. Un homme qui est sur le point de partir, apprête ce qu’il faut pour son voyage. Le Cuisinier apprête le diner, à diner. Un Peintre apprête ses couleurs. Cet homme s’apprête à partir. Cet homme s’apprête pour combattre. On dit dans l’exercice, soldat, apprêtez-vous, préparez-vous à tirer. Ce Comédien s’apprête pour jouer.

Quoi ! dis-je y en frémissant, la mort que je m’apprête
Va donc à Tiridate assurer sa conquête ? Creb.

Apprêter, se dit particulièrement en parlant de la fonction des Officiers de bouche. Cet Officier apprête bien les viandes ; c’est-à-dire, qu’il les assaisonne bien. Condire.

Apprêter, se dit en choses spirituelles & morales. Dieu apprête à ses élus la récompense de leurs œuvres. Un précepteur doit apprêter à ses écoliers les choses toutes digérées. Aujourd’hui l’on n’apprête pas si bien les louanges qu’autrefois. Font. Sa délicatesse est fatiguée de beaucoup d’éloges mal-apprêtés. Bens.

Je frémis des ennuis que vous vous apprêtez.
.


Et tout ce qu’on s’apprête encore de regrets. Id.

Apprêter. Terme de joueur de gibecière & de filoux : c’est préparer & disposer les instrumens dont ils se servent à tromper, & les rendre propres à faire leurs tours. Il y a quantité de tours de cartes, que l’on ne sauroit faire sans des cartes apprêtées. ☞ Au jeu, on appelle cartes apprêtées, celles qui sont arrangées d’une certaine façon pour tromper & gagner toujours.

On dit en termes d’agriculture & de jardinage. Les arbres s’apprêtent à nous donner bien du fruit cette année. Voilà des poiriers bien apprêtés. Liger. Arbres bien ou mal apprêtés, c’est la même chose qu’arbres bien ou mal aboutis. La Quint.

On dit proverbialement d’un ridicule, qu’il a apprêté à rire à toute la compagnie.

Apprêter des lettres. Terme de Fondeur de caractères d’Imprimerie. C’est enfermer entre les deux branches du justificateur autant de lettres nouvellement fondues qu’il y en peut tenir, pour voir si elles sont bien en ligne, & pour leur faire au pied cette petite cavité ou rainure, qui sert à en assurer la position dans les formes d’Imprimerie.

Apprêter. Terme de Chapelier. C’est mettre de l’apprêt à un chapeau, pour lui donner plus de force, & le rendre plus ferme.

Apprêter, est aussi un terme de Bonnetier, qui signifie, rendre la marchandise plus ferme & plus belle, en y mettant de l’apprêt.

APPRÊTÉ, ÉE. part. Paratus.

APPRÊTEUR. s. m. Ouvrier qui apprête les marchandises, qui leur donne de l’apprêt.

Apprêteur. Ouvrier qui peint sur le verre. Vitrorum Pictor.

APPRIVOISER. v. a. Adoucir le naturel sauvage par l’art & par l’industrie. rendre doux & traitable. Domare, mansuefacere, cicurare. Il n’y a guère d’animal si farouche qu’on ne puisse apprivoiser. On dit que le sanglier, le castor, la chauvesouris, l’hirondelle ne s’apprivoisent jamais. Les Carthaginois envoyerent en exil Hannon, pour avoir eu l’industrie d’apprivoiser un lion, appréhendant que celui qui apprivoisoit si bien les bêtes les plus farouches, ne captivât les inclinations du peuple.

Apprivoiser, se dit figurément des hommes dans les choses spirituelles & morales. Solon sut insensiblement apprivoiser avec les idées de justice, d’ordre & de loi, un peuple nourri dans la licence, & persuadé qu’il n’y avoit d’autres préservatifs contre l’oppression, que la force & la violence. Tourr. ☞ Il y a des gens peu sociables, qu’on a bien de la peine à apprivoiser.

Apprivoiser, avec le pronom personnel, signifie quelquefois, se rendre familier avec quelqu’un. Familiariter agere cum aliquo. Il est dangereux de se trop apprivoiser avec les Princes. Il se prend aussi pour s’accoutumer. Assuefieri. La coutume fait qu’on s’apprivoise jusqu’aux maux. Ablanc. Il n’y a point de monstre avec lequel on ne s’apprivoise peu à peu. Je tâche de m’apprivoiser avec la mort. J’admire ceux qui savent s’apprivoiser & se divertir avec tout le monde. Mont.

On s’en sert encore pour signifier, s’adoucir. Mitescere, mansuefieri. La perfidie s’apprivoise par les bienfaits. Vaug.

On dit par reproche à un homme qui prend quelques libertés, sur tout avec les femmes, vous vous apprivoisez bientôt.

APPRIVOISÉ, ÉE. part. Cicur, cicuratus, mansuefactus. Regnier a dit : jà tout apprivoisé, je mangeois sur le poing.

☞ Les animaux apprivoisés, le sont par l’art & l’industrie des hommes. Les animaux privés, le sont naturellement. Syn. Fr.

☞ Le chien, le cheval, &c. sont des animaux privés. L’ours, le lion, &c. sont quelquefois apprivoisés.

APPRIVOISEMENT. s. m. action par laquelle on apprivoise. Domitura, domitus. L’apprivoisement des bêtes les plus féroces s’est fait par l’industrie des hommes. Ce mot n’est pas reçu.

Ces mots viennent du latin, privatus.

APPROBAMUS. Terme de droit canonique. Il est purement latin ; mais les Canonistes l’ont introduit en françois, pour signifier le visa que donne l’Ordinaire à un mandat ou rescrit in forma dignum. Févret dit que l’Ordinaire à qui la commission est adressée pour le visa, ne doit pas prendre connoissance de la validité du titre, ni différer pour cela de donner son approbamus.

APPROBATEUR. s. m. Celui qui donne son approbation. Probator, approbator, comprobator. Il n’y a point de si bon livre qui n’ait ses censeurs, ni de si méchant qui n’ait ses approbateurs. Il y a tant de dupes dans le monde qu’on peut avoir des approbateurs sans avoir un véritable mérite. Bell. Le plus mauvais plaisant a ses approbateurs, Boil.

On appelle plus particulièrement, Approbateur, celui qui a donné son approbation publique à un ouvrage, à un livre. Les Approbateurs de son livre sont tels & tels Docteurs.

Dans ce mot, & dans les trois suivans, le premier p ne se fait sentir tout au plus que dans une prononciation soutenue & oratoire ; car dans la conversation, & le discours ordinaire, les personnes mêmes qui parlent le mieux ne le font point ou presque point sentir.

APPROBATIF, IVE. adj. Qui témoigne de l’approbation. Une douce inclination de tête est un geste approbatif. Sentence approbative.

☞ APPROBATION. s. f. Ce mot s’entend généralement de l’agrément, du consentement que l’on donne à quelque chose. Il se prend alors pour consentement. C’est une affaire faite, si le pere & la mere y donnent leur approbation. Il se prend plus particulièrement pour un jugement favorable & avantageux qu’on fait de quelqu’un ; un témoignage qu’on donne de l’estime qu’on fait d’une chose ou d’une personne. Probatio, approbatio. La vertu de ce Prélat a une approbation universelle. Il y a des gens qui prennent pour approbation la flatteuse complaisance, & le respect qu’on a pour eux. Flech. Mendier l’approbation de ses amis pour quelque ouvrage. Scar. Souvent, dit Pline, rien n’est plus généralement désaprouvé, que ce qui paroît se faire avec une approbation générale.

Approbation, en Librairie, est un acte par lequel le Censeur nommé pour l’examen d’un livre, déclare l’avoir lu, & n’y avoir rien trouvé qui puisse ou qui doive en empêcher l’impression. La permission d’imprimer est accordé sur l’approbation du Censeur.

☞ En matière Ecclésiastique, approbation se dit des pouvoirs qu’un Evêque donne à un Prêtre de prêcher & de confesser dans son diocèse.

APPROBATRICE. s. f. Celle qui approuve, qui donne son approbation. C’est assez que je vous aie pour mon approbatrice. Probatrix.

APPROCHANT, ANTE. part. adj. Qui approche de quelque lieu. Accedens, appropinquans. Ce mot n’est pas usité en ce sens.

Approchant. adj. Qui approche, qui a du rapport & de la ressemblance. Similitudine accedens, &c. Son style est fort approchant de celui des anciens. Il y a des mensonges fort approchans de la vérité. Falsa veris finitima. Cette couleur est fort approchante de celle-là. Vaug. La condition la plus approchante de la liberté.

Approchant, est aussi une sorte de préposition qui se construit avec la particule de quand un nom suit, & signifie, à-peu-près, environ. Ferè, penè, fermè. Je veux avoir approchant de mille écus de cette tapisserie. Il est approchant de huit heures, de midi. Il est familier.

Approchant, est aussi quelquefois adverbe, & signifie la même chose ; il se rend en latin par l’adjectif, simile, affine. Je ne lui ai point dit cela, ni rien d’approchant. Il y a dix mille hommes en cette armée, ou approchant. Circiter.

☞ APPROCHE. s. f. Mouvement par lequel une personne s’avance vers une autre. Appropinquatio, accessio. A l’approche de l’ennemi, les troupes se mirent sous les armes. L’approche des Princes est utile ou dangéreuse.

☞ On le dit aussi de ce qui avance, ou paroît s’avancer vers nous. Un vieillard craint les approches de la mort. Les hirondelles sentent l’approche de l’hiver. L’approche de la nuit lui fit doubler le pas.

Approches, se dit figurément en choses morales. Il y a apparence que l’accommodement réussira ; chacun fait des approches de son côté, & se relâche de ses prétentions. Il se dit aussi en termes de galanterie, d’amour & d’amitié. C’est par la complaisance que l’amour fait les approches d’un cœur. La Suze.

Approches, au pluriel, se dit en termes de guerre, de tous les travaux qui se font pour s’avancer vers une place qu’on attaque, & de l’attaque même, comme tranchées, sappes, logemens, mines. Successio, Admotio exercitus ad muros, ad urbem, &c. On appelle les tranchées, lignes d’approches. Les assiégés font quelquefois des contre-approches pour interrompre les approches des assiégeans.

☞ On dit qu’une ville est de difficile approche ; pour dire, qu’il est difficile d’en faire les approches.

Approche. (greffer en) En terme de Jardinage. Voyez Greffe.

Approche. Terme de Fondeur de caractères d’imprimerie. Distance que doivent avoir les lettres d’imprimerie, à côté les unes des autres. Un caractère est approché quand toutes les lettres sont pressées les unes contre les autres, ce qui dépare l’impression.

☞ On entend par approche, en Imprimerie, l’union de deux mots qui sont joints, quoiqu’ils doivent être espacés, ou la désunion d’un mot, dont les syllabes sont espacées, quand elles doivent être jointes. Encyc.

Lunettes d’approche. Voyez Lunettes.

APPROCHER. v. a. Mettre une chose auprès d’une autre, la rendre moins éloignée qu’elle n’étoit. Admovere. Approchez ce siége, approchez la lumière. Approcher le canon de la place.

On dit qu’une lunette approche les objets, pour dire, qu’elle les fait voir comme étant plus proches. Acad. Fr.

Ce mot vient de appropriare, qui se trouve dans l’Exode. Menage. Quelques-uns le font venir d’appropinquare.

Approcher, dans un sens figuré, signifie avoir ou donner un libre accès. On dit approcher le Prince. Approcher la personne du Roi. Il approche l’oreille du Prince. Vaug. Et en parlant d’un Prince, d’un grand Seigneur, on dit qu’il a approché quelqu’un de lui ; pour dire, qu’il l’a admis dans sa familiarité, ou qu’il lui a donné quelque emploi qui l’attache à sa personne.

☞ On dit d’un homme de difficile accès, qu’on ne sauroit l’approcher.

Avoir accès, aborder, approcher, considérés comme synonymes. On a accès où l’on entre. On aborde les personnes à qui l’on veut parler. On approche celles avec qui l’on est souvent. Les Princes donnent accès : ils se laissent aborder : & ils peuvent permettre qu’on les approche. Qui joint à la hardiesse un esprit souple & flatteur, peut approcher les grands avec plus de succès qu’un autre. Quand on a dessein de s’insinuer dans les bonnes grâces des gens, on essaie de les approcher. Ceux qui approchent les Ministres de près, sentent bien que le public ne leur rend presque jamais justice ni sur le bien ni sur le mal. La belle éducation fait qu’on n’aborde jamais les dames qu’avec un air de respect, & qu’on approche toujours avec une sorte de hardiesse accompagnée d’égards.

Approcher, se dit encore activement pour exprimer l’accouplement des animaux. Les œufs des femelles qui n’ont point été approchées, par les mâles sont inféconds.

Approcher, est aussi neutre, & signifie être proche, devenir proche. Appropinquare. L’heure approche, le temps approche. Instat, imminet nox. La nuit approche. On ne sauroit approcher de cette place. Accedere. Le temps de la jeunesse est presque le seul où la vérité approche des Rois avec quelque liberté. Nicol. Les plus fermes ne voient point approcher la mort avec indifférence. La Roch.

Approcher, se dit au figuré, pour venir bien près ; atteindre presqu’au but que l’on se propose ; être presque semblable, avoir quelque convenance, quelque rapport, quelque parité. Proximè accedere ad, &c. il n’a pas trouvé le mot de l’énigme, mais il en a fort approché. Si ce Traducteur n’a pas égalé son original, il en a fort approché. Cela approche fort de la vérité. Un Poëte approche fort de l’Orateur. L’amour approche de la folie. On dit même, approcher de fort loin, quoique ces termes d’approcher & de loin semblent contradictoires. Longè, longo intervallo accedere. Tant s’en faut qu’il ait atteint la perfection de son original, il n’en a approché que de fort loin. Virgile a dit aussi proximus, sed longo proximus intervallo.

Approcher, se dit encore au figuré, pour se relâcher d’une partie de ses droits, de ses prétentions en faveur d’un accommodement. Aliquid de jure suo cedere, remittere. Des amis communs ont fait approcher ces deux plaideurs, sont venus à bout d’approcher ces deux plaideurs. Dans ce sens j’aimerois mieux dire rapprocher.

Approcher, est aussi récip. au propre & au figuré. Le temps s’approche. S’approcher du feu. Les hommes ont tant de peine à s’approcher, & sont si épineux sur leurs intérêts, que je ne sais comment ils peuvent s’accorder sur quelque chose. La Bruy. On sent déja que le soleil s’approche & revient à nous. Ne t’approche jamais de qui peut t’éclipser. Amelot.

Approcher le vent. Terme de Marine. S’est se servir d’un vent qui paroît contraire à la route, & le prendre de biais, en mettant les voiles de côté par le moyen des boulines & des bras.

Approcher à la pointe, à la double pointe, ou dent de chien, & à la gradine. Tous termes de Sculpteurs & de Marbriers, qui signifient, tailler & avancer un ouvrage de sculpture successivement avec ces trois outils, après l’avoir dégrossi & ébauché avec la masse & la pointe affutée de court. Scalprum, cuspidem marmori admovere.

Approcher, en termes de monnoie, se dit lorsque l’on ajuste les flans ou carreaux, pour les rendre du poids qu’ils doivent avoir : ce qui se dit particulièrement de ce qu’on en ôte d’abord, ou la première fois qu’on y touche. Nunumos legitimo ponderi exæquare.

APPROCHÉ, ÉE. part. Il a les significations de son verbe en latin comme en françois.

APPROFONDIR. v. a. Rendre plus profond, creuser plus avant. Fodere, defodere, cavare. Il faut encore approfondir le puits de cette mine. Il faut approfondir ce fossé, ces tranchées. Dans ce sens creuser paroît plus usité.

Approfondir, se dit figurément, pour dire, examiner à fonds, pénétrer dans la connoissance d’une chose. Altè penetrare, pervadere, penitùs scrutari. Il faut étudier les Auteurs qui ont approfondi les matières. Il ne faut pas toujours approfondir les choses. Pasc. Il y a des esprits qui éblouissent, & qu’on n’estime que parce qu’on ne les approfondit pas. La Bruy.

Approfondir, signifie aussi, rechercher exactement. Perquirere diligenter, accuratè scrutari. Si on approfondit toutes les circonstances de son affaire, c’est un homme perdu.

APPROFONDI, IE. part. Il a le sens de son verbe en françois comme en latin.

APPROFONDISSEMENT. s. m. Action par laquelle on approfondit. Il ne se dit ni au propre ni au figuré.

Ce mot vient du latin profundus.

APPROPRIANCE. s. f. Terme de Coutume. Prise de possession d’une chose achetée ou donnée. Vindicatio, assertio. C’est dans la Coutume de Bretagne la même chose que décret ailleurs : de même qu’ayant acquis un héritage, nous le faisons décréter pour notre sûreté, en Bretagne on poursuit l’appropriance, ou, pour mieux dire, la propriété.

APPROPRIATION. s. f. Action par laquelle on s’approprie quelque chose. L’appropriation d’une terre.

Appropriation en Juris prudence canonique, est l’application d’un bénéfice ecclésiastique à l’usage propre & perpétuel de quelque Prélat ou communautés religieuses, à un collége, afin qu’il en puisse jouir pour toujours. C’est ce que l’on appelle autrement union. Voyez ce mot.

Appropriation en Chimie, est l’état où sont mis deux corps qui ne peuvent s’unir ensemble que par le moyen d’un troisième qui dispose les deux premiers à s’unir. Acad. Fr.

APPROPRIEMENT. s. m. Dans la Coutume de Bretagne est la même chose qu’appropriance.

APPROPRIER. v. a. Rendre une chose propre, nette, agréable. Adornare, concinnare, expolire. Ce bourgeois a bien approprié sa maison depuis que je n’y suis venu. J’aimerois mieux dire, ajuster, accommoder proprement.

Approprier, signifie aussi, appliquer un passage à quelque chose qui lui convient bien, qui lui est fort propre. Accommodare. Cet Avocat a bien approprié l’espèce de cette loi à sa cause, elle y venoit fort bien. Approprier un exemple à un sujet. Ablanc.

Approprier, avec le pronom personnel, se dit des choses qu’on usurpe, & dont on se rend le maître. Vindicare sibi aliquid, asserere, addicere. Je lui avois prêté mon manteau, il se l’est approprié. S’approprier les ouvrages d’autrui. Boil. Se les attribuer, s’en dire l’auteur. Il n’y a point de nations au monde, où il y ait plus de vains titres que chez les Italiens ; ce qui vient de la facilité qu’ils ont de se les approprier. Cail. Ce favori obsède tant le Prince, & se l’approprie ainsi par une violente usurpation. Balz.

APPROPRIÉ, ÉE. part. pass. & adj. Il a les significations de son verbe en latin comme en françois.

Bénéfice approprié. Terme de droit canonique. C’est celui dont le revenu est annexé à quelque dignité ecclésiastique ou communauté qui nomme un Vicaire pour le desservir. C’est la même chose qu’uni. Voyez Union.

☞ En Angleterre, approprié & inféodé sont termes synonymes.

Ces mots viennent d’appropriare, & de proprius ; & l’on peut y faire sentir un peu les deux pp, quoiqu’on ne le fasse pas communément.

APPROVISIONNEMENT. s. m. Provision, fourniture des choses nécessaires à la subsistance d’une ville, d’une garnison, d’une flotte, d’une armée, d’un hôpital. Rerum necessariarum comparatio. Le détail de la construction des vaisseaux, de leur armement & de leur approvisionnement sera porté au bureau du Secrétaire d’Etat de la marine… Le Secrétaire d’Etat des affaires de la guerre, veillera au maintien de la discipline militaire, & prendra soin de pourvoir à l’entretien des troupes, à l’approvisionnement des hôpitaux d’armée, & à la réparation des fortifications. Merc. Oct. 1736. Déclaration du Roi du 16 Avril 1737, enregistrée au Parlement le 10 Mai suivant, qui établit un grénier dans la maison de la Salpêtriere, qui contiendra au moins dix mille muits de blé pour l’approvisionnement de Paris.

APPROVISIONNER. v. a. faire un approvisionnement. Res necessarias comparare. Il n’y a pas jusqu’à une sorte d’eau-de-vie dont il trouva le moyen d’approvisionner son vaisseau. Le P. Castel. Mém. de Trév. Voyez Approvisionnement.

APPROVISIONNÉ, ÉE. part.

☞ APPROUVER. v. a. Agréer une chose, y donner son consentement, trouver bon. Approbare, comprobare. Cette partie a approuvé & ratifié ce qui avoit été fait par son Procureur. Le Roi a approuvé ce que son Ambassadeur avoit fait.

Approuver, signifie encore autoriser, après un examen suffisant, par un témoignage authentique. L’Eglise a approuvé l’invocation des Saints, les prières pour les morts. Plusieurs Conciles ont approuvé cette doctrine. Ce Confesseur a été approuvé par l’Ordinaire. C’est le Maître du sacré Palais, qui approuve les livres à Rome.

Approuver, signifie aussi louer, trouver louable, digne d’estime. Je me passerai bien que vous approuviez mes vers. Mot. Je n’approuve point cette hypocrisie universelle ni le commerce des mensonges ingénieux, pour se tromper, qui est si fort en usage. Flec. Les hommes n’ont qu’une foible pente à s’approuver réciproquement. La Bruy. Il y a des gens de si mauvaise humeur, qu’ils ne peuvent se résoudre à approuver les meilleurs choses. Bell.

APPROUVÉ, ÉE. part. Probatus, approbatus.

APPROXIMATION. s. f. Terme d’Arithmétique & d’Algèbre. C’est l’opération par laquelle on approche toujours de plus près en plus près d’une racine, ou d’une quantité, que l’on cherche, & qu’on ne peut trouver exactement. Wallis a donné des méthodes d’approximation dans son histoire d’Algèbre, pag. 317.

Voyez encore les Transactions philosophiques, N. 215.

Approximation. Approximatio. Méthode singulière de guérir une maladie, en la transplantant, à la faveur du contact immédiat, dans un animal ou dans quelque substance végétale. Dict. de James.

☞ APPUI. s. m. Fulcrum, fulcimen, fulcimentum, fulmentum. On fait ordinairement ce mot synonyme de soutien & support. On a tort, chacun de ces mots a son idée propre. Les Vocablistes qui le définissent, support, ce qui sert à soutenir, ne disent que ce que dit l’Acad. & ne nous apprennent rien de plus touchant le caractère propre de ce mot. On donne le nom d'appui à ce qui fortifie, à ce que l’on met tout au près pour résister à l’impulsion des corps étrangers. Syn. Fr. Une muraille est appuyée par des arcs-boutans. Ce qui est violemment poussé ou ce qui penche trop a besoin d’appuis. Le soutien porte, on le place au-dessous pour empêcher de succomber sous le fardeau : une voute est soutenue par des colonnes. Ce qui est excessivement chargé, ou ce qui est trop lourd par soi-même, a besoin de soutiens. Le support aide ; il est à l’un des bouts, pour servir de jambage. Le toit d’une maison est supporté par les gros murs. Les pièces d’une certaine étendue qui sont élevées ont besoin de supports.

☞ On met des appuis pour tenir les choses dans une situation droite ; des soutiens pour les rendre solides ; des supports pour les maintenir dans le lieu de leur élévation.

Appui, hauteur d’appui. On appelle ainsi en Architecture ce qui n’est élevé qu’autant qu’il faut pour se pouvoir appuyer dessus. Mur à hauteur d’appui. Les accoudoirs des fenêtres s’appellent aussi appui, & doivent être de deux pieds huit pouces. Podium. Appui allégé, est celui qui est diminué de la profondeur de l’embrasure pour regarder plus facilement au dehors, & pour soulager le dessous. Les balustrades des jardins sont à hauteur d’appui. La pierre qui sert à s’accouder s’appelle aussi appui.

☞ Ce mot s’emploie quelquefois au figuré. Remettre quelqu’un à hauteur d’appui, c’est-à-dire au niveau des autres hommes. Vous êtes bonne quand vous dites que vous avez peur des beaux esprits. Hélas ! si vous saviez qu’ils sont petits de près, & combien ils sont quelquefois empêchés de leur personne, vous les remettriez bientôt à hauteur d’appui. Me de Sev.

☞ On donne encore assez improprement le nom d’appui au modillon ou corbeau sortant de la muraille pour soutenir une poutre. Mutulus.

Appui, se dit encore des pièces de pierre, de bois ou de fer qui sont le long des rampes des escaliers, & des galeries, qui sont à hauteur d’appui, afin d’empêcher les passans de tomber. Il y a des appuis rampans, podium aulive, & des appuis carrés, podium rectum.

☞ En Mécanique, on appelle appui ou point d’appui, le point fixe par lequel le levier est appuyé. Les ouvriers le disent d’une pierre, ou d’un éclat de bois qu’ils mettent sous leurs pinces & leviers pour remuer des pierres & fardeaux : ce qu’ils appellent aussi, Orgueil, cale, & en termes scientifiques, Hypomoclion. C’est proprement le point fixe autour duquel le poids & la puissance sont en équilibre dans le levier.

☞ Dans une balance ordinaire le point d’appui est le point milieu par lequel la balance est suspendue.

Appui. Fulcrum. En termes de Tourneur, signifie cette longue piéce de bois, qui porte des deux bouts sur les deux bras des deux poupées, & que le Tourneur a devant lui, lorsqu’il travaille, pour soutenir & affermir son outil. On l’appelle quelquefois simplement la barre du tour, mais plus ordinairement, le support.

Appui, se dit figurément pour, protecteur, défenseur. Præsidium, columen. L’Eglise a besoin d’appuis temporels. Cl. Ce Ministre est l’appui de l’Etat. Le principal appui du Prince est moins la force de ses armes, que l’estime qu’on a pour lui, & l’application qu’il a à la mériter. Le Gend. Le Seigneur est mon appui. Arn. Il est étrange à combien de choses l’âme s’attache, & combien il lui faut de petits appuis pour la tenir en repos. Nicol.