Description d’un parler irlandais de Kerry/2-6

Chapitre VI. L’adjectif : Composition et dérivation nominales.


CHAPITRE VI
COMPOSITION ET DÉRIVATION NOMINALES

§ 61. Comme dans tout groupe nominal, l’unité du composé est marquée par la prédominance d’un accent principal.

La marque de la composition est l’aspiration du deuxième terme du composé. Cependant certains groupes nominaux dont le deuxième élément n’est pas aspiré jouent le rôle de véritables composés.

On peut distinguer trois types principaux, selon que le premier élément est un nom, substantif ou adjectif, ou un préfixe.

1. Premier terme substantif. Le deuxième terme est alors également substantif, et fournit sa flexion au composé.

mʷikʹo:lʹ (muicfheóil) « viande de porc » ; mɑrtʹo:lʹ (mairt-fheóil) « viande de bœuf» ; kʷi:rʹo:lʹ (caoirfheóil) « viande de mouton » ; su:lʹi:αχənʹtʹ (súilfhéachaint) « coup d’œil » ; ku:lʹiəkəlʹ (cúilfhiacail) « dent du fond, molaire », mais fʹiəkəlʹ tosəgʹ (fiacail tosaigh) « dent de devant » ; ku:lχɑinʹtʹ (cúlchainnt) « médisance », cf. angl. backbiting; dans divers mots de type expressifs où le premier terme est pris métaphoriquement : korplɑ:r (corplár) « beau milieu » litt. « milieu de corps » ; boləglɑ:r (bolglár) litt. « milieu de ventre », même sens, etc.

Cette formation sert à traduire des composés anglais αuntobər (peanntobar) « fountain-pen ». Encore ces calques sont-ils le plus souvent de caractère livresque et artificiel, la langue parlée préférant ou emprunter le mot anglais, ou le traduire par un groupe substantif + génitif (voir § 140) : srɑuŋsgʹi:αl (sreangscéal) « télégramme » ne s’entend guère : on dit wire ; bank-holiday se traduit par lɑ: si:rʹə bʷi:ŋʹkʹ (lá saoire bainnc) « jour férié de banque », etc.

Les premiers éléments ri:- et αh‑, d’origine nominale, ont pris valeur de préfixes (§ 63).

Un substantif déterminé par un complément prépositionnel (comme un substantif déterminé par un génitif, voir § 140) peut avoir la valeur d’un composé : αunfe: (ceannfé) « honte, confusion », litt. « tête dessous » ; eirʹi:nɑrdʹə (eirghe-in-áirde) « sentiment d’excitation et d’importance », litt. « élévation en l’air ».

§ 62, II. Premier terme adjectif. Quelques adjectifs se composent avec des substantifs : kɑmɑiməd (camadhmad) « du bois tors » ; kɑməχɑinʹtʹ (camchainnt) « un propos perfide ». Mais le deuxième terme est le plus souvent adjectif, la composition ne se distinguant de la juxtaposition que par l’aspiration du deuxième terme : duvǥorəm (dubhghorm) « noir bleu, bleu sombre » : mʷè:lvʹrʹiʃtʹə (maolbhriste) « chauve-brisé, brisé de façon à avoir perdu sa crête (se dit de la vague une fois brisée) ». On passe par transitions insensibles de ce type au type III, à mesure que le premier terme perd de sa valeur concrète.

Bon nombre de ces composés sont des adjectifs de sens possessif dont le deuxième terme, formé sur un substantif à l’aide du suffixe ‑ach, n’existe pas isolé : fɑdχosɑχ (fadchosach) « aux longues jambes » ; kɑməχosɑχ (camchosach) « aux jambes fortes » ; αlχri:χ (gealchroidheach) « au cœur brillant, insouciant » ; luehi:nʹtʹinʹəχ (luathintinneach) « à l’esprit rapide » ; mʷè:lχluəsəχ (maolchluasach) « aux oreilles couchées » ; on peut former à volonté des adjectifs de ce genre, qui répondent au besoin, très marqué dans le parler, de caractériser les individus.

§ 63, III. Premier terme préfixal. Le deuxième terme est soit un substantif soit un adjectif, et donne sa flexion au composé.

Ce type tient une grande place dans le parler. Nous avons affaire non plus à des mots isolés, mais à des séries ouvertes formées à l’aide de préfixes exprimant des modalités (nombre, degré, fréquence, etc), de la notion concrète exprimée par le deuxième élément. C’est ainsi que toute une série de préfixes exprime les degrés absolus de l’adjectif.

Certains de ces préfixes sont d’origine nominale. La valeur du premier élément ressort du sens même du composé : comparer ri:hαiləχ (ritheaghlach) « maison royale », composé d’un type non vivant dans le parler, et ressortissant à la langue des contes, avec ri:vαh (rímhaith) « extrêmement bien », de formation ouverte.

αv‑, α- (neamh‑) ; négation, privation : nʹαvαʃtʹər (neamh-aistear) « oisiveté », de αʃtʹər (aistear) « dérangement » ; αvαʃtʹrʹəχ (neamhaistreach) « oisif, insouciant ».

mʹi:- (mí‑), drœh‑, drœ- (droch‑) ; péjoratifs : mʹi:hlɑ:nʹtʹə (mí-shláinte) « mauvaise santé » ; drœvαhəsəχ (droch-mhaitheasach) « ingrat ».

ɑnə- (ana‑); excellence, degré élevé : ɑnəvʹαn (ana-bhean) « une femme remarquable » ; ɑnəvuər (ana-mhór) « très grand ».

ɑ:rd- (árd‑) ; litt. « haut », plus affectif que ɑnə- : ɑ:rdlʹeʃgʹu:lʹ (árd-leisceamhail) « excessivement paresseux ».

lɑ:n- (lán‑) : litt. « plein », degré largement suffisant : lɑ:nè:stə (lán-aosta) « adulte ».

ro:- (ró‑) « trop » ; ro:è:stə (róaosta) « trop âgé ».

D’autres adjectifs peuvent être employés comme préfixes pour marquer un degré excessif ; ainsi αrəg (dearg) « rouge », dans αrəgna:rʹə (dearg-náire) « grand honte » ; ou lɑum (lom) « nu », dans lɑumhrè:χ (lom-thraochta) « totalement épuisé ».

mʹɑ:n- (meadhon‑) ; degré moyen : mʹɑ:nè:stə (meadhon-aosta) « d'âge moyen » ; un grand nombre de préfixes adjectivaux expriment divers degrés moyens, avec des valeurs plus ou moins affectives : bʹrʹαk- (breac), litt. « bigarré » ; bʹrʹαkχorhə (breac-chortha) « plutôt fatigué » ; bɑrə- (barra‑) « superficiellement » : bɑrəχαtʹə (barrachaithte) « usé mais encore bon » ; strɑk- (strac‑) « fragmentairement » : strαkʹoləs (straic-eolus) « connaissance de bric et de broc » ; lɑg- (lag) litt. « faiblement » : lɑguər (lag-fhuar) « presque froid » ; cf. également pαtʹlʹuχ (pat-fhliuch) « un peu humide » ; skœrʹαur (scoth-reamhar) « assez gros » ; αχolətəχ (meath-chodlatach) « à moitié endormi ».

αh- (leath‑), composé avec un adjectif : « à demi » : αvʹrʹiʃtʹə (leathbhriste) « à demi brisé ».

αh- composé avec un substantif peut avoir deux valeurs; « demi » : αfʹiŋʹgʹənʹ (leath-phingin) « a halfpenny » ; ou singulatif du duel (cf. § 18).

fo- (fo‑), litt. « sous », exprime une faible fréquence, une distribution sporadique : foǥʷinʹə (fo-dhuine) « quelques personnes, peu de monde » ; fohuerʹ (fo-huair) « de temps à autre » ; fohigʹ (fo-thigh) « une maison de-ci de-là » ; kor- (corr‑) a sensiblement la même valeur : korǥʷinʹə (corr-dhuine) « un homme de temps à autre ».

ɑh- (ath‑) ; redoublement : ɑhuerʹ (athuair) « la deuxième fois » ; et er ɑhuerʹəv (ar athuairibh) « de temps à autre » ; ɑχogənʹtʹ (ath-chogaint) « ruminer ».

ʃi:r- (síor‑) ; perpétuité : e ʃi:robərʹ (ag síorobair) « travaillant sans cesse ».

αrt- (ceart) ; exactitude ; αrtlɑ:r (ceartlár) « le milieu exact. »


§ 64. On peut avoir surcomposition, et combinaison des divers types que nous avons vus : ɑnəǥrœvʹαntʹi: (ana-dhroch-bhean tighe) « très-mauvaise-maitresse-de-maison » est ainsi un composé au troisième degré.

On peut laisser de côté diverses locutions prises substantivement, qui ne constituent pas des composés réguliers : nʹi:isfʹu: (ní-is-fiú) litt. « chose qui vaut la peine », « grand personnage », ironiquement ; gʹuləmolʹehe:dʹ (giolla-mo-leithéid) litt. « garçon mon semblable », « compère et compagnon », etc. Il faut en revanche signaler un type de substantifs plutôt doubles que proprement composés, puisqu’ils ne comportent pas l’aspiration du deuxième terme. Ce sont des mots expressifs, sujets à déformations, formés en redoublant, avec modification arbitraire de la voyelle radicale, une formule souvent elle-même obscure : nʹu:dərnʹɑ:dər « indécision, cafouillage » de nʹi αdər (ní fheadar) « je ne sais pas » ; lʹu:təre:tər « affolement, tumulte », de lʹu: (liugh) « hurlement » ? sgunsgɑn « complètement », etc.

Dérivation nominale.

§ 65.Substantifs abstraits :

Abstraits en ‑ə (‑e) précédé de consonne palatale, féminins invariables, formés sur des adjectifs, et coïncidant formellement avec le génitif féminin et avec le comparatif de l’adjectif : gʹilʹə (gile) « blancheur », de αl (geal) « blanc ». À ce type se rattachent les abstraits en ‑i: (‑ighe) d’adjectifs en ‑ach. Ce type n’est plus productif dans le parler.

Abstraits en ‑əs (‑as), masculins ou féminins de Type I ou III, formés sur des adjectifs : mαhɑs (maitheas) « bonté », de mαh (maith) « bon » ; avec palatalisation de la consonne précédant le suffixe : ilʹkʹəs (uilceas), de olk (olc) « mauvais ». N’est plus productif dans le parler.

Abstraits et noms d’action en ‑əχt, ‑ɑχt, ‑αχt (‑acht), féminins. Type III, formés sur des substantifs ou sur des adjectifs. Ce suffixe, vivant, étant utilisé pour doter de dérivés des mots eux-mêmes dérivés, il en résulte des superpositions de suffixes qui donnent naissance à des suffixes indépendants. Le suffixe en ‑acht se trouve fréquemment en concurrence avec les formations abstraites en ‑ə, ou en ‑əs, la prédominance du suffixe long sur le suffixe court étant caractéristique de la langue parlée : ləmʹαχt (luimeacht) « minceur », à côté de limʹə (luime), de lɑum (lom) « mince, nu » ; lʹeʃgʹu:ləχt (leisceamhlacht) « fainéantise (habituelle) » de lʹeʃgʹu:lʹ (leisceamhail) « paresseux » lui-même dérivé de lʹeʃgʹə (leisce) « paresse, répugnance (à faire quelque chose) » ; sur des noms d’agent de formations diverses : tʹi:ŋʹkʹe:rʹəχt (tinncéireacht) « bricoler » de tʹi:nʹkʹe:rʹ (tinncéir) « rétameur ambulant » ; mʹeʃgʹo:rʹəχt (meisceoireacht) « ivrognerie (habituelle) » de mʹeʃgʹo:rʹ (meisceóir) « ivrogne », dérivé de mʹeʃgʹə (meisce) « ivresse » ; pʷi:hərʹəχt (paoithireacht) « fait de huer » de pʷi:hərʹə (paoithire) « personne qui raille, hue », de pʷi:h (paoith), interjection de mépris ; ʃαχi:χt (seanchaidheacht) « fait de raconter les récits traditionnels », de ʃαχi: (seanchaidhe) « conteur traditionnel » ; sur des adjectifs en ‑ɑ:ntə (‑ánta) : lɑˈsɑ:ntəχt (lasántacht) « irritabilité », de lɑˈsɑ:ntə (lasánta) « irritable ».

Suffixes dérivés complexes : ‑i:χt (‑idheacht) : ɑmədɑ:nti:χt (amadántuidheacht) « idiotie », de ɑmədɑ:ntə (amadánta) « idiot (adjectif) » mais qu’on peut rapprocher de ɑmədɑ:n (amadán) « idiot (substantif) », d’où ‑ti:χt (‑tuidheacht) : αdrɑ:nti:χt (leadrántuidheacht) « lenteur, négligence », à côté de αdrɑ:n (leadrán), même sens.

Ces abstraits à suffixes longs diffèrent en général par une nuance de sens des abstraits en ‑ə ; ainsi plus haut mʹeʃgʹo:rʹəχt, lʹeʃgʹu:ləχt désignant une habitude ou un vice foncier, par opposition à mʹeʃgʹə, lʹeʃgʹə, désignant un état ou une attitude passagers.


§ 66. 2º Substantifs verbaux. La formation des noms d’action correspondant à des thèmes verbaux est capricieuse, et largement indépendante de la forme du thème verbal (voir pourtant § 163). On ne peut qu’indiquer ici les principaux types.

En fonction verbale, le suffixe verbal tend à devenir invariable, ne manifestant son genre que par l’aspiration du génitif qu’il régit : tʹrʹe:ʃ po:sə (tréis pôsadh) « après s’être marié », à côté de tʹrʹe:ʃ po:stə (cf. § 245); mais, avec aspiration du régime qui décèle le féminin : e fɑ:lʹ vɑ:ʃ (ag fagháil bháis) « mourant » ; eg imʹərtʹ χɑ:rti: (ag imirt chártaí) « jouant aux cartes ».

Substantifs racines (consonne finale vélaire et palatale) masculins et féminins : sgœr (scur) « dételer », en face de sgʷirʹəmʹ (scuirim) mais kʷirʹ (cuir) « placer » ; noter aussi la consonne finale, vélaire dans le parler, de dridʹəm (druideam) « bouger », tʹitʹəm (tuiteam) « tomber ». Les noms en ‑ɑ:lʹ, gén. ‑ɑ:lə se présentent, par rapport aux verbes en ‑ɑ:ləmʹ (‑álaim) comme des noms racines, mais avec consonne finale palatale : ɑblɑ:lʹ (abláil) « gâcher la besogne », ɑblɑ:lamʹ (ablálaim).

Substantifs masculins et féminins avec adjonction au radical verbal de ‑əv (‑amh), ‑əχ (‑ach), ‑əgʹ (‑igh), après consonne, ‑v, ‑χ après voyelle : lʹe:v (leigheamh) « lire », en face de lʹe:mʹ (leighim) « je lis », glè:χ (glaodhach) « appeler », en face de glè:mʹ (glaodhaim); bʹe:kʹəgʹ (béicigh) « crier », en face de bʹe:kʹəmʹ (bèicim), ou bʹe:kʹi:mʹ.

Substantifs ajoutant ‑ə au thème verbal (parfois avec dépalatalisation de la consonne finale du thème), masculins : buələ (bualadh) « frapper » de buelʹəmʹ (buailim); suəhə (suathadh) « agiter » de suehəmʹ (suaithim). En face de verbes présentant une alternance ‑gʹ/zéro (§ 6), on a des noms verbaux à voyelle longue sans spirante finale : si: (suidhe) « s’asseoir », en face de si:mʹ (suidhim), sigʹ (suigh); do: (dóghadh) « brûler », en face de do:mʹ (dóighim); bɑ: (bádhadh) « noyer », en face de bɑ:mʹ (báidhim).

Substantifs en ‑u: (‑ughadh), masculins, correspondant à des verbes de flexion longue en ‑i:- (‑igh‑) : mɑru (marbhughadh) « tuer », de mɑri:m’ (marbhuighim). Cette formation vivante fournit tous les substantifs verbaux de verbes dérivés ; elle tend à s’étendre aux dépens des autres types : sɑ:su: (sásughadh) à côté de sɑ:səv (sásamh), en face de sɑ:si:mʹ (sásuighim) « je satisfais ».

Substantifs (féminins) ajoutant ‑tʹ au radical de verbes de type A, 3º (§ 165) kosənʹtʹ (cosaint) « protéger » de kosni:mʹ (cosnaighim) ; lɑurtʹ (labhairt) « parler » de lɑuri:mʹ (labhraighim) ; après une racine monosyllabique : kʹelʹtʹ (ceilt) « cacher », de kʹelʹəmʹ (ceilim).

Substantifs (féminins) en ‑nʹtʹ, ‑u:nʹtʹ : ligʹənʹtʹ (leigint) « laisser » ; kαlʹu:nʹtʹ (cailleamhaint) « perdre », de kαləmʹ (cailtim).

Abstraits en ‑acht, féminins, avec valeurs de noms verbaux : e:ʃtʹəχt (éisteacht) « écouter », et voir § 65.


§ 67, 3º. Noms d’action en ‑ɑ:lʹ (‑áil), féminins, de type III et adjectifs en ‑ɑ:ltə (‑álta), ‑ɑ:lhə (‑áltha), ‑ɑ:lʹtʹə (‑áilte) ; peuvent être formés pratiquement sur n’importe quel nom, particulièrement sur des mots d’emprunt, que ces formations permettent de naturaliser aisément : pʹrʹislɑ:lʹ (priosláil) « fait de baver », pʹrʹislɑ:lhə (priosláltha) « baveux », de pʹrʹislə (priosla) « bave » ; ʃu:rɑ:ltə (siúrálta), d’anglais sure; bɑ:kɑ:lʹ (bácáil), bɑ:kɑ:ltə (bácálta) d’anglais to bake ; fʹrʹiʃɑ:ltə (friseáilte) « frais » d’anglais fresh. On peut former sur ces noms des verbes : bɑ:kɑ:ləmʹ (bácálaim) « I bake ».


§ 68, 4º. Noms d’agent. Masculins. Formations vivantes, qui permettent de créer sans cesse de nouveaux mots expressifs servant à caractériser, souvent péjorativement, les individus.

‑i: (‑idhe) : sgʹi:αli: (scéalaidhe) « conteur » de sgʹi:αl (scéal) « histoire » ; fréquemment formé sur un nom d’action en ‑ɑ:lʹ rɑgərnʹɑ:li: (ragairneálaidhe) « bambocheur », de rɑgərnʹɑ:lʹ « bambocher», etc.

‑ərʹə (‑ire) : iəsgərʹə (iascaire) « pêcheur » de iəsg « poisson » ; plubərʹə (plubaire) « gros patapouf », de plub, mot imitatif, bruit que fait un objet mou en tombant; et d’innombrables termes caractérisant les personnes : ro:gərʹə (rôgaire) « coquin » d’anglais rogue ; sgafərʹə (scafaire) « personne d’allure robuste et agile », etc.

‑o:rʹ (‑óir) mɑrəgo:rʹ (margóir) « entrepreneur à forfait », de mɑrəgə (margadh) « marché » ; αhəlo:rʹ (meathalóir) « enfant chétif », de αh (meath) « ruine, déliquescence ».

‑e:rʹ (‑éir); de type III, se rencontre dans des mots empruntés, où il correspond à anglais ‑er : stro:nʹʃe:rʹ « stranger ».

Deux noms d’agent peuvent être formés sur le même radical, avec deux suffixes différents : cf. en face de kαni:mʹ (ceannuighim) « j’achète » kαni: (ceannaidhe) « négociant », et kαnəho:rʹ (ceannuightheóir) « acheteur (occasionnel) ».

§ 69. 5º. Diminutifs.

‑i:nʹ (‑ín) précédé de voyelle palatale ; masculins ; invariables ; souvent hypocoristiques : fʹirʹi:nʹ (firín) « un petit bonhomme » ; mɑ:rʹi:nʹ (Máirín) « Mariette » ; lɑ:vʹi:nʹ (láimhîn) « menotte».

‑ɑ:n (‑án), masculins, type I ; à l’inverse du suffixe en ‑i:nʹ, a plutôt tendance à être péjoratif : mɑrəvɑ:n (marbhán) « personne passive, sans vie » ; et, avec divers développements : lɑpədɑ:n (lapadán) « pataugeur », de lɑpə (lapa) « patte » ; suərəχɑ:n (suarachán) « chose, être sans valeur » de suərəχ (suarach) « insignifiant » ; d’où le suffixe ‑əχɑ:n (‑achán) : bʹrʹo:tʹəχɑ:n (breóidhteachán) « personne maladive » de bʹrʹo:tʹə (breóidhte) « malade ». Même suffixe dans un nom d’instrument : pusəχɑ:n (pusachán) « muselière », de pus (pus) « museau ».

‑o:g (‑óg) ; féminin ; de type VIII : luχo:g (luchóg) « souris », à côté de luχ (luch), même sens. Suffixe peu vivant. On le trouve cependant servant à former un sobriquet féminin en face d’un sobriquet masculin en ‑ərʹə : lʹubo:g (liobóg) « femme maladroite, négligente », en face de lʹubərʹə (liobaire) désignant le même caractère chez un homme ; mais on dira aussi couramment lʹubərʹə mnɑ: (voir § 15).

§ 70. 6º. Suffixes adjectivaux.

‑hə (‑dha) ; n’est plus vivant dans le parler : mʷi:nʹtʹərhə (muirinteardha) « apparenté » de mʷi:nʹtʹərʹ (muinntir) « famille».

‑vər (‑mhar); n’est plus vivant dans le parler : kʹo:lvər (ceólmhar) « mélodieux », de kʹo:l (ceól) « musique ».

‑u:lʹ (‑amhail) ; formation vivante : klʹαχtu:lʹ (cuileachtamhail) « gai, sociable », de klʹαχ (cuileachta) « compagnie, amusement ».

‑əχ, ‑ɑχ, ‑αχ (‑ach), atone ou accentué selon la forme du radical (voir § 56) ; formation vivante servant à former automatiquement un adjectif sur n’importe quel thème nominal ou verbal : mʹeirʹe:ʃəχ (meidhréiseach) « gai » de mʹeirʹe:ʃ (meidhréis) « gaieté »; ɑdvɑ:ləχ (admhálach) « qui confesse, qui reconnaît », de ɑdvɑ:lʹ « confesser » ; formes développées en ‑nəχ, ‑ərnəχ (fréquemment à côté de noms d’agent en ‑ərʹə) : lʹubərnəχ (liobarnach) « négligé », de lʹubər (liobar) « chiffon » ; pʹrʹαbərnəχ (preabarnach) « nerveux », de pʹrʹαb (preab) « saut » ; on a pʹrʹαbu:lʹ avec le même sens. Ces mêmes formes suffixales donnent des substantifs féminins de type VIII, parfois avec valeur abstraite, parfois sensiblement avec la même valeur que les noms en ‑ɑ:n ; sbʹrʹi:αχərnəχ (spréacharnach) « fait d’étinceler » de sbʹrʹi:αχ (spréach) « étincelle » ; sgʹαhərəχ (sceathrach) « chose, maison, en mauvais état ».

§ 71. 7º. Adjectifs verbaux.

Il y a une double série de formes: formes en ‑tə, ‑tʹə (‑ta, ‑te) ; formes en ‑hə (‑tha, ‑the), ou ‑ə avec assourdissement de la consonne précédente, ou en ‑əhə, avec ou sans assourdissement de la consonne précédente ; le choix entre l’une et l’autre série est déterminé en principe par la nature du phonème terminant le radical, mais il y a des flottements dans l’usage, où deux tendances se font jour. D’une part, tendance à étendre les formes en ‑t- au détriment des formes en ‑h‑, moins claires. D’autre part, à l’intérieur de la série en ‑h‑, tendance à étendre le suffixe ‑əhə, et à le combiner avec l’assourdissement de la consonne finale du radical. Le suffixe ‑əhə apparaissant normalement dans la flexion longue, il y a lieu de rapprocher de ce fait l’extension prise par cette flexion dans le parler (§ 164).

A. ‑tə, ‑tʹe se rencontre après voyelle et h, après les dentales n, nʹ, l, lʹ, s, ʃ, d, dʹ, après χ, et aussi après m, mʹ (mais voir § 72) : kru:tʹə (crúidhte) « trait », de kru:mʹ (crúdhaim) « je trais » ; iətə (iadhta) « fermé », de iemʹ (iadhaim) ; kʹelʹtʹə (ceilte) « caché », de kʹelʹəmʹ (ceilim) ; kαtʹə (caithte) « usé » de kαhəmʹ (caithim) ; ʃe:tʹə (séidte) « soufflé », de ʃe:dʹəmʹ (séidim); lʹe:mʹtʹə (léimte) « sauté » de lʹe:mʹəmʹ (léimim).

§ 72. B. Le suffixe ‑hə (‑tha), avec consonne précédente vélaire, n’apparaît sous cette forme qu’après les phonèmes ne possédant pas de forme sourde dans le parler ; ailleurs on a ‑ə avec assourdissement de la consonne précédente (§ 5). Il se rencontre après occlusive et après m, et r. Les verbes présentant l’alternance spirante finale/zéro (§ 6) ont à l’adjectif verbal parfois la forme sans spirante avec le suffixe en ‑t‑, d’ordinaire la forme avec assourdissement de la spirante : kœrhə (curtha) « placé », de kʷirʹəmʹ (cuirim) ; tu:rhə (tabhartha) « donné », de tu:rəmʹ (tabhraim) ; krɑumhə (cromtha) « courbé », de kroməmʹ (cromain) ; to:kə (togtha) « élevé », de to:gəmʹ (tógaim) ; tʹrʹα (treabhtha) « labouré », ou tʹrʹαutʹə, ou tʹrʹo:tʹə (treaibhle) de tʹrʹαumʹ (treabhaim) ; gɑfə (gabhtha) « pris », de gɑimʹ (gabhaim).

Le suffixe ‑əhə (‑uighthe) est normal en face des verbes à flexion longue (§ 163) : αdəhə (ceaduighthe) « permis », etc.

Ce suffixe tend à s’étendre aux adjectifs verbaux en ‑hə, en se surajoutant à la forme à assourdissement : to:kəhə, à côté de to:kə (tógtha) ; de même slukəhə (slogtha) « avalé », de slugəmʹ (slogaim) « j’avale » ; stɑtəhə (stadtha), de stɑdəmʹ (stadaim) « j’arrête » ; αkəhə (leagtha), de αgəmʹ (leagaim) « j’abats », etc.