Contes secrets Russes/Le soldat et la Petite-Russienne
LVII
LE SOLDAT ET LA PETITE-RUSSIENNE
n Petit-Russien se rendait à la ville avec sa
femme et son fils dans une charrette attelée de
bœufs, tandis qu’un cuirassier était en train de forniquer
avec sa jument attachée à un arbre de la
route. « Qu’est-ce que tu fais, soldat ? — Le cheval
que le gouvernement m’a donné s’est luxé la jambe et je la lui remets. » La femme se dit :
« Pour sûr, il a un gros υιτ ! Té ! il φουτ la jument ! »
Sans dire gare, elle s’assit sur le bord
extérieur de la charrette ; la roue ayant rencontré
un fossé, la Petite-Russienne versa. « Cours vite
chercher le soldat, » cria-t-elle, « je me suis
démis un membre ! » En quelques secondes, le
mari arriva près du cuirassier : « Militaire ! sois un
père pour nous ! Viens-nous en aide, s’il te plaît !
ma femme s’est démis un membre. — Il n’y a
pas à dire ! Puisque tu es dans la peine, il faut
que je vienne à ton secours. » Bref, le mari ramena
le soldat sur le lieu de l’accident.
La Petite-Russienne gisait à terre et gémissait : « Ah ! Seigneur, je me suis luxé la jambe ! — As-tu une bâche pour couvrir la charrette ? » demanda le soldat au Petit-Russien. — « Oui. — Bien ; donne-la ! » Il couvrit la charrette et y déposa la victime de l’accident. « As-tu du pain et du sel ? » continua-t-il. — « Oui. » Le cuirassier prit un morceau de pain et le saupoudra de sel. « Allons, Petit-Russien, va tenir les bœufs, pour qu’ils ne bougent pas de place. » Le Petit-Russien les saisit par les cornes et les tint immobiles ; pendant ce temps, le cuirassier grimpa dans la charrette et commença à βαισερ la femme. Le fils remarqua que le soldat était couché sur sa mère : « Papa, » fit-il, « eh ! papa, le soldat βαισε maman. — En effet, mon fils, on dirait qu’il la βαισε ! Mais non ! Il ne peut pas faire cela après avoir mangé notre pain et notre sel. ». Quand le cuirassier, ayant fini son affaire, descendit de la charrette, la Petite-Russienne lui dit : « Eh bien ! merci, militaire, voici un rouble d’argent pour toi. » À son tour, le mari tira sa bourse de sa poche et donna deux roubles au soldat ! « Merci, militaire, d’avoir guéri ma femme. »