Cours d’agriculture (Rozier)/FIGUE, FIGUIER, FIGUERIE

Hôtel Serpente (Tome quatrièmep. 619-637).


FIGUE, FIGUIER, FIGUERIE. Le premier mot indique le fruit, le second l’arbre qui le porte, le troisième l’emplacement où l’on le cultive. M. Tournefort le place dans la quatrième section de la dix-neuvième classe, qui comprend les arbres à fleurs à chaton, les mâles séparées des femelles, & dont les fruits sont des baies molles ; il l’appelle ficus, ainsi que M. von-Linné qui le classe dans la polygamie polyœcie.


CHAPITRE PREMIER.

Caractère du Genre.


Fleurs à chatons, mâles & femelles, renfermées en très-grand nombre, dans l’intérieur d’un calice commun, grand, à peu près ovale, charnu, concave, presque totalement fermé dans la partie nommée l’œil de la figue, par des écailles aiguës en forme de lance, dentées, recourbées ; les fleurs mâles logées dans la partie supérieure du calice ; les femelles dans l’intérieure ; les unes & les autres attachées à de petits péduncules ; les mâles composées de trois étamines, & d’un calice propre divisé en trois ; les femelles composées d’un pistil & d’un calice particulier divisé en cinq.

Fruit ; il est précisément le calice commun qu’on nomme figue, & qu’on appelle improprement le fruit. On voit par ce qui précède, qu’il n’est réellement que l’enveloppe des fleurs & des fruits. Les fleurs femelles produisent des semences obrondes, comprimées, lenticulaires qui se trouvent dans le fond du calice commun.


CHAPITRE II.

Des Espèces.


Afin d’éviter la confusion, il convient de les diviser en botaniques & en jardinières ; (voyez le mot Espèce) comme je n’ai jamais soigné que les espèces cultivées dans nos provinces méridionales, je préviens que je vais emprunter une très-grande partie de la section suivante, du supplément de l’Encyclopédie, où cet article est extrait du savant ouvrage de Miller.

Section première.

Des Espèces Botaniques.

1. Figuier commun. Ficus carica, L. Ses feuilles sont simples, entières, palmées, découpées profondément, rudes au toucher, avec des nervures saillantes sur leur surface inférieure, elles sont alternativement placées sur les tiges, vertes en-dessus, blanchâtres en-dessous ; l’écorce & les feuilles répandent une liqueur blanche lorsqu’on les coupe. Cet arbre s’élève dans les provinces méridionales, souvent à la hauteur de vingt à vingt-cinq pieds, & quelquefois son tronc a jusqu’à dix-huit pouces de diamètre ; son bois est spongieux, il est originaire d’Asie & de l’Europe méridionale. Cette espèce de figuier est le type de toutes les espèces jardinières, aujourd’hui si multipliées.

2. Figuier-Sycomore ou Figuier de Pharaon. Ficus sycomorus, L. Il est originaire d’Égypte, ses feuilles ressemblent à celle du gros mûrier noir, & elles sont blanches & velues par-dessous. Le fruit croît sur les grosses branches & sur le tronc.

3. Figuier Religieux. Ficus religiosa, L. Originaire de l’Inde où il est regardé comme sacré, & personne n’ose le détruire ; il s’élève à la hauteur de quarante à cinquante pieds, pousse des branches horizontales & multipliées au sommet, dont l’ombrage couvre à peu près la même grandeur de terrein. Le besoin, je pense, plus que tout autre motif a été, dans ces pays brûlans, le premier motif du respect religieux. Les feuilles ressemblent à celles du peuplier noir ; elles sont d’un vert clair, soutenues par de longs pétioles ; le fruit naît sur les branches, petit, rond, sans valeur, & il sort de l’aisselle des feuilles. On peut le multiplier par bouture.

4. Figuier du Bengale. Ficus benghalensis, L. Il est originaire de l’Inde. Il s’élève sur plusieurs tiges à la hauteur de trente à quarante pieds ; ces tiges se divisent en nombre de branches qui poussent des racines de leur partie inférieure : la plupart de ces racines plongent jusqu’à terre & s’enfoncent dans le sol ; de sorte que cet arbre forme aux lieux où il croît naturellement, un tissu impénétrable par l’entrelacement de ses branches & de ses racines ; ses feuilles sont ovales, très-entières, obtuses, un peu épaisses ; les fruits d’un rouge foncé, ronds & deux à deux.

5. Figuier des Indes. Ficus indica, L. Originaire des deux Indes ; il s’élève autant que le précédent. Ses feuilles ressemblent assez à celles du coignassier pour la forme ; mais elles ont jusqu’à six pouces de longueur sur deux de large, terminées en pointes obtuses, d’un vert obscur en-dessus, & d’un vert tendre & veiné en-dessous ; le fruit est petit & mauvais ; les branches poussent des racines de leur partie inférieure, comme celles du figuier du Bengale.

6. Figuier des Indes occidentales, c’est le ficus ß foliis lanceolatis integerrimis, L. M. von-Linné le regarde comme une variété du précédent, & il s’élève aussi haut ; ses branches sont très-déliées, & poussent des racines, les feuilles ont huit à neuf pouces de longueur sur deux de large, elles se terminent en pointe ; les fruits sont petits, ronds, bleus, & ne sont pas mangeables.

7. Figuier en grapes. Ficus racemosa, L. Originaire des Indes. Sa hauteur est de vingt-cinq pieds environ, ses feuilles sont ovales pointues, d’un vert luisant ; le fruit est petit, il naît en grappes.

8. Figuier nain. Ficus pumila, L. Originaire de Chine & du Japon. C’est un buisson à branches traînantes, qui poussent des racines de leurs joints comme les coulans des fraisiers ; les feuilles ont environ deux pouces & demi de longueur sur deux de large, & se terminent en pointe, elles sont d’un vert luisant ; le fruit est petit.

9. Figuier à feuilles de châtaignier. Originaire d’Amérique ; les feuilles sont oblongues, pointues, découpées en scie ; le fruit est rond & parsemé de taches.

10. Figuier à feuille de Nymphea, ficus nymphæi folia, L. Originaire de l’Inde ; a les feuilles semblables à celles du nymphea ou nénuphar jaune, aussi grandes, lisses, blanches en-dessous, & comme sespendues en écusson.

11. Figuier Benjamin. Ficus benjamina, L. Originaire de l’Inde ; il a les feuilles ovales, pointues, striées transversalement.

12. Figuier vénéneux. Ficus toxicaria, L. Feuilles en forme de cœur, ovales, dentelées, cotonneuses en-dessous ; le fruit rond & velu ; cet arbre croît près de Sumatra, il est très-vénéneux au rapport de M. von-Linné.

Tous ces arbres se multiplient par boutures, par marcottes, par rejets. Les boutures se font en été ; il convient d’avoir l’attention de les laisser sécher à l’air & dans un endroit ombragé, afin de sécher la coupure, sans quoi elle pourriroit.

Section II.

Des espèces jardinières.

Il règne dans la nomenclature de ces espèces une singulière confusion dans chaque province. Les noms varient.

I. Des espèces les plus analogues aux provinces du nord du royaume. 1. Figuier à fruit blanc ou grosse Blanche ronde, ficus sativa, fructu globoso, albo, mellifluo, T. Feuilles grandes, peu découpées ; les fruits gros, renflés par la tête, pointus à leur base, recouverts d’une peau lisse ; sa couleur est d’un vert très-clair. La figue est remplie d’un suc doux, très-agréable ; il donne deux fois du fruit dans la même année. Les figues du printemps, nommées figues-fleurs, ne sont point aussi bonnes que celles de l’automne. Cette espèce a produit une autre variété à fruit rond, dont on ne parle pas en ce moment, parce qu’il ne mûrit que dans les provinces du midi.

2. Figuier à fruit jaune ou l’Angélique ou la Mélitte. Ficus sativa fructu parvo, fusco, intùs rubente, T. Feuilles moins grandes, moins découpées que les précédentes, plus longues que larges, & n’ont souvent que trois découpures. Leur pétiole est moins long que celui des feuilles de la précédente. Les fruits sont un peu plus alongés & moins gros ; leur peau est jaune, tiquetée de vert clair ; la couleur de la pulpe est fauve, tirant sur le rouge. Cette espèce est plus abondante en automne qu’au printemps ; elle est très-agréable au goût.

3. Figuier à fruit violet. Ficus sativa fructu parvo globoso, violaceo intùs rubente. Ses feuilles sont plus petites que celles des deux précédentes, découpées très-profondément en cinq parties, & souvent surdécoupées, presque toutes aussi larges que longues. La peau du fruit est d’un violet foncé & la chair rouge. Cette figue est très-agréable quand elle est mûre.

4. Figue-Poire ou Figue de Bordeaux. Ficus sativa, fructu violaceo, longo, intùs rubente, T. C’est une variété de la précédente ; sa peau est d’un rouge brun, le dessous d’un rouge pâle, l’intérieur d’une couleur fauve & rouge : elle mûrit mal dans le nord.

II. Des espèces analogues aux provinces méridionales du royaume. Garidel, dans son Histoire des Plantes de Provence, nous a donné une bonne collection des espèces de figuiers qu’on y cultive.

1. La Cordelière ou Servantine. Ficus sativa, fructu præcoci, subrotundo, albido, striato, intùs roseo, T. Le fruit est obrond, presque rond, blanchâtre ; son écorce marquée par des nervures, l’intérieur est de couleur rose. Les figues-fleurs ou printanières sont les meilleures & les plus délicates de ce genre.

2. La grosse Blanche longue ; variété de la grosse Blanche ronde, très-commune dans les provinces du midi. Ficus sativa, fructu oblongo, albo, mellifluo, T. Cette espèce exige beaucoup de chaleur, craint les brouillards ; son fruit est blanc, oblong, se sillonne, & il est marqué de quelques petits points blancs. Les figues printanières sont douceâtres, moins bonnes que celles du printemps.

3. La Marseilloise. Ficus sativa, fructu parvo, serotino albido intùs roseo, mellifluo, cute lacerâ, T. Elle exige beaucoup de chaleur : c’est, à mon avis, la meilleure figue, la plus parfumée. Son fruit est petit, d’un vert pâle & intérieurement rouge ; il mûrit tard.

4. La petite Blanche ronde ou de Lipari. Ficus sativa, fructu globoso, albido, omnium minimo, T. C’est la plus petite espèce de toutes celles que l’on mange. Son fruit est rond, blanc ; il a la forme d’un chapeau, & doux comme le miel.

5. La Verte. Ficus sativa, fructu viridi, longo pediculo insidente, T : intùs rubente. Elle est portée sur un long péduncule, verte extérieurement & rouge comme du sang dans son intérieur. C’est une des meilleures figues de Provence, mais fort sujette aux brouillards. N’est-ce pas la figue ischia verte de Miller ?

6. La grosse Jaune, ficus sativa, fructu albo, omnium maximo, oblongo, intùs suave rubente & mellifluo. Cette figue est d’abord blanche, ensuite jaune quand elle mûrit ; elle est oblongue & d’un joli rouge en dedans. C’est la plus grosse que l’on connoisse. On en voit qui pèsent de quatre à cinq onces. Son goût est agréable & fort sucré.

7. La grosse Violette longue ou l’Aulique. Ficus sativa, fructu majori violaceo, oblongo, cute lacerâ, T. Elle a la forme d’une aubergine ou mélongène ; (voyez ce mot) sa peau se fend quand elle approche de sa maturité. Les figues d’automne sont moins grosses que celles du printemps.

8. La petite Violette. Ficus sativa, fructu minori, violaceo, cute lacerâ, T. Elle ne diffère de la précédente que par sa grosseur.

9. La grosse Bourjassote ou Barnissote. Ficus sativa, fructu atro-rubente, polline cæsio aspeyo, d’un rouge foncé, couvert d’une espèce de poussière bleue, & quelquefois blanche ; son écorce est dure, sa forme est sphérique & aplatie du côté de l’œil. Cette figue est délicate & très-agréable.

10. La petite Bourjassote. Ficus sativa, fructu globoso, atro-rubente, intùs purpureo, cute firmâ, T. Plus petite que la précédente, d’un rouge noir en dehors & pourpre en dedans, plus aplatie vers l’œil, son écorce dure : elle exige beaucoup de chaleur.

11. La Mouissonne. Ficus sativa, fructu rotundo, minore atro-purpureo, cortice tenui. Elle diffère de la précédente par son écorce mince, par son écorce d’un pourpre noir, & elle est plus petite.

12. La Negrone. Ficus sativa, fructu parvo, spadico intus dilutè, rubente, G. Elle est fort commune, peu délicate, croît dans les vignes ; fruit petit, d’un rouge brun, & intérieurement d’un rouge vif.

12. La Graissane. Ficus sativa, fructu rotundo, albo, mollis & insipidi saporis, G. Très-peu délicate, blanche, fade, molle, précoce, aplatie par-dessus.

13. La Rousse, Ficus sativa, fructu magno, rotundo, depresso, spadiceo, circà umbilicum dehiscente, intùs suave rubente, G. Très-grosse, ronde, aplatie, de couleur d’un rouge-brun ; s’ouvre vers l’œil, & intérieurement elle est d’un joli rouge.

14. Nommée en Provence xuov de muelv. Ficus sativa, fructu oblongo, dilutè utrò-rubente, mellifluo, intùs albo, G. Oblongue, d’un rouge noir & vif, intérieurement blanche, & très-douce.

15. La Verte-brune. Ficus sativa, fructu parvo, in basi rotundo, circà pediculum acuminato, atro viridi, intùs rubente, & delicati atque exquisici saporis, G. C’est une des meilleures espèces de figues ; elle est petite, à base arrondie, mais terminée en pointe vers le péduncule ou queue. d’un vert brun à l’extérieur, & rouge en dedans, d’une saveur délicate & exquise.

16. Figue du saint-Esprit ou d’automne. Ficus sativa autumnalis, fructu magno, oblongo, obscurè violaceo. Son goût est aqueux, peu agréable, son fruit gros & oblong, sa couleur d’un violet obscur.

Les trois espèces cultivées dans le nord, le sont également dans le midi du royaume. Ces dernières y réussiroient fort mal, l’intensité de chaleur n’y étant pas assez forte pour les faire parvenir à maturité. On ne mange réellement de bonnes figues que dans les pays chauds.

Le bois de tous les figuiers cultivés, est rempli d’une espèce de moelle qui se corrompt à la superficie lorsqu’elle est en contact avec l’air, & la corruption gagne de proche en proche dans l’intérieur. Si on coupe une branche, si on détache une feuille, il sort de la plaie une substance laiteuse & âcre.


CHAPITRE III.

De la Culture des Figuiers.


On doit la considérer sous deux points de vue, & comme artificielle, & comme naturelle. Les figuiers sont très-étrangers dans nos provinces du nord ; il faut donc que l’art supplée au peu de chaleur du climat, d’où il résulte une culture différente de celle des provinces du midi, où les figuiers sont réellement naturalisés.

Section première.

De la Culture artificielle.

§ I. Du terrein qui convient au Figuier.

Toutes les terres en général lui conviennent, à l’exception des fangeuses, des argileuses & humides ; il se plaît beaucoup plus dans les terres substancielles, qui ont du fond, & sont légèrement humides. Il réussit supérieurement, lorsqu’il peut aspirer l’air vaporeux des sources, des fontaines & des rivières. Ils deviennent prodigieux, si à une profondeur assez considérable, il se trouve au-dessus de grandes ravines, un filet d’eau ; d’où est venu le proverbe, le figuier le pied dans l’eau, & la tête au soleil ; mais il faut que cette eau soit à une certaine profondeur, & non pas que les racines y trempent ; en un mot, il doit jouir de cette eau comme vapeur, & non pas comme masse. Les racines de cet arbre s’étendent au loin, sont très-nombreuses & fibreuses. Il aime les rayons du soleil levant, du midi, peu ceux du couchant, & ne réussit jamais au nord, à moins que, dans ces deux derniers cas, on se contente de la récolte des figues-fleurs. Tels sont, en général, le sol & l’exposition qui conviennent dans ces deux genres de culture. On doit encore observer que les figuiers à gros fruits exigent plus de fond & meilleur que ceux à fruits petits, quoique les hauteurs & l’étendue des branches de ces arbres soient les mêmes.

§ II. De la multiplication du Figuier.

1. Le Semis. Opération très-avantageuse pour se procurer de nouvelles espèces jardinières ; & je pense que si on multiplioit le semis des figues, déjà acclimatées dans le nord, on obtiendroit insensiblement des espèces qui craindroient beaucoup moins le froid, & n’exigeroient plus les soins dont on parlera ci-après. Qu’on se rappelle que le mûrier est aujourd’hui naturalisé en Prusse. Cet exemple prouve jusqu’à quel point on peut acclimater un arbre par des semis. Cette voie est longue, j’en conviens, & la plupart des cultivateurs se sont effrayés de la lenteur de la végétation de cet arbre ; mais le plaisir que l’on goûte lorsqu’on s’est procuré une espèce nouvelle, dédommage bien amplement des ennuis de l’attente. Il faut être amateur, pour le sentir dans sa plénitude. Combien cet arbre est agréable à sa vue, & combien le fruit qu’il a cueilli est délicieux !

Plusieurs personnes sèment la graine de figues desséchées, qu’elles font venir d’Espagne, d’Italie, de Provence, &c. ; elles se trompent ; la distance n’est pas proportionnée, & la réussite dépend du proche en proche. L’expérience a prouvé que trois ou quatre espèces réussissent passablement dans nos provinces du nord ; c’est donc avec la semence de leurs fruits qu’on doit multiplier les essais. À cet effet, on laissera ces fruits se pourrir, &, s’il se peut, se dessécher sur l’arbre, & on les conservera dans cet état, pendant tout l’hiver, dans un lieu sec. Au commencement d’avril, la graine sera détachée, autant qu’il est possible, de sa pulpe, & semée dans des terrines remplies de terre fine & substancielle. Une partie de ces terrines sera placée sur couche, l’autre dans un lieu bien abrité, & on y entretiendra une légère humidité. Les grains qui germeront dans les seconds terrines, auront déjà acquis un degré de dureté de plus que ceux des premières. Pendant l’hiver, les unes de ces secondes seront garanties du froid, & les autres très-modérément, & quelques-unes point du tout. Après l’hiver, on enlèvera les sujets des terrines, en ménageant avec grand soin les racines, & ils seront plantés séparément dans des pots, sur lesquels on répétera les expériences précédentes, jusqu’à ce que les pieds demandent la pleine terre.

2. Des Rejetons. Il en pousse souvent des racines des vieux figuiers, & même quelquefois ils sont multipliés à l’excès. Si l’arbre est franc, c’est-à-dire, s’il est venu de bouture ou de marcottes, les rejetons seront francs ; & il n’en en est pas ainsi si l’arbre a été greffé. On les laisse fortifier pendant deux ou trois années, & après avoir cerné la terre tout autour, on les déchausse, les enlève de terre, évitant d’endommager les racines ; enfin, on les plante dans l’endroit qu’on leur destine. Ces rejetons ont l’avantage de fournir des sujets pour la greffe.

3. Des boutures. Les pousses de l’année précédente ne peuvent servir à cet usage ; celles de deux ou trois ans valent beaucoup mieux, reprennent plus facilement, & sont moins sujettes à pourrir. (Voyez la manière d’opérer, décrite au mot Bouture).

4. Des marcottes, (consultez ce mot) Cette méthode assure la reprise, & il faut choisir des branches du même âge pour les boutures. On les fait en mars ou avril, c’est-à-dire, dès qu’on ne craint plus le froid. M. Mallet dans sa Dissertation sur la culture des plantes choisies, s’exprime ainsi : Je suppose qu’on a des mères-plantes de figuier dans son jardin ; il faut toujours marcotter les plus belles pousses de deux ans, que l’on suppose de la grosseur d’un pouce & de trois pieds de hauteur, qu’on aura arrêté dans le principe. Étant parvenu au 15 avril, il faut intercepter la sève à six pouces de terre de la manière suivante. Prenez votre serpette ; coupez l’écorce autour de la branche sans blesser le bois, enlevez l’écorce coupée en forme d’anneau. Le suc propre de la plante soutient la branche opérée, il se forme un bourrelet, (voyez ce mot) ce qui oblige les racines à s’y former de toute part, pourvu qu’on ait grand soin de les arroser. Parvenu au mois d’octobre, on détache pour lors ces arbrisseaux hors des pots, pour les mettre ensuite dans une caisse d’un pied six pouces quarrés. Il est entendu qu’on leur donne une bonne terre ; on les cultive une année dans son jardin, & on ne leur laisse aucun fruit ; au contraire, on les pince, afin qu’ils en donnent plus l’année d’ensuite.

5. Des greffes. (Voyez ce mot) Celle en sifflet est la seule d’usage ; elle se pratique sur les rejetons, dès qu’ils ont acquis un certain âge, & qu’ils sont sains & vigoureux.

§ III. De la culture des Figuiers.

L’arbre est destiné à figurer ou en espalier, ou en buissonnier, ou à donner des primeurs. Il faut ici vaincre la nature & la surmonter sans lui nuire ; car, de tous les arbres, le figuier est celui qui souffre le plus impatiemment d’être tourmenté, coupé, taillé, mutilé. Son bois est trop spongieux, & si la plaie n’est pas recouverte, la pourriture descend toujours & gagne jusqu’au tronc.

I. De l’espalier. Cette forme contre-nature suppose l’ébourgeonnement (voyez ce mot) des branches qui poussent contre le mur, & de celles qui poussent sur le devant ; puisqu’elles ne peuvent être appliquées au mur, sans être forcées dans leur disposition. Ces amputations multiplient les plaies & fatiguent l’arbre. Le premier ébourgeonnement bien fait, la conduite de cet arbre n’offre ensuite aucune difficulté, & le jardinier le moins habile palissera sans peine les nouveaux bourgeons à mesure qu’ils paroîtront. Pendant les premières années, cet arbre cherche à se délivrer de la captivité, en poussant beaucoup de bourgeons & de faux bourgeons ; cette fougue n’aura qu’un temps : lorsque le bois aura acquis une certaine consistance, qu’il sera moins séveux, il modérera son impétuosité, deviendra sage & se débarrassera de lui-même de beaucoup de bois inutile.

II. Du buissonnier. En plantant l’arbre, il faut avoir soin de rabattre la tige près de terre, afin de la forcer à faire une souche, de laquelle s’élanceront plusieurs tiges destinées à former le buisson ; si le nombre de ces branches est trop considérable, il convient de le diminuer avec précaution, afin de ne pas multiplier les plaies, & on peut laisser les autres pendant une ou deux années sans les arrêter, afin qu’elles acquièrent une hauteur convenable, & telle qu’on la désire. Parvenues à ce point, on les arrête au sommet, afin de les forcer à jeter des branches latérales. Cette opération se fait en automne, au moment que les feuilles vont tomber, & dans le même temps, on supprime toutes les figues qui restent sur l’arbre. Si l’extrémité des pousses n’est pas encore mûre, elles ne mûriront pas en hiver & elles pourriront ; c’est le cas de retrancher ce bois incomplet, & de recouvrir la plaie. On peut cependant laisser ce bois sur pied, & attendre le retour du printemps pour enlever ce qui sera desséché. Ces soustractions quoique forcées, sont toujours préjudiciables, parce que le figuier porte son fruit au sommet des branches. Lorsque le nombre des tiges qui s’élancent de la souche devient trop fort, on retranche celles qui sont nues, ou qui sont le plus dégarnies de branches latérales.

La sensibilité de cet arbre, & la rigueur du climat sous lequel il se trouve étranger, nécessitent à le préserver des gelées ; à cet effet, on détache les branches de l’espalier, on les environne avec de la paille qu’on assujettit avec de l’osier ; afin que les vents, ou telle autre cause, ne la dérangent pas, & l’on chausse le pied avec du fumier, de manière que tout l’arbre est empaillé depuis le haut jusqu’en-bas. Quelques personnes rattachent de nouveau ces branches contre le mur, & étendent encore de la paille longue par-dessus, afin que l’eau des pluies glisse sur elle, & ne pénètre pas celle qui enveloppe les branches ; d’autres abaissent ces branches contre terre, & les chargent de paille, La première méthode est à préférer ; on observera, autant qu’on le pourra, de ne point endommager ni forcer les bourgeons en les rapprochant des mères branches, afin que la paille les couvre mieux & les touche par tous les points.

On a vu plusieurs fois, dans les hivers rigoureux, que lorsque les enveloppes faites avec de la paille, avec des cosses de pois, &c. étoient pénétrées par l’humidité, & que le grand froid survenoit avant qu’elle fût dissipée, le tout ne formoit plus qu’une masse de glace, & le tronc & les branches périssoient. Les habitans d’Argenteuil, pour prévenir ces fâcheux contre-temps, ont une méthode qui mérite d’être plus connue. Dans le courant du mois de Décembre, ils couchent en terre toutes les branches des figuiers, & assez profondément afin de les mettre à l’abri des gelées ; mais ils conservent une égale quantité de figuiers, & les enveloppent de paille, ainsi qu’il a été dit ; & par cette sage prévoyance, ils sont assurés de ne perdre qu’une des deux parties des figuiers, tandis que les autres jardiniers les perdent souvent en totalité. Dans les hivers secs & froids, ils sont assurés de sauver les figuiers enterrés ; ils les perdent lorsque l’hiver est mou, doux & pluvieux ; mais ils conservent les autres.

Pour les arbres en buissonnier, on fait la même opération, c’est-à-dire, que l’on commence à fixer les petites branches contre la branche ou tige-mère, on l’investit de paille, & ainsi successivement pour toutes les tiges, depuis le haut jusqu’au bas. Après qu’elles sont toutes empaillées, on fiche tout autour de l’arbre, des tuteurs forts & d’une hauteur proportionnée à celle des tiges, & on assujettit chaque tige contre ce tuteur. Si elles sont trop multipliées, & qu’on n’ait pas à sa disposition le nombre de tuteurs suffisans ; on se contentera d’en planter quelques-uns de plus forts que les précédens, & au moyen d’une corde ou des osiers, &c. on réunira, autant que faire se pourra, toutes les branches en faisceau, & on le fixera par les tuteurs ; ces précautions sont indispensables, non-seulement contre le froid, mais pour empêcher que les tiges ne succombent sous le poids de la paille, de la pluie & de la neige.

Dès qu’on ne craint plus les rigueurs de la saison, on commence par découvrir le pied jusqu’à une certaine hauteur, peu à peu les tiges, enfin les bourgeons & lorsque tout l’arbre est remis en liberté, on travaille largement la terre tout autour. À cette époque il faut supprimer tout le bois mort, rattacher les branches, les bourgeons contre le mur, & en écarter celles du buissonnier. Si des branches sont trop nues, c’est le cas de les pincer, afin d’avoir des pousses latérales.

III. Du figuier destiné à donner des primeurs. On réussit, ou par le secours des serres chaudes ou des châssis. (Voyez ces mots & la gravure des châssis) Les arbres, ou plutôt les arbrisseaux sont plantés dans des pots, & ces pots enterrés dans des couches de tan ou de fumier, (voy. Couche) & on les gouverne comme des plantes exotiques. Le sieur Mallet, dans la brochure déjà citée, prescrit ainsi la conduite des figuiers sous les châssis de son invention.

« Étant parvenu au commencement de janvier, on fait la couche uniquement avec du fumier de vache & de cheval. La gelée des rois, qui d’ordinaire est la plus forte, étant passé, vous arrangez, en premier lieu, vos caisses de figuiers sur trois rangs ; cela étant fait, vous jetez entre les caisses un pouce de hauteur de terreau seulement, & vous garnissez ensuite toutes les caisses de paille sèche, très-légérement, jusqu’au niveau des caisses ; ce qui conserve les racines du hâle & en même temps du feu. Au commencement de mars, il n’y a plus rien à craindre, le grand feu de la couche est passé ; vous enlevez la paille, & vous remplissez le vide avec du terreau, dans lequel il se trouve trois quarts de terre. »

» Il faut souvent arroser les figuiers ; quant au degré de chaleur, on les tient depuis le vingt-cinquième au trentième ; quand les figues sont de la grosseur d’une noix, les premières pousses sont d’ordinaire de six à huit pouces de hauteur ; il faut pour lors pincer toutes les extrémités ; cela fait grossir les premiers fruits & augmenter le nombre des seconds. Arroser les figuiers de temps en temps, sont les seuls soins qu’ils exigent. »

» Comme ces figuiers ont donné deux saisons, il est à propos de les faire reposer l’année suivante ; & comme ils ont dévoré tous les sucs contenus dans leur caisse, il faut les rencaisser le printemps suivant, en coupant l’extrémité des racines. »

» L’avantage de mes châssis sur les serres chaudes, est unique pour la végétation. 1°. Les figues venues en serre chaude sont beaucoup plus petites, outre que le goût est désagréable, étant d’ailleurs très-mal saines. Au contraire, les figues de mes châssis sont grosses, bien nourries ; elles ont la peau fine, les sucs sont bien digérés, & le goût en est agréable. 2°. Un figuier forcé par le feu en serre chaude, donne à peine ses premières figues, tant il est altéré, & la plupart sont desséchées ; celles de mes châssis surpassent le plein air, les premières comme les secondes, parce que la maturité est plus accomplie. »

Les assertions du sieur Mallet sont très-vraies ; j’en ai vu la preuve chez lui, & il n’y a aucune ressemblance entre la beauté & la fraîcheur de ses figues, avec celles que j’ai vues cultivées dans les serres chaudes.

Section II.

De la culture naturelle des Figuiers.

§. I. Du local de la Figuerie.

Il ne s’agit pas ici de la culture de quelques arbres épars çà & là ; à bien prendre, ils n’exigent aucuns soins particuliers dans les provinces méridionales. On en voit de monstrueux dans les cours, près des bâtimens, &c. La nature fait tout pour eux, & la main du cultivateur n’a eu d’autre peine que de les planter ; souvent même ils sont venus de graine, Il est aisé de trouver la cause de leur force végétative dans l’amas de débris des substances animales & végétales qui se putréfient autour des habitations. Elles agissent sur la terre, en l’imprégnant de leurs principes savonneux, & sur l’arbre, par l’air fixe qui se dégage pendant leur putréfaction, & que l’arbre s’approprie. Voyez le mot Amendement, & le dernier Chapitre du mot Culture, ainsi que le mot Air fixe.

Le choix du local destiné à une figuerie mise en culture réglée, est un objet capital. Les îles, dont le terrein a les qualités dont on a parlé plus haut, sont excellentes, ainsi que le bas des vallons, le bord des rivières ; en un mot, toutes les positions où l’aspiration d’un air vaporeux se trouve proportionné à la forte transpiration du figuier, afin d’établir l’équilibre entre la nourriture & les pertes.

Avant de planter une figuerie, le terrein doit avoir été labouré & croisé au commencement de novembre, également labouré & croisé en janvier & mars, & ce qui vaudroit infiniment mieux dans ce dernier mois, travaillé à la bêche. Cette opération est dispendieuse, il est vrai, mais la réussite d’une figuerie dépend presque toujours du premier défoncement.

§. II. Du temps de planter, & de la manière de planter.

Il y a deux époques, en mars & en août. La première est plus sûre : le plant est moins pressé par la chaleur ; les pluies tombent ordinairement en mars & avril dans les provinces méridionales, & presque toujours le ciel y est d’airain depuis le commencement de l’été jusqu’à l’équinoxe. Ceux qui peuvent disposer d’un courant d’eau, se passent aisément du secours des pluies, & la reprise du mois d’août dès-lors est assurée. On éprouve assez communément, dans les deux premières semaines de novembre, des froids précoces, & souvent de petites gelées qui font beaucoup de tort aux bourgeons poussés depuis le mois d’août ; ils sont encore herbacés, spongieux, & le froid les surprend & les fait périr. Ceux provenus depuis le mois de mars ont le bois plus fait, plus dur, & par conséquent moins susceptible aux impressions de l’atmosphère. Dans tout état de cause on doit préférer la première époque, sur-tout lorsque l’on n’a pas de l’eau à sa disposition, & qu’il faut attendre le secours plus qu’incertain des pluies. D’ailleurs, il en coûte infiniment plus au mois d’août pour défoncer la terre, alors épaisse, compacte, desséchée & calcinée : le travail devient dispendieux, & il est mal fait.

Nos planteurs sont très-scrupuleux sur le choix du jour de la lune, & ils ne craignent pas de dire que le figuier, mis en terre le premier jour, donne du fruit l’année suivante ; planté le second, deux ans après, & ainsi de suite ; de manière que ceux plantés au déclin de la lune font attendre leur récolte pendant vingt-huit à trente ans. Ces assertions sont trop ridicules pour les combattre ; il suffit de les indiquer. (Voy. le mot Lune)

Ils pensent encore qu’on doit placer au milieu de la figuerie un figuier sauvage, qu’ils appellent mâle, afin que ceux à bons fruits soient fécondés par lui. On a vu dans le Chapitre premier, que la figue est l’enveloppe des fleurs, que ces fleurs sont complètes, & qu’elles sont composées d’étamines & de pistils. (Voyez ces mots) Par conséquent elles se fécondent elles-mêmes sans le secours des figuiers sauvages : il suffit de connoître l’organisation des plantes pour anéantir les préjugés. Cette pratique mérite cependant l’attention du cultivateur : le figuier sauvage nourrit un insecte précieux, & on pourrait l’appeler le fructificateur, ainsi qu’il sera dit dans le Chapitre suivant, en parlant de la caprification.

Après que le terrein est préparé, on ouvre des fosses, & non des trous, de deux à trois pieds de longueur sur une largeur de quinze à dix-huit pouces, & à la profondeur d’un pied, & éloignées les unes des autres à la distance de douze à quinze pieds, suivant la qualité du sol.

Après avoir coupé sur l’espèce de figuier dont on désire le fruit, une branche âgée de deux ans, de huit à douze lignes de diamètre, & presque de la longueur de la fosse, on la couche dedans sur son plat, & sans emporter ses branches latérales, au moins les plus petites ; puis on relève l’extrémité de cette branche, afin de la faire sortir quelques pouces hors de terre ; après que la fosse est comblée, on la remplit de terreau bien consommé, & on lui donne une mouillure capable de bien imbiber le terreau, & non pas de le surcharger d’humidité. Quelques personnes partagent en deux & sur sa longueur le gros bout de la partie enterrée, afin que chaque division pousse plus facilement des racines ; la méthode est bonne. Si cette extrémité a été cassée, éclatée, elle en poussera plus facilement que si elle avoit été coupée circulairement, & encore mieux, si à l’extrémité il se rencontre un nœud. De ces faits il est aisé de conclure que plus la branche est noueuse, & plutôt elle pousse des racines, parce qu’il n’en sort jamais de la partie lisse & polie. Lorsque la fosse est comblée, & la branche assujettie, il faut bien se garder de couper l’extrémité qu’on a laissée hors de terre ; la plaie seroit mortelle, ou du moins très-dangereuse. Quelques arrosemens pendant les grandes chaleurs, sont tous les soins que la bouture exige. Les petites branches latérales enterrées avec la mère-branche facilitent beaucoup la pousse des racines. Comme leur bois est tendre, & que leurs nœuds se rapprochent, elles percent facilement l’écorce ; elles se multiplient, & la vigueur de la végétation de cette bouture en dépend. D’autres cultivateurs se contentent, & à tort, de planter perpendiculairement la branche dans le trou, après avoir fait quelques scarifications à l’écorce de la partie inférieure ; d’après cette méthode, il en manque presque toujours plus de la moitié, & souvent le tout, si on n’a pas de l’eau à sa disposition.

Une expérience assez générale a prouvé que les plants enracinés manquent rarement, mais que l’arbre est plutôt formé & fait, lorsqu’il provient de bouture bien faite & bien ménagée.

On peut recouvrir la fosse avec la balle du blé ou de la paille quelconque, hachée menu à la hauteur d’un à deux pouces, lorsque les chaleurs deviennent fortes. Cette paille empêche la grande évaporation d’une terre fraîchement remuée, & conserve la moiteur si utile à leur reprise. Si on craint que les rats & autres animaux de ce genre, attirés par la paille & par leur goût pour l’écorce encore tendre du figuier, nuisent à la plantation, un peu de bouse de vache jetée sur cette paille, ou sur la terre nue, si on n’emploie pas la paille, préviendra leur dégât.

Si, l’année suivante, on veut travailler légèrement le sol de la fosse, on le peut, mais il faut prendre garde d’endommager les racines. Il vaudroit beaucoup mieux, à l’entrée de l’hiver, faire couvrir cette fosse avec du fumier très-consommé, & le recouvrir légèrement de terre, jusqu’à ce que l’orifice de la fosse soit presque à niveau du sol du champ ; car on a dû prévoir que celui de la fosse se sera affaissé, ce qui arrive à toute espèce de terrein remuée.

Il est essentiel, dans les deux années, après la plantation, de ne pas couper les branches latérales nées sur la mère-tige. Elles lui aident à prendre du corps, & à multiplier ses racines, sur cet arbre, comme sur tous les autres, proportionnées au nombre & à l’étendue des branches. À mesure que le tronc se fortifie, on retranche ; par la suite, & peu chaque année, les rameaux inférieurs, & les plaies doivent tout de suite être recouvertes avec l’onguent de St. Fiacre.

Tant que les branches du sommet ne forment pas une tête d’une certaine étendue, on peut cultiver & semer le champ, comme celui planté en oliviers, & laisser l’espace de trois à quatre pieds tout autour de l’arbre sans semer. Lorsque l’ombrage devient considérable & étendu, on jetteroit vainement le grain en terre ; il seroit étouffé, à moins qu’il ne fût destiné à la nourriture du troupeau, jusqu’au moment que les feuilles commenceront à se développer. Dans une figuerie bien établie & en valeur, un labour croisé, avant & après l’hiver, est très-nécessaire. Beaucoup de cultivateurs n’y regardent pas de si près, & se contentent, mal à propos, de travailler la terre tout autour du pied de l’arbre ; mais si l’on compare les produits, on se convaincra de la meilleure méthode.

Comme les racines des figuiers ont beaucoup de chevelus, elles effritent la terre & l’amaigrissent, & insensiblement la figuerie s’appauvrit, s’épuise, & il faut recourir aux engrais. Ceux qui sont pailleux, peu consommés, sont presque nuls ; & si on les répand après l’hiver, l’ardeur du soleil dissipera en pure perte les sucs qu’ils contiennent. Il vaut donc mieux préparer à l’avance du terreau, ramasser les balayures des cours, des cuisines, les dépôts des mauvaises herbes déjà putréfiées, enfin, les répandre sur le champ avant l’hiver, & les enterrer alors par deux bons labours croisés. À cette occasion, Olivier de Serre se sert d’une bonne expression : Le fumer & le labourer avance l’abondance de bonnes figues.

Le grand froid, les gelées tardives du printemps, & les grandes sécheresses, sont les destructeurs des figuiers dans les provinces méridionnales. On doit à M. de la Brousse, docteur de la faculté de Montpellier, de bonnes observations à ce sujet. Il conseille, pour réparer les suites de ces calamités, d’enlever tout le bois mort. Si la mortalité a passé de toutes les branches, ou de la plus grande partie, au corps du figuier, il faut alors couper l’arbre au niveau de terre, & épargner les jets qui se trouvent tout autour ; si elle n’existe que sur une ou plusieurs branches, sans attaquer les plus grosses ou une partie du corps du figuier, on peut se contenter pour lors de couper toutes les branches mortes du figuier, en laissant subsister celles qui ne le sont pas, quand même elles paroîtroient malades ; mais laisser un pouce de bois mort à la partie vive de la branche sur laquelle on fait l’amputation, parce qu’il défend la moelle de l’arbre contre l’ardeur du soleil, des vents, des pluies, &c. L’intention est bonne, mais l’exécution n’est pas sans défaut. Je préfère de couper jusqu’au vif, & de recouvrir la plaie avec l’onguent de St. Fiacre. (Voyez ce mot) Si on est obligé de couper l’arbre par le pied, on ne doit conserver qu’un seul rejeton & le mieux venant, & porter les autres en pépinière, fumer ensuite largement l’ancien pied avec du fumier de mouton, quand on le peut, ou avec un autre engrais. On peut laisser deux rejetons, & non pas un plus grand nombre, car ils s’affameroient les uns & les autres.

§. III. De la manière de se procurer des Figuiers nains.

Dans les provinces où les figuiers parviennent à une grosseur & hauteur raisonnables, c’est uniquement par curiosité qu’on travaille à faire des nains, & la cueillette d’une quantité de huit à dix figues n’entre pas en compensation des soins qu’on donne à un arbre qui n’en exige aucuns. C’est dans la vue de compléter cet article, que je vais rapporter les deux moyens indiqués dans un Ouvrage imprimé en 1692, & intitulé Culture du Figuier. Je n’ai pas répété ces expériences.

« Plantez en mars un jeune figuier à racines, dans un pot, ou en pleine terre ; & quand il sera bien en sève au mois de mai ou de juin suivant, pliez-le par le milieu comme la moitié d’une ovale, en mettant le bout d’en-haut en terre, à quatre ou cinq doigts de profondeur, & arrêtez cette moitié d’ovale avec quelques crochets de bois, afin qu’elle ne se relève pas. Ce bout, ainsi fiché en terre, prend racine, étant fréquemment arrosé ; & quand en automne on s’apperçoit qu’il en a poussé, on coupe la moitié de l’ovale par le milieu d’en-haut, & on arrache l’autre bout premier planté, & par ce moyen on aura un figuier nain facilement. »

» Au lieu d’en user ainsi, on peut prendre une marcotte ordinaire, & quand elle a pris racine, c’est-à-dire, en automne, au lieu de la planter comme elle devroit l’être, savoir les boutons en montant, on renversera lesdits boutons en bas, & par cette rétroversion, la sève n’ayant plus son cours direct, est obligée de rétrograder, ce qui contraint le figuier à demeurer nain. »

Je ne nie pas cette expérience sur le figuier, mais je puis dire, d’après plusieurs que j’ai tentées sur d’autres arbres ou arbrisseaux, le grenadier, par exemple, qu’en plaçant dans la terre les petites branches, &, par conséquent, renversant l’ordre naturel, elles ont promptement poussé des chevelus ; & ces boutures ont mieux réussi que lorsque j’ai planté le gros bout ; mais malgré cette rétroversion de la sève, le grenadier a acquis sa hauteur ordinaire.

§. IV. De la Greffe.

Je n’entrerai point dans les détails relatifs à l’opération de la greffe, (voyez ce mot) ce seroit une répétition inutile. Il suffit de savoir que le figuier se greffe très-bien en bec de flûte ou sifflet, & en écusson ou œil dormant. À la moindre incision cet arbre laisse couler un suc laiteux & abondant. Si on n’a pas l’intention de le laisser se répandre pendant quelque temps, &, pour ainsi dire, s’étancher, il est à craindre qu’il ne noie l’œil, ne s’accumule sous les morceaux de l’écorce découpée lorsqu’on a greffé en flûte, ne s’y putréfie & ne fasse périr la greffe. Il est donc nécessaire d’enlever ce suc laiteux avec du vieux linge, du coton, de la filasse, &c. ; en un mot, de dessécher la place avant d’y placer la greffe. Cette opération s’exécute dans les mois de juin ou juillet ; la sève décide le moment.


CHAPITRE IV.

De la Caprification.


Le figuier est un arbre singulier, il pousse ses fleurs ou fruits avant ses feuilles. Par-tout où l’année d’auparavant on a vu exister une feuille, on voit de l’endroit même paroître une fleur ou figue, sans que la sève soit montée des racines aux branches, ce dont on peut se convaincre en cherchant à soulever l’écorce qui se détache difficilement du bois. C’est donc par la seule force de la sève restée avant l’hiver dans le tronc & dans les branches, que s’opère la végétation du fruit. Elle est mise en mouvement par la chaleur ambiante de l’atmosphère. Voyez les belles expériences de M. Duhamel, rapportées au mot Amandier, pag. 457, Tom. 1, & cette chaleur n’a pas encore eu le temps & n’a pas été assez forte pour faire monter la sève des racines aux branches ; puisque dans les provinces méridionales, les premières figues paroissent communément en mars, & les feuilles en avril. C’est ainsi que naissent les premières figues, ou figues-fleurs, ou plutôt ou plus tard : suivant les climats, les seconds naissent au pied du pétiole de la feuille poussée au printemps, de manière que la première a été nourrie par la feuille de l’année précédente, & la seconde par celle du printemps, & la feuille qui pousse au second renouvellement de la sève, devient la mère nourrice d’un œil à fruit pour l’année suivante.

Lorsqu’il s’agit de se procurer des récoltes abondantes & sûres, il faut recourir à l’art quand la nature s’y oppose par la variation & l’inconstance des saisons, ou par l’épuisement de la plante. On a eu raison de dire que le besoin fut le père de l’industrie, & les habitans des îles de l’Archipel, dont les figues sont la principale nourriture, nous en donnent un exemple frappant.

La caprification étoit connue des anciens ; Pline en parle dans son Liv. 16, chap. 27. M. Tournefort est, je pense, le premier auteur qui en ait parlé en France, dans son Ouvrage intitulé Relation d’un voyage du Levant, & après lui M. Godheu de Riville, dans un Mémoire publié par l’Académie des Sciences de Paris, dans un Volume des Savans Étrangers. Les écrivains qui sont venus ensuite, n’ont rien ajouté aux détails que ces deux observateurs avoient donnés. Écoutons parler M. Tournefort.

« Pline a remarqué que l’on cultivoit dans Zia, les figuiers avec beaucoup de Soin ; on continue encore aujourd’hui la caprification. Pour bien comprendre cette manufacture de figues, il faut remarquer que l’on cultive, dans la plupart des îles de l’Archipel, deux sortes de figuiers. La première espèce s’appelle omos, ou figuier sauvage, le caprificus des latins, d’où on a tiré le mot caprification ; la Seconde espèce est le figuier domestique. Le sauvage porte trois sortes de fruits appelés sornites, cratitires & orni, absolument nécessaires pour faire mûrir ceux des figuiers domestiques. Ceux qu’on appelle sornites paroissent dans le mois d’août, & durent jusqu’en novembre sans mûrir ; il s’y engendre de petits vers, d’où sortent certains moucherons qu’on ne voit voltiger qu’autour de ces arbres : dans le mois d’octobre & de novembre ces moucherons piquent d’eux-mêmes les seconds fruits des mêmes pieds de figuiers ; ces fruits que l’on nomme cratitires ne se montrent qu’à la fin de septembre, & les sornites tombent peu à peu après la sortie de leurs moucherons. Les cratitires restent sur l’arbre jusqu’au mois de mai, & renferment les œufs que les moucherons des sornites y ont déposés en les piquant : dans le mois de mai la troisième espèce de fruit commence à pousser sur le même pied de figuiers sauvages qui ont produit les deux autres. Ce fruit est beaucoup plus gros, & se nomme orni ; lorsqu’il est parvenu à une certaine grosseur, & que son œil commence à s’entrouvrir, il est piqué dans cette partie par les moucherons des cratitires, qui se trouvent en état de passer d’un fruit à un autre pour y déposer leurs œufs. »

» Il arrive quelquefois que les moucherons des cratitires tardent à sortir dans certains quartiers, tandis que les orni de ces mêmes quartiers sont disposés à les recevoir : on est obligé dans ce cas-là d’aller chercher les cratitires dans un autre quartier, & de les ficher à l’extrémité des branches des figuiers dont les orni sont en bonne disposition, afin que les moucherons les piquent : si l’on manque ce temps, les orni tombent & les moucherons des cratitires s’envolent. Il n’y a que les paysans appliqués à la culture des figuiers qui connoissent les momens, pour ainsi dire, auxquels il faut y pourvoir, & pour cela ils observent avec cela l’œil de la figue. Non-seulement cette partie marque le temps où les piqueurs doivent sortir, mais aussi celui où la figue doit être piquée avec succès : si l’œil est trop dur, trop serré, le moucheron ne sauroit y déposer Ses œufs, & la figue tombe quand cet œil est trop ouvert. »

» Ces trois sortes de fruits ne sont pas bons à manger, ils sont destinés à faire mûrir les fruits des figuiers domestiques. Voici l’usage qu’on en fait. Pendant les mois de juin & & de juillet, les paysans prennent les orni dans le temps que les moucherons sont prêts à Sortir, & les vont porter tout enfilés dans des fétus sur les figuiers domestiques. Si l’on manque ce temps favorable, les orni tombent, & les fruits du figuier domestique ne mûrissent pas tombent aussi dans peu de temps. Les paysans connoissent si bien ces précieux momens, que tous les matins en faisant leur revue, ils ne transportent sur les figuiers domestiques que les orni bien conditionnés, autrement ils perdroient leur récolte. Il est vrai qu’ils ont encore une ressource quoique légère, c’est-à-dire, de répandre sur les figuiers domestiques l’ascolimbros, plante très-commune dans les îles, & dans les fruits de laquelle il se trouve des moucherons propres à piquer ; c’est le cardon de nos jardins. Peut-être que ce sont les moucherons des orni qui vont picorer sur les fleurs de cette plante. Enfin, les paysans ménagent si bien les orni, que leurs moucherons font mûrir les fruits du figuier domestique dans l’espace de quatre jours. »

» À Malthe on caprifie, mais deux espèces seulement, dit M. Godheu de Riville ; voyons ce qui peut avoir donné lieu à cette opération, tandis que les autres espèces n’ont pas besoin de ce secours pour bien mûrir. Il est certain que le figuier de la première espèce, qui a produit une quantité de figues grosses & succulentes, se trouve, pour ainsi dire, épuisé. Cet arbre n’a pas la force de fournir la nourriture suffisante aux secondes figues qui commencent à paroître dans le temps que les premières sont dans leur maturité. Qu’arrive-t-il ? La moitié de ces secondes figues, qui ne reçoivent point le suc nourricier dont elles ont besoin, tombent avant d’être mûres, & c’est par la caprification qu’on remédie à cet inconvénient. L’introduction du moucheron y cause une fermentation capable de précipiter leur maturité, comme il arrive dans les fruits verreux qui mûrissent toujours avant les autres. Pour lors les figues qui tarderoient deux mois à mûrir, sont bonnes à manger trois semaines plutôt, & le temps de leur chute étant prévenu, la récolte en est plus abondante. Cela est prouvé par la manœuvre de quelques particuliers qui, pour ne point fatiguer leurs arbres, ne caprifient point les secondes figues, attendu que la récolte des premières est ordinairement mauvaise pour l’année d’après, l’arbre ayant, pour ainsi dire, été forcé de nourrir une trop grande quantité de fruits pendant la même année. En effet, les trois quarts des secondes figues tombent avant de mûrir, lorsqu’elles n’ont point été caprifiées, & il n’en reste sur l’arbre que le nombre qu’il est capable de nourrir. »

» J’ai dit que la récolte en est fort abondante ; & cela est si vrai, qu’on trouve plusieurs figuiers dont on ne voit point les branches, attendu la quantité de fruits dont elles sont chargées. La caprification prévient leur chute. »

On peut opérer la caprification d’une manière plus simple, remplir les fonctions de l’insecte & hâter de trois semaines la maturité des figues : tout le merveilleux consiste à toucher légèrement avec une petite goutte d’huile, l’œil ou le point central de la figue.


CHAPITRE V.

De la Cueillette du Fruit.


La récolte de la figue dans plusieurs cantons des provinces méridionales, est aussi précieuse que celle des oliviers & même de la vigne, & le figuier y est soumis à une culture réglée. La cueillette est longue, parce que le fruit mûrit successivement, & on doit attendre qu’il commence à se dessécher sur l’arbre. Le jour de la cueillette n’est pas indifférent. On doit, autant qu’on le peut, attendre que le vent du nord ait régné depuis quelques jours, que le ciel soit pur & serein, que la chaleur soit forte & soutenue, & que la rosée soit entièrement dissipée. On les étend sur des planches, sur des claies ; on les comprime un peu, & on les expose au gros soleil contre un bon abri, afin de multiplier la chaleur. Du moment que le soleil se couche, on les porte dans un lieu sec, exposé à un libre courant d’air ; le lendemain on recommence la même opération, & ainsi de suite, jusqu’à ce que la plus grande partie de l’eau de végétation soit dissipée ; de la promptitude de cette exsiccation dépend la bonne qualité de la figue. Comme dans une figuerie on cueille plusieurs espèces, & que toutes n’ont pas la même perfection, on fera très-bien de ne pas les confondre pendant l’exsiccation, soit pour conserver la qualité de la marchandise, soit parce que des espèces se sèchent plus facilement que les autres ; & par conséquent, si on les mêloit, il faudroit beaucoup plus de tablettes ou de claies. Tant que dure cette opération, on tourne & retourne plusieurs fois par jour les figues, afin qu’elles éprouvent dans tous leurs points le même degré de chaleur, & par conséquent l’évaporation de leur humidité surabondante. Souvent le ciel se couvre de nuages, des pluies surviennent, l’humidité règne pendant plusieurs jours, & la figue, loin de sécher, pourrit ; il faut avoir recours à la chaleur modérée d’un four, mais elle ne produit jamais le même effet que le soleil, & la qualité du fruit diminue d’un grand tiers au moins, & quelquefois ces figues ne sont bonnes qu’à donner aux cochons.

Lorsqu’elles sont sèches, quelques particuliers les mettent par rang dans des sacs, par-dessus un rang de farine, & ainsi de suite jusqu’à ce que le sac soit plein ; alors on le secoue, on l’agite en tout sens, afin que le fruit roulant sur l’autre, mêlé avec la farine, cette farine s’empare de l’humidité superflue ; & s’il est besoin, on répète l’opération à plusieurs reprises & à temps différens. D’autres se contentent de les étendre sur des draps, de les laisser pendant plusieurs jours dans les greniers ouverts, au courant d’air, & dont on ferme les fenêtres dès que l’atmosphère est humide. Enfin, lorsqu’elles sont bien desséchées, on les place perpendiculairement sur une table ; & appuyant le pouce sur la queue, on les comprime, afin qu’elles occupent moins d’espace. Dans cet état, on en remplit des sacs, & encore mieux de grands coffres destinés à cet usage. La dernière méthode est à préférer ; car pour peu que l’humidité gagne la farine, elle aigrit & fait aigrir & fermenter la figue.


CHAPITRE VI.

Des propriétés des Figues.


La figue bien mûre, est un fruit délicieux pour les personnes en santé, comme pour les malades, & l’on n’a jamais vu dans les provinces méridionales aucun paysan qui en fût incommodé, quoi qu’elle forme une grande partie de sa nourriture. Il est vrai que si le fruit n’est pas bien mûr, il développe beaucoup d’air, pèse sur les estomacs foibles & délicats & procure le cours de ventre. Le fruit desséché détermine l’expectoration, calme la toux, l’asthme convulsif, remédie à l’extinction de voix & augmente le cours des urines. En gargarisme, il tempère la sécheresse de la bouche, résout l’inflammation essentielle des amigdales, ou la fait dégénérer plus promptement en abcès, lorsqu’il y a tendance vers cet état… : en cataplasme, elle diminue les douleurs hémorroïdales, dispose les tumeurs phlegmoneuses à se changer en abcès… les feuilles récentes froissées & appliquées sur les bords de l’anus, ou introduites dans l’intestin-rectum irritent ses parois, & renouvellent les hémorroïdes qu’on a intérêt de rappeler… on dit que le suc laiteux des feuilles fait disparoître les verrues.

M. Tournefort dans l’Ouvrage déjà cité, dit, qu’à Scio on tire de l’eau-de-vie des figues, & n’entre dans aucun détail à ce sujet. Il y a apparence qu’on les fait fermenter comme nos raisins & qu’on les distille ensuite. La figue contient beaucoup de muqueux sucré ; il n’est pas étonnant qu’il soit changé en vin par la fermentation, & eau-de-vie par la distillation. (Voyez Distillation, Eau-de-vie & Fermentation.


Figue, Pomme, (voyez le mot Pomme.)